Édition du 14 mai 2024

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Le blogue de Louise Chabot

Je suis féministe, et vous ?

C’est étrange, à l’approche du 8 mars, chaque année, un événement arrive pour nous rappeler à quel point le combat du mouvement féministe est encore pertinent.

Pas plus tard que la semaine dernière, deux ministres du gouvernement libéral de Philippe Couillard ont tenu à souligner le fait qu’elles n’étaient pas féministes : Stéphanie Vallée, ministre de la Condition féminine sortante et actuelle ministre de la Justice, et Lise Thériault, ministre de la Condition féminine !

Cette dernière a nuancé son propos, se disant « féministe, à sa manière ». Cependant, le mal est fait. Prônant une approche « individuelle plutôt que collective », la ministre croit que tout ce qu’une femme a à faire pour prendre sa place, c’est de travailler plus fort. Le premier ministre lui-même a tenu à ajouter de l’huile sur le feu en affirmant : « ce n’est pas un débat utile pour moi »...

Une myriade d’articles ont été écrits pour expliquer à la ministre en quoi elle avait tort à ce sujet, je vous invite à les lire :

Réplique des féministes à la ministre Thériault, qui ne se dit pas féministe...

Ministres & rejet du féminisme ou l’inculture bienheureuse

Lise Thériault, le féminisme et le dictionnaire

Le féminisme tout libéral de Lise Thériault

15 livres sur le féminisme que la ministre Lise Thériault devrait lire

Je vous propose aussi une lecture de l’effet qu’aurait une analyse féministe sur les actions du gouvernement et qui illustre l’importance de mettre en application de façon plus rigoureuse et étendue l’analyse différenciée selon les sexes.

Un peu plus de féminisme à la Justice et à la Sécurité publique

En analysant les politiques de sécurité publique et de justice sous la lorgnette du féminisme, nous arrêterions peut-être de voir les cas de violence faite aux femmes (violence sexuelle, conjugale, économique, etc.) comme autant de tragédies individuelles et nous pourrions attaquer le problème de front.

N’oublions pas qu’au Canada, la moitié des femmes ont été victimes d’au moins un acte de violence physique ou sexuelle depuis l’âge de 16 ans. C’est un problème systémique et nous devons nous y attaquer en tant que tel. Nous devons arrêter de voir les arbres et prendre le recul nécessaire pour voir la forêt.

Plus de féminisme = meilleure conciliation famille-étude-travail

Au Québec, les responsabilités et les tâches ménagères incombent encore beaucoup plus aux femmes dans les ménages (http://iris-recherche.qc.ca/publications/taches-domestiques). Il est normal alors que le mouvement féministe soit associé de près à la lutte pour que le monde du travail et des études s’adaptent aux réalités familiales des Québécoises et Québécois.

Une analyse féministe aurait aussi conclu que c’est une bien mauvaise idée de saccager notre réseau public de services de garde comme le gouvernement libéral le fait présentement. Ce réseau, résultat d’un long combat féministe, a permis à des dizaines de milliers de femmes d’accéder ou de retourner sur le marché du travail. Encore aujourd’hui, c’est la pièce maîtresse d’une politique familiale qui gagnerait à être plus cohérente et plus... féministe !

Plus de féminisme = moins d’austérité

Comme l’expliquait Eve-Lyne Couturier au magazine Nouvelles CSQ et Aurélie Lanctôt dans son essai Les libéraux n’aiment pas les femmes, les mesures d’austérité mises en place par le gouvernement Couillard heurtent les femmes de plein fouet. Que ce soit les coupes en éducation, en petite enfance, en santé et en services sociaux ou dans les organismes communautaires, le gouvernement libéral met en péril des acquis durement gagnés par le mouvement des femmes et le mouvement syndical à travers le temps.

Simone de Beauvoir ne pensait pas si bien dire lorsqu’elle affirmait : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » Force est de constater que les ministres Thériault et Vallée ont mis leur vigilance en veilleuse...

Avez-vous d’autres exemples de ce qu’une analyse féministe pourrait apporter de positif au Québec ?

Louise Chabot

Présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) (depuis 2012)

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