Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Écosocialisme

Le Réseau écosocialiste est prêt à passer à l’action !

Le samedi 9 mars, c’est dans l’enthousiasme que se sont réuniEs à Montréal plus de 75 militantes et militants de Québec solidaire, provenant de différentes régions du Québec, pour fonder le Réseau écosocialiste. Ont participé à sa mise sur pied des membres de collectifs existants dans QS, comme Masse critique, Gauche socialiste, Alternative socialiste et Socialisme international. Mais ce sont - et de loin - des militantEs indépendantEs de tout collectif qui étaient les plus nombreuses-eux. La rencontre a permis d’adopter une base de regroupement, des statuts et d’élire un exécutif. Loin d’un simple regroupement idéologique, le Réseau se veut avant tout un centre d’initiatives, tourné vers l’action.

L’Assemblée a été ouverte par quatre panélistes qui ont apporté une contribution appréciée sur les fondements de l’écosocialisme, les concepts écologistes majeurs, la place des mouvements sociaux dans le processus de transformation sociale et les expériences écosocialistes dans différents partis à gauche de la gauche, particulièrement d’Europe.

Quelles sont les bases de regroupement et d’action du Réseau écosocialiste ?

Après la présentation du document sur les bases de regroupement, l’assemblée a ensuite discuté des analyses, puis avancé une série de propositions d’amendements.

Résumons à grands traits les bases de regroupement. Elles identifient une triple crise dans la période ouverte par la grande récession de 2008 : une crise économique, une crise environnementale provoquée par un mode de production et de consommation insoutenable et une crise de la démocratie, vidée de tout contenu par la toute-puissance de l’oligarchie financière. En somme, nous vivons une crise systémique globale qui montre l’impasse du capitalisme contemporain, de plus en plus incapable de répondre aux besoins fondamentaux de l’humanité.

L’écosocialisme est un nouveau projet politique qui répond à cette impasse. Pour sortir des crises actuelles, il faut mettre fin à la recherche du profit maximal, au consumérisme et au productivisme. Si l’écosocialisme s’engage à approfondir et à renouveler le projet émancipateur du socialisme dans les conditions du 21e siècle, il se distingue des « socialismes du 20e », qui ont échoué tant sur le plan écologique et démocratique, que sur celui de l’équité sociale. C’est pourquoi il se veut démocratique, autogestionnaire et égalitaire, et rejette le capitalisme vert défendu par la social-démocratie, qui prétend qu’on peut dépasser la crise écologique actuelle sans remettre en question le responsable de cette crise, le capitalisme lui-même. À celui-ci il faut opposer une économie gérée démocratiquement, en rupture avec le consumérisme, la marchandisation et la privatisation de tous les domaines de la vie. L’écosocialisme pose la nécessité de prendre part aux luttes sociales et environnementales aux côtés de toutes celles et tous ceux qui résistent.

Réorganiser l’économie sur une base radicalement démocratique, renouveler la démocratie à tous les niveaux, favoriser la convergence des luttes sociales et politiques, ce sont là des conditions essentielles à la réalisation des perspectives écosocialistes. Il faut passer d’une situation de tout au privé à une planification écologique et participative, guidées par les besoins réels de la population et le respect des écosystèmes. Il faut rompre avec les choix de production des grands propriétaires des entreprises énergétiques, minières ou industrielles et des banques, imposés à leur seul profit.

Les bases de regroupement du Réseau écosocialiste insistent particulièrement sur la nécessité de lier Québec solidaire aux mouvements sociaux, non seulement en leur manifestant une nécessaire solidarité, mais en participant à leurs débats pour définir ensemble des perspectives communes de résistance aux plans du grand capital. Pour ce faire, Québec solidaire doit se donner les moyens d’apporter ses contributions en se mettant à l’écoute de ses membres militants présents dans les différents mouvements sociaux.

Des tâches du Réseau écosocialiste....

Ces tâches vont s’organiser autour des axes suivants :

 Constituer un centre d’élaboration des perspectives écosocialistes, afin de pouvoir participer aux débats programmatiques et tactiques de Québec solidaire ;

 Proposer des campagnes et des activités contre les politiques d’austérité, antiécologiques et patriarcales des classes dominantes ;

 Défendre la démocratie au sein du parti et contribuer à l’approfondissement de cette dernière ;

 Construire et consolider la présence de Québec solidaire dans les différents mouvements sociaux et se donner des structures pouvant faciliter cette tâche ;

 Animer des débats et des formations sur les perspectives écosocialistes ;

 Tisser des liens avec les organisations écosocialistes à l’échelle de la planète.

Les débats ont permis de faire ressortir une grande unité de vue sur l’orientation proposée. La discussion a rendu explicite que le courant écosocialiste dans le monde était marqué par différentes sensibilités, mais les bases de regroupement proposées étaient suffisamment souples pour accueillir ces différentes sensibilités. Une bonne partie des discussions s’est concentrée sur le renforcement de la dimension antipatriarcale de l’écosocialisme que nous défendons. Pour l’Assemblée du Réseau, l’écosocialisme doit aussi inclure dans ses dimensions de luttes l’abolition du patriarcat. Établir une société écosocialiste oblige à tenir compte des revendications des femmes et du caractère fondamental du combat contre le patriarcat.

Des statuts donnent lieu à des débats importants

Les statuts définissent les conditions pour devenir membres, le rôle et les pouvoirs de l’assemblée générale comme instance suprême du réseau, la place des assemblées régionales et de la coordination interrégionale. Les derniers définissent les tâches du comité exécutif et la répartition du travail en son sein.

Les débats se sont concentrés principalement sur deux questions : les conditions d’adhésion au Réseau et la création statutaire de comités de travail dans lesquels pourront s’impliquer les militantEs.

La première proposition mise en jeu se résumait comme suit : « les membres du réseau sont des personnes membres de Québec solidaire qui adhèrent à la base d’unité et contribuent au financement et à l’activité du Réseau ».

C’est le degré d’ouverture du Réseau qui a soulevé des questions. Si ce dernier se donnait comme tâche de travailler particulièrement au développement de Québec solidaire comme parti de la rue, il en découlait selon les partisanEs de cette option qu’il fallait limiter la participation au Réseau aux membres de Québec solidaire. Pour d’autres, qui soulignaient que la perspective écosocialiste pouvait rayonner plus largement, il apparaissait souhaitable que toute personne se définissant comme écosocialiste puisse joindre le Réseau. Du débat est ressortie une solution de compromis : toute personne membre de Québec solidaire ou en solidarité politique avec le parti pouvait adhérer au Réseau. C’est cette proposition qui a été adoptée.

Pour ce qui est des comités de travail, la rencontre de fondation a adopté de mettre sur pied les comités suivants : un comité femmes, un comité communication, un comité de formation et un comité parti de la rue. Les comités manifestaient la volonté militante de s’engager le plus rapidement possible dans l’action. D’ailleurs, ces comités, formés sur une base volontaire, ont recruté un bon nombre d’adhérentEs, particulièrement le comité parti de la rue.

L’ élection de l’exécutif

La formulation des statuts soumise à la discussion proposait d’élire un comité exécutif « composé de six personnes dont au moins trois femmes » devant « assurer une représentation aux régions ». Dans la volonté de garantir une meilleure représentation de la diversité militante, l’assemblée a décidé d’accroître à huit le nombre de membres du comité, dont au moins quatre femmes. L’élection devait nous offrir une surprise qui fut très bien accueillie. L’exécutif sera formé finalement de 5 femmes et de 3 hommes. Malheureusement, des candidatures très valables ont été écartées, mais les lieux d’engagement dans le Réseau ne manquent pas.

Le Réseau écosocialiste : un acquis pour la gauche de la gauche, un acquis pour Québec solidaire

La fondation du Réseau écosocialiste est un moment important dans le regroupement de la gauche de la gauche au Québec. Elle s’inscrit dans le processus d’unification de la gauche politique au Québec engagé depuis plus d’une décennie. Il va constituer un acquis, car il renforcera la capacité de Québec solidaire de s’inscrire dans les débats et les combats essentiels à mener face à la crise écologique du système capitaliste et aidera à attirer au parti des secteurs de la jeunesse qui se sont radicalisés durant le printemps érable.

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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