Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Asie/Proche-Orient

Inde. Déclaration du groupe Vikalp Sangam Core sur la nécessité d’alternatives créatives et à long terme suite au Covid-19

Alors que l’Inde et le monde font face à une crise sans précédent due à la propagation du virus Covid-19, la première et immédiate réponse doit être des installations de santé et de traitement, l’éloignement physique, les secours et la satisfaction de besoins de base pour les travailleurs, les services de base et autres des mesures qui réduisent à la fois le risque de propagation et offrir également une sécurité économique et de survie aux personnes les plus touchées non seulement par l’infection mais par l’arrêt de la vie ordinaire. Une attention particulière doit être accordée aux plus vulnérables, notamment les personnes âgées, les « handicapés », les femmes et les enfants, les travailleurs à salaire journalier, les résidents des « bidonvilles » urbains surpeuplés, les prisonniers dans les cellules surpeuplées, les travailleurs de l’assainissement et des déchets, les personnes transgenres, les travailleurs du sexe et les petits agriculteurs, éleveurs, pêcheurs et habitants des forêts.

tiré de : Entre les lignes et les mots 2020 - n°16 - 11 avril : Notes de lecture, textes, pétitions
https://webmail.koumbit.net/roundcube/?_task=mail&_caps=pdf%3D0%2Cflash%3D1%2Ctif%3D1&_uid=78971&_mbox=INBOX&_action=show

À cet égard, nous appuyons et réitérons les observations faites par plusieurs forums et réseaux, notamment par la Charte des travailleurs, Jan Swasthya Abhiyan, d’un grand nombre d’économistes et d’autres citoyens concernés, et la Campagne pour la justice environnementale en Inde. Plusieurs pays à travers le monde, et certains États de l’Inde, ont déjà annoncé des aides salariales, de la nourriture et d’autres livraisons essentielles, des salaires maintenus pour les travailleurs sans emploi, etc. L’Inde doit prendre le pas d’une réponse nationale, en s’appuyant mais en allant bien au-delà des annonces du ministre des Finances le 26 mars. Elle doit également promouvoir la solidarité et l’unité sociales tout en favorisant la distanciation physique (et non « sociale » !) , encourageant les réseaux de citoyens qui peuvent aider les plus vulnérables, dont beaucoup émergent spontanément à travers l’Inde. Elle doit décourager activement les réponses préjugées, racistes ou classistes qui sont malheureusement observées dans certains domaines, par exemple contre les gens du nord-est de l’Inde parce qu’ils ressemblent aux Chinois, ou contre les collecteurs de déchets, ou contre les étrangers qui se trouvent toujours en Inde. Elle doit protéger les droits humains fondamentaux contre les violations causées par une surveillance accrue de l’État et des interventions dans la vie des citoyens, car il est facile de se glisser dans des formes d’autoritarisme dans de telles situations (en particulier lorsque nous utilisons des métaphores comme « nous sommes dans un état de guerre ») ; nous devons plutôt habiliter les communautés et les collectifs à appliquer les normes sociales nécessaires pour y faire face, avec le soutien du gouvernement. Enfin, toutes les ressources du gouvernement consacrées à des dépenses inutiles ou pouvant être différées doivent être affectées à répondre au Covid-19.

Il est cependant important d’initier également des mesures à plus long terme, maintenant ou lorsque la crise immédiate sera terminée, qui (a) réduiront considérablement la possibilité d’une propagation plus désastreuse des maladies et (b) amélioreront considérablement la capacité des communautés à faire face à ces éventualités. Nous les énumérons ci-dessous.

Nous pensons que la survie et la durabilité de cette planète résident dans l’adoption de valeurs de dignité, d’égalité et de justice pour toutes les espèces, tous les genres et toutes les catégories sociales. Cela devrait se refléter dans le rejet de toutes les politiques et pratiques qui causent la destruction, l’exploitation et la discrimination et l’injustice contre tout être vivant. Les stratégies et cadres nationaux dans tous les secteurs doivent être axés sur la santé humaine et environnementale.

En particulier, nous demandons instamment que les éléments suivants soient pris en considération :

1- Imposer un moratoire sur tout détournement des écosystèmes naturels à des fins d’infrastructure, d’exploitation minière et commerciale.


Il existe un lien clair et scientifiquement établi entre la destruction écologique et la propagation de maladies comme le Covid-19. Même si le Covid-19 est originaire de Chine, d’autres agents pathogènes de ce type pourraient provenir de l’Inde ou se propager plus largement en raison de la perturbation des équilibres naturels et des interdépendances. Un moratoire immédiat sur le détournement des écosystèmes naturels, y compris les forêts et les zones humides, pour l’exploitation minière, les infrastructures et d’autres projets de « développement » est crucial ; et plutôt d’initier d’autres alternatives pour répondre aux besoins de subsistance et de développement, comme indiqué ci-dessous.

2 – Prioriser et faciliter les systèmes de santé communautaires et le secteur de la santé publique

Chaque établissement doit disposer d’installations primaires combinant plusieurs systèmes de santé, avec des médecins aux pieds nus et des ambulanciers paramédicaux formés aux soins et aux traitements essentiels, y compris pour faire face aux situations de type Covid-19. La plus haute priorité doit être accordée au renforcement de la santé publique, y compris les unités épidémiologiques au niveau du district qui peuvent comprendre et surveiller les problèmes de santé locaux et leurs déterminants, ainsi que remettre les services médicaux du secteur public aux commandes, plutôt que la privatisation encouragée ces derniers temps (avec les conséquences dévastatrices que nous constatons même dans les pays « développés » comme les États-Unis, avec des millions de personnes incapables de se permettre même des contrôles de base). Les connaissances traditionnelles sur la santé qui ont résisté à l’épreuve du temps doivent être utilisées de manière optimale dans la crise actuelle et dans le développement à long terme des services de santé dans le pays, notamment en utilisant AYUSH, amchi et les traditions de santé locales pour développer des méthodes de prévention solides, telles que l’utilisation d’immuno-boosters à base de plantes (à noter que la Chine a été en mesure d’utiliser la médecine traditionnelle chinoise très efficacement à la fois pour la prévention et le traitement des cas de la crise Covid-19).

3 – Promouvoir la conception écologique et la sensibilité dans tous les développements et moyens de subsistance

Une politique claire et une orientation programmatique sont nécessaires pour trouver des moyens écologiquement durables et équitables de créer des moyens de subsistance et des emplois, des infrastructures, des communications, etc., et garantir des moyens de subsistance dignes, par ces moyens, dont on peut tirer des enseignements (voir par exemple www.vikalpsangam.org). Il est tout à fait possible d’orienter les programmes existants comme le MNREGS, le logement, l’agriculture et d’autres dans cette direction.

4- Aider les agriculteurs à passer à l’agriculture biologique et biodiversifiée.

Étant donné les liens évidents entre une agriculture industrielle à forte intensité de produits chimiques et une perturbation écologique créant les conditions de telles catastrophes liées aux maladies, des mesures urgentes sont nécessaires pour aider tous les agriculteurs à passer à une agriculture biologique diversifiée sur le plan biologique avec une assistance spéciale aux petits agriculteurs, pasteurs, pêcheurs et habitants des forêts. Les essais et disséminations d’OGM, avec leur grand potentiel de perturbation écologique, doivent être arrêtés immédiatement.

5- Renforcer l’auto-gouvernement grâce aux gram sabhas1, aux sabhas2 de zone / quartier

La mise en œuvre de l’autonomie locale dans toute sa mesure, une véritable démocratie populaire est cruciale. Les gram sabhas, les sabhas de zone / quartier et d’autres institutions de gouvernance locales auront besoin d’aide pour renforcer les capacités et générer des ressources, afin qu’ils puissent gouverner leurs terres et leurs écosystèmes, leur vie économique et communautaire, et pour ce faire de manière à garantir la représentation et participation des sections marginalisées pour garantir la justice sociale.

6- Renforcer les économies locales autonomes

Il est maintenant évident qu’une économie mondiale, avec des ressources, de la main-d’œuvre et des produits qui se déplacent à travers le monde, est un système extrêmement vulnérable qui est susceptible de s’effondrer. Les institutions d’autonomie locale doivent disposer des ressources, de l’assistance technique et d’autres formes de coopération afin de développer leurs propres économies locales et autonomes, en utilisant des compétences et des ressources locales et nouvelles, en répondant avant tout aux besoins locaux. Un commerce plus important devrait s’appuyer sur cela et ne pas le saper. Grâce à cela, la nécessité d’une mobilité et d’un commerce de masse pourrait être considérablement réduite. Cela pourrait même aider à réduire et à inverser la migration rurale-urbaine causée par la détresse économique et sociale, et conduit à des densités urbaines très élevées qui sont propices aux épidémies.

7- Repenser les établissements urbains et semi-urbains

Nous devons repenser les agglomérations urbaines et semi-urbaines de manière à ce que le lieu de travail et la résidence de la plupart des gens soient à proximité, l’autonomie gouvernementale par le biais des sabhas de zone soit autonomisée et les écosystèmes naturels urbains soient régénérés et protégés grâce aux forums de citoyens.

Ces mesures et d’autres mesures connexes ont été décrites plus en détail dans le Manifeste du peuple pour une Inde juste, équitable et durable, publié par le processus Vikalp Sangam au début de 2019 (http://www.vikalpsangam.org/article/peoples-manifesto-for-a-just-equitable-and-sustainable-india-2019/). Nous demandons instamment sa pleine considération comme contexte des recommandations ci-dessus.

Au nom des organisations du groupe Vikalp Sangam (classées ci-après par ordre alphabétique).

Le processus Vikalp Sangam est une plateforme pour rassembler des mouvements, des groupes et des individus travaillant sur des voies justes, équitables et durables vers le bien-être humain et écologique. Il rejette le modèle de développement actuel et les structures d’inégalité et d’injustice qui le sous-tendent et recherche des alternatives dans la pratique et la vision. Plus de 50 mouvements et organisations à travers le pays sont impliqués. Pour plus d’informations, voir http://www.vikalpsangam.org/

28 mars 2020

ACCORD (Tamil Nadu), Alliance for Sustainable and Holistic Agriculture (national), Alternative Law Forum (Bengaluru), Ashoka Trust for Research in Ecology and the Environment (Bengaluru), BHASHA (Gujarat), Bhoomi College (Bengaluru), Blue Ribbon Movement (Mumbai), Centre for Education and Documentation (Mumbai), Centre for Environment Education (Gujarat), Centre for Equity Studies (Delhi), CGNetSwara (Chhattisgarh), Chalakudypuzha Samrakshana Samithi River Research Centre (Kerala), ComMutiny : The Youth Collective (Delhi), Deccan Development Society (Telangana), Deer Park (Himachal Pradesh), Development Alternatives (Delhi), Dharamitra (Maharashtra), Ekta Parishad (several states), Ektha (Chennai), EQUATIONS (Bengaluru), Gene Campaign (Delhi), Greenpeace India (Bengaluru), Health Swaraaj Samvaad (national), Ideosync (Delhi), Jagori Rural (Himachal Pradesh), Kalpavriksh (Maharashtra), Knowledge in Civil Society (national), Kriti Team (Delhi), Ladakh Arts and Media Organisation (Ladakh), Local Futures (Ladakh), Maati (Uttarakhand), Mahila Kisan Adhikar Manch (national), Mazdoor Kisan Shakti Sangathan (Rajasthan), National Alliance of Peoples’ Movements (national), North East Slow Food and Agrobiodiversity Society (Meghalaya), Peoples’ Science Institute (Uttarakhand), Revitalising Rainfed Agriculture Network (national), reStore (Chennai), Sahjeevan (Kachchh), Sambhaavnaa (Himachal Pradesh), Samvedana (Maharashtra), Sangama (Bengaluru), Sangat (Delhi), School for Democracy (Rajasthan), School for Rural Development and Environment (Kashmir), Shikshantar (Rajasthan), Snow Leopard Conservancy India Trust (Ladakh), Social Entrepreneurship Association (Tamil Nadu), SOPPECOM (Maharashtra), South Asian Dialogue on Ecological Democracy (Delhi), Students’ Environmental and Cultural Movement of Ladakh (Ladakh), Thanal (Kerala), Timbaktu Collective (Andhra Pradesh), Titli Trust (Uttarakhand), Tribal Health Initiative (Tamil Nadu), URMUL (Rajasthan), Vrikshamitra (Maharashtra), Watershed Support Services and Activities Network (Andhra Pradesh/Telangana)

1 Les gram sabhas sont des gouvernements locaux au niveau des villages. Ndt.

2 Conseil ou assemblée. Ndt.

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