Édition du 7 mai 2024

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Libre-échange

Libre-échange Canada-Colombie

Déclaration du Congrès du travail du Canada sur l’adoption de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie

Un plus grand nombre de chefs syndicaux se font assassiner en Colombie pour avoir exercé leurs droits humains et syndicaux fondamentaux que dans l’ensemble des autres pays. Et la plupart de leurs meurtres sont commis impunément.

Le Congrès du travail du Canada est consterné de constater qu’en dépit de l’opposition répandue des syndicats, des groupes confessionnels et des organisations non gouvernementales de développement, la loi de mise en vigueur de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie a reçu l’assentiment royal le 30 juin 2010.

À peine quelques semaines plus tôt, deux syndicalistes de plus ont été assassinés en Colombie. Aucun accord de libre-échange n’améliorera le lamentable dossier qui fait de la Colombie le pays le plus dangereux du monde pour les syndicalistes. On peut soutenir que le gouvernement du président sortant Alvaro Uribe viole les droits de la personne plus que tout autre gouvernement de la région. La conclusion de faibles ententes particulières de coopération dans les domaines du travail et de l’environnement ne modifiera en rien le quotidien des syndicalistes et des peuples autochtones de Colombie.
Un plus grand nombre de chefs syndicaux se font assassiner en Colombie pour avoir exercé leurs droits humains et syndicaux fondamentaux que dans l’ensemble des autres pays. Et la plupart de leurs meurtres sont commis impunément.

Le Congrès du travail du Canada a mené une campagne d’opposition à l’Accord conclu en juin 2007. Grâce à notre militantisme et à l’action que nous avons menée de concert avec nos partenaires de la société civile et les députées et députés du Nouveau Parti démocratique et du Bloc Québécois, l’Accord est demeuré en suspens au Parlement pendant deux années.
En 2008, par suite de pressions intenses faites par des syndicats, des ONG et d’autres intervenants, le Comité permanent du commerce international (CIIT) de la Chambre des communes a procédé à une étude qui a donné lieu à la production du rapport intitulé Droits humains, l’environnement et l’Accord de libre-échange avec la Colombie.

Après avoir entendu les témoignages des gouvernements, du monde des affaires et d’un vaste éventail de personnes représentant la société civile et s’être rendu en mission officielle à Bogota, le Comité a publié au nom de tous les partis ce rapport recommandant au Parlement de ne pas signer l’accord commercial. Le Comité a demandé plutôt « qu’un organe compétent effectue un examen indépendant, impartial et complet des répercussions d’un accord sur les droits de la personne, examen qui serait vérifié et validé ». Il semblait judicieux d’analyser préalablement les répercussions des dispositions commerciales sur les violations des droits humains, compte tenu des preuves de plus en plus nombreuses d’une collusion entre les membres du Congrès de la Colombie et des narcotrafiquants et voyous paramilitaires ainsi que de l’impunité dont ne cessent de bénéficier les auteurs de crimes contre les droits de la personne.

Malheureusement, le consensus entre tous les partis a été rompu en 2009 quand le Parti libéral a annoncé qu’il appuyait le projet de loi du gouvernement pour la mise en vigueur de l’accord commercial avec la Colombie. La présentation de preuves de violations des droits syndicaux par la majorité des syndicats démocratiques de Colombie, le Congrès du travail du Canada et la Confédération syndicale internationale n’a pas suffi. Par l’entremise de son porte-parole en matière de commerce international, Scott Brison, le Parti libéral a proposé l’addition d’une entente particulière à l’Accord de libre-échange Canada-Colombie qui serait jugée acceptable par le gouvernement du Canada et celui de la Colombie et selon laquelle les deux pays présenteraient eux-mêmes des rapports annuels au sujet des effets sur les droits humains des mesures commerciales que prévoit l’Accord – après sa mise en vigueur. Nous avons reproché que ce projet revenait à « demander au renard de surveiller le poulailler ».

Au printemps de 2010, notre gouvernement a mis un terme aux audiences publiques du Comité permanent du commerce international avec l’appui de ses membres libéraux. Le Congrès du travail du Canada et les personnes représentant les syndicats démocratiques et d’autres groupes de la société civile de Colombie n’ont pas pu présenter leurs témoignages. Le projet de loi de mise en vigueur de l’accord commercial a de nouveau été déposé à la Chambre des communes et il a été adopté.

La lutte pour faire échec à l’Accord de libre-échange Canada-Colombie a inscrit les droits humains au coeur du débat sur les accords de libre-échange, particulièrement avec des pays vivant des conflits tels que la Colombie. En collaborant avec des membres progressistes de l’opposition et le reste de la société civile, nous avons sensibilisé les gens à des outils, comme les évaluations de l’impact sur les droits humains, qui permettent d’exercer une diligence raisonnable au cours des négociations commerciales. Les tactiques ont permis de retarder pendant deux années la mise en oeuvre d’un accord peu judicieux et de porter la population canadienne à se demander pourquoi notre gouvernement était disposé à sacrifier les droits humains sur l’autel du commerce.

Le Congrès du travail du Canada n’a pas fini de lutter et maintient sa solidarité avec les travailleuses et travailleurs et les citoyennes et citoyens de la Colombie. Nous nous sommes engagés à continuer de surveiller les violations des droits humains et syndicaux et de dénoncer les rapports entre ces violations et le commerce et l’investissement en Colombie et partout où le Canada décide de mettre en oeuvre le modèle inéquitable de l’ALENA.

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