Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Négociations du secteur public

Rencontre sur les négociations du secteur public organisée par le Comité intersyndical de QS de la Capitale-Nationale, le 17 septembre

Construire une riposte unitaire aux politiques du gouvernement Couillard (vidéo)

(Voir les vidéos des échanges entre les panélistes et la salle)

Ce petit texte vise essentiellement à aider à synthétiser l’essentiel des interventions qui ont eu lieu durant la soirée organisée par le Comité intersyndical de Québec solidaire de la Capitale-Nationale, le 17 septembre dernier à Québec. Ces discussions ont été aux dires de plusieurs intéressantes et enrichissantes par rapport aux questions que nous allons devoir discuter dans la cadre des négociations dans le secteur public et des mobilisations que ces négociations ont déjà commencé à susciter. Vous trouverez ci-dessous deux vidéos qui reproduisent l’ensemble des interventions faites durant cette soirée.

Le contexte de la négociation

Le gouvernement Couillard est en demande dans tous les secteurs : éducation, santé et fonction publique. Ses propositions salariales constituent en fait, si on tient compte de l’inflation, une détérioration du pouvoir d’achat de l’ensemble des travailleuses et des travailleurs de ce secteur. Toute une série d’acquis en ce qui concerne les conditions de travail sont remis en question. Ces intentions de la partie patronale ne constituent pas seulement une attaque contre ces employéEs. Ce sont les services publics qui seront dégradés si le gouvernement libéral réussit à imposer ses vues. Dans l’école, les conditions d’apprentissage seront plus détériorées : hausse du nombre d’élèves par classe, disparation de la prise en compte au niveau de la formation des groupes-classe des personnes en difficultés d’apprentissage, coupures dans le personnel professionnel de soutien. En santé, le non-remplacement de poste conduit à un alourdissement considérable de la tâche qui était déjà à la limite du supportable. Toute cette détérioration des services publics ne vise qu’à créer les conditions d’une privatisation généralisée au profit des investisseurs privés.

Jusqu’à maintenant, le gouvernement dans le processus de négociation s’est montré autoritaire, intransigeant et inflexible. C’est un gouvernement complètement fermé aux propositions syndicales y compris en ce qui concerne l’amélioration des services.

La stratégie patronale est simple : faire traîner les négociations, laisser pourrir le conflit, tenter une série de manoeuvres de division entre les organisations syndicales, manipuler l’opinion publique pour tenter d’isoler les syndicats du reste de la population et enfin utiliser des mesures répressives : loi spéciale de retour au travail et décret.

Les organisations syndicales du secteur public engagent ces négociations avec des droits syndicaux restreints par la loi sur les services essentiels. Non seulement le droit de grève, particulièrement dans le secteur de la santé, est réduit à peu de chose, mais les différents gouvernements ont eu tendance à nier complètement le droit de grève et à décréter plus souvent qu’à leur tour. Dans ce contexte, les derniers accords signés avaient plus comme objectif de protéger le régime de négociation que d’enregistrer de véritables gains pour le personnel de l’État.

Les positions stratégiques qui découlent de cette situation

Les revendications salariales, pour les plus bas salariéEs, particulièrement dans le secteur de la santé sont une simple question de justice. Le fossé se creuse par rapport aux salaires équivalents dans le secteur privé. L’offre patronale est donc à ce niveau tout simplement odieux. Mais il n’en reste pas moins, que la nature et l’ampleur des attaques gouvernementales contre les services publics constituent une remise en question de la possibilité pour les travailleuses et les travailleurs de fournir des services adéquats à la population. C’est ce qui est au fondement du raz le bol généralisé des employéEs face aux politiques d’austérité du gouvernement Couillard. Et c’est ce qui explique, pour une bonne part, la volonté de se mobiliser pour contrer les politiques de ce gouvernement.

Dépasser la division intersyndicale

La première tâche des organisations syndicales est de fédérer ce ras-le-bol. La construction du Front commun constitue un pas important dans cette direction. Il en reste pas moins que des contingents importants, comme les infirmières et infirmiers de la FIQ, restent en dehors de ce Front commun. Cela ne les a cependant pas empêchés de se heurter à l’intransigeance des négociateurs gouvernementaux.

Le travail d’unité syndicale ne doit pas cependant rester la prérogative des états-majors. Que ce soit au niveau local ou régional, des coordinations syndicales sont possibles. Et il faut dès maintenant mettre sur pied des regroupements permettant d’actualiser le partage de la détermination des perspectives et des actions. Déjà, au niveau des cégeps, des comités de mobilisation ont été mis sur pied qui regroupent des profs, des étudiantEs et du personnel de soutien. Des initiatives similaires sont possibles dans les divers établissements de santé. La construction de coordinations régionales basées sur ces comités de mobilisation permettrait que fleurisse tout le potentiel de mobilisation que l’exaspération face aux politiques gouvernementales a créé. Mais cela ne se fera pas spontanément. Les militantEs syndicaux ont devant eux des défis majeurs à cet égard. Mais, ce qui apparaît de plus en plus évident, c’est que la victoire nécessitera la construction d’un front commun autant à la base qu’au sommet et ayant un fonctionnement radicalement démocratique.

Créer des liens entre les syndicats et le reste de la population

Les objectifs et la stratégie patronale nécessitent pour y faire face la construction de solidarités citoyennes agissantes. La mobilisation des parents en défense de l’école publique est exemplaire à cet égard. Elle participe à la déconstruction du discours patronal. Ce sont les parents et les enseignantEs qui sont en défense de l’école publique. C’est le gouvernement qui fait oeuvre de destruction. Les projets gouvernementaux en éducation commencent déjà à être délégitimés. Et ce travail doit se poursuivre. Un travail similaire pourrait être fait avec les usagers et usagères des services de santé. Une campagne pour un réinvestissement massif en santé pourrait trouver un écho majeur dans la population.

Toute la période de grèves perlées peut être une occasion d’un travail politique systématique pour contrer la démagogie gouvernementale sur la rigueur afin de démontrer largement les intentions régressives du gouvernement et pour dénoncer comme il sert les intérêts de l’oligarchie.

Grève sociale ou la généralisation de la solidarité syndicale à la majorité populaire

Face à la répression gouvernement Charest contre le mouvement étudiant en 2012, la population a commencé à se mobiliser et à sortir les casseroles. Face à la loi spéciale qui menace, une riposte similaire est possible, si elle est organisée. La majorité populaire reconnaîtra sans doute le caractère inacceptable et illégitime d’une loi spéciale qui imposera non seulement le retour au travail, mais également la détérioration des services publics. Une escalade des actions citoyennes vers la grève sociale serait la meilleure défense des travailleurs et travailleuses du secteur public en lutte.

Un travail coordonné entre les organisations syndicales, féministes, populaires et étudiantes pourra créer un climat démontrant que la paix sociale est terminée et que le gouvernement va se heurter à une résistance compacte des différents mouvements sociaux et citoyens.

Le gouvernement Couillard n’a aucune légitimité pour mener sa politique d’austérité

Québec solidaire, comme le rappelait sa représentante à cette soirée, considère que le gouvernement Couillard répond essentiellement aux pressions du 1% qui veut payer moins d’impôt (il promet d’ailleurs de baisser leurs impôts), voir ouvrir de nouveaux champs d’investissement par le développement de la sous-traitance et des privatisations des services publics et faire payer les classes ouvrières et populaires par la tarification des services publics

C’est pourquoi il faut se débarrasser de ce gouvernement illégitime. Il n’a aucun mandat pour ce faire. Une autre politique est possible. Il serait possible d’introduire un nouvel impôt sur les profits des banques, d’instaurer une fiscalité réellement redistributive en introduisant de nouveaux paliers d’imposition, en cassant le pouvoir des pharmaceutiques qui fait exploser le prix des médicaments, et, finalement, en refusant les politiques d’austérité. Il s’agit de créer les conditions d’un réinvestissement massif dans les services publics.

La minorité dominante utilise les gouvernements pour la défense de leurs intérêts. Il faut, ensemble, avancer un autre projet de société, et, pour le réaliser, construire un véritable pouvoir populaire à la base comme dans les institutions politiques.


Première partie des échanges entre la salle et les panélistes


Deuxième partie des échanges entre la salle et les panélistes

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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