Édition du 16 avril 2024

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Amérique centrale et du sud et Caraïbes

Contre les armes nucléaires,146 pays réunis à Nayarit, Mexique

Après la toute première conférence intergouvernementale sur les conséquences catastrophiques sur le plan humanitaire de l’emploi d’armes nucléaires (Oslo, mars 2013), des représentants de 146 pays présents à Nayarit au Mexique (13/14 février 2014) se sont fermement engagés en faveur de « l’élimination totale des arsenaux nucléaires », suivant une résolution en ce sens de mai 2010 du Document final de la Conférence d’examen du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP).

Auteur : Pierre Jasmin | Le 22 février 2014

Le succès sans précédent de la conférence de Nayarit, pourtant boycottée par les cinq pays membres du Conseil de Sécurité de l’ONU et par nos médias (en avez-vous entendu parler ?), fut tel que l’Autriche s’est engagée à recevoir le prochain rendez-vous dès cette année (Pierre en sera !). Les voix présentes à Nayarit de la société civile incluaient les Parlementaires pour la non-prolifération nucléaire et le désarmement, des membres de la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN, dont le rapport londonien dénonce l’implication de Power Corporation dans le financement de la fabrication d’armes nucléaires, ceci expliquant en partie le mutisme de La Presse sur ce sujet), la Campagne internationale pour interdire les mines (ICBL-CMC, combattant mines anti-personnel et bombes à sous-munitions) et Pugwash : Pugwash-Canada a délégué trois membres de son exécutif.

En cas d’utilisation d’une seule arme nucléaire ou simplement d’accident engendrant une explosion nucléaire militaire, le potentiel destructeur de cette arme affecterait inévitablement l’ensemble de la planète. Les conséquences sanitaires, environnementales et économiques seraient si grandes qu’il n’est pas certain que la société humaine parvienne à y faire face, selon un rapport alarmant de la Croix-Rouge. Un autre rapport évalue les impacts d’un tel accident à un milliard de victimes par la faim, compte tenu des conséquences d’un nuage atomique sur la production agricole et les stocks de nourriture mondiaux. La Cour Internationale de Justice, basée à La Haye, dénonce comme criminelles non seulement la possession d’armes nucléaires mais aussi la menace de l’utiliser proférée implicitement ou explicitement par les neuf pays détenteurs de l’arme (Chine, Corée du Nord, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Inde, Israël, Pakistan et Russie) et par un organisme tel l’OTAN.

« L’épée de Damoclès est toujours présente au dessus de la population mondiale, au nom de la doctrine de 9 États qui repose sur la puissance nucléaire », a déclaré Patrice Bouveret, directeur français de l’Observatoire des armements (et auteur de Qui arme Israël et le Hamas).

« Depuis 2010, une prise de conscience a clairement émergé au sein des Etats qui ne disposent pas de cet armement. Les conséquences humanitaires de l’emploi de l’arme nucléaire ont ainsi été réaffirmées à de très nombreuses reprises à l’ONU, malgré la volonté affichée de la France, et des autres puissances nucléaires officielles, de ne pas engager le débat sur cette réflexion » a poursuivi Jean-Marie Collin, directeur-France des Parlementaires pour la non-prolifération nucléaire et le désarmement (PNND).

Il y a deux autres menaces : la négligence criminelle et le terrorisme, qu’on associe en priorité à l’inquiétant laisser-aller des Russes ou des Pakistanais. Pourtant, les nouvelles récentes des États-Unis (Associated Press, Washington, fin janvier) mentionnent la négligence d’onze officiers drogués et de dizaines de tricheries pour des examens d’acceptation à la base de force aérienne de Malmstrom au Montana (qui contient 150 missiles Minuteman 3, c’est à dire 1/3 des ICBM américains !). Le générallissime Mark Welsh a avoué que le retranchement simultané de 34 officiers affectés au lancement de missiles nucléaires est sans précédent. On rapporte que les officiers restants sont par conséquent obligés à faire des quarts de travail qui s’étendent parfois sur 24 heures consécutives, risquant le burn-out. En octobre, le général en chef de la force ICBM, Michael Carey, avait été renvoyé pour avoir, lors d’une délégation américaine en Russie, eu un comportement erratique incluant une saoûlerie en compagnie de belles Russes aux véritables professions …inconnues. Et deux jours auparavant, on avait renvoyé pour des motifs de « gambling » extrême le vice-amiral Tim Giardina, 2e responsable du U.S. Strategic Command en charge d’établir les plans d’une éventuelle guerre nucléaire !

Quant au terrorisme, il y a motif à inquiétude quand le directeur de l’Agence internationale d’énergie atomique, M. Yukiya Amano, déplore plus de cent incidents faisant objets de rapports chaque année impliquant des vols ou activités illégales concernant du matériel nucléaire ou/et radioactif. À la suite du récent rapport de l’ONU sur la Corée du Nord, on pense d’abord à Kim Jung-un, l’erratique despote terroriste, qui a un petit nombre indéterminé de bombes nucléaires à sa disposition (et heureusement des missiles peu efficaces). Mais pourtant, les derniers événements suspects nous forcent à examiner …les États-Unis. Le 28 juillet 2012, trois activistes pour la paix d’âge moyen de 69 ans ont pu tranquillement accéder au cœur du site Oak Ridge Y-12 National Security Complex (USA), supposément « parmi les mieux sécurisés du pays », grâce à de simples pinces anti-cadenas disponibles sur le marché. La réaction typique (pensons aux whistleblowers Edward Snowden et Bradley-Chelsea Manning) déplorable des Américains fut d’emprisonner ces « dangereux terroristes » chrétiens armés de leurs seules convictions pacifistes qui n’avaient pour but que de révéler la dangerosité du site nucléarisé : leur procès, qui vient d’avoir lieu a condamné la bonne sœur de 83 ans, Sister Megan Rice, à une peine de trois ans d’emprisonnement, plus clémente que celle de ses deux comparses. Odieuse justice américaine.

Revenons à l’AIEA que plusieurs pays empêchent de jouer son rôle de régulation internationale, nous avons avec cette moyenne de cent incidents annuels des chiffres alarmants qui peuvent en outre être dangereusement sous-estimés, d’autant plus qu’Al-Qeida a déjà informé le monde qu’un de ses objectifs était de se procurer du matériel fissile en vue de fabriquer une bombe nucléaire.

À la lecture de l’index Nuclear Threat Initiative, si on peut se consoler avec le progrès effectué par le Kazahkstan et par sept pays ayant nettoyé récemment leur territoire de tout matériel nucléaire - l’Autriche, la Hongrie, le Mexique, la République tchèque, la Suède, l’Ukraine et le Vietnam -, on peut aussi se faire la même réflexion que Sam Nunn, responsable américain du NTI : « Le jour qui suivra une catastrophe nucléaire, le monde se demandera ‘qu’aurions-nous dû faire pour l’empêcher’, alors pourquoi pas se le demander maintenant ? »

Les Artistes pour la Paix espèrent vous voir travailler avec nous pour percer le silence médiatique établi par 1% contre la volonté des 99% désireux de voir les cent milliards de $ annuels affectés à la modernisation des bombes nucléaires servir à nourrir les êtres humains et à lutter contre le réchauffement climatique, par exemples.


Contacts réguliers des Artistes pour la Paix avec :

Jean-Marie COLLIN, PNND Coordinateur pour la France : jeanmarie@pnnd.org

Adele BUCKLEY, membre des exécutifs de Pugwash et Pugwash-Canada : adele-buckley@rogers.com

Alyn WARE : Global Coordinator, alyn.ware@unibas.ch

Parliamentarians for Nuclear Non-proliferation and Disarmament
United Nations Office : 866 UN Plaza, Suite 4050, New York, NY 10017, USA
Head office : PO Box 24-429, Manners St, Wellington, Aotearoa-New Zealand

Deux alarmes antérieures sur la situation nucléaire par les Artistes pour la Paix :

Le site écologiste Reporterre.org du journaliste connu Hervé Kempf a publié cet article.

Le magazine pan-canadien Affaires universitaires a publié cet appel.

Rapport du Nuclear Threat Initiative :
http://ntiindex.org/wp-content/uploads/2014/01/2014-NTI-Index-Report.pdf


Légende de la photo Le 3 mai 2010, débute la réunion d’examen du Traité de non-prolifération nucléaire à New-York (ONU). Le même jour, le pianiste Pierre Jasmin (Artistes pour la Paix et Pugwash Canada) invite à son récital à l’UQAM, sous la présidence d’honneur de Pierre J. Jeanniot (directeur émérite de l’IATA, ex-président d’Air Canada et chancelier de l’UQAM de 1995 à 2008) le regretté Frédéric Back qui remet par les mains de Jenna Dawn McLellan (APLP) son œuvre représentant l’Homme qui plantait des arbres à Murray Thomson, OC. Frédéric rendait ainsi hommage à ce pilote de la Seconde guerre Mondiale, membre de Pugwash, qui a initié une pétition de 700 membres de l’Ordre du Canada demandant au premier ministre canadien de signer une Convention internationale contre l’arme nucléaire. Pourtant la plus importante, et par son sujet et par le nombre de ses signataires sans précédent en l’Ordre du Canada, cette pétition relayée par deux motions unanimes du Sénat et de la Chambre des Communes n’a pas été jugée digne de réponse de la part du premier ministre et le Canada vient de jouer un rôle plutôt négatif à Nayarit au Mexique, la semaine dernière.

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