Édition du 14 mai 2024

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Les infirmières des urgences et des soins intensifs des régions devraient aussi avoir droit aux primes

Communiqué de la CSQ- Saguenay, 29 novembre 2007

La CSQ, la FSQ et le SIISNEQ demandent au ministre Philippe Couillard de lever des conditions injustes pour les régions

« Le simple saupoudrage de mesures aléatoires, telles que les primes actuellement versées aux infirmières œuvrant dans les urgences et aux soins intensifs d’hôpitaux répondant à certaines conditions, est nettement insuffisant pour remettre notre système public de santé sur les rails. Ces mesures sont même profondément injustes pour les infirmières travaillant en région, dont la taille des établissements ne permet pas à plusieurs d’entre elles d’avoir droit à ces bénéfices. »

Participant à l’assemblée régionale du Syndicat des intervenantes et intervenants de la santé du Nord-Est québécois (SIISNEQ), la vice-présidente de la CSQ, Mme Louise Chabot, a profité de l’occasion pour inviter le ministre de la Santé et des Services sociaux à dépasser le simple saupoudrage de petites mesures à gauche et à droite pour empêcher le personnel de se tourner vers le secteur privé.

Mme Chabot croit que le ministre devrait plutôt établir un véritable plan pour réorganiser les services en s’inspirant des propositions qui lui avaient été faites par les organisations syndicales, lors des dernières négociations en 2005, dont il n’avait pas cru bon alors de tenir compte.

« Nous ne pouvons que nous réjouir d’entendre M. Couillard reconnaître aujourd’hui qu’il faut offrir de meilleures conditions de travail au personnel de la santé, dont les infirmières, pour éviter une fuite vers le privé. Mais en même temps, nous déplorons qu’il n’ait pas su démontrer la même ouverture d’esprit lors des dernières négociations en 2005 », constate la vice-présidente de la CSQ.

Oser interdire l’embauche d’infirmières d’agences privées

Mme Chabot rappelle que le ministre de la Santé ne peut à la fois soutenir qu’il souhaite freiner l’exode des infirmières vers le privé et continuer d’autoriser certains établissements de santé à recourir à l’embauche d’infirmières d’agences privées comme c’est le cas présentement.

« Au cours de la dernière année seulement, ce sont 100 millions des fonds publics qui ont été utilisés pour rémunérer des infirmières du privé œuvrant dans le système public. Aussi longtemps que le ministre n’interdira pas une telle pratique, où l’on utilise des fonds publics pour embaucher et payer des infirmières du privé qui bénéficient de salaires supérieurs aux infirmières du secteur public, il est évident que le secteur privé continuera d’apparaître fort attrayant au personnel du secteur public », explique Mme Chabot.

Une pratique dangereuse pour les régions

La vice-présidente de la CSQ craint d’ailleurs que cette pratique ait des conséquences à moyen terme sur des régions qui ne sont pas encore en situation de pénurie pour le personnel de la santé.

« Bien que le recours aux infirmières d’agences privées soit encore limité aux grands centres tels que Montréal, certaines infirmières, travaillant dans les régions comme le Saguenay–Lac-Saint-Jean, pourraient être tentées d’aller poursuivre leur carrière dans le secteur privé à Montréal où les conditions salariales et de travail sont plus avantageuses que dans le secteur public », anticipe Mme Chabot.

Des primes injustes pour les infirmières en région

Pour la présidente de la Fédération de la santé du Québec (FSQ-CSQ), Mme Monique Bélanger, un tel scénario est d’autant plus envisageable que les primes versées à certaines infirmières travaillant aux urgences et aux soins intensifs sont inaccessibles pour plusieurs pratiquant dans les établissements de santé des régions.

« Les infirmières des régions sont nettement désavantagées par les critères fixés par le ministre pour avoir droit aux primes, qui sont la nécessité de travailler dans un centre hospitalier régional ou dans un établissement recevant un minimum de 30 000 visites annuelles aux urgences. Ces primes sont largement méritées, mais elles le sont tout autant par l’ensemble des infirmières de tous les hôpitaux à travers le Québec. La complexité de la tâche des infirmières affectées aux urgences et aux soins intensifs ne varie pas en fonction de la taille de l’établissement. Ça n’a rien à voir et le stress est aussi élevé dans un cas comme dans l’autre », soutient Mme Bélanger.

Des effets pervers à prévoir

La présidente de la FSQ-CSQ croit même que la distribution arbitraire de primes peut avoir des effets pervers nuisibles au réseau.

« Il y a quelque chose de paradoxal à implanter une telle mesure dans l’intention, entre autres, de désengorger les urgences, alors que dans certains établissements où l’on réussira à réduire le nombre de patients dans les urgences sous les 30 000 visites, les infirmières perdront par le fait même leurs primes. De plus, dans une région comme le Saguenay–Lac-Saint-Jean où l’on ne compte qu’un centre hospitalier régional qui peut se qualifier pour les primes, cela risque de rendre plus difficile le recrutement dans les autres hôpitaux, où les salaires sont moins élevés », souligne Mme Monique Bélanger.

Une réorganisation du travail impossible sans investissements supplémentaires

De son côté, la présidente du SIISNEQ-CSQ, Mme Nathalie Savard, prévient le ministre de la Santé et des Services sociaux qu’une véritable réorganisation du travail ne peut se faire sans être accompagnée d’investissements supplémentaires dans le réseau.

« Si le ministre se contente de parler de réorganisation du travail sans donner les moyens aux établissements de changer les façons de faire, ses propositions vont demeurer de simples vœux pieux. Il suffit de penser à l’adoption de la loi 90 visant à transférer des tâches supplémentaires aux infirmières. Les principes sont là, mais aucun établissement n’a les moyens de les appliquer », précise Mme Savard.

Une expertise sous-utilisée

La présidente du SIISNEQ-CSQ ajoute qu’il suffit de regarder comment se déroule actuellement la campagne de vaccination contre la grippe au Saguenay–Lac-Saint-Jean pour constater jusqu’à quel point il y a un sérieux problème d’organisation du travail.

« Est-il normal que dans une région où l’on évalue à plus de 120 le manque de médecins omnipraticiens et spécialistes, plusieurs d’entre eux soient actuellement occupés dans leurs bureaux à recevoir les gens pour les vacciner, une tâche qui pourrait facilement être confiée aux infirmières ? Pendant qu’ils occupent ainsi une partie de leur temps, le manque de médecins dans les hôpitaux n’en devient que plus criant. Et ça ne s’arrête pas là puisque l’on voit encore régulièrement des infirmières et infirmières auxiliaires occupées à ramasser des plateaux dans les chambres, alors qu’il ne fait aucun doute que l’on pourrait utiliser plus intelligemment leur expertise et leur expérience », remarque Mme Nathalie Savard.

Les trois leaders syndicales, Mmes Louise Chabot, Monique Bélanger et Nathalie Savard, concluent en défiant le ministre Philippe Couillard de se donner, en étroite collaboration avec les organisations syndicales, un véritable plan de réorganisation du travail qui passera par une nécessaire revalorisation des professions en santé, en améliorant concrètement et équitablement les conditions de travail et les salaires de toutes et tous.

Mots-clés : Communiqués

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