Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Syndicalisme

La revendication clef du Front commun : l’indexation salariale

Le fer de lance anti-inflationniste de tout le peuple-travailleur

La revendication clef du Front commun est grosso modo une indexation des salaires au coût de la vie plus un rattrapage de 2 à 4% l’an sur trois ans. L’offre salariale gouvernementale est de 9 % sur 5 ans alors que l’inflation a été de 6,7 % uniquement pour l’année 2022. Les négociateurs patronaux refusent de bouger. Le Premier ministre va jusqu’à prétendre que l’offre gouvernementale équivaut au taux d’inflation prévu pour les cinq prochaines années. Tout un devin le Premier ministre de prévoir un taux d’inflation d’à peine plus de 2% l’an sur les cinq prochaines années sans compter que l’offre gouvernemental ne compense pas l’inflation québécoise de plus de 11% sur les deux dernières années jusqu’en juillet 2023.

Difficile de croire qu’il n’y aura pas un clash débouchant sur la grève. On peut cependant regretter que le Front commun ne prenne qu’indirectement en compte la crise des services publics en n’avançant pas des revendications aussi précises que celles salariales telles des quotas, des planchers d’emploi par secteurs et des embauches supplémentaires sans lesquelles il est vain de s’attaquer au temps supplémentaire obligatoire et aux journées sans fin des enseignantes. Reste qu’il n’y a pas de rétention et recrutement sans indexation et rattrapage salariaux. Le Front commun ose tabler sur la colère populaire pour exiger l’indexation des salaires au coût de la vie, ce que n’ont fait ni les grévistes débardeurs de Colombie britannique ni ceux des magasins Métro de Toronto même si le rapport de forces des premiers leur a valu une hausse salariale non négligeable.

La revendication de l’indexation est en soi rassembleuse car elle est l’épine dorsale de toute lutte anti-inflation du peuple-travailleur québécois et canadien comme elle l’a été dans le contexte de la stagflation des années 1970 avant d’être abandonnée lors de la contre-offensive néolibérale. Elle l’est d’autant plus cette fois-ci que la présente inflation résulte non pas d’une dynamique prix-salaires traduisant un rapport de force bloqué entre la bourgeoisie et le prolétariat. Prédomine aujourd’hui une dynamique prix-profits voulue par les monopoles pétroliers et alimentaires même si le nient les économistes de la Banque du Canada quoique « [l]orsque les coûts augmentent, comme cela a été le cas en 2022 et 2023, les entreprises augmentent leurs prix, mais pas nécessairement leur marge bénéficiaire, même si leurs profits augmentent » !

Il faudrait expliquer cette vérité à la direction Solidaire qui prétend vouloir poser une question par jour sur l’inflation lors de la prochaine session parlementaire. Malgré un appui au Front commun mais d’une grande discrétion — aucun communique de presse ni autre intervention médiatique sur le sujet — jamais les porte-parole Solidaire n’ont explicitement appuyé les revendications du Front commun dont la centrale indexation. Ils ont encore moins défendu l’indexation des salaires de tout le peuple-travailleur et des prestations sociales au coût de la vie comme moyen de résister à l’inflation patronale et ainsi la neutraliser comme outil pour baisser les salaires réels. Après seulement viennent des mesures structurantes comme le contrôle des loyers et des prix des aliments et services publics de base tout comme la reprise de la construction en masse de logements sociaux… écoénergétiques dont personne ne parle même si c’est dans le programme Solidaire. Ce serait là faire le pont entre lutte anti-inflation et lutte climatique tout comme le serait le contrôle des prix des céréales non transformées, fruits et légumes, et légumineuses mais non de la viande.

On rêve d’un coup médiatique parlementaire où la députation Solidaire se vête du chandail du Front commun et déclare haut et fort qu’elle appuie ses revendications, en particulier l’indexation. On pense à la rentrée parlementaire ou le 23 septembre, date du premier rendez- vous du Front commun dans la rue… et espérons-le avec une foule d’organisations et de personnes alliées. On y verra sans doute une majorité de femmes qui forment les trois quarts des syndiquées du Front commun. Et ce serait davantage si la FIQ des infirmières cessait son petit jeu corporatiste parce qu’elle croit que sa plus grande popularité relative lui permettra d’arracher un meilleur contrat… tout en servant d’épouvantail à moineaux au Premier ministre. Déjà la FAE enseignante, l’autre tireur au flanc, a coupé en deux sa revendication salariale avant même de livrer combat. Les femmes méritent mieux que ça. La lutte du Front commun c’est leur lutte sur le chemin de leur autonomie matérielle si ce n’est de leur dignité, un support indispensable pour tenir leur bout face aux assauts du sexisme… et aussi du masculinisme des quatre gars sur quatre qui sur le site même du Front commun leur expliquent ce qu’elles doivent revendiquer !

Marc Bonhomme, 10 septembre 2023

www.marcbonhomme.com ; bonmarc@videotron.ca

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