Édition du 23 avril 2024

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Féminisme

À propos de l'accés à l'avortement au Nouveau-Brunswick

Nous en avons le droit / Nous voulons l’accès

Ce feuillet d’information a été préparé par Wendy Robbins et sa traduction a été faite par Noëlla Richard.

La situation actuelle

1. La clinique Morgentaler de Fredericton, la seule clinique autonome dans les Maritimes, est ouverte depuis 20 ans et effectue plus de la moitié des 1 000 avortements fournis annuellement au Nouveau-Brunswick ; elle fermera ses portes en juillet - non pas parce qu’il n’y a pas de demande, mais en raison du réglement provincial NB 84-20, annexe 2 (a.1) adopté en vertu de la Loi sur le paiement des services médicaux. Ce réglement prévoit que les services d’avortement seront remboursés par l’assurance-maladie seulement si les trois conditions suivantes sont réunies : 1) l’avortement sera effectué dans un hôpital ; 2) par un spécialiste en gynécologie ou en obstétrique ; et 3) deux médecins auront confirmé par écrit que l’avortement est "médicalement nécessaire".

2. Un autre règlement dans la Loi sur le paiement des services médicaux, annexe 2.01, interdit le financement public de "services fournis par une clinique privée dans la province". Ces conditions contreviennent à la Loi canadienne sur la santé, à plusieurs décisions de la Cour suprême, et à la Charte canadienne des droits et des libertés, qui garantit le droit à la sécurité de la personne ainsi que le droit des femmes à l’égalité.

3. Le Nouveau-Brunswick est la seule province qui soumet les femmes à de tels obstacles lorsqu’elles veulent un avortement ; l’ÎPÉ, la seule province où il n’y a pas d’avortements du tout (le gouvernement de l’ÎPÉ paie pour les avortements des femmes de l’Île qui vont à Halifax pour l’intervention, mais ne rembourse pas les dépenses de voyage). Environ 10% des clientes de la Clinique de Fredericton viennent de l’ÎPÉ, et même si elles doivent payer de leurs poches, elles préférent les soins qu’elles reçoivent.

4. Dans toutes les provinces et les territoires, y compris le Nouveau-Brunswick, l’avortement est considéré médicalement nécessaire puisque l’intervention est financée si elle est fait dans un hôpital. En 1995, Santé Canada a ordonné aux provinces de financer les cliniques privées qui font des interventions médicalement nécessaires, précisant que ces cliniques sont considérées être des "hôpitaux" en vertu de la Loi sur la santé.

5. Toutes les provinces ayant des cliniques d’avortement les financent pleinement, exception faite du Nouveau-Brunswick ; l’intervention peut être fait par des médecins généralistes ou des spécialistes. Les avortements en clinique coútent moins chers, le service est plus rapide parce que les femmes n’ont pas besoin d’être référées et les femmes en préférent le soutien et l’accompagnement.

6. Le fait d’exiger le consentement écrit de deux médecins pour obtenir un avortement, dans une province où plus de 1 000 femmes sont sur une liste d’attente d’un médecin de famille, constitue un gaspillage de ressources et met la santé des femmes en danger. "Un avortement tardif augmente les risques à la santé psychologique et physique des femmes, et c’est une des raisons pour lesquelles la Cour suprême du Canada a invalidé certaines dispositions du Code criminel en 1988 - celles-ci violaient le droit à la sécurité des femmes en leur imposant des délais arbitraires qui mettaient à risque la santé et la vie des femmes," selon la Coalition du droit à l’avortement du Canada (CDAC).

7. L’Organisation mondiale de la santé a dressé une liste des obstacles qui doivent être éliminés parce qu’ils ont pour effet de retarder l’accés à des avortements sécuritaires : ces obstacles comprennent des lois contraignantes, difficulté d’accés, coút élevé, des tests inutiles, and des autorisations de tiers partis.

8. "À moins de changer le réglement et augmenter les ressources, les femmes du Nouveau-Brunswick (avec la fermeture de la clinique Morgentaler de Fredericton) perdront 60% de l’accés aux services d’avortement, et les femmes de l’ÎPÉ perdront perdront 50%," selon la professeure de droit de UNB Jula Hughes.

9. Lorsque l’avortement sécuritaire n’est pas accessible, les femmes ont recours à des méthodes dangereuses pour interrompre une grossesse non-voulue, y compris l’auto-mutilation, l’ingestion de drogues inconnues et non-testées, ce qui peut s’avérer fatal. La CDAC prévient que "la fermeture de la seule clinique d’avortement au Nouveau-Brunswick aura des conséquences désastreuses et potentiellement tragiques pour les femmes de cette province."

10. Tous les partis d’opposition du Nouveau-Brunswick demandent un changement. Des experts des droits de la personne de partout au Canada, les professeures d’études féministes, la nouvelle coalition du Nouveau-Brunswick pour la justice en matiére de santé de la reproduction, le Forum de concertation Voix des femmes du N.-B., et plus de 13 000 signataires de la pétition des étudiantes ont ajouté leurs voix à cette revendication.

Il faut agirmaintenant : Le Premier ministre du Nouveau-Brunswick doit immédiatement abroger le Réglement 84-20, annexe 2 (a.1), et aussi l’annexe 2.01. Joignez-vous à nous et demandez au Premier ministre Alward d’agir immédiatement : (506) 453- 2144 ou premier@gnb.ca.

Contexte

1. Quand les femmes et les filles ont le contrôle de leur systéme de reproduction, elles sont avantagées sur le plan social, éducationnel et économique. Elles peuvent rester à l’école, rester au travail, éviter la pauvreté, s’auto-suffire, et faire vivre leur famille. "Pour êtres égales, les femmes doivent pouvoir décider pour elles-mêmes quand et si elles veulent des enfants, et combien elles en veulent. Si elles ne contrôlent pas leur fertilité, elles ne contrôleront pas leur propre vie et elles ne pourront pas jouer un rôle actif et égal dans la société." (CDAC)

2. Aucune méthode de contraception n’est efficace à 100%. Les pilules anticonceptionelles ne sont efficaces qu’à 90%, et des pilules anticonceptionnelles défectueuses ont fait l’objet d’un rappel en 2013.

3. Des femmes du N.-B. et de l’ÎPÉ rapportent que certains médecins refusent de prescrire un contraceptif aux femmes qui ne sont pas mariées, et dans certains cas des pharmaciens refusent de remplir une ordonnance pour des contraceptifs pour la même raison.

4. La pilule contraceptive d’urgence, connue comme le Plan B ou la pilule du lendemain est disponible dans la plupart des pharmacies au Nouveau-Brunswick ; elle coúte environ 40 $ mais les pharmaciens ont le droit de ne pas la prescrire bien qu’ils doivent référer une cliente à un autre pharmacien.

5. La plupart des femmes qui demandent un avortement sont tombées enceintes par accident, soit parce qu’elles n’avaient pas de contraceptif ou soit parce que leur contraceptif n’a pas fonctionné ; certaines deviennent enceintes en attendant une ligature des trompes ou lorsque leur conjoint attend une vasectomie ; d’autres parce leur cycle menstruel est irrégulier en raison de la préménopause.

6. Qui sont ces femmes qui peuvent faire face à une grossesse imprévue ? Elles sont mariées, célibataires, étudiantes, travailleuses, adolescentes, méres, grand-méres. De tous les avortements effectués dans les hôpitaux au Nouveau-Brunswick, la majorité des femmes sont dans la vingtaine (56%) ; 28% sont des femmes de 30 ans et plus, et 17% sont des adolescentes.

7. Le taux d’avortement au Nouveau-Brunswick est considérablement moins élevé que le taux national, mais le taux de grossesses adolescentes y est considérablement plus élevé.

8. Dans les écoles où on promeut exclusivement l’abstinence, on note des taux de grossesses adolescentes élevées ; des programmes de promotion de l’abstinence accompagnés d’information sur la contraception permettent de réduire les grossesses adolescentes.

9. Les grossesses adolescentes sont plus nombreuses chez les jeunes désavantagées et présentent des risques à la santé à la mére et à l’enfant. "Les enfants des méres adolescentes sont plus susceptibles d’avoir un poids insuffisant ou de naître prématurément, et ont des taux de mortalité infantile plus élevés, des problémes de développement, d’apprentissage, des déficiences d’ouïe et de vue ainsi que des problémes respiratoires chroniques."

10. L’avortement est-il sécuritaire ? "Toute intervention médicale comporte un risque. L’avortement est considéré une intervention médicale mineure et ne comporte donc pas un risque élevé de complication. L’avortement est considéré 20 fois plus sécuritaire qu’un accouchement." (La clinique Morgentaler de Fredericton)

Pour plus d’information

Feuillet d’information préparé par Wendy Robbins avec la contribution de la CDAC et JRNB ; traduction par Noëlla Richard
Références disponibles sur demande. Justice reproductive NB, mai 2014
Pour plus d’information, communiquez avec : Kathleen Pye, JRNB

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