Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Grève générale européenne

Etat espagnol : Le 14 novembre nous montre la voie à suivre !

Le 14 novembre, il y aura une grève générale au Portugal et dans l’Etat espagnol. Dans de nombreux pays du sud de l’Europe, des millions de personnes vont se mobiliser contre les coupes salariales, sociales et dans les droits du travail, contre le démantèlement des services publics, les sauvetages bancaires avec l’argent public… Il s’agira de la plus importante action de masse menée jusqu’ici en rejet des politiques d’austérité et de socialisation des pertes bancaires mises en œuvre par l’Union européenne contre la classe travailleuse.

Le succès de cette journée de mobilisation est fondamental pour le maintien et la continuité des luttes contre l’austérité néolibérale à l’échelle européenne et pour empêcher que la sortie de crise élaborée par les élites capitalistes ni finisse par s’imposer.

L’Union européenne néolibérale est un puissant instrument aux mains du grand capital européen afin d’imposer des politiques économiques et sociales en faveur de ses intérêts : réduction généralisée des salaires au nom de la « compétitivité » ; liquidation des droits du travail pour faciliter les licenciements et la précarité ; démantèlement des services publics pour créer de nouvelles « niches » de profit pour le capital ; conversion de la dette des banques en dette publique au détriment des dépenses sociales ; retour des femmes au foyer et aux tâches domestiques ; réduction des droits démocratiques et augmentation de la répression policière…

Les effets de ces politiques sur les pays du sud de l’Europe sont dévastateurs et produisent une destruction du tissu industriel et commercial, un appauvrissement sans cesse plus aigu de la classe travailleuse et l’augmentation du malaise social et du rejet de l’austérité. Le joug de la dette et la priorité donnée au remboursement de ses intérêts au détriment de la satisfaction des besoins sociaux élémentaires s’est transformé en une chape de plomb qui écrase les conditions de vie des générations présentes et à venir. Dans les pays du nord de l’Europe, par contre, de larges secteurs de la classe travailleuse et du mouvement syndical sont influencés par la version néolibérale sur l’origine de la crise de la dette, selon laquelle la faute repose sur les sociétés du sud, gaspilleuses et peu productives.

Briser le discours et la politique néolibérale de l’UE nécessite d’unifier les objectifs et l’action de l’ensemble de la classe travailleuse du continent – et en premier lieu de celle des pays du sud de l’Europe – en mettant en avant un programme commun contre les politiques d’austérité et en lui donnant un prolongement dans une mobilisation à l’échelle européenne.

Cela exige de rejeter le Traité fiscal et les recapitalisations bancaires avec des fonds publics ; d’exiger un audit citoyen sur la dette et de refuser de payer ce qui est illégitime ; de renforcer la solidarité et les liens entre ceux qui luttent aujourd’hui en première ligne contre l’austérité : Grèce, Portugal, Etat espagnol. Cela exige, en résumé, de remettre ouvertement en question le modèle actuel de l’UE.

Il est évident que tels ne sont pas les objectifs pour lesquels on a appelé à une journée d’action le 14 novembre et c’est sur ce terrain, celui des alternatives aux politiques d’austérité, que s’exprime les plus grandes faiblesses de cet l’appel. Malgré tout, le 14 novembre montre la voie à suivre : la coordination des luttes, des expériences et des alternatives à l’échelle européenne. Cette date représente également la réponse nécessaire à l’adaptation de certains secteurs syndicaux au discours néolibéral : elle leur montre également le chemin qu’ils devraient suivre. C’est pour cela que le 14 novembre comptera avec tout notre soutien.

Dans l’Etat espagnol, cet appel à la grève est particulièrement nécessaire, non seulement face aux hésitations des directions syndicales CCOO et UGT sur la manière de continuer la mobilisation après la manifestation du 15 septembre, mais aussi parce que le gouvernement, après la pause provoquée par les élections régionales, s’empresse de mettre en marche une nouvelle phase d’austérité (pause relative, puisque Gallardon n’a pas perdu son temps en lançant une réforme du Code Pénal pour criminaliser la désobéissance civile, augmenter les amendes judiciaires, ainsi que la réforme annoncée du droit à l’avortement).

Dans l’immédiat, la demande d’un sauvetage, que le gouvernement prétend écarter, est pourtant inévitable. Même s’il a lieu par petits morceaux, ses effets sur une économie en récession seront à coup sûr désastreux : augmentation de la dette publique, coupes brutales des dépenses de l’Etat, fermeture d’entreprises publiques, licenciements massifs dans le secteur public et réduction de la masse salariale dans les administrations publiques. Un champ de ruine sociale.

Face à ce scénario, le 14 novembre doit marquer la fin d’une étape et le commencement d’une autre. Il faut tourner la page des mobilisations ponctuelles et dispersées dans le temps, des discours timides qui appellent le gouvernement à rectifier le tir et des illusions par rapport à la concertation sociale et aux négociations - qui ne reviendront de toute façon plus et qui, en outre, ont démontré depuis des années leur inutilité pour conquérir de nouveaux droits.

Le 14 novembre doit être le début d’un nouveau cycle de mobilisations planifiées et organisées, capables d’exercer une pression insupportable sur le gouvernement afin de l’obliger à mettre fin à ses politiques. Nous devons commencer à construire par en bas un travail de front syndical, social et politique contre les coupes et l’austérité qui intègre également les revendications de mouvements comme le 15-M et le 25-S.

Dans ce sens, le syndicalisme en général, et en particulier les syndicats majoritaires, doivent reprendre les revendications fondamentales des mouvements sociaux : une nouvelle loi électorale proportionnelle et égalitaire, l’audit citoyen de la dette et le respect du droit à l’autodétermination des nations de l’Etat espagnol.

Les mouvements sociaux, la gauche anticapitaliste et le syndicalisme alternatif doivent pousser ensemble pour faire en sorte que le 14 novembre aille plus loin que ce que veulent les directions des syndicats CCOO et UGT, afin que cette date constitue réellement un tournant. Dans ce sens, nous saluons particulièrement la décision du syndicat UGT de participer à la grève du 14 novembre, avec son propre appel et en reportant la grève qu’elle avait préparée pour le 31 octobre. L’unité dans la lutte est également fondamentale aujourd’hui.

La tâche immédiate est de construire cette grève générale par en bas : en créant des espaces unitaires dans les entreprises, les quartiers, les écoles et universités pour la populariser ; pour en faire un succès ; pour que le 14 novembre soit une immense clameur contre les coupes l’austérité et le gouvernement, et pour que la capacité de réaction face aux agressions puisse se maintenir et se développer. Le 14 novembre doit être une journée de mobilisation générale dans laquelle les sans emploi, les précaires, les pensionnés, les immigrés et les femmes aux foyer jouent un rôle actif et aient une visibilité significative.

Ces espaces unitaires doivent non seulement servir d’instruments de construction de la grève, où l’on renforce les liens entre ceux qui prêts à résister, mais également pour revendiquer qu’ils jouent un rôle de décision, qu’ils décident réellement de la « gestion » de la grève générale, qu’ils décident de comment et sous quelle forme poursuivre la mobilisation, de quelles alternatives mettre en avant face à l’austérité, etc.

C’est à cette tâche que les militant-e-s d’IA vont consacrer toutes leurs énergies.
24 octobre 2012


Izquierda Anticapitalista, organisation anticapitaliste dans l’Etat espagnol. www.anticapitalistas.org
Traduction française pour Avanti.be : Ataulfo Riera

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