Édition du 30 avril 2024

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Assurance-chômage

Fruits de mer de l'Est - La CSN a déposé plus de 80 contestations auprès de l'assurance-emploi

RIMOUSKI, QC, le 18 avril 2013 - Un drame terrible s’est abattu sur quelque 120 familles de Matane. L’assurance-emploi a décidé il y a quelques mois qu’elle n’accepterait plus le régime de travail en vigueur dans l’usine Fruits de mer de l’Est depuis 1996. Cette pratique a pourtant permis tout ce temps de maintenir en emploi plus d’une soixantaine de travailleuses et de travailleurs qui n’auraient d’autre recours que des mesures de soutien du revenu. La CSN considère que cette décision, présentée comme une nouvelle interprétation de la loi est tout à fait néfaste au développement économique. Toutefois, il y a pire. En effet, l’assurance-emploi demande à plus de 80 de ces travailleuses et ces travailleurs de rembourser les prestations reçues au cours deux dernières années. Dans quelques cas, l’assurance-emploi leur réclame jusqu’à 14 000 dollars. La CSN conteste toutes ces réclamations et mènera la bataille devant les tribunaux contre cette réclamation abusive.

La ministre doit s’excuser

Hier, à la Chambre des communes, la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Diane Finley a prétendu qu’ « Il y a vraiment une enquête très sérieuse contenant un potentiel de fausses déclarations et des déclarations trompeuses. » La CSN déplore ce manque de rigueur flagrant de la ministre et lui demande de s’excuser auprès de ces honnêtes travailleuses et travailleurs. La centrale syndicale tient à souligner que toutes les enquêtes dans ce dossier sont complétées et qu’en aucun cas les conclusions ne soutiennent des prétentions de fraudes ou de déclarations trompeuses. L’assurance-emploi réclame des « trop-perçus ». Si faute il y a eu, elle incombe totalement à l’administration de l’assurance-emploi elle-même. En effet, celle-ci a visité l’usine de Matane à plusieurs reprises depuis 1996 et a accepté toutes les demandes de prestations présentées depuis ce temps. Ce n’est qu’en janvier dernier qu’une nouvelle enquête a subitement conclu que les salarié-es visés ne seraient plus admissibles à l’assurance-emploi. Rapidement, le syndicat et l’entreprise ont convenu de modifier les horaires de travail afin de rendre un peu plus de la moitié des postes permanents et acceptant, à contrecœur, que près de la moitié des employé-es perdent leur emploi dans le processus.

Pour le vice-président de la CSN, Jean Lacharité, le gouvernement conservateur est complètement déconnecté de la réalité. « La ministre Finley nous répète qu’elle vise deux objectifs : aligner les emplois disponibles avec les personnes sans emploi qui en recherchent et combattre le fraude. Mais dans ce cas-ci, c’est précisément le contraire qui arrive. En mettant fin à ce régime de travail qui permettait d’avoir plus de salarié-es à l’emploi, on pousse 50 personnes qui avaient un emploi vers le chômage à temps plein. Ensuite, la machine s’abat sur quelque 80 honnêtes travailleuses et travailleurs à qui l’on a absolument rien à reprocher, leur réclamant des milliers de dollars. Comment le gouvernement a-t-il pu nous imposer une telle réforme sans jamais se questionner sur les impacts qu’elle aura sur le terrain, sans jamais n’avoir tenu la moindre consultation. S’il avait pris la peine de s’informer correctement de la situation à Matane, comme ailleurs, peut-être que nous n’en serions pas là ».

Quotas

La présidente du Conseil central du Bas-Saint-Laurent (CCBSL-CSN), Nancy Legendre, assure à l’ensemble des travailleuses et les travailleurs le soutien inconditionnel de la CSN. Grâce aux représentations faites par les avocats de la CSN auprès de l’Agence de revenu du Canada qui agit à titre de collecteur celle-ci a accepté d’attendre que les plaintes soient entendues avant de se rembourser. Malgré cela, au moins une travailleuse a vu son dernier chèque amputé de moitié cette semaine, une erreur administrative révélatrice de l’inhumanité du système. « Ce genre de régime de travail é a longtemps été vu comme une solution créative pour mieux partager la richesse dans nos régions à haut taux de chômage. Nous continuons de croire que c’est une voie à privilégier dans certaines situations. Nous décodons de tout ça que les agents de l’assurance-emploi subissent beaucoup de pression à l’interne pour diminuer au maximum les prestations versées par l’assurance-emploi. Cela les amène à inventer de nouvelles interprétations de la loi qui vont en ce sens et ça nous donne des situations aussi ridicules que tristes, comme celle que nous vivions ici à Matane, déplore la porte-parole de la CSN au Bas-Saint-Laurent. Cette politique des quotas est toxique, il faut y mettre fin immédiatement. »

Dur coup pour Matane

Pour Nancy Legendre, cette décision de l’assurance-emploi aura des impacts négatifs importants pour une ville comme Matane. « Le résultat, ce sont des pertes d’emplois alors qu’il n’y en a pas beaucoup de disponibles et l’appauvrissement en général de la population. Il ne faut pas oublier que ces travailleuses et ces travailleurs étaient déjà touchés par les différents aspects de la réforme de l’assurance-emploi imposée par les conservateurs. »

Travail partagé

Enfin, Jean Lacharité entend demander formellement à la ministre Finley de préciser les intentions de son gouvernement à l’égard de ce type d’organisations du travail mises en place pour contrer le problème chômage . « Il y en a beaucoup plus qu’on peut le penser, dans plusieurs régions et dans plusieurs secteurs d’activités. Il nous semble que les travailleuses et les travailleurs ont le droit de savoir dès maintenant à quoi s’en tenir. Souvent, ces régimes ont été le fruit de compromis où des employés permanents acceptent de partager leur temps de travail avec d’autres afin de soutenir solidairement le développement local et régional, de partager la richesse. Il appartient au gouvernement de clarifier la situation car au-delà de la rhétorique, il nous apparaît inconcevable et irrationnel que le gouvernement du Canada ait comme politique délibérée de tuer les initiatives locales visant à sortir les sans-emploi de l’exclusion et de la pauvreté. »

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