Édition du 23 avril 2024

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Economie mondiale

Dette illégale, odieuse, illégitime, insoutenable : comment s’y retrouver ?

Comme le souligne l’Expert des Nations-unies sur la dette |1| Juan Pablo Bohoslavsky, la signature d’un contrat n’entraîne pas automatiquement le paiement de la dette : « L’idée qu’un État et sa population doivent rembourser la dette en toute circonstance, quelles que soient les fins auxquelles les fonds ont été empruntés, la manière dont ils ont été dépensés, ou les efforts consentis pour les rembourser, repose de toute évidence sur une conception trop simpliste de la souveraineté et du contrat » |2|.

Tiré du site du CADTM.

Il existe donc des limites au paiement des dettes publiques. C’est le cas lorsqu’elles sont illégales, odieuses, illégitimes ou insoutenables |3|. Si vous vous sentez perdus au milieu de tous ces termes, pas de panique ! Cet article est là pour clarifier ces différentes notions, leurs points communs et leurs différences à travers des exemples concrets.

Les dettes illégales

Sont illégales toutes les dettes contractées en violation du droit international et des règles nationales en vigueur (Constitutions, lois, règlements) à la fois de l’État débiteur et celui du siège du créancier ainsi que toutes les dettes réclamées par les prêteurs n’ayant pas respecté leurs obligations contractuelles.

Pour apprécier leur légalité, il faut examiner la validité de l’engagement au moment où il est pris mais aussi analyser les événements précédant sa conclusion, notamment la façon dont se sont conduites les négociations et enfin vérifier si le les obligations du créanciers stipulées dans l’accord ont bien été respectées.

Des illégalités multiples

Une dette est illégale lorsque, par exemple :

• Les procédures en vigueur ne sont pas respectées : les personnes qui ont négocié le prêt, qui l’ont signé ou émis le titre de la dette sur les marchés financiers n’avaient pas la compétence légale de le faire ; l’accord de prêt n’a pas été discuté ou ratifié par le Parlement, l’étude d’impact dudit prêt ou du projet à financer n’a pas été réalisée conformément aux règles en vigueur, etc.

• Les termes mêmes du contrat violent le droit national (du pays débiteur ou créancier) ou international. Il faut notamment prêter attention aux taux d’intérêt (est-ce que le taux est usurier ? Est-ce que le contrat prévoit la capitalisation des intérêts sur les intérêts de retard ? |4| Le taux d’intérêt global est-il mentionné dans le contrat ? |5|, etc.) ; à l’objet du contrat (comme les prêts destinés à financer l’occupation illégale d’un territoire) ; à la durée de remboursement (excède-t-elle la durée autorisée légalement ? |6|) ou encore au poids du service annuel de la dette (certaines législations prévoient que le remboursement de la dette ne peut pas dépasser un certain pourcentage des revenus de l’État ou de la collectivité locale |7|).

• Lorsque le prêt est adossé à des conditions à respecter par le débiteur (comme celles listées dans les programmes d’ajustement structurel et autres memoranda) dont le contenu viole de manière partielle ou totale le droit national ou international comme les Conventions protégeant les droit humains fondamentaux |8| ou encore les Traités européens |9|, comme c’est le cas avec les memoranda grecs |10|.

• Lorsque le créancier a commis une faute grave au cours des négociations (corruption, menace, dol, mauvaise foi, contrainte |11|). À titre d’exemple, les trois mémorandums que la Grèce a signé entre 2010 et 2015 avec les créanciers sont entachés par la mauvaise foi et la contrainte exercée par les créanciers.

• Une dette coloniale (celle qui est contractée par une puissance occupante pour réaliser des « investissements » dans le pays occupé) est transférée au nouvel État juridiquement indépendant |12|.

• Le prêt a été consenti à un État sous embargo international |13| (comme ce fut le cas à l’égard de l’Afrique du Sud pendant le régime de l’apartheid)

Toute ces dettes illégales doivent non seulement être annulées sans condition mais devraient aussi déboucher sur des actions en responsabilité civile ou pénale, comme cela est explicitement prévu dans la Constitution équatorienne |14|. Sans se faire trop d’illusion sur la justice des États, il faut rappeler que, suite à l’extraordinaire mobilisation des Islandais, plusieurs responsables de la crise (des PDG, des directeurs financiers, des avocats, des gros actionnaires de banques ainsi que des hauts fonctionnaires d’État) ont été poursuivis et condamnés par les tribunaux islandais.

Les dettes odieuses

Cette notion renvoie à la doctrine de la dette odieuse théorisée par le juriste russe Alexandre Nahum Sack en 1927. Selon le passage le plus célèbre de cette doctrine de droit international, « Si un pouvoir despotique contracte une dette pour fortifier son régime et réprimer sa population […], il s’agit d’une dette odieuse attribuée au pouvoir qui l’a contractée. Elle tombe par conséquent avec la chute de ce régime ». Le terme de dette odieuse est explicitement repris par plusieurs décideurs politiques. Par exemple, les résolutions des parlements belge en 2011 et européen en 2012 qualifient d’odieuses les dettes tunisiennes contractées sous l’ère Ben Ali ainsi que les dettes contractées par d’autres régimes autoritaires renversés par les « Printemps arabes » à partir de 2011.

L’erreur d’interprétation sur le sens de la doctrine

De nombreux commentateurs du passage cité en ont déduit que, pour qu’une dette puisse être qualifiée d’odieuse, elle devait impérativement avoir été contractée par un régime despotique. Or, ce n’est pas la position de Sack |15|. Selon sa doctrine, élaborée sur la base des jurisprudences nationales et internationales et sur les pratiques antérieures des États, la réunion des deux éléments suivants suffit à caractériser une dette d’« odieuse » : d’une part, l’absence de bénéfice pour la population de l’État qui la contracte et, d’autre part le fait que les créanciers en étaient conscients. Selon cette doctrine, la nature despotique ou démocratique d’un régime n’entre pas en ligne de compte. Une dette contractée par un régime dictatorial devrait donc pour Sack être remboursée si elle a réellement servi les intérêts de la population.

Ce dernier point n’est pas partagé par le CADTM qui, avec d’autres mouvements sociaux, juristes et décideurs politiques, travaillent depuis des années à l’actualisation de cette doctrine. Pour le CADTM, une dette contractée par un régime autoritaire, fût-il élu, qui ne respecte pas les normes impératives du droit international tels que les droits humains fondamentaux, la souveraineté des autres États ou l’absence du recours à la force, doit être considérée comme d’office odieuse. Dans ce cas de figure, la destination des prêts (au bénéfice ou non de la population) n’est pas fondamentale pour la caractérisation de la dette. En effet, soutenir financièrement un régime criminel, même pour des hôpitaux ou des écoles, revient à le consolider, à lui permettre de se maintenir. D’une part, certains investissements utiles (routes, hôpitaux…) peuvent ensuite être utilisés à des fins odieuses, par exemple pour soutenir l’effort de guerre. D’autre part, un gouvernement qui emprunte pour des fins utiles à la population ou à l’État peut libérer des fonds pour d’autres buts moins avouables.

Comment identifier une dette odieuse ?

Pour apprécier le caractère odieux d’une dette, il faut à la fois analyser :

• la période de la négociation pour examiner la conduite du créancier et la nature du régime emprunteur ;

• le contenu de l’accord de prêt pour examiner les clauses, les conditionnalités et le but du prêt |16| ;

• les conséquences de l’exécution du contrat et de ses conditionnalités sur la population et la souveraineté de l’État débiteur.

L’objectif est de démontrer que les créanciers savaient ou auraient du savoir que le prêt ne servirait pas les intérêts de l’Etat débiteur et de sa population. C’est le cas de la dette grecque contractée en 2010 à l’égard de la Troïka. En effet, le rapport du Bureau indépendant d’évaluation du FMI publié en juillet 2015 de même que des documents confidentiels du FMI publiés par le CADTM |17|, prouve que la direction du FMI savait dès 2010 que la dette était insoutenable et que le programme d’austérité imposé en contrepartie du prêt allait aggraver la situation du pays. La responsabilité des créanciers est ici évidente.

Rappelons que la condition liée à l’absence de bénéfice ne vaut pas pour les régimes dictatoriaux (qui répriment notamment toute opposition politique) et criminels, puisque leur accorder des prêts revient à les consolider. Le seul fait que les créanciers étaient au courant de la nature de la politique menée par ce débiteur suffit à qualifier la dette d’odieuse. On peut ranger dans cette catégorie les régimes autoritaires de la « Françafrique » et les gouvernements qui se sont succédés en Israël en violant les droits du peuple palestinien.

Pour les autres cas de figure, il est possible que la dette soit légale mais odieuse, s’il est démontré que la mise en œuvre de ces conditions a détérioré les conditions de la vie de la population, annihilé la souveraineté de l’État débiteur et que cet effet délétère était prévisible (les créanciers en étaient conscients). C’est le cas de des programmes d’ajustement structurels (PAS) conclus par les États avec la Banque mondiale et le FMI, tant le caractère préjudiciable de ces politiques sur les populations a été clairement démontré, notamment par l’ONU |18|. Malgré l’échec de ces programmes, le FMI et la Banque mondiale s’obstinent. Le Programme d’action mondiale de la directrice du FMI de 2016, Christine Lagarde, est sans équivoque : « il importe d’accélérer la mise en œuvre des réformes structurelles ».

Les dettes illégitimes

La question de la légitimité de la dette se pose depuis longtemps en ce qui concerne la dette du Sud. Cette question s’est d’abord posée uniquement en termes politiques : c’est, en effet, l’illégitimité du « système dette » dans son ensemble, et plus généralement de l’ordre économique mondial en vigueur, qui est dénoncée à juste titre par celles et ceux qui sont engagés dans la lutte contre la domination par la dette. Un argumentaire juridico-politique a, par la suite, été développé pour renforcer ce combat.

Une notion utilisée par les pouvoir exécutifs, législatif et judiciaire

Certes, il n’existe pas de définition de la « dette illégitime » en droit international à la différence de la dette odieuse ; la dette illégitime étant davantage un concept politique. Toutefois, cette notion recouvre aussi des principes juridiques (interdiction de l’abus, équité, dignité humaine, droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, etc.) et elle est utilisée par les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.

Le gouvernement norvégien a décidé en 2006, sous la pression citoyenne, d’annuler unilatéralement et sans condition ses créances sur cinq pays au motif qu’elles étaient « illégitimes ». Autre exemple, le gouvernement d’Équateur a utilisé cette notion lors de l’audit de sa dette en 2007-2008 et l’assemblée constituante l’a même inscrit dans la Constitution à l’article 290.5 : « Les dettes déclarées illégitimes par un organisme compétent seront remises en cause » |19|.

Au niveau parlementaire, citons deux exemples récents. Le premier concerne la loi votée par le Parlement fédéral belge le 12 juillet 2015 qui parle d’ « avantage illégitime » pour caractériser le comportement abusif de certains créanciers spéculateurs dont les fonds vautours. Le second exemple a la spécificité de réunir à la fois des membres des exécutifs locaux et des parlementaires. Il s’agit du Manifeste d’Oviedo |20| signé par plus de 700 élus en Espagne (maires, conseillers municipaux et députés de différents partis politiques de toutes les régions de l’État espagnol, îles Canaries et Baléares inclus). Ce texte a donné naissance en novembre 2016 au Réseau des municipalités contre la dette illégitime et les coupes budgétaires en Espagne.

On croise également la notion d’illégitimité dans plusieurs décisions de justice. Citons, par exemple, celle rendue dans l’affaire opposant le Costa Rica à la Royal Bank of Canada où le juge donna raison au Costa Rica qui refusait de payer certaines dettes dues à ce créancier : « le cas de la Banque royale ne dépend pas simplement de la forme de la transaction, mais de la bonne foi de la banque lors du prêt pour l’usage réel du gouvernement costaricain sous le régime de Tinoco. La Banque doit prouver que l’argent fut prêté au gouvernement pour des usages légitimes. Elle ne l’a pas fait » |21|.

Ajoutons enfin que ce terme se retrouve dans des résolutions adoptées par les Nations-Unies. Les Principes directeurs de l’ONU relatifs à la dette et aux droits de l’homme adoptés par une résolution du Conseil des droits de l’Homme en 2012, indiquent clairement que l’obligation de payer une dette se limite à celle « contractée dans le cadre d’un accord [...] valide et légitime » |22|.

La dette légitime est celle qui sert l’intérêt général

Le dénominateur commun à toutes ces différentes évocations de la dette illégitime est le fait que les pouvoirs publics doivent agir dans l’intérêt de leur population lorsqu’ils contractent une dette. Cette obligation est rappelée par ces Principes directeurs de l’ONU : « Les prêteurs qui négocient avec des agents de l’État emprunteur devraient reconnaître que ces derniers ont une obligation fiduciaire d’agir dans l’intérêt supérieur de leur mandant, à savoir l’État emprunteur, qui quant à lui représente sa population dans le système international » (paragraphe 44). Autrement dit, le recours à l’endettement doit servir l’intérêt général dans le pays débiteur. Par conséquent, une dette est illégitime lorsqu’elle est contractée au préjudice de l’intérêt général |23|.

L’intérêt général, entendu comme l’intérêt de la collectivité, s’oppose aux intérêts privés et renvoie aux spécificités des dettes publiques dans l’ordre juridique. La majorité des juristes s’accorde pour dire qu’une dette publique est destinée à financer une dépense visant un intérêt public. Cette position doctrinale réaffirmée récemment par les Experts des Nations-Unies sur la dette n’est pas nouvelle. Au début du vingtième siècle, les juristes A. de La Pradelle et N. Politis écrivaient déjà, sur base de la pratique des États, que « L’emprunt public occupe (...) dans la masse des contrats d’État (...) une place à part ; c’est une opération de crédit, faite en vertu d’actes souverains, pour assurer la vie du pays et faciliter le fonctionnement de ses services publics ». Sack, l’auteur de la doctrine de la dette odieuse, ne dit pas autre chose lorsqu’il écrit en 1927 que « les dettes d’État doivent être contractées et les fonds qui en proviennent utilisés pour les besoins et dans les intérêts de l’État » |24|.

Comme nous l’avons vu précédemment, l’absence de bénéfice pour la population (l’intérêt général) constitue l’une des deux conditions pour la qualification des dettes odieuses. C’est aussi le cas pour la caractérisation de dette « illégitime », sauf que pour cette dernière, la complicité du créancier n’est pas une condition requise. Démontrer que la dette n’est pas contractée dans l’intérêt général (absence de bénéfice) suffit à la qualifier d’illégitime. Par conséquent, une dette odieuse est toujours illégitime mais une dette illégitime n’est pas toujours odieuse (dans les cas où la complicité du créancier au moment de l’octroi du prêt n’a pu être démontrée).

Légalité et légitimité : deux notions à ne pas confondre...

L’obligation des pouvoirs publics de recourir à l’endettement pour servir l’intérêt public se retrouve aussi au niveau local. En France, par exemple, la circulaire du 15 septembre 1992 relative aux contrats de couverture de taux d’intérêt offerts aux collectivités et aux établissements publics locaux, stipule que « les collectivités locales ne peuvent légalement agir que pour des motifs d’intérêt général présentant un caractère local ».

Dans cet exemple, la légalité et la légitimité se superposent. Mais ce n’est pas toujours le cas, loin de là. Plus généralement, il est dangereux de confondre légalité et légitimité. Pour s’en convaincre, il suffit de rappeler que le droit de vote des femmes et des ouvriers n’a pas toujours existé, que l’esclavage était légal, que l’avortement est encore interdit dans plusieurs pays, que la solidarité (à l’égard des migrants notamment) est souvent criminalisée, que certains accords fiscaux conclus entre les États et les transnationales (qui font perdre des milliards d’euros à la collectivité) sont licites, que les lanceurs d’alertes sont poursuivis devant les tribunaux pour violation du secret professionnel, qu’il a suffi d’un vote en catimini des députés belges pour légaliser a posteriori l’octroi anticonstitutionnel de garanties à la banque Dexia SA |25|, etc.

Ensuite, le fait que la plupart des gouvernements accède au pouvoir par la voie légale (celle des élections) n’est pas de nature à légitimer automatiquement les dettes qu’ils contractent au nom de l’État. Il serait antidémocratique et dangereux de laisser les élus agir en notre nom, sous prétexte qu’ils seraient les représentants du peuple et, qu’en tant que tels, ils prendraient automatiquement des décisions visant l’intérêt général. Le contrôle citoyen devrait s’exercer de manière permanente, le contrôle sur l’endettement ne faisant bien évidemment pas exception.

Il est utile d’analyser les dettes des gouvernements élus au cas par cas et notamment confronter les mesures politiques que les dirigeants politiques prennent avec leurs promesses électorales. Une dette légale peut donc être illégitime.

....mais qui peuvent se rejoindre : quand l’illégitime devient aussi illégal

Une dette illégitime peut aussi devenir illégale. Le droit est, en effet, une matière vivante qui est créé, modifié par le politique. Il n’est que le produit d’un rapport de force à un moment donné. Des actes illégitimes peuvent donc être aussi strictement encadrés voire interdits par le droit national ou international.

C’est le cas des lois sur les fonds vautours adoptées par le Belgique, la France et le Royaume-Uni. Ces pays ont décidé, par la voie légale, d’entraver l’action illégitime de ces fonds devant leurs juridictions nationales. Autre exemple, le droit équatorien interdit, par l’intermédiaire de sa nouvelle Constitution, la transformation illégitime des dettes privées en dettes publiques.

Il existe aussi des cas où des mesures légitimes peuvent devenir légales grâce à des actes de désobéissance. Par exemple, la loi instaurant un salaire minimum légal aux États-Unis sous présidence de Roosevelt avait été jugée une première fois anticonstitutionnelle par la Cour suprême. Roosevelt avait alors décidé de désobéir. Ce qui a conduit la Cour suprême a changé d’avis |26|. Pour qualifier un acte de désobéissance de légitime, il est fondamental de regarder la finalité de cet acte. Ainsi le refus du président Trump de se plier à une décision de justice invalidant son décret anti-migration n’est pas un acte légitime car il viole de manière manifeste les droits humains dont celui à la libre circulation.

Aujourd’hui, les dirigeants politiques sont très peu nombreux à oser désobéir aux règles injustes qui servent seulement les intérêts d’une minorité de très riches et qui placent nos États sous la coupe des marchés financiers. Pourtant, les gouvernements pourraient très bien s’appuyer sur d’autres obligations juridiques (celles qu’ils ont à l’égard de leurs populations) pour désobéir, via des actes unilatéraux, aux créanciers et refuser d’appliquer les accords internationaux qui institutionnalisent l’austérité budgétaire et bafouent la souveraineté des peuples.

À l’opposé de ces dirigeants dociles, de nombreux mouvements citoyens s’organisent et mènent entre autres des actions de désobéissance civile, dont le moteur est précisément l’illégitimité d’une décision en apparence légale (une loi, un règlement, un décret, un Traité) qu’ils veulent combattre. Par ces actions, les « désobéissants » décident consciemment d’enfreindre des règles pour forcer les décideurs politiques à respecter l’intérêt général et pour faire respecter les grands principes juridiques tels que la dignité humaine, les droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le droit de vivre dans un environnement sain, le droit à circuler librement, etc. En agissant de la sorte, ces citoyens se mettent consciemment en situation d’illégalité par rapport à une certaine branche du droit et risquent donc d’être attaqués par l’État ou les banques comme ce fut le cas avec le procès à Dax (en France) des « faucheurs de chaises » poursuivis par la BNP Paribas pour le délit de « vol en réunion ». Ces actions symboliques de réquisitions de chaises, menées à visage découvert par des milliers de citoyens depuis 2015 en France et en Belgique (principalement) dans les agences de banques disposant de filiales dans les paradis fiscaux , visaient à dénoncer l’évasion fiscale dont sont complices ces banques qui fait perdre aux Etats des milliards d’euros nécessaires pour financer la transition écologique et creuse en même temps la dette publique.

Comment identifier les dettes illégitimes ?

On l’a vu ; les dettes illégitimes sont celles qui ne servent pas l’intérêt général et qui ne profitent qu’à une minorité de très riches. Si les élus ont le pouvoir de prendre des décisions et d’écrire le droit, nous avons aussi le droit de nous opposer, de défaire les décisions illégitimes et de faire évoluer les règles de droit pour qu’elles coïncident avec l’intérêt général, grâce à la mobilisation. Comme le rappelle le Conseil d’État français, le concept d’intérêt général est évolutif et il « est, par nature, rarement consensuel et sa définition résulte d’inévitables confrontations d’intérêts entre lesquels il faut, en fin de compte choisir ». Laissons le milliardaire étasunien, Warren Buffet, le formuler autrement : « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui la mène, et nous sommes en train de la gagner » |27|. Le combat pour l’abolition des dettes illégitimes passe donc nécessairement par un affrontement avec la minorité très riche, symbolisée par le fameux « 1% », qui détient aussi le réel pouvoir économique et politique.

Les premières questions que nous devons dès lors nous poser sont : est-ce que le gouvernement défend les intérêts de la population ? Qui détient la dette publique ? Qui profite de cette dette ? Pourquoi l’État s’endette ? Etc. L’expérience nous apprend que répondre à ces questions fondamentales et générales ne suffit pas pour convaincre la population (les « 99% ») à construire un vaste mouvement social de remise en cause de ces dettes. Afin de créer un rapport de force politique face aux créanciers et aux gouvernements complices, nous pensons que nous avons tout intérêt à multiplier avec précision les motifs d’illégitimité des dettes, dont certains peuvent aussi être des motifs d’illégalité.

À cet égard, la définition de la dette illégitime donnée par la Commission internationale pour la Vérité sur la dette grecque nous semble la plus complète « Dette que le débiteur ne peut être contraint de rembourser du fait que le prêt, les titres financiers, la garantie ou les termes et conditions attachées au prêt sont contraires au droit (aussi bien national qu’international) ou à l’intérêt général ; ou parce que ces termes et conditions sont manifestement injustes, excessifs, abusifs ou inacceptables d’une quelconque manière ; ou encore parce que les conditions attachées au prêt, à sa garantie contiennent des mesures politiques qui violent les lois nationales ou les standards en matière de droits humains ; ou in fine car le prêt ou sa garantie ne sont pas utilisées au profit de population ou que la dette est le produit d’une transformation de dette privée (ou commerciale) en une dette publique sous la pression des créanciers ».

Sur base de cette définition, nous proposons cinq moyens d’analyse (qui ne sont pas exhaustifs) afin d’identifier les dettes contractées contre l’intérêt général. Comme pour la dette odieuse, il faut s’intéresser à la fois à la période de négociation, au contrat et aux conditions qui lui sont éventuellement adossées ainsi qu’à l’exécution du contrat.

• La conduite des créanciers : quel montant réclament-ils, en capital, en intérêts, selon quel calcul ? Comment le créancier a-t-il acquis ce titre de la dette ? Existe-il une disproportion manifeste entre le montant réclamé et la valeur de rachat de ce titre de la dette ? Quelle est la différence entre le taux d’intérêt payé par la banque et le taux auquel l’État doit rembourser cette même banque ? Qui est ce créancier ? Est-ce un fonds vautour ? Une banque qui a déjà été sauvée avec de l’argent public ? Qui est implantée dans les paradis fiscaux ?, etc.

• Les circonstances entourant la conclusion du contrat : Le Parlement a-t-il été consulté ? La population s’est-elle opposée au prêt et ses conditionnalités ? Le gouvernement débiteur était-il sous la contrainte économique ? Avait-il accès aux marchés financiers ? Est-ce qu’il y a des indices de corruption ? Le gouvernement était-il démissionnaire au moment des négociations ? Quelles étaient les promesses électorales tenues par les dirigeants ?, etc.

• Les termes du prêt et des conditionnalités attachées : les termes du contrat sont-ils abusifs ? Les taux d’intérêt sont-ils usuriers ? Est-ce que le contrat stipule que le débiteur s’engage à acheter, avec l’argent du prêt, des marchandises ou des services produits par les entreprises du pays créancier (ce qu’on appelle communément l’ « aide liée »). Quel droit est prévu en cas de litige avec les créanciers ? Devant quels tribunaux ? L’Etat renonce-t-il à son immunité ? Est-ce que les conditions du prêt vont entraîner de manière prévisible la détérioration des conditions de vie de la population, l’effondrement de l’économie, violent-elles le droit national et international ?, etc.

• L’utilisation des fonds empruntés : à quoi a servi l’argent emprunté ? A la construction d’un « éléphant blanc », à un grand projet inutile et néfaste pour l’environnement (comme certains barrages, aéroports) ? Est-ce que l’argent du prêt a été détourné à des fins privées ? Est-ce que le gouvernement a contracté un prêt pour sauver les banques ? Etc. Cependant, il peut s’avérer très difficile, voir impossible, d’identifier avec exactitude la destination de l’argent emprunté lorsque par exemple l’État émet des titres de la dette sur les marchés financiers et dans la mesure où ces contrats ne précisent pas cette destination. Par conséquent, il est indispensable dans le cadre d’un audit d’identifier les différents facteurs en amont qui permettent d’identifier la cause de l’augmentation de la dette (par exemple le coût du sauvetage bancaire, la chute des recettes d’impôts due aux cadeaux fiscaux à une minorité privilégiée, la signature d’un mémorandum, l’augmentation des dépenses militaires,…).

• Les facteurs expliquant l’augmentation des dettes publiques : Les questions à se poser sont notamment : Les pouvoirs publics ont-ils utilisé l’argent public pour recapitaliser les banques ? Si oui, quel a été l’impact de ces sauvetages bancaires sur la dette publique ? Y a-t-il eu des contreparties à ces sauvetages ? Est-ce que la dette a été contractée pour compenser le déficit budgétaire ? Si oui, d’où vient ce déficit ? Des cadeaux fiscaux faits aux ménages les plus riches et les transnationales ? De l’effet « boule de neige » lié à l’accumulation des intérêts ? Etc.

Les dettes insoutenables

Nous arrivons maintenant à la dernière catégorie de dette dont l’avantage est de pouvoir fonder sur des bases légales, sociales et économiques, une suspension immédiate du paiement des dettes publiques indépendamment de leur caractère illégal, odieux ou illégitime. Une telle suspension (avec gel des intérêts) se justifie par le niveau insoutenable des dettes pour la population et par la supériorité des obligations juridiques des États à l’égard de leur population par rapport au remboursement des dettes.

Comme le met en exergue l’Expert de l’ONU sur la dette, le remboursement des dettes peut constituer dans le chef des créanciers une violation de leurs obligations relatives au respect des droits humains. « Puisque les droits de l’Homme jouent un rôle important en définissant un élément essentiel des conceptions actuelles de la souveraineté, une dette souveraine (et les réclamations afférentes) pouvant nuire gravement à la population de l’État emprunteur, peut constituer une violation des droits de l’Homme » |28|.

Contrairement aux catégories précédentes, l’évaluation du caractère insoutenable de la dette est liée uniquement à l’exécution du contrat et son impact sur la population. Il faut donc regarder concrètement les effets du remboursement de la dette sur les autres postes budgétaires de l’État.

Une dette est insoutenable lorsque son paiement entraine une violation des droits humains

Comme le souligne la CNUCED (Conférence des Nations-unies sur le commerce et le développement), la soutenabilité de la dette n’est pas une simple catégorie financière mais une situation qui n’existe que si le service de la dette n’entraine pas des sacrifices intolérables pour le bien-être de la société |29|. Cette position est également celle de l’Expert de l’ONU sur la dette et celle de la Commission pour la Vérité sur la dette grecque qui définit la dette insoutenable comme « une dette qui ne peut être honorée sans attenter gravement à la capacité de l’État débiteur à assurer ses obligations en matière de droits humains fondamentaux, comme ceux relevant du domaine de l’éducation, de l’eau, des soins de santé, de la fourniture de logements décents, ou à investir dans les infrastructures publiques et les programmes nécessaires au développement économique et social ».

Une telle dette peut donc être valide (légale, légitime, non-odieuse) mais insoutenable. Elle peut aussi être les quatre à la fois. C’est notamment le cas de la dette grecque dont le paiement et la mise en œuvre des conditionnalités empêchent le respect des droits fondamentaux de la population mais aussi de sortir de la crise économique.

Cette définition de l’insoutenabilité s’oppose à la vision du FMI qui considère « insoutenables » les dettes trop élevées selon des critères strictement financiers, sans jamais prendre compte l’impact de ce paiement sur les autres budgets prioritaires de l’État, ceux qui visent à assurer à l’ensemble de la population une vie décente. L’objectif du FMI est d’assurer coûte que coûte la continuité du paiement la dette, peu importent les conséquences.

Le respect des droits humains prime sur le paiement des dettes publiques

Lorsque les créanciers proclament qu’« une dette est une dette, c’est un contrat » comme l’a déclaré Christine Lagarde le lendemain de la victoire de Syriza, ils mettent de côté volontairement les spécificités des États comme leurs missions de services publics et leur obligation de respecter et faire respecter les droits fondamentaux des personnes qui se trouvent sur son territoire.

Ces obligations sont pourtant prioritaires comme le rappellent les Principes directeurs de l’ONU sur la dette : « les États sont au premier chef responsables de veiller à ce que tous ceux qui vivent sur leur territoire ou sous leur juridiction jouissent de tous les droits de l’homme » [...] « Si le service de la dette est excessif ou disproportionné et absorbe des ressources financières destinées à la réalisation des droits de l’homme, il devrait être ajusté ou modifié de manière à refléter la primauté de ces droits. Les allocations budgétaires des États débiteurs devraient consacrer la priorité des dépenses liées aux droits de l’homme (paragraphe 49) ».

Ces principes de l’ONU sont directement issus de textes déjà existants, comme la Charte des Nations Unies de 1945 qui affirme, dans son article 103 |30|, la supériorité de la Charte (qui protège le droit des peuples à l’autodétermination et les droits humains fondamentaux) sur tous les autres accords comme les Traités de libre-échange ou les accords conclus avec les créanciers. Ces principes ont aussi été élaborés sur base de la jurisprudence et de la doctrine. Citons à titre d’exemple l’affaire « Socobel » |31| opposant la Grèce à la Belgique, au cours de laquelle l’avocat du gouvernement grec a affirmé que « la doctrine admet à ce sujet que le devoir d’un gouvernement d’assurer le bon fonctionnement de ses services publics prime celui de payer ses dettes. Aucun État n’est tenu d’exécuter, ou d’exécuter en entier, ses engagements pécuniaires si cela compromet le fonctionnement de ses services publics et a pour effet de désorganiser l’administration du pays » |32|. Ce à quoi l’avocat du gouvernement belge répond : « dans une savante étude (…), M. Youpis exposait hier qu’un État n’est pas tenu de payer sa dette si, en la payant, il devait compromettre ses services publics essentiels. Sur le principe ainsi énoncé, le Gouvernement belge serait d’accord sans aucun doute » |33|.

Un État manquerait donc gravement à ses devoirs s’il devait privilégier le service de sa dette lorsqu’il traverse une grave crise. Par conséquent, les États sont fondés à suspendre immédiatement le paiement de la dette (sans que les créanciers puissent prétendre à réclamer le paiement d’intérêts de retard) et à réduire radicalement le montant de leur dette lorsqu’ils la jugent insoutenable au regard de la situation sociale et économique dans le pays.

Remerciements : L’auteur remercie chaleureusement pour leur relecture et leurs suggestions : Christine Pagnoulle, Eric Toussaint et Rémi Vilain. L’auteur est entièrement responsable des éventuelles erreurs contenues dans ce travail.

Notes

|1| L’intitulé complet de sa fonction est le suivant : Expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels

|2| Paragraphe 49 du Rapport sur les effets de la dette extérieure et des obligations financières connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels (A/70/275).

|3| A l’intérieur de ces catégories qui parfois se superposent, il est nécessaire d’ajouter les garanties d’État dans la mesure où celles-ci produisent une dette publique en cas de défaut de paiement du débiteur (entreprise, banque) dont la dette est garantie par les pouvoirs publics. Pour ne pas alourdir le texte, nous ne mentionnons pas explicitement les garanties d’État lorsque nous parlons des différentes définitions de dettes examinées dans le texte.

|4| Plusieurs législations comme en Italie, en Suisse et en Équateur interdisent cette pratique appelée « anatocisme ». https://fr.wikipedia.org/wiki/Anatocisme

|5| Comme ce fut le cas avec les prêts toxiques octroyés aux collectivités locales françaises par plusieurs banques dont Dexia. Lire http://www.cadtm.org/Les-prets-toxi...

|6| Certains États comme Porto Rico fixent une limite légale à l’émission de titres de la dette. Lire http://www.cadtm.org/La-dette-neoco...

|7| Cette limite est fixée par exemple dans la législation de Porto Rico : https://fr.scribd.com/document/3146...
ou encore dans l’Accord de Londres de 1953 portant sur le règlement de la dette de l’Allemagne. http://www.cadtm.org/L-annulation-d...

|8| Les droits humains fondamentaux comprennent notamment les droits économiques, sociaux et culturels tels qu’inscrits par exemple dans le PIDESC (Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels).

|9| Par exemple, l’article 9 du Traité de Lisbonne dispose que : « Dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l’Union prend en compte les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la garantie d’une protection sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion sociale ainsi qu’à un niveau élevé d’éducation, de formation et de protection de la santé humaine. »

|10| http://www.cadtm.org/Grece-la-longu...

|11| La Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités et la Convention de Vienne sur le droit des traités entre États et organisations internationales de 1986 indiquent différents vices du consentement pouvant entrainer la nullité du contrat. Parmi eux, on trouve la corruption du contractant par des moyens directs ou indirects lors de la négociation, la contrainte exercée sur le contractant au moyen d’actes ou de menaces dirigés contre lui ou encore le dol (tromperie).

|12| L’interdiction de transférer les dettes coloniales a été posée dès 1919 avec le Traité de Versailles qui dispose dans son article 255 que la Pologne est exonérée de payer « la fraction de la dette dont la Commission des Réparations attribuera l’origine aux mesures prises par les gouvernements allemand et prussien pour la colonisation allemande de la Pologne ». Concernant les colonies africaines de l’Allemagne, la réponse des Alliés fut la suivante : « Les colonies ne devraient être astreintes à payer aucune portion de la dette allemande, et devraient être libérées de toute obligation de rembourser à l’Allemagne les frais encourus par l’administration impériale du protectorat. En fait, il serait injuste d’accabler les indigènes en leur faisant payer des dépenses manifestement engagées dans l’intérêt de l’Allemagne, et il ne serait pas moins injuste de faire peser cette responsabilité sur les Puissances mandataires qui, dans la mesure où elles ont été désignées par la Société des Nations, ne tireront aucun profit de cette tutelle ». Source : Treaty series, n° 4, 1919, p. 26.
Une disposition similaire fut prise dans le Traité de paix de 1947 entre l’Italie et la France, qui déclare « inconcevable que l’Éthiopie assure le fardeau des dettes contractées par l’Italie afin d’en assurer sa domination sur le territoire éthiopien ».

L’article 16 de la Convention de Vienne de 1978 sur la succession d’États en matière de traités ne dit pas autre chose : « Un État nouvellement indépendant n’est pas tenu de maintenir un traité en vigueur ni d’y devenir partie du seul fait qu’à la date de la succession d’États, le traité était en vigueur à l’égard du territoire auquel se rapporte la succession d’États ».

|13| Il est utile de rappeler que le droit n’est pas forcément juste, loin de là. Ainsi, un embargo peut très bien être légal mais illégitime. C’est le cas de l’embargo qui a été imposé à Cuba par les États-Unis. Bien que sa légalité soit fortement contestée du point de vue du droit international, cet embargo est légal du point de vue du droit interne des États-Unis.

|14| L’article 290.5 prévoit que « En cas de dettes déclarées illégales, on exercera le droit de récupération des sommes liées aux dommages qu’elles ont entraînés », http://www.cadtm.org/La-constitutio...

|15| Eric Toussaint, La dette odieuse selon Alexandre Sack et selon le CADTM, http://www.cadtm.org/La-dette-odieu... Voir également en version complète : http://www.cadtm.org/Demystifier-Al...

|16| Selon la définition donnée par le Rapporteur spécial Mohammed Bedjaoui dans son projet d’article sur la succession en matière de dettes d’État pour la Convention de Vienne de 1983, les dettes odieuses sont celles qui ont été contractées dans « des buts non conformes au droit international contemporain, et plus particulièrement aux principes du droit international incorporés dans la Charte des Nations Unie ». Mohammed Bedjaoui, « Neuvième rapport sur la succession dans les matières autres que les traités », A/CN.4/301et Add.l, p. 73. Une telle dette serait également illégale.

|17| CADTM - Documents secrets du FMI sur la Grèce avec commentaires d’Eric Toussaint, http://www.cadtm.org/Documents-secr...

|18| Récemment encore, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU dans sa résolution adoptée le 23 mars 2016 constate que « les programmes de réforme par ajustement structurel et les conditionnalités par politique imposée limitent les dépenses publiques, imposent un plafonnement de ces dépenses et accordent une place insuffisante à la fourniture de services sociaux, et que seuls quelques pays parviennent durablement à une croissance plus élevée dans le cadre de ces programmes » et recommande de « ne pas reproduire les politiques d’ajustement structurel antérieures qui n’ont pas fonctionné, notamment celles qui ont imposé de façon dogmatique des privatisations et une réduction des services publics ». http://ap.ohchr.org/Documents/F/HRC...

|19| La constitution équatorienne : un modèle en matière d’endettement public, http://www.cadtm.org/La-constitutio...

|20| http://www.cadtm.org/Manifeste-d-Oviedo
http://manifiestodeoviedo.org/
Extrait du manifeste : « La socialisation des pertes due au sauvetage des banques espagnoles ayant provoqué l’explosion de la dette et du déficit en 2012 se poursuit actuellement au travers de mesures comme le Plan de Paiement des Fournisseurs des municipalités (FFPP) ou le Fonds de Liquidité Autonome (FLA) qui, loin de servir l’intérêt général, ont profité aux banques en leur permettant de convertir des dettes commerciales en dettes financières et d’imposer aux administrations publiques des taux d’intérêt exorbitants, jusqu’à 26 fois supérieurs à ceux réclamés par la BCE aux banques elles-mêmes. Les municipalités et les communautés ploient sous le fardeau de la dette en conséquences d’une série de décisions illégitimes : des travaux pharaoniques et inutiles, des spéculations urbanistiques, des surfacturations, des pots-de-vin et d’autres manœuvres de corruption. En général, même dans les administrations considérées comme assainies, le Plan de Paiement des Fournisseurs et le FLA sont venus alourdir la dette publique en toute illégitimité ».

|21| Le Juge Taft, cité dans P. Adams, Odious Debt, 1991, p. 168. Voir aussi O. Lienau, Rethinking Sovereign Debt : Politics, Reputation, and Legitimacy in Modern Finance, Harvard, 2014.
http://www.cadtm.org/En-quoi-la-rep...

|22| Paragraphe 52 des Principes directeurs relatifs à la dette extérieure et aux droits de l’homme, Annexe au rapport de l’expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, Cephas Lumina, du 10 avril 2012 (A/HCR/20/23).
http://www.ohchr.org/FR/Issues/Deve...

|23| Ruzié David, Droit international public, 17e édition, Dalloz, 2004, p. 93.

|24| Les effets des transformations des États sur leurs dettes publiques et autres obligations financières : traité juridique et financier, Recueil Sirey, Paris, 1927

|25| Le 10 octobre 2011, le gouvernement belge sauvait une deuxième fois Dexia de la faillite en rachetant une partie du groupe : Dexia Banque Belgique - devenue Belfius - pour 4 milliards d’euros. En plus de ce rachat, les États belges, français et luxembourgeois décidaient aussi de garantir les emprunts de la partie « à risque » du groupe bancaire : Dexia SA surnommée « bad bank » et ce, jusqu’en 2031. Or, la garantie de l’État belge était illégale car elle n’avait pas soumise au vote du Parlement fédéral belge comme l’impose la Constitution. Le CADTM avec ATTAC avait alors introduit un recours devant le Conseil d’État pour annuler cette garantie d’État. Mais deux ans plus tard, ce parlement, dont les compétences avaient été illégalement usurpées par le gouvernement, décidait par un vote de légaliser à postériori l’acte qu’avait pris le gouvernement pour sauver Dexia SA en 2011. Cette garantie publique est certes devenue légale, elle n’en reste pas moins illégitime car elle va à l’encontre de l’intérêt général. Elle fait peser tous les risques sur la population, protège de manière absolue les créanciers et verrouille tout débat sur les alternatives aux recapitalisations de Dexia SA. http://www.cadtm.org/Le-proces-de-l...

|26| Voir Howard Zinn, New Deal Thought, Edit. Bobbs Merril, Indianapolis, 1966. Voir en particulier PART TEN : The Constitution and Social Progress. 52. Felix Frankfurter : Social Issues Before the Supreme Court (1933)

|27| New York Times, édition du 26 novembre 2006

|28| Paragraphe 49 du Rapport sur les effets de la dette extérieure et des obligations financières connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels (A/70/275).

|29| Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), « Sovereign Debt Workouts : Going Forward : Roadmap and Guide » (2015), Genève.

|30| Article 103 : « En cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ». Parmi les obligations contenues dans cette Charte, on trouve notamment, aux articles 55 et 56, « le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l’ordre économique et social […], le respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. »

|31| Société Commerciale de Belgique, (1939) PCIJ Ser A/B, n° 78.

|32| Cité par by R. Ago, Additif au huitième rapport sur la responsabilité des États, A/CN.4/318/ADD.5-7.

|33| Ibid.

|34| Comme nous l’avons indiqué plus haut dans le texte, la Constitution équatorienne interdit la socialisation des pertes des banques privées. En conséquence, les dettes liées à un sauvetage bancaire sont illégales en droit équatorien.

Renaud Vivien

Co-secrétaire général du CADTM Belgique.

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