Édition du 30 avril 2024

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États-Unis

États-Unis : la grève de l’automobile s’étend à la plus grande usine du géant français Stellantis

Depuis la mi-septembre, une vague de grèves déferle sur « les trois géants » de l’automobile aux États-Unis. Ce mardi, la mobilisation s’étend encore avec « la plus grande et la plus lucrative usine » Stellantis des Etats-Unis qui a été appelé à rejoindre le mouvement.

Tiré de Révolution permanente
24 octobre 2023

Par Julian Vadis

Crédit Photo : Left Voice

Et ça continue, encore et encore ! Ce 24 octobre, les 6 800 salariés de l’usine d’assemblage de Stellantis à Sterling Height, au nord de Détroit dans le Michigan, ont été appelé à rejoindre le vaste mouvement de grève qui touche les « big three » de l’automobile étatsunienne depuis la mi-septembre. « Des milliers d’ouvriers sont sortis et ont rejoint les piquets de grève. Ils ont arrêté de faire fonctionner la plus grande source d’argent de Stellantis » a ainsi indiqué l’UAW. Une entrée en mouvement loin d’être anecdotique puisque cette usine de Stellantis est qualifié comme étant « la plus grande et la plus lucrative  » du groupe aux États-Unis par le syndicat UAW.

Alors que, début octobre, les directions de Ford et de Général Motors avaient tenté de briser le mouvement de grève en licenciant 500 travailleuses et travailleurs, l’entrée en lutte des ouvriers michiganais de Stellantis est la meilleure des réponses face à la politique répressive des géants de l’automobile américaine et pourrait marquer un tournant dans l’automne du mécontentement qui touche les États-Unis.

Des revendications offensives qui montrent la voie à suivre

Ces milliers de travailleurs de Stellantis ont ainsi rejoint les quelque 25.000 ouvriers de l’automobile en lutte depuis la mi-septembre, ce qui augmente de manière significative le rapport de force en faveur des grévistes. Un mouvement qui s’articule autour de revendications offensives : pour des augmentations de salaires de 45 % sur quatre ans, pour la semaine de 32 heures et contre la division des travailleurs de statuts différents, entre autres.

Loin d’apparaître hors-sol, ces revendications offensives répondent aux aspirations des travailleurs et leurs donnent la volonté de se mobiliser malgré l’inflation et la répression des directions des « big three ». Surtout, la lutte actuelle des travailleurs de l’automobile brise deux idées reçues : d’abord, celle de porter seulement des « revendications réalistes », c’est-à-dire des revendications qui apparaîtrait « acceptable » par le patronat, comme seule possibilité d’obtenir une victoire. Ensuite, la deuxième idée reçue consiste à dire que les salaires devraient se négocier « boite par boite », ce qui est une source de désunion des différents secteurs de travailleurs et donc affaiblit le rapport de force en faveur des patrons.

Comme l’explique Vincent Duse, militant de la CGT Stellantis à Mulhouse dans un billet publié le 25 septembre dernier sur Révolution Permanente « les métallurgistes américains montrent l’alternative : l’unité, dans un seul et même mouvement de grève, de tous les salariés d’une branche pour les mêmes revendications. Un exemple et un rappel qu’il faut arrêter de lutter seulement dans le cadre des Négociations Annuelles Obligatoires (NAO). Imaginons, en France, une grève de l’ensemble du secteur automobile, qui intégrerait non seulement Renault et PSA-Stellantis, mais aussi toutes les usines des sous-traitants les plus importants : le rapport de force en serait démultiplié et la possibilité de gagner beaucoup plus importante, à condition de rester unis jusqu’à ce que les revendications soient acceptées dans toutes les entreprises, des donneurs d’ordre aux derniers sous-traitants » et d’ajouter qu’ « en revendiquant de vraies augmentations de salaire, de l’ordre de 45% en quatre ans, l’UAW permet aux salariés de s’engager dans la lutte avec un programme qui en vaille la peine, qui vaut les sacrifices que demande une grève. Il faut en finir avec les demi-revendications, les demandes de prime ridicules : demandons 400€ ou 500€, demandons 15% ou 20% d’augmentation, c’est ce que les salariés ont perdu ces dernières années ! Un tel programme pour unifier tous les secteurs de l’usine serait la base pour mener des grèves majoritaires offensives en France ».

Pour faire plier les « big three » et pour un mouvement d’ensemble, il faut que les grévistes tiennent les rênes de leurs grèves !

Le mouvement des travailleurs américains de l’automobile s’inscrit dans une vague de grèves plus large, touchant l’industrie du cinéma, l’aéronautique ou bien encore les salariés des casinos de Las Vegas ces dernières semaines. De par leur ampleur et leur radicalité, ces différents mouvements témoignent d’un renouveau et du réveil de la classe ouvrière aux États-Unis.

Au vu de son ampleur, sa longévité et sa place centrale dans l’industrie américaine, le mouvement des salariés de l’automobile pourrait jouer un rôle moteur pour une généralisation de la grève dans un vaste mouvement d’ensemble pour les salaires aux États-Unis. Malgré tous ces aspects extrêmement positifs, la grève des ouvriers de l’automobile se heurtent encore à quelques limites, dont la plus importante réside dans la politique de dialogue social de la direction de l’UAW avec le patronat des « big three » et le gouvernement Biden. Une politique qui bride la généralisation de la grève et, surtout, qui est un frein à ce que le secteur mobilisé de l’automobile entraîne avec lui d’autres secteurs dans une bataille d’ensemble pour des augmentations générales de salaires face à l’inflation.

Pour dépasser ces limites, il faut que les piquets de grève deviennent des espaces démocratiques possibles, avec des assemblées générales décisionnaires faisant non-seulement le lien entre les différents sites mobilisés, mais qui se coordonnent avec l’ensemble des travailleuses et travailleurs mobilisés dans tout le pays. Si de tels organismes voient le jour, la force de frappe des grévistes s’en trouvera démultipliée et ouvrira la voie à une généralisation de la grève dans l’automobile, mais pourrait également entraîner derrière elle d’autres secteurs qui observent avec attention le mouvement en cours.

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