Édition du 16 avril 2024

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Le SPGQ à la commission Charbonneau - Protéger les divulgateurs pour que le Québec passe de cancre à champion de l'intégrité

QUÉBEC, le 16 oct. 2014 - « D’un côté, un étudiant, après avoir découvert une fuite de renseignements importants, aide le gouvernement à rendre plus sécuritaire le portail Web des Offices jeunesse internationaux du Québec (LOJIQ) contenant des milliers de renseignements personnels de Québécois. De l’autre, la direction de LOJIQ, plutôt que de féliciter et de remercier cet étudiant, décide de porter plainte contre lui à la police et contribue ainsi à le faire accuser de piratage informatique, un crime passible de 10 ans de prison. » C’est notamment par le biais de cet exemple kafkaïen que M. Richard Perron, président du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), vient de plaider aujourd’hui l’urgence criante de mettre sur pied une loi pour protéger les divulgateurs d’actes répréhensibles, lors de son audience à la commission Charbonneau, afin d’endiguer une culture de l’impunité.

« Force est d’admettre qu’un système de collusion et de corruption est bel et bien en place au Québec et que nous avons besoin d’instruments juridiques, non seulement pour protéger les divulgateurs d’actes répréhensibles qui nous permettent d’y voir plus clair, mais aussi pour encourager ceux et celles qui craignent de sortir de l’ombre par peur de représailles. L’étudiant a dû subir les représailles en silence, faute de loi pour le protéger. Par contre, un journaliste vedette du quotidien La Presse, à qui la police demande de divulguer ses sources, peut déchirer sa chemise sur la place publique, à juste titre, car les tribunaux reconnaissaient aux journalistes le devoir de protéger leurs sources, et la Fédération professionnelle des journalistes du Québec peut dénoncer cette situation sans avoir peur de voir son membre être puni », affirme M. Perron.

Heureusement, le jeune divulgateur accusé de piratage informatique a pu retrouver la paix d’esprit, la Couronne ayant retiré sa poursuite, comme le demandait le SPGQ, à la lecture des faits qui ne justifiaient pas cette poursuite. Le cas fait désormais école, car, pour une première fois, la justice au Québec s’en est prise à un divulgateur d’actes répréhensibles dans le domaine informatique. Le prix à payer a été très élevé pour cet universitaire : il a été cloué au pilori, dénoncé à la police et aussi privé du stage qu’il convoitait. « Avec cette histoire, l’aveu de l’État est troublant : si vous découvrez une faille informatique, mieux vaut vous taire, car le prix à payer pour votre honnêteté risque de vous coûter très cher sur le plan humain », ajoute le président du SPGQ. 

Un site Web pour mesurer l’ampleur du bordel informatique

Afin de favoriser l’avènement de l’ère de transparence promise par le premier ministre le soir de son élection, et aussi de permettre aux citoyens de débusquer la mauvaise gestion des contrats publics, le SPGQ vient de lancer Le ContrActuel. Ce site Web fait ressortir l’ampleur des contrats publics attribués non seulement par le gouvernement du Québec, mais aussi par les grandes municipalités et universités du Québec. Il permet également de découvrir les sommes empochées par une poignée de soumissionnaires privés. Uniquement dans le secteur informatique, Le ContrActuel met en lumière le fait que plusieurs grandes sociétés implantées au Québec se sont partagé des contrats publics totalisant des milliards de dollars, ce qui aurait pourtant permis l’embauche de professionnels nécessaires afin de reconstruire l’expertise interne qui fait actuellement défaut à la fonction publique québécoise.

« Pour que le Québec passe d’élève médiocre à champion de l’intégrité, son gouvernement devrait rapidement effectuer une enquête publique sur la gestion des contrats de sous-traitance en informatique. Le gouvernement du Québec déploie une rigueur enthousiaste pour éliminer rapidement le déficit créé par la dernière crise financière, et ce, en affaiblissant les moins nantis de la société. Mais où est cette même rigueur pour chiffrer les dépenses publiques en informatique ? Le bordel informatique doit cesser et la priorité doit être la corruption zéro, encore plus que l’obsession du déficit zéro », poursuit Richard Perron.

L’ampleur du fiasco informatique peut se mesurer par la valeur des contrats de service en sous-traitance dans les ressources informationnelles (RI) de l’ensemble des ministères et organismes de la fonction publique québécoise, qui a grimpé de 218 à 778 millions de dollars entre 2003 et 2013, soit un bond spectaculaire de 257 %. En outre, le pourcentage des dépenses en RI liées à des ressources externes caracolait à 52 % dans la fonction publique québécoise en 2010-2011, tandis qu’il se maintenait entre 8 et 24 % pour les gouvernements provinciaux et les États ailleurs dans le monde de 2004 à 2008.

Le président du SPGQ juge en outre injuste le faible accès des petites firmes aux contrats et s’interroge sur l’apparente concentration de grandes sociétés qui, elles, se voient attribuer des contrats pharaoniques. « Même pour des contrats modestes, les petites firmes sont généralement incapables de rivaliser avec les grandes, excluant en partant de nombreuses firmes, ce qui freine une saine concurrence. Pourtant, une saine concurrence constitue l’un des meilleurs remèdes à la corruption et à la collusion », conclut M. Perron.

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