2 septembre 2025 | Rabble.ca | Photo : La première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, lors de sa conférence de presse sur la carte d’identité santé, où le sujet de l’interdiction des livres a été abordé.
Riez, et le monde rit avec vous ; interdisez The Handmaid’s Tale (La servante écarlate), et le monde se moque de vous.
Avec cette interdiction de livres, la première ministre Smith et son armée de robots sur les réseaux sociaux semblent apparemment ignorer que si vous accusez un conseil scolaire de « conformité vicieuse » pour avoir tenté d’établir une liste de livres à interdire en réponse à votre propre arrêté ministériel mal rédigé, vous exposez en réalité votre propre incompétence au grand jour.
C’est ce qui arrive lorsque vous ordonnez à un tiers réticent de faire un sale boulot afin de ne pas avoir à affronter les conséquences lorsque la liste des livres à brûler (pardon, je voulais dire interdire) inclut inévitablement un ou deux titres (ou cinquante) qui suscitent la controverse parmi les personnes instruites.
Oui, vous vous retrouvez ridiculisé, et il faudra du temps pour vous en remettre, même si vous avez enfin présenté une preuve de couverture médicale qui ne ressemble pas à quelque chose imprimé sur une imprimante matricielle.
Oui, tout le Canada se moque maintenant du gouvernement conservateur social autoritaire de l’Alberta, parce que The Handmaid’s Tale (La servante écarlate) de Margaret Atwood s’est retrouvé sur une liste de livres interdits que le même gouvernement avait ordonné au conseil scolaire d’Edmonton de créer, et ils ne vont pas arrêter de rire simplement parce que vous essayez de blâmer le conseil scolaire. Le reste du monde se joindra probablement aux rires plus tard.
« Edmonton Public fait clairement un peu de conformité un peu excessive quant à la direction à suivre », a déclaré Smith avec humeur lors de la conférence de presse sur la carte d’identité santé. (AlbertaPolitics.ca considère cela comme une preuve que la première ministre lit notre blog.)
« S’ils ont besoin que nous les guidions dans le processus pour identifier quels types de documents sont appropriés », a-t-elle ajouté sarcastiquement, « nous travaillerons avec eux, avec plaisir, pour passer leur liste en revue, un par un, afin que nous soyons très clairs sur ce que nous essayons de faire. »
Comme nous l’avions déjà noté ici, ce qu’ils essayaient de faire était déjà parfaitement clair. À savoir : assurer le soutien politique continu des parents évangéliques d’enfants en âge scolaire, provoquer les éléments homophobes et « anti-woke » de la base de l’UCP, et piéger les adversaires politiques en les forçant à défendre la pornographie.
L’erreur du conseil scolaire public d’Edmonton a été de tenter de se conformer à cet ordre ridicule en premier lieu, au lieu de dire au ministre d’aller se faire voir.
Comme l’avocat éminent d’Edmonton, Simon Renouf, l’a commenté dans le billet d’hier, l’ordre du ministre de l’Éducation Demetrios Nicolaides n’établit ni objectifs ni normes, contrairement à ce qu’il prétend. « Il impose de nouvelles tâches, et contestables, aux conseils scolaires pour faire le sale boulot du gouvernement, qui dépassent largement le cadre de la Loi sur l’éducation. »
Renouf poursuit : « Assurément, tout conseil scolaire digne de ce nom (ceux qui ne sont pas intimidés par les agitateurs de Take Back Alberta) devrait dire : Désolé, ministre, nous n’irons pas là. Interdire des livres n’est pas du ressort du conseil scolaire. Nous engageons des enseignants et des bibliothécaires professionnels pour sélectionner les livres dans nos bibliothèques, et nous irons devant les tribunaux pour affirmer notre droit – et notre obligation – de le faire. »
Hélas, en Alberta comme dans le pays au sud de nous, il existe un étonnant manque de courage institutionnel pour résister aux impulsions autoritaires de nos gouvernements MAGA.
Quant à la faible tentative de Nicolaides et du ministre des Finances Nate Horner lors d’une conférence de presse matinale pour faire porter à l’Association des enseignants de l’Alberta la responsabilité d’une grève possible des enseignant-es en septembre, il s’est avéré que ce n’était qu’une reprise du communiqué de presse peu convaincant de la veille au soir.
Il y a quelque chose d’intrinsèquement comique dans le spectacle de quelques politicien-nes professionnel-les, bien que dans ce cas peu talentueux, accusant des gens qui ont de vrais emplois de « faire de la politique ».
La réponse de Larry Booi, ancien président de l’Association des enseignants de l’Alberta, que la CBC a retrouvé en vacances en Nouvelle-Écosse, résume bien le problème auquel le gouvernement est confronté à cause de l’ingérence mal informée de ces deux ministres dans les relations de travail – qui, à l’instar du fonctionnement des bibliothèques scolaires, s’avère être une activité qu’il vaut mieux laisser aux professionnel-les.
« Ces deux ministres tournent tellement vite qu’ils doivent souffrir de vertige aujourd’hui », a-t-il déclaré à l’intervieweur de l’émission matinale d’Edmonton. « Quand on peut se présenter comme les protecteurs des conditions d’enseignement et qu’on est complice de leur destruction depuis six ans, c’est tout un exploit ! »
« Ils ont enfin reconnu la nécessité d’améliorer ces conditions de classe », a poursuivi Booi. « Mais s’ils n’améliorent pas aussi les conditions salariales, je pense que les enseignant-es n’ont aucune raison de s’excuser de demander les deux. »
Danielle Smith expose ses goûts littéraires
Comme cela avait également été prédit ici hier, la première ministre Smith n’était pas vraiment ravie de la proposition de proscription du conseil scolaire public d’Edmonton selon les ordres de Nicolaides concernant Atlas Shrugged d’Ayn Rand, un livre que la première ministre a indiqué dans le passé préférer à l’œuvre de Mme Atwood.
« Je n’ai pas lu Atlas Shrugged avant mes 22 ans », a confessé Smith à un journaliste curieux, ce qui explique beaucoup de choses. « J’avais un ami en 10e année qui l’avait lu. Peut-être devrions-nous en faire une lecture obligatoire au lycée, car c’est un livre assez influent et je pense qu’il explique vraiment l’importance de valoriser nos entrepreneurs et notre économie de marché libre. » De plus, a-t-elle ajouté, il est « absolument approprié pour les enfants d’âge scolaire ».
Je laisserai aux lecteurs la célèbre évaluation très juste du scénariste John Rogers sur le chef-d’œuvre de feu Rand : « Il existe deux romans qui peuvent changer la vie d’un adolescent de quatorze ans passionné de lecture : Le Seigneur des anneaux et La Révolte d’Atlas (Atlas Shrugged). L’un est un conte fantastique enfantin qui engendre souvent une obsession permanente pour ses héros invraisemblables, conduisant à une vie adulte émotionnellement atrophiée, socialement handicapée, incapable de faire face au monde réel. L’autre, bien sûr, met en scène des orques. »











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