Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Québec solidaire

Un Québec indépendant de plein emploi écologique pour sortir du pétrole

Nous publions ici une contribution de Marc Bonhomme autour de la discussion de la plate-forme de Québec solidaire. (NDLR PTAG)

Pour éviter l’isolement que l’alliance nationaliste avec le PQ prétendait résoudre, s’impose une nouvelle alliance avec les nations autochtones et inuit, les nationalités racisées et les mouvements sociaux. Les luttes climatique et pour la biodiversité pour sauver la civilisation en sont le creuset. Cette nouvelle alliance concerne en particulier la jeunesse qui déserte la cause indépendantiste... à moins qu’elle soit comprise comme indispensable aux causes écologiste, de justice sociale et de paix mondiale. Militarisme, racisme et sexisme cristallisent le corrompu capitalisme des copains, stade suprême néolibéral. Envenimés par la crise climatique, ces fléaux dévastent nature et société par l’intensité énergétique des armées, par les destructions massives des guerres nécessitant une reconstruction énergivore. La haine engendrée bloque l’émergence d’une alternative tout en faisant le lit des barbaries impérialistes, grandes et petites, et de leur contrepartie, la barbarie djihadiste.

La cible radicale Solidaire de baisser des deux tiers d’ici 2030 par rapport à 1990 les émanations de GES est conforme à la science et aux objectifs des Accords de Paris de contenir la hausse moyenne de la température mondiale à 1,5°C en 2100 . Elle est inatteignable par le marché ou la taxe carbone qui font le jeu des marchés financiers et des grands pollueurs. Elle exige qu’aucune goutte d’hydrocarbure québécois ne sorte de terre. Elle nécessite une planification démocratique financée par une mobilisation de l’épargne nationale et le contrôle des échanges commerciaux, ce qui requiert l’indépendance. Le Québec peut être « quelque chose comme un grand peuple » à l’image des femmes du Québec qui furent à l’initiative de la Marche mondiale des femmes. Encore mieux que les Bernie Sanders et Jeremy Corbyn, lestés par des partis faillis, Québec solidaire propose de dépasser le capitalisme pour sauver la civilisation, ce que sait faire le peuple québécois du Printemps érable. Cette radicalité est la réponse à la montée de l’extrême-droite qui stigmatise le Québec racisé et menace le monde.

De grands chantiers écologiques au cœur de la plateforme

Ce radicalisme appelle à une plateforme de plein emploi écologique basé sur de grands chantiers. Il faut réhabiliter selon la fine pointe de la technologie écologique l’ensemble du stock de bâtiments du Québec tout en multipliant les bâtiments à quasi consommation zéro d’énergie comme la bibliothèque publique de Varennes. 50 000 logis sociaux en seront l’avant-garde. Les bâtiments et logements non climatisés à l’électricité seront convertis et ainsi rénovés d’ici 2030. Plus crucialement, car c’est là où le bât blesse, d’ici 2030 le transport électrique des livraisons de proximité à partir de pôles de transbordement maritime-rail doit être achevé. Sera en voie de réalisation la transition du transport à longue distance par cabotage et par train intermodal. Le transport des personnes devra être essentiellement assuré en 2030 par le transport collectif électrifié et un complément d’auto-partage communautaire plus important dans les petites villes et les villages.

Québec solidaire ne subventionnera pas les entreprises car l’efficacité énergétique abaissera leurs coûts. Le parti les obligera à se doter d’une politique d’écologie du lieu de travail, en accord avec les syndicats à favoriser partout, assurant sécurité du travail et au travail. Les entreprises, individuellement et conjointement, seront tenues de reconvertir les emplois devant être supprimés pour raison écologique. La Banque d’État préconisée par les Solidaires financera les PME délaissées par les banques de même que les petits et moyens propriétaires devant rénover leurs logements tout en assurant une protection des loyers. L’ensemble des banques et consorts sera mobilisé pour financer à bon compte la plateforme pour le plein emploi écologique.

Ces grands chantiers écologiques seront la voie royale vers le plein emploi écologique, épine dorsale de la lutte contre la pauvreté et les inégalités. La plateforme y ajoutera un réinvestissement massif anti-austérité dans les services publics. Ces emplois sont aussi écologiques en plus d’être féministes parce que les femmes en sont les principales bénéficiaires tant comme travailleuses rémunérées que domestiques. Ces emplois requièrent une masse d’énergie humaine mais très peu d’énergie fossile tout comme ils enrichissent les relations personnelles aux dépens du stress compétitif. Ce stress avec les poisons alimentaires et aériens sont les sources majeures de mauvaise santé. En découle une priorité à la santé préventive à partir des CLSC, point d’attache de tous les médecins de famille. L’envers de la médaille en est la réutilisation et la récupération des déchets à 100%.

Ces grands chantiers se combineront à la baisse du temps de travail à 35 heures semaine sans baisse de revenu ce qui libérera du temps pour socialiser, s’éduquer, créer et militer, contrepartie du consumérisme. Ce Québec de plein emploi écologique et social se dotera d’une politique d’immigration sans frontière pour combler les postes vides, dynamiser son économie et enrichir sa culture. La hausse du salaire minimum à 15$ est aussi écologique car une travailleuse pauvre est forcée à acheter de la pacotille vite à renouveler, de la nourriture agro-industrielle et souvent une vieille auto énergivore tout comme à louer un logement mal isolé.

Québec solidaire n’attendra pas les calendes grecques pour légiférer en termes de zonage, de code du bâtiment et autres obligations afin d’amorcer le processus d’une ville sans auto solo, sans bungalow et sans publicité, but atteignable dès 2050. La ville nouvelle s’appuiera sur une agriculture biologique de fermes familiales et coopératives adéquatement soutenues pénétrant le tissu urbain et liée à la ville par un maximum de circuits courts impliquant obligatoirement les entreprises de transformation et de distribution alimentaire.

Les ménages québécois, une fois informés adéquatement, seront heureux de ce soulagement budgétaire consistant à se débarrasser de leurs véhicules privés en faveur d’un transport public gratuit du XXI iè siècle qui n’a rien à voir avec le REM (voir annexe), de renoncer à la maison unifamiliale et même en rangée en faveur d’un logement collectif de qualité adossé à des services de proximité, à un réseau bicyclette-piéton et au transport public, y compris l’autopartage, et avec accès à l’agriculture urbaine au sol ou sur les toits.

Un plan financièrement réaliste, à gratuité mobilisatrice et requérant l’indépendance

Il faut arrêter de flipper à propos du financement. Une réforme fiscale en profondeur, dont le blocage des paradis fiscaux et la fin de l’évasion et de l’évitement fiscaux, y suffira. La Coalition mains rouges a démontré que le seul Québec fédéral pouvait aller chercher dix milliards $ de plus l’an en revenus fiscaux supplémentaires. Rappelons que financement ne signifie pas nécessairement dépense budgétaire mais investissement récupérable. On finance les négawatts de la réhabilitation énergétique des bâtiments et les flottes de camions électrifiés de la même façon que les mégawatts d’Hydro-Québec. Sauf que l’usager payeur, par la conservation de l’énergie, débourse moins pour payer sa dette que ses frais énergétiques initiaux.

La clef de voûte mobilisatrice de la plateforme pour le plein emploi écologique en est la gratuité du transport collectif sur dix ans. Il l’est déjà à l’intérieur de petites villes comme Chambly, Ste-Julie et Beauharnois. Cette revendication-clef a le même potentiel mobilisateur que la gratuité scolaire l’a été pour le Printemps érable. La gratuité scolaire, dans le cadre d’une éducation citoyenne non marchande, est de soi écologique. Elle généralise la culture scientifique afin de comprendre les grands équilibres écologiques et les causes des crises écologiques qui ont tout à voir avec l’accumulation capitaliste. Elle débouche sur la recherche et la mise en place de solutions qui ont tout à voir avec la socialisation des grands moyens de production dont la Finance, les système de transport et d’énergie et les entreprises d’exploitation des ressources naturelles. Les écoles privées et consorts réservées à une élite et la recherche universitaire prise en otage par les grandes entreprises bloquent ce changement d’où la suppression des premières et la socialisation de la seconde.

Le plein emploi écologique nécessite l’indépendance pour détenir les pouvoirs constitutionnels pour le réaliser et surtout pour se débarrasser de l’humiliant et paralysant fardeau du Quebec bashing : les pouvoirs pour contrôler la Finance et les changes grâce à une monnaie nationale, ceux pour que le Québec ne devienne pas une passoire pétrolière et gazière et pour qu’il se sorte d’accords de libre-échange masquant la dictature des transnationales. Ces pouvoirs seront au cœur de l’apport Solidaire à la Constituante à convoquer sans plus tarder tout comme le parti réclame dès maintenant une série de réformes démocratiques centrées autour de la proportionnelle compensatoire, d’assemblée de reddition de compte et de droits de rappel des personnes élues. La Constituante permettra de reconnaître le droit à l’indépendance des nations aborigènes de la province fédérale du Québec et de leur offrir l’égalité nationale dans le cadre d’une république fédérée et écologique.

Un tel projet de société emballant redonnera le goût du français à la jeunesse qui n’accepte pas la répression linguistique sauf celle contre le patronat en ce qui concerne la langue de travail et celle d’affichage. Il facilitera l’intégration des communautés culturelles et racisées, surtout en termes d’emploi, et leur adhésion à la québécitude, dont le français, loin du néolibéralisme guerrier que fuient les réfugiées. Il favorisera les relations de peuple à peuple, y inclus ceux canadien et étasunien, pour obtenir leur accord au projet indépendantiste et pour établir des ententes commerciales, financières, scientifiques, culturelles réciproquement avantageuses et, pourquoi pas, pour aller dans la même direction que le peuple québécois... ou vice-versa.


Annexe : Une alternative écologique et populaire au REM, au même coût

Le REM sert les intérêts de la Finance, de « l’industrie de la corruption » et de Bombardier et « oublie » tant l’est de Montréal que le restant du Québec. Comme alternative au même prix, on peut s’inspirer du « Grand virage » : — Pour un budget semblable au REM, le Grand Virage inclut les lignes suivantes de tramway : 1. Anjou/Pie-IX/CHUM ; 2. Laval (Saint-Mart in)/Pie IX/métro Pie-IX ; 3. Métro Lionel-Groulx/Lachine/aéroport ; 4. Centre-ville/pont Champlain/Dix30 ; 5. Centre-ville/pont Champlain/Taschereau/métro Longueuil ; 6. Centre-ville/Côte-des-Neiges ; 7. Le Carrefour/métro Montmorency/Bois-Francs. — Le Grand Virage inclut aussi 3 stations de métro : Pie-IX, Poirier et Bois-Francs. — Il sera même possible de financer une ligne de tramway à Gatineau et une à Québec. Marc Bonhomme, neuf septembre 2017

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