Édition du 23 avril 2024

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Thaïlande : « Nous demandons des bulletins, pourquoi nous accueillez-vous à coups de boulets ? »

La démocratie échappe aux manifestants thaïlandais, aux « Chemises rouges »

Le 14 mai 2010, après huit semaines de confrontation, le gouvernement a chassé les « Chemises rouges » des rues de Bangkok et causé la mort de 80 personnes. « Le gouvernement les a traités de terroristes, les a accusés de soutenir Thaksin Shinawatra contre le responsable actuel du gouvernement. Les médias eux aussi ont souvent assimilé les manifestants à des supporters du Premier ministre déchu.

Cette interprétation est erronée » selon Junya Yimprasert, qui craint que les rues de Bangkok « nettoyées », le gouvernement ne s’attaque à d’autres cibles. « On parle de chasse aux sorcières contre des syndicats militants, des universitaires, des journalistes, des dirigeants régionaux et des politiciens. Une campagne internationale de solidarité est nécessaire pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la situation en Thaïlande ».

Junya Yimprasert appelle le mouvement syndical international à accorder une attention particulière à ce pays et à soutenir les collègues thaïlandais. Elle rappelle que « le combat pour la démocratie en Thaïlande a déjà 78 ans. Engagé en 1932, il abattit la monarchie absolue et lui substitua une monarchie constitutionnelle. Mais jamais le pays n’a connu de démocratie véritable, de démocratie véritablement populaire ». Les classes laborieuses étaient à l’initiative du mouvement récemment réprimé à la différence des combats démocratiques du passé.

Quelle dynamique politique derrière la récente répression des manifestants ?

Bhumibol Adulyadejis, le roi de Thaïlande est âgé de 84 ans. Gravement malade, il est hospitalisé depuis plus d’un an. Le gouvernement actuel du Premier ministre Abhisit Vejajeva est étroitement lié à l’armée et aux élites qui soutiennent un gouvernement loyaliste pour garantir à la mort du roi une transition à leur avantage. Elles craignaient que l’éviction du gouvernement actuel n’ouvre la voie à un gouvernement Thaksin ou proche de lui où leur pouvoir serait menacé, où le roi, comme ceux d’Angleterre ou de Suède, perdrait toute influence réelle.

Une lutte des classes laborieuses

La lutte pour la démocratie a toujours commencé avec les intellectuels, qui transmettent le flambeau aux étudiants et à la classe moyenne. Pour Junya Yimprasert ce sont les classes laborieuses, l’écrasante majorité du peuple thaïlandais, qui a engagé le combat aujourd’hui.

La Thaïlande à l’aube d’une lutte pour une véritable réforme politique ?

Sous le gouvernement Thaksin, le budget militaire avait été massivement réduit. Le gouvernement actuel a multiplié les dépenses militaires qui sont passées de 86 à 200 milliards de bahts. Il repose sur les militaires qui n’ont jamais cessé de peser sur les gouvernements civils. Au cours des 78 années écoulées, le pays a connu 20 coups d’Etat militaires.

Si les partisans du Premier ministre déchu ont impulsé la mobilisation des « Chemises rouges », les personnes interviewées parmi les millions de provinciaux qui l’ont rejointe déclarent avoir agi pour elles-mêmes, et n’avoir rien à voir avec Thaksin. Revendiquant des élections libres, le mouvement était prêt à accepter tout gouvernement remportant la majorité sans demander son retour au pouvoir.

Propos recueillis et mis en contexte par Linus Atarah.

* Publié en français sous une forme légèrement réduite par solidaritéS 172 19 août 2010 sous le titre « Sur la révolte des chemises rouges ». Traduit de l’anglais par la rédaction de "solidaritéS d’après une version publiée paru le 7 juin 2010 sur le site de la centrale syndicale finlandaise www.sask.fi

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