L’argent a parlé. Nous allons aller de l’avant pour faire des forages « exploratoires » sur l’île d’Anticosti l’été prochain. Après avoir insufflé un peu d’espoir aux habitants de l’Île [1], le gouvernement donnera fort probablement son aval à la fracturation. Parce que nous avons signé un contrat avec la compagnie Pétrolia pour ce faire. Une signature qui date du temps du PQ ou des libéraux, on ne sait plus tellement, ces deux partis se lancent la balle à tour de rôle [2].
Mais de quel argent parle-t-on ici ? Eh bien, du nôtre ! Car la compagnie qui exécutera les travaux sur l’Île cet été est en fait propriété en bonne partie des Québécois. La Caisse de dépôt et de placement possède en effet 40% des actions de Pétrolia, celle-là même qui menace le gouvernement de poursuites judiciaires si le projet de forage de trois puits exploratoires est bloqué. Pour ne pas perdre d’argent ! C’est comme si notre poche gauche menaçait notre poche droite de poursuites ! Nous allons aller de l’avant afin de respecter le contrat signé et nous allons ensuite être obligés de payer pour ramasser les dégâts, parce qu’il y en aura à coup sûr, des dégâts. Pourquoi ne pas payer tout de suite cette compagnie qui ne cherche que les profits et laisser tout simplement tomber cette entreprise vouée à un cul-de-sac de toute façon ? Nous épargnerons ainsi temps et argent. Nous transférerons l’argent de la poche gauche à la droite en laissant au passage un peu du butin à Pétrolia qui ne cherche que cela dans le fond.
Pendant que l’on tergiverse sur des questions d’argent, la population de l’Île, elle, n’en veut pas et vient de s’exprimer clairement sur ce fait en élisant un maire qui a fait campagne électorale spécifiquement sur ce point. Quasiment référendaire comme campagne. Le gros mot est lâché !
Référendaire, le mot qui fait peur, le mot qui a été dans la bouche des libéraux lors de la dernière campagne électorale provinciale. Pourtant, aux dernières nouvelles, les habitants d’Anticosti sont toujours vivants, et bien vivants. Au point que leur maire ne sait plus à quel saint se vouer pour se faire entendre de la part du gouvernement [3].
Qu’attendons-nous pour bouger ? Le ministre Heurtel a déclaré la semaine dernière qu’il tiendra compte de l’acceptabilité sociale après les forages exploratoires, lorsqu’il sera question d’exploitation [4].
En fait, cela veut dire qu’on écoutera la population une fois le mal fait. À bien y penser, ce n’est que la santé d’une poignée de personnes dont il est question ici. Ah oui, et la santé du fleuve et du golfe Saint-Laurent, de la pêche au homard et de la pêche côtière, de la chasse au chevreuil, de la qualité de vie des habitants. Pas grave, ce ne sont là que des considérations biotiques. Pas de votes à sauver là-dedans.
Jacques Tétreault
Coordonnateur général adjoint, RVHQ