Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Océanie

Non à la mise en péril du processus de décolonisation en Nouvelle-Calédonie

La politique du coup de force, irrespectueuse des droits légitimes du peuple Kanak, conduite par le gouvernement ne peut mener qu’à un immense gâchis, s’alarment dans cet appel 56 personnalités.

Tiré de Entre les lignes et les mots

L’État a imposé que le 3e référendum d’autodétermination se tienne à la date prévue en décembre 2021. C’était aller contre la demande des indépendantistes de le reporter, compte tenu de l’impact du covid et de la période de deuil qui s’en est suivie. En dépit d’une abstention de 57%, dont une majorité de Kanaks, le gouvernement considère que l’électorat de l’archipel a alors définitivement opté pour une « Nouvelle-Calédonie dans la France ».

Aujourd’hui, il décide de reporter les élections provinciales de 2024 et de modifier la Constitution pour autoriser le « dégel » du corps électoral provincial. Il s’agit d’ouvrir la citoyenneté calédonienne, pas seulement aux natifs – les indépendantistes sont favorables à la pleine application du droit du sol –, mais au terme d’une durée de 10 ans à tous les résidents. Lesquels deviendront électeurs et éligibles pour les assemblées de Province qui déterminent les orientations politiques locales et la composition du Congrès du pays.

Cette imposition d’un « corps électoral glissant », sans un accord politique global négocié entre les différentes parties prenantes, constitue un passage en force de l’État. Celui-ci, une fois de plus, dicte son calendrier en fixant au processus engagé la date butoir du 1er juillet 2024.

C’est revenir sur un élément clé de l’accord de Nouméa, lequel a permis d’engager un processus de décolonisation et de garantir la paix civile au cours de ces trente dernières années.

Une telle politique renoue avec la logique qui a fait de la Nouvelle-Calédonie une colonie de peuplement.

Elle vise à mettre définitivement en minorité le peuple Kanak, en contradiction du droit international et des résolutions de l’ONU qui invitent les « puissances administrantes » à« veiller à ce que l’exercice du droit à l’autodétermination ne soit pas entravé par des modifications de la composition démographique dues à l’immigration ou au déplacement de populations dans les territoires qu’elles administrent ».

Le Congrès du FLNKS, qui s’est tenu le 23 mars 2024, s’est unanimement prononcé contre ce projet de réforme constitutionnelle. Il a également confirmé que, pour le FLNKS, seuls le dialogue et la recherche du consensus peuvent permettre d’envisager une solution d’avenir pour l’ensemble des Calédoniennes et Calédoniens.

Nous nous alarmons de cette politique du coup de force, irrespectueuse des droits légitimes du peuple kanak et qui met en péril la notion même de citoyenneté calédonienne au principe de la construction du destin commun.

Elle compromet la recherche d’un consensus entre les diverses communautés quant au devenir du pays et ne peut conduire qu’à un immense gâchis.

Il est impératif de préserver le processus de décolonisation qui a été poursuivi ces dernières décennies. Pour les droits du peuple kanak et des autres communautés. Pour l’avenir de la Kanaky/Nouvelle-Calédonie. Pour l’image de la France et celle de la République.

Premiers signataires :
Gilbert Achcar, chercheur et écrivain
Paul Alliès, universitaire
Bertrand Badie, politiste
Etienne Balibar, philosophe
John Barzman, historien
Christian Belhôte, magistrat
Jérôme Bonnard, syndicaliste Union syndicale Solidaires
Claude Calame, helléniste et anthropologue
Patrick Chamoiseau, écrivain
David Chapell, historien, Université de Hawaï
Mathias Chauchat, professeur de droit, université de Nouvelle Calédonie
Nara Cladera, syndicaliste Union syndicale Solidaires
Pierre Cours-Salies, sociologue
Thomas Coutrot, économiste
Pierre Dardot, philosophe
Christine Demmer, anthropologue
Bernard Dreano, responsable Cedetim
Josu Egireun, syndicaliste et anticapitaliste
Didier Epsztajn, blogueur Entre les lignes, entre les mots
Franck Gaudichaud, historien, Université Toulouse Jean Jaurès
Daniel Guerrier, militant anticolonialiste, ancien co-président de l’AISDPK
Christine Hamelin, anthropologue
Hortensia Ines, syndicaliste Union syndicale Solidaires
Mehdi Lallaoui, réalisateur
Christian Laval, sociologue
Isabelle Leblic, anthropologue
Michael Löwy, sociologue
Christian Mahieux, syndicaliste Union syndicale Solidaires, éditeur Syllepse
Philippe Marlière, politiste
Roger Martelli, historien
Jean-Pierre Martin, psychiatre
Gustave Massiah, économiste, altermondialiste
Laurent Mauduit, écrivain et journaliste
Isabelle Merle, historienne
Michel Naepels, anthropologue
Ugo Palheta, sociologue
Alice Picard, porte parole nationale d’ATTAC
Christian Pierrel, directeur de publication de La Forge
Philippe Pignarre, éditeur
Boris Plezzi, secrétaire confédéral CGT, en charge des questions internationales
Jacques Ponzio, psychanalyste
Michèle Riot-Sarcey, historienne
Henri Saint-Jean, docteur en psychologie sociale
Christine Salomon, anthropologue
François Sauterey, vise président du MRAP
Denis Sieffert, éditorialiste
Patrick Silberstein, éditeur Syllepse
Francis Sitel, responsable revue ContreTemps
Marc Tabani, anthropologue
Serge Tcherkezoff, anthropologue
Jean-Marie Theodat, universitaire
Benoît Trepied, anthropologue
Anne Tristan, journaliste
Jacques Vernaudon, linguiste, université de Polynésie française
Antoine Vigot, syndicaliste FSU
Sophie Zafari, militante syndicale

Contact : appelkanaky@orange.fr

https://www.politis.fr/articles/2024/04/non-a-la-mise-en-peril-du-processus-de-decolonisation-en-nouvelle-caledonie/

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