Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Opinion

Juste colère

Savez-vous pourquoi le statu quo se maintient et pourquoi le conservatisme politique perdure au Québec ? Parce que les partis traditionnels sont d’une loyauté sans borne quand il s’agit de préserver la façon sclérosée dont le pouvoir s’exerce chez nous. Leur connivence pour refuser la proportionnelle alors qu’elle est inscrite au programme de chacun depuis 20 à 30 ans en est l’illustration sans équivoque. Ils figent les mœurs politiques à leur avantage et bloquent ainsi une manière innovatrice de les faire évoluer.

Alors qu’ils prétendent tous revendiquer une plus grande part d’autonomie ou de souveraineté pour le Québec, ils cautionnent, en appuyant unanimement les troupes d’occupation, la politique impérialiste de dénie de souveraineté du peuple afghan par le Canada. Faut-il à ce point en être les serviles valets tout en espérant qu’un « Québec indépendant serait de l’occupation » de ce pays ? Dixit : Duceppe à Ottawa !

Non, la morosité politique au Québec ne vient pas d’une population soi-disant conservatrice avec un prétendu noyau dur dans la Capitale nationale. Elle est inscrite dans les programmes et les discours sans envergure des trois partis à l’Assemblée nationale. Ils en font la promotion tout en se donnant de symboliques croc-en jambes qui ne les démarquent en rien sur le terrain de l’innovation et de la créativité politique. Chacun se gargarise d’insultes inoffensives qui font écran de fumée à leur propre responsabilité dans l’immobilisme et la stagnation du pouvoir. Ils se congratulent devant les performances médiocres de leurs décisions sur la crise forestière, les fermetures d’usines, le risque du privé en santé, le sous financement de l’éducation, … Tout ce qui tourne à la crise au Québec ne trouve aucune audience à leurs yeux et les gens impliqués restent pour eux des votes à aller chercher sans véritable soucie de leur sort. Leurs discours indignés sur la passivité des gouvernements antérieurs ne leur inspire que des gestes sans portée pour résoudre le moindre problème.

Ils embrassent de tout cœur le néolibéralisme, avec des teintes estompées de contradictions mineures entre eux, et reproduisent presque sans divergences ce que les Québécois-e-s ont connu dans leur histoire comme la « Clique » qui nous gouvernait en d’autres temps, à une époque de soumission aux bourgeois commerçant ou à l’occupant britannique.

Non, aucune accusation de conservatisme attribué à notre nation par ces mandataires temporaires du pouvoir ne me convaincra de renoncer à demander des comptes à ce gouvernement et sa factice opposition paralysés par l’inertie, se contentant d’une fébrilité de façade qui ne résout rien, même pas pour ceux qui ont appelé sans cesse à des politiques de libéralisme économique à outrance dans tous les journaux, sur toutes les tribunes. Qu’ils leur arrivent de seulement faire quoi que ce soit qui les coule devant l’opinion publique en défendant des politiques réactionnaires, on leur tend les micros pour, en plus, les faire valoir. Sans considération pour la valeur ou la pertinence de leur discours, on les entoure de précautions pour qu’ils apparaissent sous leur meilleur jour comme si leur élection leur donnait tout à coup une magique faculté de rebondir sans égard à leurs compétences pour gouverner en faveur des gens, de la vaste majorité. Leur parti pris pour le statu quo qu’ils sont les premiers, affirment-ils, à vouloir changer sans que l’on n’y trouve vraiment rien de nouveaux, leur assure toutes les tolérances des journalistes qui ne les talonnent plus que pour la forme et les bichonnent comme de petits chiens savants en spectacle pour égayer la foule. Ils savent l’apprécier en accordant aux médias gagnés d’avance l’exclusivité pour expliquer sans esprit critique leurs positions politiques.

Comme pour les psychiatrisé-e-s qui sont passé-e-s à la rue sans alternative que la mendicité à cause de leur choix commun à tous de couper, en prétextant le bien commun, ce n’est pas leur passé de décisions en faveur de leurs maîtres, propriétaires d’entreprises ou autres grands bourgeois, ou de gestes impunis, comme les coupures dans l’entretien des routes ou des ponts non encore sanctionnées par une population en colère, qui font reculer ces pouvoirs figés. C’est l’irrépressible et permanente révolte des gens ordinaires qu’ils provoquent quand ces gens en ont assez. Comme ces citoyen-ne-s de Lévis qui se sont soulevé-e-s contre Rabaska. Comme il s’en trouvera de plus en plus devant leur incurie à gouverner pour le peuple.

Mots-clés : Opinion
Guy Roy

l’auteur est membre du collectif PCQ de Québec solidaire à Lévis.

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