Édition du 16 avril 2024

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Premières Nations

Projet de loi C-262 : imposer un cadre législatif à la reconnaissance des droits des Premières nations canadiennes

Le député néo-démocrate Roméo Saganash a déposé le 21 avril dernier le projet de loi C-262 qui « vise à harmoniser les lois fédérales avec la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. » Celui-ci reprend l’essentiel de la déclaration de l’ONU en la recadrant dans le menue législatif du Parlement canadien comme cadre à la réconciliation souhaitée entre les Premières nations et le reste de la population canadienne..

Saganash met au défi le gouvernement Trudeau d’appliquer immédiatement la déclaration de l’ONU et de lui donner force de loi. Le projet de loi se veut un test majeur pour le gouvernement Trudeau qui s’est davantage distingué depuis son arrivée au pouvoir par sa politique-spectacle que par une réelle mise en œuvre des engagements du PLC pris lors de la récente campagne électorale fédérale, notamment en matière de droits des Premières nations. Le projet de loi C-262 vise l’inscription des principes établis par la déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones dans les lois fédérales, le rejet du colonialisme intérieur, la protection des droits ancestraux ou issus des traités et le rejet de doctrines qui prônent la supériorité de peuples ou d’individus sur d’autres. Le député Saganash affirme que le but du projet de loi est d’ « utiliser la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones en tant que cadre de réconciliation. » Le chef de l’Assemblée des Premières nations Perry Bellegarde salue cette intiative tout comme Ghislain Picard, chef régional de l’APN, Québec/Labrador.

Le projet de loi C-262 (extraits)

Attendu :

 que le Parlement du Canada reconnaît que les principes établis dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones devraient être inscrits dans les lois fédérales ;

 que, dans le document final produit à l’issue de la réunion plénière de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies appelée Conférence mondiale sur les peuples autochtones, le Canada et d’autres États du monde ont réaffirmé leur engagement solennel à respecter, promouvoir et favoriser les droits des peuples autochtones et à faire respecter les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ;

 que la Commission de vérité et réconciliation du Canada, dans le document intitulé Appels à l’action, demande au gouvernement fédéral et à d’autres gouvernements d’adopter et de mettre en oeuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et d’en faire le cadre de la réconciliation ;

 que les peuples autochtones ont subi des injustices historiques à cause, entre autres, de leur colonisation et de la dépossession de leurs terres, territoires et ressources ;

 que toutes les doctrines, politiques et pratiques qui invoquent ou prônent la supériorité de peuples ou d’individus en se fondant sur des différences d’ordre national, racial, religieux, ethnique ou culturel sont racistes, scientifiquement fausses, juridiquement sans valeur, moralement condamnables et socialement injustes ;

 que le Canada doit rejeter toute forme de colonialisme à l’égard des peuples autochtones et adopter un modèle contemporain fondé sur la bonne foi et sur les principes de justice, de démocratie, d’égalité, de non-discrimination, de bonne gouvernance et de respect des droits de l’homme ;

 que le Canada s’est engagé à prendre les mesures appropriées — législatives, politiques et administratives, entre autres — à l’échelle nationale et internationale, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones, afin d’atteindre les objectifs énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et à s’assurer de son efficacité ;

 que la protection des droits ancestraux ou issus de traités des peuples autochtones représente une valeur et un principe sous-jacents de la Constitution canadienne ;

 que les droits de la personne, la primauté du droit et la démocratie sont des principes interdépendants qui se renforcent mutuellement, en plus d’être des principes sous-jacents de cette Constitution,

(...)

Articles

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 13 septembre 2007 par sa résolution 61/295 et dont le texte est reproduit à l’annexe constitue un instrument universel garantissant les droits internationaux de la personne et trouve application au Canada.

Le gouvernement du Canada, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones, élabore et met en oeuvre un plan d’action national afin d’atteindre les objectifs énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Les autochtones, peuples et individus, sont libres et égaux à tous les autres et ont le droit de ne faire l’objet, dans l’exercice de leurs droits, d’aucune forme de discrimination fondée, en particulier, sur leur origine ou leur identité autochtones.

Les peuples autochtones ont le droit à l’autodétermination. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

Les peuples autochtones, dans l’exercice de leur droit à l’autodétermination, ont le droit d’être autonomes et de s’administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes.

Les autochtones, peuples et individus, ont le droit de ne pas subir d’assimilation forcée ou de destruction de leur culture. Les États mettent en place des mécanismes de prévention et de réparation efficaces visant :
a) Tout acte ayant pour but ou pour effet de priver les autochtones de leur intégrité en tant que peuples distincts, ou de leurs valeurs culturelles ou leur identité ethnique ;
b) Tout acte ayant pour but ou pour effet de les déposséder de leurs terres, territoires ou ressources ;
c) Toute forme de transfert forcé de population ayant pour but ou pour effet de violer ou d’éroder l’un quelconque de leurs droits ;
d) Toute forme d’assimilation ou d’intégration forcée ;
e) Toute forme de propagande dirigée contre eux dans le but d’encourager la discrimination raciale ou ethnique ou d’y inciter.

Les peuples autochtones ne peuvent être enlevés de force à leurs terres ou territoires. Aucune réinstallation ne peut avoir lieu sans le consentement préalable — donné librement et en connaissance de cause — des peuples autochtones concernés et un accord sur une indemnisation juste et équitable et, lorsque cela est possible, la faculté de retour.

Les peuples autochtones ont le droit de manifester, de pratiquer, de promouvoir et d’enseigner leurs traditions, coutumes et rites religieux et spirituels ; le droit d’entretenir et de protéger leurs sites religieux et culturels et d’y avoir accès en privé ; le droit d’utiliser leurs objets rituels et d’en disposer ; et le droit au rapatriement de leurs restes humains.

Les peuples autochtones ont le droit de revivifier, d’utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales, leur philosophie, leur système d’écriture et leur littérature, ainsi que de choisir et de conserver leurs propres noms pour les communautés, les lieux et les personnes.‍ Les États prennent des mesures efficaces pour protéger ce droit et faire en sorte que les peuples autochtones puissent comprendre et être compris dans les procédures politiques, juridiques et administratives, en fournissant, si nécessaire, des services d’interprétation ou d’autres moyens appropriés.‍

Les peuples autochtones ont le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue, d’une manière adaptée à leurs méthodes culturelles d’enseignement et d’apprentissage.‍

Les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire de représentants qu’ils ont eux-mêmes choisis conformément à leurs propres procédures, ainsi que le droit de conserver et de développer leurs propres institutions décisionnelles.

Les peuples autochtones ont droit, sans discrimination d’aucune sorte, à l’amélioration de leur situation économique et sociale, notamment dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la formation et de la reconversion professionnelles, du logement, de l’assainissement, de la santé et de la sécurité sociale.‍ Les États prennent des mesures efficaces et, selon qu’il conviendra, des mesures spéciales pour assurer une amélioration continue de la situation économique et sociale des peuples autochtones. Une attention particulière est accordée aux droits et aux besoins particuliers des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones.‍

Une attention particulière est accordée aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones dans l’application de la présente Déclaration.‍

Les peuples autochtones ont le droit de conserver et de renforcer leurs liens spirituels particuliers avec les terres, territoires, eaux et zones maritimes côtières et autres ressources qu’ils possèdent ou occupent et utilisent traditionnellement, et d’assumer leurs responsabilités en la matière à l’égard des générations futures.

Les peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils ont utilisés ou acquis.‍ (...) Les États accordent reconnaissance et protection juridiques à ces terres, territoires et ressources. Cette reconnaissance se fait en respectant dûment les coutumes, traditions et régimes fonciers des peuples autochtones concernés.‍

Les peuples autochtones ont droit à la préservation et à la protection de leur environnement et de la capacité de production de leurs terres ou territoires et ressources. À ces fins, les États établissent et mettent en oeuvre des programmes d’assistance à l’intention des peuples autochtones, sans discrimination d’aucune sorte.‍ Les États prennent des mesures efficaces pour veiller à ce qu’aucune matière dangereuse ne soit stockée ou déchargée sur les terres ou territoires des peuples autochtones sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.‍

Il ne peut y avoir d’activités militaires sur les terres ou territoires des peuples autochtones, à moins que ces activités ne soient justifiées par des raisons d’intérêt public ou qu’elles n’aient été librement décidées en accord avec les peuples autochtones concernés, ou demandées par ces derniers.‍

Les peuples autochtones ont le droit de définir et d’établir des priorités et des stratégies pour la mise en valeur et l’utilisation de leurs terres ou territoires et autres ressources.‍

Le projet de loi C-262

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

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