Édition du 23 avril 2024

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Asie/Proche-Orient

Chine : violente répression de manifestations contre un projet nucléaire d’Areva

Aux cris de « pas de ça chez moi ! », des milliers de personnes sont descendues durant 3 jours dans les rues de Lianyungang, ville côtière de l’est de la Chine, pour contrer toute tentative d’implanter des installations d’entreposage et de traitement de déchets radioactifs. Cet équivalent du centre de déchets nucléaire de la Hague en France est piloté par Areva et la China National Nuclear Corp (CNNC). Les policiers antiémeute ont fait preuve de brutalités sans nom, un agent allant jusqu’à pointer son arme en direction d’une manifestante. Le gouvernement a du reculer. Le plus grand projet franco-chinois dans le nucléaire a du plomb dans l’aile.

Durant trois jours des milliers de personnes sont descendues dans les rues de la ville côtière de l’est de la Chine Lianyungang (environ 800 000 d’habitants et au cœur d’un bassin de 5 millions d’habitants) pour protester contre les tentatives d’implanter la toute première installation franco-chinoise de compostage de déchets atomiques.

Cet équivalent de la Hague en France a pour ambition de retraiter près de 800 tonnes de déchets mortels nucléaire issus de centrales nucléaires en cour de construction et des 2 monstres EPR que la France à vendu à la Chine. Un centre d’entreposage d’une capacité de 3 000 tonnes doit aussi y être adjoint. Malgré les désastres monstrueux de Tchernobyl et de Fukushima le bras armé du Commissariat à l’Energie Atomique tricolore, Areva, poursuit sa besogne en Asie (Chine et Japon), seule perspective commerciale envisageable là où les régimes politiques autoritaires peuvent retarder son inévitable agonie. Le projet, estimé entre 10 milliards et 15 milliards d’euros, est jugé crucial par le groupe français, qui se recentre dare-dare sur la gestion du cycle des produits uranifère et déchets de fission atomique.

Lianyungang est situé au nord-est de Shanghaï dans la province du Jiangsu. Cette ville-préfecture de département est un haut lieu touristique notamment avec son mont Yuntai.

Protégeons les prochaines générations » et « Nous aimons notre Lianyungang, pas de déchets nucléaires ! » sont les slogans brandit à bout de bras par les manifestants. Le 7 août les manifestants en centre-ville ont fait face à de violentes brutalités policières. Un agent n’hésitant pas à pointer son arme en direction d’une manifestante. Le 8 août, plusieurs dizaines d’autres habitants ont fait face devant le siège du gouvernement local à des rangées de policiers antiémeute et ont entonné l’hymne chinois. La contestation populaire opte pour le moment pour la position Nimby (pour "not in my backyard", « pas de ça chez moi ! ».

D’autant que déjà, à une trentaine de kilomètres du centre-ville, la centrale atomique de Tianwan de deux réacteurs de technologie russe veut mettre en service deux réacteurs supplémentaires voir 3 autres ce qui en fera l’une des plus grosses centrales nucléaires au monde. Trop c’est trop ! Assez de folie.

Le plus grand projet franco-chinois dans le nucléaire a du plomb dans l’aile

Le partenaire chinois d’Areva, China National Nuclear Corp (CNNC), n’a pas encore annoncé publiquement son choix définitif du site (six provinces sont pressenties) et teste, comme la fait dans l’hexagone l’agence gouvernementale de gestion des déchets radioactifs l’Andra, le niveau de résistance des populations locales à ses projets déments. Areva et CNNC voudraient bien que la construction commence en 2020. Mais ce genre d’annonce à grand renfort publicitaire s’est déjà avéré par le passé un simple leurre.

Toujours est-il qu’a la suite de cette vague de manifestations, le gouvernement local a dû renoncer à sa candidature pour l’implantation sur son territoire des déchets des 34 centrales nucléaires chinoises. La municipalité de Lianyungang déclare forfait : « Nous avons décidé de suspendre temporairement notre participation au concours de sélection pour le retraitement de déchets nucléaires ». Les habitants ont donc réussi à faire reculer les autorités, au moins temporairement.
Déjà en 2012, après la levée du moratoire sur l’approbation de nouvelles centrales nucléaires en Chine consécutif à la quadruple catastrophe nucléaire de Fukushima au Japon, de premières protestations contre le projet de la centrale nucléaire de Pengze dans le Jiangxi avaient eu lieu, très vite étouffées par les pouvoirs en place et aux ordres du lobby nucléaire.

Collusions à tous les étages

Aujourd’hui, 3 % de la production d’électricité est d’origine nucléaire mais la Chine veut en doubler le volume d’ici 10 ans et les rapaces atomiques français lorgnent sur la bête. Depuis des années, les vrp-politiciens tricolores d’Areva ont multipliés les courbettes et avantages financiers (à régler par les contribuables).

Initiée il y a 30 ans, la "coopération" franco-chinoise nucléaire a débuté avec la signature en 1982 d’un accord de coopération entre le Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) et le Ministère chinois de l’industrie nucléaire. Plusieurs protocoles d’accords notamment depuis les visites présidentielles de N.Sarkozy et F. Hollande en Chine puis de leurs "collaborateurs" F.Fillon, Jean-Marc Ayrault et M.Valls ont été signés depuis. Tous les gouvernements de droite et socialiste à participation EELV y ont favorisé la prolifération nucléaire.

Quitte à opérer des transferts dangereux de technologies, à former de futurs concurrents (500 ingénieurs et chercheurs chinois ont été formés en France dans les centres de recherche du CEA) et à créer plusieurs "joint-venture" entre laboratoires du CEA et instituts de recherche et d’ingénierie chinois.

Le C.E.A, Areva et EDF poussent à la construction de réacteurs atomiques EPR sur le site de la centrale nucléaire de Taishan dans le Guangdong mais les chinois demandent à présent des preuves de fiabilité suite aux révélations en France de défauts constatés sur les cuves de l’EPR en cours de construction à Flamanville et les retards immenses sur celui de Finlande. Et ce qui se trame entre les industriels français EDF et Areva d’une part, et chinois, CGN et CNNC d’autre part, pour la construction de deux EPR à Hinkley Point en Grande-Bretagne n’est pas plus fiable ni rassurant. Le puits sans fond du financement de ce projet après le retrait du britannique Centrica par crainte des surcoûts a conduit les atomistes français à solliciter l’aide de la Chine.

Et tout comme en France, la collusion des médias et des pouvoirs publics, des politiciens et entreprises privées ou publiques nucléaristes est de moins en moins acceptée par les populations qui constatent aussi l’impuissance ou la complicité des agences dites de contrôle.
Quand la Chine et le peuple chinois, se réveillent...
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sources :
. http://reseauinternational.net/guerre-nucleaire-chineetats-unis-deviendra-t-inevitable/ . Le Monde (09.08.2016 - Brice Pedroletti - correspondat à Pékin)

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