Édition du 23 avril 2024

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États-Unis

Le discours de Chuck Shumer soulève la rage de la droite qui soutient Israël

Les néoconservateurs.trices ne détestent les interférences en Israël que quand elles s’attaquent à leur soutient inébranlable en faveur de l’apartheid et du massacre des Palestiniens.nes

Murtaza Hussain, The Intercept, 15 mars 2024
Traduction, Alexandra Cyr

Le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, représentant de New-York, a livré un discours qui a provoqué la rage de la droite qui soutient Israël. Plusieurs l’ont décrit comme un appel à un changement de régime en Israël en visant son Premier ministre, Benjamin Nétanyahou. En quarante minutes environ, il a attaqué le Hamas et critiqué Israël tout en assurant que les États-Unis le défendraient et le soutiendraient durant toutes les crises auxquelles il pourrait faire face. Mais il a ciblé directement le Premier ministre Nétanyahou en décrivant son gouvernement « d’obstacle à la paix » et en disant que sa coalition gouvernementale « ne répondait plus aux besoins d’Israël ».

Il est même allé plus loin en souhaitant des élections en Israël qui apporteraient un nouveau gouvernement. Et il a ajouté que B. Nétanyahou : « s’est égaré en permettant à sa survie politique de prendre le dessus sur les meilleurs intérêts du pays ».

Malgré le ton qui soutient Israël, son discours a soulevé la rage chez les plus ardents défenseurs de ce pays y compris plusieurs néoconservateurs.trices. Écrivant pour le Conseil sur les relations étrangères, Elliott Abrams (impliqué dans l’affaire Iran-Contra), accuse M. Schumer sur un ton hystérique de vouloir faire d’Israël une « colonie américaine » en intervenant dans ses politiques : « C’est une manière honteuse et sans précédent de traiter un allié et une interférence inadmissible dans les politiques internes d’une autre démocratie ». Sa critique a été reprise par des élus.es israéliens.nes comme l’ancien Premier ministre, M. Naftali Bennett qui a dénoncé (le discours) comme « une intervention politique externe  » dans les affaires israéliennes.

Ces arguments pourraient peut-être être respectables pour la plupart, si pour l’essentiel, la masse des interventions politiques américaines habituelles et institutionnelles à l’égard d’Israël et de son gouvernement, n’avaient été retournée avec succès par ses supporters ; les affaires d’un petit pays au bord de la Méditerranée sont devenues un enjeu problématique de politique intérieure aux États-Unis. B. Nétanyahou lui-même n’a affiché aucun embarras à propos de ses interventions dans la politique américaine alors qu’il livrait des discours frénétiques devant le Congrès des États-Unis lui demandant de légiférer en faveur d’Israël et endossant visiblement le candidat qu’il préférait pour la Présidence américaine durant les élections.

Sans contre dit, la politique étrangère américaine est actuellement fortement contrainte par le lobby de groupes d’intérêts spéciaux puissants comme le « American Israel Public Affairs Committee » (AIPAC). Ces organisations s’attachent à assurer que les États-Unis fournissent à Israël une aide militaire, économique et diplomatique sans faille, même quand son gouvernement rejette continuellement les demandes américaines pour la création d’un État palestinien en accord avec la loi internationale.

Que des gens comme Messieurs Abrams et Bennett expriment des doléances quant aux interventions américaines dans les affaires israéliennes semble plutôt à très courte vue car, elles ne sont pas que bienvenues mais exigées par Israël et ses soutiens aussi longtemps qu’elles sont en concordance avec la sécurité et les besoins politiques du gouvernement israélien.

Plus que jamais

Le discours de C. Schumer arrive au moment où Israël n’a jamais été aussi isolé et dépendant de l’aide américaine. Contrairement à ses propres désirs, le gouvernement américain est revenu au Proche Orient en luttant contre les Houtis au nom d’Israël, lui fournissant des armes pour sa campagne à Gaza et en décourageant le Hezbollah au Liban avec ses porte-avions stationnés en Méditerranée. Les trois militaires américains qui ont été tués en Jordanie plus tôt cette année, l’ont été dans un attaque clairement motivée par le rejet de l’aide américaine à Israël.

Les États-Unis ont utilisé leur droit de véto au Conseil de sécurité de l’ONU pour protéger Israël du flot de contestation mondiale devant la vue de tuerie de masse et la famine à Gaza. Quand Israël a reçu les réponses diplomatiques négatives de la part du Brésil, de l’Afrique du sud, de la Chine et de la plupart des pays musulmans, les États-Unis sont restés à ses côtés sans faiblir comme son plus important et parfois son unique défenseur sur la scène internationale.

Malgré tout ce soutien, Israël n’a pas joué la réciproque. Aux remarques du Président Biden en faveur d’une éventuelle solution à deux États toutes rhétoriques qu’elles aient été, B. Nétanyahou a répondu en humiliant publiquement son plus important défenseur. Il a déclaré sans vergogne, qu’il n’y aurait jamais d’État palestinien. Ce Premier ministre de droite s’est même vanté d’en avoir empêché un de voir le jour.

L’engagement inébranlable de B. Nétanyahou à défier la loi internationale et la majorité de l’opinion mondiale pour poursuivre le projet de colonisation de la Cisjordanie ne peut tenir que parce que ses supporters réussissent à fléchir les politiques américaines en faveur d’Israël, aucun autre pays n’en a autant bénéficié. Et aucun autre pays n’a aussi peu redonné pour les énormes chèques fait au porteur que les États-Unis ont libellés jusqu’à maintenant.

Malgré ses critiques envers B. Nétanyahou et sa coalition extrémiste devant le Sénat, C. Schumer était résolument en soutien à Israël et hostile à ses ennemis. Mais en souhaitant une solution à deux États, il a est entré en contradiction avec M. Nétanyahou et une majorité du public israélien qui s’y oppose. Ils préfèrent le statut quo ce qui entraîne le retrait systématique du droit de vote aux Palestiniens.nes ce que les groupes de défense des droits humains ont qualifié « d’apartheid ».

Dans ce contexte il ne faut pas comprendre les commentaires du leader de la majorité démocrate au Sénat comme un appel à organiser une révolution colorée à Tel Aviv. Il s’agit plutôt d’une tentative de prévenir Israël contre son arrivée à un niveau d’ostracisme d’où, même les États-Unis ne pourraient les sortir. Et M. Schumer d’ajouter : « Israël ne peut espérer réussir en tant que paria en opposition au reste du monde ».

Les supporters d’Israël qui ont été choqués.es par son discours ferait mieux d’entendre ce conseil avisé.

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