Édition du 16 avril 2024

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Le blogue de Louise Chabot

Les valeurs libérales au temps des élections

Il y avait quelque chose de surréaliste à entendre le premier ministre Couillard se draper des « valeurs libérales » telles que décrites par Claude Ryan dans le livre du même nom. Au nombre de ces valeurs, on retrouve la justice sociale. Philippe Couillard veut se débarrasser de l’étiquette « austéritaire » qui lui colle à la peau et tente de s’ériger en champion de la lutte aux inégalités sociales.

Ce n’est pas parce qu’on rit que c’est drôle

C’est à croire que le premier ministre n’est pas en mesure de voir l’énorme contradiction entre ce qu’il vient de dire à ses militantes et militants, et les gestes que son gouvernement a posés au cours des deux années où il a exercé ses mesures d’austérité qui ont plongé la population, particulièrement les plus vulnérables d’entre nous, dans plus de précarité, de détresse et d’incertitude.

À l’occasion de leur Conseil national, les libéraux ont prétendu qu’avec les énormes surplus budgétaires que leur gouvernement a artificiellement créés après deux années de compressions budgétaires sans précédents, il serait maintenant possible de réinvestir dans différentes sphères et de réduire les écarts de richesse dans la population.

« Stop-and-go »

Cette hypocrisie budgétaire a un nom : le « Stop-and-go ». Normalement, ça implique des investissements importants de l’État (services publics, dépenses d’infrastructures, etc.) en temps de ralentissement économique afin de relancer la machine et une baisse de ces investissements lorsque l’économie reprend son air d’aller.

La méthode libérale est un peu différente, en ce sens que le gouvernement Couillard a coupé massivement dans les dépenses de l’État à un moment où la situation de l’économie dictait de faire le contraire. Qui plus est, les « réinvestissements » dont parle le gouvernement ne sont même pas faits avec de l’argent frais et demeurent infiniment inférieurs aux sommes qu’il a coupées précédemment.

Croyez ce que je dis, pas ce que je fais

Pour dégager son surplus budgétaire de 3,6 milliards de dollars, le gouvernement Couillard a fragilisé l’économie des régions et aura pourri la vie des familles, des personnes âgées, des patients, des élèves et de tous ceux et celles qui comptent sur les services publics pour souffler un peu. Cette austérité imposée par le Parti libéral du Québec aura causé bien des dommages pour l’ensemble de la population.

Et maintenant, Philippe Couillard voudrait nous faire croire qu’il réparera les dégâts ? Pourtant, ce n’est pas ce que laisse croire la récente mise à jour budgétaire et le dernier rapport mensuel des opérations financières montrant un surplus de près de 2 milliards et une réduction de 0,6 % des dépenses de la mission « Éducation et culture » pour les cinq premiers mois de l’année budgétaire (avril à août) ! Que dire également de l’adoption du projet de loi no 70 qui vient frapper durement certains premiers demandeurs de l’assistance sociale en réduisant leur maigre pitance de 623 $ à 399 $ par mois, et ce, à quelques jours de ce conseil national ?

Les valeurs libérales

C’est à se demander si le premier ministre a seulement lu le chapitre consacré à la justice sociale dans l’ouvrage de Claude Ryan. Il y découvrirait : un plaidoyer pour la gratuité et l’accessibilité de l’éducation, des services de santé de qualité pour toutes et tous, une préoccupation pour le sort des plus démunis et des mises en garde contre la tentation de privatiser nos services publics. Ces services ont été mis en place expressément pour réduire les inégalités.

C’est une chose que de vouloir que toutes et tous bénéficient de la richesse collective le plus équitablement possible. C’en est une autre de véritablement s’attaquer aux causes de ces inégalités sociales, et le gouvernement Couillard part avec un lourd handicap de crédibilité en la matière, à moins qu’il ne corrige rapidement le tir. Les belles paroles ne suffiront pas, parce que les plus démunis le resteront tandis que les mieux nantis se sentiront l’esprit allégé par ces bons sentiments.

Les paroles s’envolent, les gestes demeurent, monsieur Couillard. Aux prochaines élections, nous nous en souviendrons !

Louise Chabot

Présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) (depuis 2012)

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