Édition du 30 avril 2024

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Le blogue de la présidente de la CSQ

Transformation des commissions scolaires : tout raser ou rénover ?

Est-ce qu’il y a des améliorations à apporter à la démocratie et à la gouvernance scolaire ? Bien entendu ! Est-ce qu’il faut pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain comme s’apprête à le faire le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Jean-François Roberge, en déposant le projet de loi modifiant principalement la Loi sur l’instruction publique relativement à l’organisation et à la gouvernance scolaires ? Poser la question, c’est y répondre !

Gouverner, c’est plus qu’une liste d’épicerie

Fidèle à son habitude, au lieu de baser ses décisions sur une réflexion de fond concernant les besoins des élèves et les façons d’améliorer la démocratie scolaire et la gouvernance en éducation, le gouvernement n’a qu’une idée en tête : rayer un autre article sur sa liste
d’épicerie de promesses électorales.

En quoi la transformation des commissions scolaires en centres de services améliorera-t-elle la réussite scolaire ? Est-ce que les élèves, jeunes ou adultes, seront mieux formés au terme de leurs parcours ? En quoi cette réforme favorisera-t-elle l’égalité des chances en éducation ? Le ministre n’a pas la réponse à ces questions.

En a-t-on vraiment besoin ?

Dans le contexte actuel d’un réseau de l’éducation affaibli par des années d’austérité, a-t-on vraiment besoin d’une réforme de structure semblable à ce que nous avons vécu dans le réseau de la santé et des services sociaux ? D’autres enjeux, nettement plus importants, commanderaient qu’on y consacre le temps, l’énergie et les ressources du ministère.

Par exemple :

 offrir un meilleur accès aux services pour les élèves, notamment ceux en difficulté ;

 résoudre les problèmes de pénurie que vit actuellement le réseau et qui ira en s’aggravant si l’on n’agit pas dès maintenant ;

 s’attaquer aux conditions toxiques qui prévalent et qui font fuir la relève, comme celles et ceux qui sont en poste, qui tombent malade ou qui décrochent.

Une tendance antidémocratique

Oui, des améliorations sont souhaitables dans la gouvernance du réseau scolaire. Plusieurs solutions ont déjà été proposées au cours des dernières années. Oui, la démocratie scolaire mériterait un sérieux coup de pouce pour stimuler la participation. Cependant, il n’y a jamais eu de véritable volonté politique de les mettre en pratique par les gouvernements successifs. Ce n’est certainement pas en abolissant ce palier démocratique pour le remplacer par une structure administrative opaque qui relèvera du ministre que le système d’éducation sera mieux servi.

Est-ce que des parents bénévoles auront tout le temps nécessaire pour s’approprier des questions aussi complexes touchant l’éducation du primaire au secondaire, en passant par la formation professionnelle et la formation générale aux adultes, le tout dans leurs temps libres ? Auront-ils la même indépendance et la même légitimité que les élus scolaires ? Ce sont des questions importantes auxquelles nous n’avons malheureusement pas de réponses. D’autant plus que, si nous voulons que les écoles soient au centre de nos communautés, il faut s’assurer de donner l’occasion aux membres de ces dites communautés de véritablement participer aux discussions.

Au fond, cette transformation est le reflet d’une tendance lourde qui gagne toutes les sphères de l’État et qui se traduit par une approche managériale, comptable et froide en matière de services publics. Au bout du compte, ce sont les citoyennes et citoyens et les élèves qui y perdront au change.

Déjà vu

Le gouvernement dit vouloir réaliser des économies et améliorer la réussite des élèves. Ce sont exactement les mêmes arguments que nous avait servi l’ex-ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, lorsqu’il a entrepris sa réforme. Économies et améliorations des services seraient au rendez-vous disait-il. Par quoi s’est soldée cette réforme ? Un réseau fragilisé, une centralisation à outrance des pouvoirs entre les mains du ministre, zéro économie et moins de services pour la population. Va-t-on revivre le même scénario avec la transformation des commissions scolaires en centres de services ? Il est fort à parier que oui.

Une goutte d’eau dans l’océan des besoins

Le ministre fait miroiter des économies de 45,5 millions de dollars avec sa réforme qui lui permettrait d’embaucher 160 professionnelles et professionnels de plus pour assurer des services directs aux élèves. C’est de la poudre aux yeux, un coup de marketing, une goutte d’eau dans l’océan des besoins ! Il faut se rappeler que l’on compte actuellement 206 617 élèves ayant un diagnostic HDAA reconnu sur les bancs des classes qui, en raison du manque criant de professionnelles et professionnels et de personnel de soutien scolaire, n’obtiennent pas les services auxquels ils auraient droit. Pourquoi se rabattre sur ces supposées économies pour faire une telle annonce alors qu’il avait l’opportunité d’agir significativement lors du dernier budget ? Surtout, pourquoi s’entêter à vouloir tout raser alors que l’on pourrait très bien rénover ?

Sonia Éthier

Présidente de la CSQ (2018-...)

Elle siégeait sur l’exécutif de la CSQ depuis 2015 à titre de première vice-présidente. Enseignante en adaptation scolaire auprès d’élèves en difficulté d’apprentissage, elle a été présidente du Syndicat de l’enseignement du Bas-Richelieu durant neuf ans. Elle milite au sein du mouvement syndical depuis plus de 30 ans.

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