Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

La guerre en Ukraine - Les enjeux

Guerre en Ukraine : de l’arme du droit au droit aux armes

Ce texte est né d’un constat amer : plus d’un an après l’agression russe en Ukraine, la guerre menée par le régime de Poutine est encore analysée par certains non comme une guerre néo-impérialiste à tonalité génocidaire mais comme l’expression d’un conflit territorial dans lequel chaque protagoniste aurait sa part de responsabilité. Une telle grille de lecture ouvre logiquement sur l’exigence de négociation immédiate ayant pour objectif le retour à la paix.

Tiré de Entre les lignes et les mots
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/07/18/guerre-en-ukraine-de-larme-du-droit-au-droit-aux-armes/

Dans cette perspective, les exigences du droit international sont minorées ou renvoyées à des échéances plus lointaines comme le suggère une tribune récente impulsée par 300 chercheurs sous l’égide d’Edgar Morin, Xavier Emmanuelli et Rony Brauman [1] : la justice internationale interviendra « le moment venu ». Façon élégante de noter que… le moment n’est pas venu. On ne peut que s’incliner derrière la logique à l’œuvre derrière cette affirmation ; difficile en effet d’imaginer Vladimir Poutine admettre, lors de négociations de paix, la nécessité d’accélérer les enquêtes judiciaires contre les crimes de guerre commis en Ukraine par sa propre armée ou de collaborer avec la cour pénale internationale dans le cadre du mandat d’arrêt qui vient d’être émis à son encontre. La justice internationale est alors perçue comme un frein au retour à la paix qui reste l’objectif prioritaire.

Cette analyse réunit aujourd’hui des familles de pensée hétéroclites voire antagonistes : émanant de l’extrême droite ou d’une partie de la droite, ce discours est relativement cohérent avec la longue complaisance voire la fascination éprouvée par ces dirigeants vis-à-vis d’un régime autoritaire qui se présente comme le défenseur des valeurs traditionnelles. Il inquiète davantage venant de certains cercles de gauche [2] qu’on imaginerait plus enclins à manifester devant les ambassades russes pour demander le retrait de leurs troupes d’Ukraine comme l’avaient fait leurs prédécesseurs contre les USA dans la guerre au Vietnam.

Bien que ces courants s’appuient sur des soubassements idéologiques très différents : pacifistes convaincus, adeptes de la realpolitik, admirateurs des pouvoirs autoritaires ou contempteurs de l’empire américain, tous se rejoignent sur l’objectif à atteindre : un cessez- le feu immédiat suivi de négociations pour la paix.

Ces courants ne sont pas marginaux et mobilisent des pans entiers de l’opinion publique en Europe de l’Ouest. Jusqu’à quel point les gouvernements occidentaux resteront insensibles à cette pression et maintiendront leur volonté d’aider la résistance ukrainienne ? Dès lors, il importe de montrer pourquoi, face à une guerre qui bafoue les règles internationales, l’arme du droit doit nécessairement être assortie de l’obligation d’aider l’Ukraine par un envoi massif d’armes, de nature à inverser le rapport de forces ; l’objectif étant d’obtenir un retrait total des troupes russes d’Ukraine, et ce, avant toute négociation sur les conditions d’une paix durable.

Une opération très spéciale

Vladimir Poutine a commencé par inscrire l’agression de l’Ukraine dans le cadre d’une opération spéciale qui se présentait comme ayant pour but de mettre fin à un génocide qui serait exercé sur la minorité russe du Donbass par l’armée ukrainienne. Il convoque ainsi le droit international qui permet, dans certaines conditions, d’intervenir militairement pour protéger une population d’un génocide. Faudrait-il encore que ce génocide soit attesté ce qui, à l’évidence, n’est pas le cas dans le Donbass. L’existence réelle d’une guerre depuis 2014 dans cette région n’est pas contestée mais nulle preuve de génocide n’a été apportée et la seule mesure discriminatoire que l’on pourrait attribuer aux autorités ukrainiennes est la relégation de la langue russe en langue de minorité nationale. En revanche, les preuves de l’appui militaire et financier du gouvernement russe aux séparatistes du Donbass via des livraisons d’armes et de blindés mais également par l’envoi de soldats et de mercenaires russes sont, elles, avérées. Elles rendent inaudibles les arguties juridiques de Poutine en faveur d’une opération de prévention d’un génocide.

Un passé mythifié

De même, les accusations qualifiant le gouvernement ukrainien de nazi ne peuvent parvenir à convaincre en dehors d’une partie de l’opinion publique russe formatée aux discours extrémistes des média. Il n’est pas anodin que l’invasion ait été précédée de la dissolution de l’association Mémorial qui tentait de faire la lumière sur les crimes de l’époque soviétique mais également sur des exactions plus récentes commises par le régime de Poutine, notamment en Tchétchénie. La lecture révisionniste de l’histoire par les media et les institutions russes vise à faire apparaître cette opération spéciale comme la continuation de la grande guerre patriotique qui ferait de la Russie l’unique vainqueur du nazisme ; effaçant les ombres au tableau comme la signature du pacte germano soviétique qui n’était pas seulement un pacte de non-agression mais un partage d’états et territoires comme la Pologne, la Finlande ou les états baltes entre l’Allemagne et l’Union soviétique [3]. De même, l’accent mis sur le sacrifice du peuple russe vise à faire oublier que c’est le peuple soviétique composé de ses multiples nationalités qui a payé un lourd tribut dans son combat contre l’agresseur nazi et que les ukrainiens pour la majorité d’entre eux (7 millions d’hommes) ont combattu dans l’Armée rouge, seuls 250 000 d’entre eux ayant collaboré avec les nazis.

Aujourd’hui, il est difficile de soutenir que le régime ukrainien aurait la moindre filiation avec le régime nazi même si une loi mémorielle contestée a inclus la figure de Bandera [4] parmi les héros du nationalisme ukrainien jusqu’à baptiser de son nom une avenue de Kiev ; au vu des résultats des élections en Ukraine, la présence de l’extrême droite en Ukraine est marginale. Le bataillon Azov dont le noyau historique était néo-nazi a été réintégré dans l’armée régulière. Il importe néanmoins de demeurer vigilants sur de possibles résurgences de la mouvance hyper nationaliste qui pourraient découler de l’exacerbation de la guerre.

L’agression du 24 février 2022, manifestement illégale, apparaît donc bien comme une tentative de s’inscrire dans une histoire falsifiée [5] dans laquelle l’Ukraine n’existerait que comme un petit frère [6] dont on se plaît à rappeler le statut inférieur.

Réécrire le présent

C’est à partir de cette vision fantasmatique de l’histoire que Poutine entreprend de réécrire le présent en s’aveuglant sur la réalité contemporaine d’une Ukraine : un état indépendant dont les frontières sont reconnues par le droit international depuis 1991 et ayant fait le choix en 2014 d’emprunter la voie démocratique.

L’Ukraine avait connu une brève période d’autonomie au 17ème siècle avec la création d’un état cosaque sous le contrôle d’un état polono-lithuanien ancrant l’Ukraine en Europe avant son annexion par l’empire russe au 18ème siècle. La référence européenne permit néanmoins aux ukrainiens de résister aux tsars qui s’employaient à détruire systématiquement toute forme d’identité culturelle à travers des mesures coercitives contre l’enseignement et la langue. La période soviétique, tout en proclamant la république populaire d’Ukraine, imposera un modèle de fraternité dans lequel l’Ukraine était décrite à travers des stéréotypes coloniaux.

La dislocation de l’Union soviétique ouvre une nouvelle ère pour l’Ukraine devenue un état indépendant reconnu par la communauté internationale, Russie comprise ; mais c’est sa marche vers la démocratie qui va constituer un défi inacceptable pour Vladimir Poutine : on peut faire la supposition raisonnable que si l’Ukraine avait fait le choix de rester sous l’influence de Moscou, à l’image de la Biélorussie, la Russie n’aurait pas déclenché l’agression de 2022. Cette marche vers la démocratie est le fruit d’un processus amorcé en 2004 lors de la révolution orange, marqué par la première grande loi mémorielle en 2006 faisant de l’Holodomor [7] un génocide et criminalisant sa contestation ; il est consolidé en 2014 par la révolution de Maidan, dite révolution de la dignité ; l’Ukraine se détache du grand frère russe et se rapproche de l’union européenne en adoptant peu à peu des normes d’un état de droit et en initiant le combat contre la corruption et les oligarques.

C’est bien cette révolution démocratique qui constitue un point de non-retour pour Moscou qui réagit en 2014 par l’annexion de la Crimée et l’occupation illégale du Donbass. Ces passages en force n’ont pas les effets escomptés : l’Ukraine renforce ses lois mémorielles en 2015, lois dites de dé-soviétisation libérant l’accès aux archives de police entre 1917 et 1991 ou réprimant l’exhibition de symboles nazis et communistes. Elle montre également sa volonté de se rapprocher de l’Union européenne par un accord d’association en mars 2014. Dans le même temps, la population ukrainienne développe des capacités inédites de résistance militaire et civile. C’est dans ce contexte que Poutine décide de l’invasion de l’Ukraine.

Plus d’un an après, un constat s’impose : jamais, depuis les guerres en ex-Yougoslavie, l’Europe n’avait connu un tel cortège d’attaques massives contre des populations civiles, visant des établissements de santé, d’enseignement, de quartiers d’habitation, en recourant à la torture, aux viols et aux déportations d’enfants sans omettre l’utilisation d’armes à sous munitions et la prise de contrôle de la plus grande centrale nucléaire en Europe, Zaporijia, située au sud de l’Ukraine. L’ampleur inédite de ces exactions [8] pose la question de savoir comment la justice va s’emparer de ces faits pour les instruire avant de les juger.

Juger la guerre… en temps de guerre

La première ligne de ce front judiciaire se joue sur le territoire ukrainien devenu une véritable scène de crime à ciel ouvert. Dès l’invasion russe et plus encore après le massacre de Boutcha fin mars 2022, la justice ukrainienne dépêche sur les lieux des exactions des équipes d’enquêteurs et d’experts pour recueillir les preuves matérielles, entendre les témoins et survivants, réaliser les actes médico-légaux et examens balistiques. Ces enquêtes en temps réel qui s’accomplissent dans des zones minées et parfois voisines de zones occupées par l’occupant débouchent sur les premiers procès de soldats russes ; procès qui ne répondent pas toujours aux critères habituels d’un état de droit, les droits de la défense étant parfois sacrifiés au nom des nécessités inhérentes à l’état de guerre. On peut également y ajouter la difficulté de remonter la chaîne de commandement avec le risque de ne condamner que les exécutants. Se pose enfin la nécessaire question de l’impartialité d’une justice qui se rend en temps réel sous l’emprise de l’émotion causée par des massacres toujours en cours [9].

C’est la raison pour laquelle le rôle de la justice internationale est crucial car il permet non seulement de dégager des moyens plus ambitieux pour mener les investigations mais il offre surtout la possibilité d’une justice plus indépendante, impartiale et respectueuse des canons admis du procès équitable.

L’engagement de poursuites pour crimes de guerre par le procureur de la cour pénale internationale et la délivrance récente d’un mandat d’arrêt visant notamment Vladimir Poutine pour les déportations d’enfants ukrainiens constitue la seconde phase du front judiciaire mais ouvre également une nouvelle page dans la longue marche contre l’impunité des chefs d’état. Ce modèle classique de l’immunité des gouvernants reposait sur la conception ancienne de la souveraineté ; le souverain définissant le crime ne pouvait être considéré comme criminel, telle était la conception qui prévalut jusqu’au début du 20ème siècle. C’est l’ampleur de la « boucherie » de 1914 et plus encore le génocide de la seconde guerre mondiale qui va constituer le tournant décisif : désormais, comme le souligne Antoine Garapon, « le référent ultime des droits n’est plus la personne du souverain en majesté du 19ème siècle mais la souffrance des victimes de crimes de masse du 20ème siècle » [10], siècle des génocides.

« Une conception universelle du mal »

La création de la cour pénale internationale, reconnue aujourd’hui par 123 états puise ses références dans le précédent Nuremberg ; elle en est une incarnation plus aboutie car plus impartiale et dotée d’un règlement de preuves et de procédure plus élaboré. C’est la consécration d’une cour fondée sur des interdits universels et, selon les termes de Mireille Delmas Marty, sur « une conception commune du mal » [11]. Cette « utopie universaliste du droit » pour reprendre l’expression de Joël Hubrecht [12] se heurte rapidement aux réalités politiques : le bilan des condamnations est jugé insuffisant et on pointe régulièrement le soupçon d’une justice à deux vitesses, plus encline à poursuivre les chefs d’état africains – certains osent évoquer une forme de racisme [13] – que les gouvernements occidentaux lors des opérations en Afghanistan ou en Irak pour ne rien dire de l’occupation israélienne dans les territoires occupés. On doit prendre en compte certains de ces reproches et il appartient à la cour pénale internationale de démontrer une plus grande indépendance à l’égard des puissances de ce monde. Il reste que le principal obstacle est l’absence d’une force de police internationale qui permettrait de faire exécuter ses décisions lorsqu’ un état est récalcitrant.

Il reste que malgré ces imperfections, la CPI démontre aujourd’hui qu’elle peut viser le chef d’un état membre du conseil de sécurité et immense puissance nucléaire, faisant de Vladimir Poutine un véritable paria pour une partie non négligeable de la communauté internationale ; c’est pourquoi on doit prendre en compte cette avancée inédite qui a surpris bon nombre de juristes et n’a pas manqué de susciter la riposte de la Russie inscrivant le Procureur de la Cour pénale internationale et l’ un des juges de cette cour sur la liste des personnes recherchées ce qui constitue un acte d’intimidation particulièrement grave. Il convient de s’interroger aussi sur une autre limite qui empêche la cour pénale internationale de poursuivre la Russie pour le crime d’agression en Ukraine, ce crime premier qui permet tous les autres. Le crime d’agression s’inscrit dans la filiation juridique du crime contre la paix imaginé, ironie de l’histoire, par un juriste soviétique [14] en 1945 dans le cadre des procès Nuremberg.

Jus ad bellum

L’Ukraine, rejointe par certains juristes comme Philippe Sands [15], plaide pour la création d’un tribunal spécial international habilité à juger l’invasion russe. Cette proposition est approuvée par le Conseil de l’Europe le 9 décembre 2022 et par la commission européenne le 30 novembre 2022 ; ses modalités sont encore débattues et les juristes se divisent sur l’opportunité de créer une nouvelle juridiction ; l’avantage évident serait de parvenir rapidement à l’étape du jugement, les déclarations de Poutine précédant l’invasion suffisant à caractériser son rôle dans le déclenchement de l’agression ; l’autre intérêt serait de pouvoir juger Poutine par contumace ce que ne peut pas faire la CPI. Pour le reste, on peut se demander si cette juridiction doit être créée par résolution d’une majorité d’états de l’ONU ou si elle devrait être une initiative du Conseil de l’Europe, option la plus « signifiante » pour Antoine Garapon et Bruno Cathala car « l’Europe d’après 1945 s’est définie par la prééminence du droit » [16]. On peut ajouter à cet argument crucial l’idée selon laquelle l’Europe est particulièrement concernée par cette agression, ayant été la cible d’une guerre hybride menée par Poutine bien avant 2022, comme le documente Raphael Glucksmann [17].

Enfin, le risque de délégitimer le rôle de la CPI par la création d’un tribunal spécial chargé de juger l’agression ne parait pas convaincant, chaque juridiction ayant son périmètre d’action bien délimité.

A ces propositions s’ajoute enfin la question des réparations et d’un mécanisme permettant le gel puis la confiscation des biens et avoirs des banques et oligarques russes afin de permettre un processus de reconstruction de l’Ukraine. D’autres initiatives judiciaires sont à saluer tant du côté de juridictions nationales faisant jouer le mécanisme de la compétence universelle que du coté du parquet parisien spécialisé en matière de crimes de guerre ou encore l’accord entre la CPI et Eurojust pour faciliter la collecte de preuves [18]. Enfin on prévoit de confier au parquet européen la compétence en matière de violation des sanctions économiques et financières contre la Russie.

L’ensemble de ces actions montre que le constat exprimé par Cicéron « le droit se tait lorsque les armes parlent » [19] n’a plus cours et que le droit entend désormais devenir une force de régulation des relations internationales ; s’il n’ambitionne plus de mettre la guerre hors la loi comme en avaient rêvé les signataires du pacte Briand-Kellog en 1928, il vise au moins à définir à quelles conditions une agression peut être considérée comme illégitime et à mettre en œuvre des mécanismes empruntant à la justice pénale pour juger les auteurs des crimes qui découlent de l’agression. La force symbolique de la justice internationale ne doit pas être négligée même lorsque ses décisions peinent à s’appliquer d’autant qu’elle a aussi une fonction régulatrice nécessaire dans une perspective de réconciliation des belligérants. Avant de tourner la page sur les atrocités commises, les victimes et les survivants ont besoin que cette page soit écrite et la justice leur donne cet espace ; c’est enfin un moyen d’opposer un autre narratif à la propagande de l’agresseur, et ce, dans une enceinte permettant un débat contradictoire.

Il reste cependant à s’interroger sur la portée de la justice dans l’hypothèse où la Russie emporterait une victoire décisive et annexerait tout ou partie de l’Ukraine. Comment imaginer la possibilité pour une partie des enquêtes et procès en cours de se maintenir en sauvegardant l’ensemble des preuves déjà recueillies dans des territoires reconquis par la Russie ? On voit bien l’impossibilité de dissocier l’arme du droit du droit aux armes, seul moyen pour le pays agressé d’inverser le rapport de forces. Ce constat est contesté par des courants idéologiques différents allant du pacifisme intégral à des formes de pensées conservatrices, parfois cyniques et sensibles d’abord aux rapports de forces entre nations et empires. Certains d’entre eux voient d’ailleurs en la justice internationale une dangereuse tentative de criminaliser l’ennemi, empêchant tout retour à la paix, objectif que permettrait l’oubli des crimes.

La paix à tout prix ?

Au préalable, reconnaissons que l’ensemble des forces politiques et experts militaires ont été surpris de l’invasion du 24 février ; « le risque oublié de la guerre » pour reprendre les termes de l’historien Stéphane Audouin-Rouzeau [20] en Europe, malgré le précédent en ex-Yougoslavie, explique en partie la difficulté à penser un évènement inédit. Pour le camp pacifiste, hostile à l’envoi d’armes en Ukraine, rien ne peut justifier qu’on ajoute ainsi la guerre à la guerre ; étant le mal absolu, même une guerre défensive ne trouve grâce à ses yeux ; ce courant pacifiste intégral se déploie particulièrement en Italie, encouragé par les déclarations successives du pape François.

Ce débat a déjà eu lieu dans les années 1930 au sein même du milieu pacifiste ; face à la montée du nazisme , une partie des pacifistes comprit, parfois tardivement, que le slogan « la paix à tout prix » était une impasse : ainsi Albert Einstein admettait : « je suis opposé à l’usage de la force en toutes circonstances sauf face à un ennemi qui poursuit la destruction de la vie comme une fin en soi » [21] ; l’écrivain pacifiste Romain Rolland se résolut à la guerre en 1940 écrivant que « les pacifistes intégraux sont devenus des collaborationnistes » ; concilier les exigences de la paix avec la nécessité de lutter contre le fascisme était impossible et chacun dut choisir son camp. Ce que firent récemment certains pacifistes et syndicalistes italiens dans le port de Gênes en s’opposant à l’acheminement de matériel militaire à destination de la résistance ukrainienne [22]. Dans ce contexte, le slogan « la paix à tout prix » apparaît bien comme une prime à l’agresseur et un renoncement à toute revendication du droit contre la force du plus fort, car parler d’un « droit du plus fort », c’est tomber dans « un galimatias inexplicable », comme le dit Rousseau dans « le contrat social » (1 ch 3).

La guerre par procuration : un concept dévoyé

Les arguments pacifistes peinant à convaincre, c’est sur la nature de la guerre que le débat va s’engager car il s’agit aussi pour les adversaires de l’aide militaire à l’Ukraine de démontrer que cette guerre n’est pas celle que l’on-nous-vend-dans-les-media-mainstream. Intervient alors la classique inversion de culpabilité comme dans les procès pour viols où la défense tente de persuader le juge que la victime n’est pas si innocente et qu’elle a même provoqué son malheur ; en l’espèce, l’Ukraine est accusée de s’être rapprochée dangereusement de l’Occident dont l’Otan ne serait que le bras armé. Surgit alors le concept de guerre par procuration – pertinent pour d’autres conflits dans le monde – qui ferait de l’Ukraine la simple victime collatérale, mais pas tout à fait innocente, du véritable conflit opposant les USA à la Russie. Dans ce schéma, le véritable agresseur devient les Etats-Unis, acculant Poutine à déclencher une opération défensive ; dans une version plus soft, Poutine reste l’agresseur principal mais on va chercher dans l’histoire des dernières décennies qui ont suivi le démantèlement de l’Urss des motifs d’humiliation infligée à la Russie.

Dans cette reconstruction qui fait de l’anti-américanisme la seule grille idéologique, l’Ukraine n’est plus qu’un jouet aux mains des grandes puissances, Volodymyr Zelensky, une simple marionnette manipulée par Joe Biden, montrant ainsi le peu de considération pour la volonté de résistance du peuple ukrainien ; au fond, c’est une façon de prolonger la négation de l’Ukraine, y compris lorsque sa population prend les armes pour se défendre. De la même façon, dans la propagande soviétique les révoltes hongroises et tchèques avaient été considérées comme une opération de déstabilisation conduite par les USA.

Le problème de ce récit qui prétend embrasser la complexité du monde est qu’il ne repose pas sur des faits avérés : on sait aujourd’hui que les États-Unis, soucieux des tensions et menaces dans le Pacifique, auraient lâché l’Ukraine en offrant seulement d’exfiltrer son président [23], si les ukrainiens n’avait pas montré dès le premier jour des capacités de résistance inattendues ; on sait également qu’une partie de l’électorat républicain juge sévèrement cette aide militaire que l’Ukraine n’est pas assurée de conserver en cas de victoire de Trump en 2024. Enfin, la thèse de l’encerclement de la Russie par des forces de l’Otan prêtes à en découdre est une fable : l’Otan n’a jamais manifesté de menaces à l’encontre de la Russie, cherchant même au début des années 2000 à l’intégrer et ses bases en Europe sont conçues dans une perspective purement défensive. Les États-Unis avaient même convaincu l’Ukraine en 1994 de renoncer aux 1800 ogives nucléaires stationnées sur son sol au profit de la Russie en échange de garanties sur le respect de sa souveraineté territoriale [24].

Sacrifier l’auto-détermination des peuples pour préserver les marches des empires ?
Ce que cette thèse complaisante à l’égard de Poutine laisse de côté, c’est la nature quasi-totalitaire de ce régime qui a besoin de la guerre pour mobiliser sa population contre un ennemi. Cette instrumentalisation du patriotisme contre l’Ukraine puis, au fil des déconvenues militaires sur le terrain, contre un Occident collectif jugé nazi et décadent, avait pour objectif d’affaiblir la contestation qui s’était exprimée en Russie fin 2011. Mais il s’agit également de consolider les marches de l’empire en faisant des pays limitrophes des zones tampons. Gardons à l’esprit qu’en russe, comme le souligne l’écrivain Erri De Luca, le mot sécurité est traduit littéralement par l’expression « sans risque » : « ce détail nous fait comprendre l’antique obsession russe pour des états tampons à ses frontières » [25]. D’ailleurs, comme le rappelle souvent le géographe Michel Foucher [26], le problème des empires est qu’ils ne savent pas bien où sont leurs frontières. Admettre la nécessité d’états à souveraineté limitée pour complaire à un régime devenu totalitaire n’est-il pas une renonciation au principe d’autodétermination des peuples ?

Qu’une partie de la gauche européenne sacrifie ce principe fondateur interroge : serait-elle encore prisonnière d’une vision magnifiée du passé soviétique en cultivant une certaine nostalgie à l’égard d’un régime qui proclamait en théorie la supériorité du socialisme sur le monde capitaliste ? Le retour en grâce de Staline (et non de Lénine faut-il le préciser ?) dans les célébrations actuelles en Russie fait-il illusion comme si Poutine s’inscrivait dans la tradition révolutionnaire ? Cet aveuglement sur la réalité de ce que fut le régime soviétique pourrait expliquer en partie la cécité dont une certaine gauche fait preuve aujourd’hui à l’égard de Poutine. En partie seulement, car il faut y ajouter une tendance à relativiser les différences entre démocraties et dictatures et à dénoncer le « deux poids deux mesures » dans la condamnation des agressions injustes : mais dénoncer les graves manquements de nos démocraties, et par exemple condamner l’invasion en Irak doit-il entraîner la moindre indulgence à l’égard des dictatures comme la Russie ou la Chine ? Une partie de la gauche a opté pour la théorie de l’équidistance : Ni avec l’Otan, ni avec Poutine », slogan remarqué lors des manifestations pacifistes notamment en Italie, oubliant la leçon de Georges Orwell qui, comme le rappelle Edwy Plenel : « Bataillant en 1941 (…) contre les intellectuels de gauche qui renâclaient à s’aligner derrière leur gouvernement dans le combat contre le nazisme, Georges Orwell leur concédait volontiers toutes les tares du régime britannique qui était encore un empire. (…) Mais c’était pour mieux asséner, comme une tranquille évidence, que si un crime reste un crime, qu’il ait été commis par une démocratie ou une dictature, il n’y a pas pour autant d’équivalence entre les deux régimes, l’un permettant de le contester quand l’autre l’interdit » [27].

Proximités dangereuses

Une partie de la droite et de l’extrême droite a éprouvé, elle, une véritable fascination pour le régime de Poutine incarnant à ses yeux la défense des valeurs chrétiennes oubliées de l’Occident, la préservation de la famille traditionnelle contre le féminisme, le wokisme ou la propagande LGBTI. On voit même, sur les réseaux sociaux, des mouvements contre la pédophilie faire de Poutine la figure de proue de leur combat.

On assiste également à la convergence de mouvements de l’extrême droite européenne dans un sommet à Vienne le 31 mai 2014 écouter religieusement le théoricien Alexandre Douguine vanter la révolution conservatrice reprenant, comme l’explique Raphael Glucksmann, la théorie du juriste nazi Carl Schmidt d’un « affrontement permanent et structurel entre les puissances terriennes qu’il nomme Rome éternelle et les puissances maritimes qu’il nomme Carthage éternelle ; les premières sont ancrées et autoritaires. Les secondes hors-sol et libérales. L’union européenne est l’héritière de Carthage et Moscou prend les traits d’une nouvelle Rome. Entre les deux, aucune cohabitation possible » [28]. Carthage devra-t-elle être détruite ?

Cette proximité idéologique s’accommode de services rendus sous la forme de prêts bancaires ou de financements d’opération de propagande contre l’avortement. Cette complaisance intéressée n’est pas le seul fait de l’extrême droite. La commission spéciale sur les ingérences étrangères dirigée par l’eurodéputé Raphael Glucksmann documente l’ensemble des incursions russes dans les processus démocratiques tant aux USA qu’en Europe à travers les fermes à trolls russes de Prigogine ou des media comme Russia Today et Spoutnik [29]. Mais cette percée qui vise à créer le chaos [30] aurait dû amener nos gouvernements à plus de vigilance. C’était sans compter avec notre dépendance au gaz russe [31] que les dirigeants européens, notamment en Allemagne mais également en Italie comme le dénonce le président du parti radical Igor Boni, ont entretenue voire renforcée ; moyennant une participation dans les conseils d’administration des monopoles russes comme l’illustre le cas de Gerhard Schroeder, François Fillon et quelques autres.

On voit que les fautes de l’Occident ne sont pas celles pointées par les pacifistes ou adeptes de la realpolitik : après avoir permis aux oligarques russes de blanchir leurs fonds en Europe, fermé les yeux sur les exactions du régime en Tchétchénie, en Syrie ou en Géorgie, trop timidement condamné l’annexion de la Crimée, l’Europe a laissé prospérer les réseaux d’influence russes, cru que les bonnes relations commerciales avec la Russie finiraient par produire des effets démocratiques sur ce régime. Ce fut évidemment le contraire qui s’est passé, nos brillants stratèges ont dû réviser leurs copies mais l’Ukraine paie aujourd’hui le prix sanglant de notre aveuglement.

L’hypothèse nucléaire

Il reste alors le dernier argument pour nous convaincre de la nécessité de passer immédiatement à la table des négociations, quitte à céder les territoires déjà occupés par la Russie soit environ 20% de l’Ukraine ; c’est le scénario d’une troisième guerre mondiale nucléaire, au moins par l’usage d’armes tactiques. C’est d’ailleurs bien le sens des discours de Poutine : une fois épuisés les arguments proprement idéologiques pour justifier la guerre, il subsiste l’argument d’autorité, la menace nucléaire. La Fontaine avait parfaitement illustré cette situation dans une fable [32] dans laquelle le lion, après avoir égrené tous les arguments idéologiques pour prouver que le cerf doit lui revenir exclusivement, finit par menacer d’étrangler ses associés au cas où ils se permettraient de ne pas l’entendre de cette oreille.

Si la majorité des experts estime improbable le recours au feu nucléaire car désastreux pour les intérêts de la Russie, eu égard aux représailles encourues, il serait hasardeux pour certains d’écarter totalement ce risque, ignorant si la rationalité guide toujours les choix de Poutine. C’est le sens de l’avertissement du philosophe Habermas qui s’inquiète « du chorus belliqueux » de l’Occident qui risque de nous faire franchir la ligne rouge et nous précipiter dans un scénario apocalyptique. S’il admet que l’Ukraine ne doit pas perdre la guerre, c’est pour plaider en même temps pour un « compromis acceptable » [33]. La réponse à Habermas est venue du directeur de la revue italienne Micromega, Paolo Flores d’Arcais : « Si la guerre se conclut au prix d’une amputation du territoire ukrainien après des dévastations inédites, des crimes effrénés et impunis, comment pourra-t-on dire que l’Ukraine n’a pas perdu la guerre, cela reste un mystère illogique et hypocrite » conclut le philosophe italien [34].

Il faut se demander en effet si c’est le moment de céder à ce chantage en sachant que notre renoncement pourrait avoir de lourdes conséquences quant à de probables autres « opérations militaires spéciales » contre les états baltes, la Moldavie ou la Pologne. A terme, c’est la sécurité de l’Europe qui serait compromise et cela constituerait un encouragement pour d’autres dictatures dotées de l’arme nucléaire pour se lancer dans des annexions illégales. Et si on maintenait cet argument au nom duquel, face à un risque nucléaire même minime, la légitime défense d’un pays agressé injustement n’est plus de mise, alors il faudrait démanteler toutes les institutions qui tentaient d’œuvrer pour la paix en recourant au droit international qui reste parfois la seule arme des nations fragiles ; le dernier deviendrait une vague survivance dans nos manuels de droit et l’ordre international une jungle régie par la loi du plus fort dans un monde qui aurait tourné le dos à plus de 50 ans d’accords internationaux visant à limiter la production d’armes nucléaires et à éviter la prolifération.

Les pacifistes sont à l’Est

Ce texte sera perçu à tort par certains comme un manifeste contre la paix et une hostilité à tout compromis. Le temps de la négociation n’est certes pas venu mais la diplomatie retrouvera toutes ses prérogatives lorsque les troupes russes auront quitté le territoire ukrainien. La tâche est immense : à court terme, déjouer l’alliance des dictatures et à plus long terme, reconstruire une architecture de sécurité et un ordre mondial plus juste ; en se défiant du concept de multilatéralisme prêché par les dirigeants russes et chinois qui renvoie, comme le souligne le chercheur Jean-Sylvestre Mongrenier, à « une doctrine de combat au service d’un revanchisme guerrier et d’un bouleversement des équilibres mondiaux » [35]. Dans l’immédiat, n’est-il pas temps de soutenir les véritables pacifistes qui sont à l’est, comme ces cheminots biélorusses tentant, au péril de leur liberté, d’empêcher le départ d’armes à destination de l’armée russe [36] ou les opposants, comme Navalny ou Vladimir Kara-Mourza, qui croupissent au fond des prisons russes pour s’être dressés contre la corruption du régime poutinien et la guerre en Ukraine. Il faut en effet soutenir « les personnes héroïques qui aujourd’hui descendent dans la rue pour protester contre la guerre et se font arrêter (parfois simplement en brandissant un exemplaire de « Guerre et paix » – parce que le mot guerre est interdit – », écrivait le poète et traducteur André Markowicz au début de la guerre dans un essai au nom évocateur : « Et si l’Ukraine libérait la Russie ? »[37].

Anne Vaudano et Gilles Sainati, magistrats, respectivement ancienne présidente et ancien secrétaire général du syndicat de la magistrature.

Notes
[1] Tribune publiée par Le Monde du 21 mars 2023
[2] Article Le Monde du 2/ 3 avril 2023 « UE : les gauches fracturées par la guerre en Ukraine »
[3] Sur l’ensemble des meurtres politiques de masse commis pendant cette période, on renvoie à l’ouvrage « Terres de sang, l’Europe entre Hitler et Staline » de l’historien Timothy Snyder (Folio histoire 2012)
[4] Stepan Bandera fut un nationaliste extrémiste ukrainien ayant collaboré avec l’Allemagne nazie en créant la légion ukrainienne sous les ordres de la Wehrmacht.
[5] Constatant le caractère massif des attaques visant les producteurs d’histoire en Russie, un rapport de la FIDH en juin 2021 développe le concept de « crime contre l’histoire ». Certains ont payé le prix de leur vie pour avoir décrit les massacres de l’armée russe en Tchétchénie comme en témoigne l’assassinat d’Anna Politovskaia le 7 octobre 2006.
[6] « Russes et Ukrainiens les frères inégaux du moyen Age à nos jours » d’Andreas Kappeler (CNRS Editions)
[7] Sur l’holodomor, on peut se reporter à l’ouvrage déjà cité : Terres de sang.
[8] 31 000 crimes de guerre répertoriés fin mars 2023 selon la présidente du centre pour les libertés civiles, prix Nobel de la paix en 2022.
[9] Voir le documentaire de 2023 d’Elisabeth Drevillon sur France 5 « Crimes de guerre en Ukraine »
[10] Le Monde du 16 avril 2022 page 30
[11] Ibid page 31
[12] Idem
[13] Reproche surprenant : des massacres commandités par des responsables africains sur leurs populations devraient-ils rester impunis pour préserver la CPI d’un soupçon de racisme ?
[14] Il s’agit d’Aaron Trainin
[15] Se reporter à l’appel signé par des juristes commeAntoine Garapon, Denis Salas, Jean-Paul Jean ou Dominique Rousseau, appel publié dans le JDD du 19 novembre 2022
[16] Le Monde 1er mars 2023
[17] Cf « la grande confrontation » de Raphael Glucksmann aux Editions Allary 2023
[18] Article Le Monde du 29 avril 2022 page 12
[19] « Silent leges inter arma »
[20] La part d’ombre de Stéphane Audouin-Rouzeau (Editions les belles lettres 2023)
[21] Dans un courrier du 12 août 1936 adressé au physicien Hans Thirring
[22] « Il manifesto » édition du 24 février 2023
[23] Le Huffington post du 26 février 2022
[24] Cf les mémorandums de Budapest signés le 5 décembre 2014
[25] Revue Micromega 4-2022 page 68
[26] Ukraine-Russie.la carte mentale du duel de Michel Foucher collection tract chez Gallimard
[27] « L’épreuve et la contre épreuve » par Edwy Plenel éditions Stock 2022 page 59
[28] Page 93 « la grande confrontation » déjà cité note 14
[29] Interdits de diffusion par l’Union européenne le 2 mars 2022.
[30] Cf le roman de Giuliano da Empoli “le mage du Kremlin” Ed Gallimard, qui brosse le portrait d’une éminence grise de Poutine, apôtre de la désinformation en vue de répandre le chaos.
[31] « Toute dépendance énergétique et commerciale à un pays qui n’est pas un allié géopolitique équivaut à un suicide stratégique » selon le professeur Jean-Yves Heurtebise dans un article du Monde du 23 mars 2022
[32] Il s’agit de « La génisse, la chèvre et la brebis en société avec le lion ».
[33] Se reporter à la tribune publiée par Habermas dans le Monde du 22 février 2023 mais également à son article précédent, publié le 28 avril 2022 dans « Suddeutsche Zeitung ».
[34] La guerra di Putin : Habermas e Ponce Pilate. Revue Micromega 4-2022
[35] Le Monde du 18 avril 2023 page 26
[36] Comme le raconte l’ancien militant de Lotta Continua, Adriano Sofri, dans sa lettre en réponse au physicien Carlo Rovelli publiée sur facebook le 10 avril 2023
[37] Essai publié au Seuil libelle en juin 2022

https://blogs.mediapart.fr/gillessainati/blog/300523/guerre-en-ukraine-de-l-arme-du-droit-au-droit-aux-armes
Publié dans Les Cahiers de l’antidote : Soutien à l’Ukraine résistante (Volume 21)
https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/07/05/les-cahiers-de-lantidote-soutien-a-lukraine-resistante-volume-21/
https://www.syllepse.net/syllepse_images/soutien-a—lukraine-re–sistante–n-deg-21_compressed.pdf

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