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COP23 : prise en compte de l’égalité femmes-hommes et des droits humains dans les négociations ?

Présidée par les îles Fidji, la 23ème conférence des parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques ou COP23 s’est tenue du 6 au 18 novembre 2017 au siège de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques, à Bonn en Allemagne. La COP23 visait un "dialogue de facilitation" pour accélérer des contributions nationales des Etats à partir de 2018.

tiré de : Le climat, bien commun mondial De Infos Adéquations

Vendredi 17 novembre 2017, par Yveline Nicolas

Celles-ci ne permettent pas actuellement d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris de contenir la hausse de la température « nettement en dessous de 2 °C » en 2100 par rapport aux niveaux préindustriels.

Un enjeu suivi de près par Adéquations : la prise en compte de l’égalité femmes-hommes et des droits humains dans les négociations. Bonne nouvelle : un Plan d’action genre a été adopté.

Les enjeux de la COP23

Progrès de la prise en compte des droits et de l’égalité femmes-hommes

Premier bilan de la COP23

Comme souvent, le bilan des négociations climatiques donne une impression très mitigée. Les lentes avancées contrastent avec les rapports alarmants sur la dégradation des équilibres climatiques et écosystémiques. Les exercices onusiens nécessitant d’aboutir à des consensus entre positionnements souvent inconciliables laissent insatisfaits les mouvements sociaux qui militent pour la justice climatique.

Cependant la mobilisation acharnée depuis des années des associations de femmes et féministes, et les alliances avec des personnes dans les institutions et pouvoirs publics convaincus de l’importance de concrétiser le principe d’égalité femmes-hommes, a permis l’adoption d’un Pan d’action Genre (lecture en ligne et téléchargement ici), qui constituera une nouvelle base de plaidoyer dans les institutions et les programmes climat. Les peuples autochtones obtenaient la création d’une Plateforme des peuples autochtones et des communautés locales sur le changement climatique, visant à favoriser les échanges de savoir entre communautés, qui représentent 360 millions de personnes et 4000 langues sur tous les continents. De même, l’agriculture, deuxième émetteur de gaz à effet de serre, qui constituait jusqu’à présent un point aveugle, vont enfin être mises à l’agenda des négociations climatiques via un groupe de travail sur la sécurité alimentaire ; le mode d’agriculture et d’alimentation est en effet déterminant dans l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et l’adaptation aux impacts du changement climatique.

Quelques annonces ont été faites par des gouvernements et des acteurs économiques, comme la création d’une Alliance pour la sortie du charbon par une vingtaine de pays (Canada, Grande-Bretagne, Belgique, Finlande, France, Italie, Portugal, etc. mais aucun pays gros consommateur de charbon, comme la Chine ou l’Inde) ou les désinvestissements des énergies fossiles (Norvège). En même temps l’emprise de milieux d’affaires et industries est critiquée, comme en témoigne une lettre associative de protestation à propos de la présence des industries nucléaires, bénéficiant de stands d’information bien en vue, se présentant comme "initiatives de la société civile".

Si les Etats-Unis, 2ème émetteur mondial de gaz à effet de serre, qui ont confirmé leur retrait (effectif en 2020) de l’Accord de Paris, n’ont pas contrecarré les négociations, l’Union européenne s’est montrée peu engagée, la Chine ambigue et ni la France ni l’Allemagne n’ont fait d’annonces importantes. L’ambiance des Etats était au manque d’enthousiasme. Pour le gouvernement français, la prochaine étape est son One Planet Summit le 12 décembre 2017 visant à mobiliser concrètement pour des initiatives et financements climat. L’accès à des financements pour mettre en oeuvre la transition écologique, y compris dans les pays pauvres, au niveau urbain comme au niveau agricole, et que ces financements parviennent réellement aux structures les mieux à même de développer des politiques cohérentes et/ou des initiatives pilotes transférables, est l’enjeu principal. De leur côté, les organisations de la société civile se mobilisent autour de la campagne "Pas un euro de plus" (pour les énergies du passé) demandant que les financements soient "intégralement réorientés dans le soutien à la transition vers des sociétés justes et durables".

Mais la présidence fidjienne de la COP23 et le groupe des pays en développement ne sont pas parvenus à mettre en avant la question récurrente du financement des "pertes et dommages" dus aux changements climatiques et des transferts financiers des pays riches vers les pays les moins responsables du changement climatique et pourtant les plus impactés par les conséquences. Un point doit être fait en 2018 sur les 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 promis par les pays riches depuis 2009... En tout cas l’engagement de 2 milliards de dollars de la précédente administration américaine passe à la trappe.

Le décalage est grand entre les discussions techniques sur la finance carbone et autres mécanismes technologiques (où les panels sont majoritairement masculins) et les témoignages poignants de représentant-es de communautés faisant face aux catastrophes climatiques. Destruction de leurs habitations, sécheresses et épisodes caniculaires où il faut continuer à vivre et travailler par presque 50° de température, migrations forcées et leur cortège de violences : les femmes sont particulièrement touchées, qui portent déjà en temps normal une charge supplémentaire de travail domestique, alimentaire et de soins aux enfants et personnes dépendantes. Elles sont aussi très présentes comme défenseuses des droits environnementaux et initiatrices de projets concrets.

L’accord de Paris doit entrer en application en 2020. Il comporte un mécanisme de révision à la hausse des engagements nationaux tous les cinq ans, avec une première révision obligatoire en 2025. Notons que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) prévoie son sixième rapport d’évaluation en 2022. Un des acquis de la COP23 est l’établissement d’un bilan mondial des émissions de gaz à effet de serre pour fin 2018, après un an de dialogue et en vue de la 24ème conférences des parties sur le climat. La cOP24 aura lieu fin 2018 à Katowice en Pologne, pays dont le développement est fondé sur le charbon et l’importation de gaz de schiste des Etats-Unis et qui, au niveau européen, bloque différentes réformes en faveur du climat. Pour éviter une régression des négociations, il est prévu que la présidence fidjienne continue à s’impliquer officiellement dans le "dialogue facilitateur" préalable à cette COP (une session de négociations intermédiaires aura lieu en mai 2018) et dans l’animation de la COP24 en Pologne. Dans cette année considérée comme charnière de 2018, il s’agira de poursuivre le « Dialogue Talanoa », de la COP23, inspiré par la tradition culturelle du Pacifique de discussion constructive, qui sera basé sur trois questions : "où en sommes-nous ? où voulons-nous aller ? comment y parvenir ?"...

Faire le lien entre des négociations internationales frileuses et les innombrables initiatives et dynamiques au niveau des sociétés civiles et à l’échelon territorial constitue un enjeu crucial. L’implication de tous les acteurs politiques, sociaux, économiques, associatifs et syndicaux a un rôle majeur à jouer, à condition de prendre en compte l’existence de rapports de pouvoirs, d’inégalités et de discriminations sociales et environnementales. Et de ne pas occulter la question de la compatibilité ou non du modèle économique, consumériste et financier mondialisé actuel avec une réduction urgente et massive des émissions de gaz à effet de serre.

 Cf. notre dossier ci-dessous sur les enjeux de la COP23, les mobilisations des organisations de la société civile, et les avancées de l’égalité femmes-hommes.
 Communiqué de la CCNUCC à la fin des négociations
 Réactions d’organisations de la société civile, Réseau Action Climat (vidéo)

Les enjeux de la COP23

La 23ème conférence des parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques a démarré le lundi 6 novembre 2017.

Il s’agit d’une nouvelle étape dans la mise en oeuvre de l’Accord de Paris de 2015. Celui-ci est actuellement ratifié par 169 pays et signé par tous les pays de l’ONU - sauf la Syrie et les Etats-Unis qui se sont retiré de l’Accord. Parmi les pays importants n’ayant pas encore ratifié figurent la Russie et la Turquie. De son côté, la Chine apparait très mobilisée pour la COP23.

Depuis la COP21 à Paris, la plupart des Etats ont déposé leurs "contributions déterminées au niveau national", indiquant leurs engagements en matière d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre et de politiques climatiques. Un premier bilan doit être fait en 2018. Mais ces contributions, fondées sur le volontariat, sont insuffisantes pour parvenir à l’objectif de l’Accord de Paris qui était de contenir la hausse de la température moyenne sur la planète « nettement en dessous de 2 °C » en 2100 par rapport aux niveaux préindustriels, en « poursuivant des efforts » pour limiter cette hausse à 1,5°. Selon le rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement, paru quelques jours avant le début de la COP23, la mobilisation actuelle mène la planète vers un réchauffement global de plus de 3°. Les émissions de gaz à effet de serre ont continué à augmenter : 0,5 % en 2016. L’année 2016 a été la plus chaude depuis les premiers enregistrements à la fin du 19ème siècle, selon l’Organisation météorologique mondiale, soit +1,1°C par rapport à l’époque préindustrielle. Les épisodes climatiques extrêmes se multiplient, tels les récents ouragans dans les Caraïbes ou le cyclone qui a dévasté les îles Fidji (qui président la COP23), début 2016, affectant 40% de la population, avec 40 000 maisons et 200 écoles endommagées ou détruites, 1,4 milliard de dollars de dégâts (soit un tiers du PIB du pays).

L’enjeu central de la COP23 est la négociation des règles d’application de l’ Accord de Paris qui doivent être adoptées à la COP24, qui se tiendra en Pologne en 2018. Un objectif de la COP23 est donc d’initier un "dialogue de facilitation" visant à rehausser les engagements des contributions des Etats et à harmonisation les informations et les modes de calcul de ces contributions nationales, pour permettre un premier bilan en 2023. Des discussions se poursuivent également sur des enjeux et initiatives thématiques de "l’Agenda de l’action" : agriculture, énergie, forêts, eau, finances, santé...

Mais comme à chaque négociation internationale, se pose la question de l’insuffisance des financements climat en direction des pays les plus pauvres, qui sont aussi les moins émetteurs de gaz à effet de serre et les moins responsables du dérèglement climatique. Pour eux, la reconnaissance des pertes et dommages dues aux catastrophes climatiques et de leur indemnisation, est cruciale, mais les pays riches sont réticents à considérer leur responsabilité qui déboucherait sur des soutiens financiers. Un Mécanisme international de Varsovie relatif aux pertes et dommage a été créé en 2013 lors d’une précédente COP, mais le plan d’action 2017-2021 proposé par le Groupe des experts sur les pertes et dommages est critiqué pour son insuffisance.

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