Édition du 14 mai 2024

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Utilisation alléguée de scabs : Le Journal de Québec passe ses commandes à Canoë

Depuis le mois de juin, le directeur de l’information du Journal de Québec demande à « l’agence de presse » Canoë de couvrir, à Québec, des événements qui étaient habituellement couverts par les journalistes qui sont actuellement en lock-out.

Appelé à la barre des témoins, hier, au premier jour des audiences de la Commission des relations de travail visant à débattre de l’utilisation alléguée de briseurs de grève par le quotidien de Vanier, Donald Charette a affirmé que Canoë, une branche de Quebecor, est « une source d’information qui nous permet de couvrir Québec ».

« Depuis le début du conflit, qui couvre les événements auxquels étaient normalement assignés les journalistes syndiqués ? » lui a demandé Me Yves Morin, l’un des avocats représentant les syndiqués.

« Canoë », a répondu Donald Charette, qui a reconnu que Canoë fournit du contenu journalistique seulement depuis le début du conflit, le 22 avril 2007.

« C’est un site Internet qui est devenu un fil de presse nous fournissant du contenu », a-t-il spécifié.

Donald Charette a cependant dit ignorer s’il existait une entente écrite entre le Journal de Québec et Canoë. Il ignore aussi combien coûtent les services de Canoë.

10 pour faire le travail de 64

M. Charette a dit qu’il envoyait chaque soir, à Louis Gosselin, de Canoë, un avis contenant les événements à couvrir pour le lendemain. Il reçoit, le lendemain, un « avis de ce qui sera couvert dans la journée ».

À l’avocat du SCFP qui lui demandait s’il agissait de la même manière avec une autre agence de presse telle la Presse canadienne, le directeur de l’information a répondu qu’il « arrive » qu’il demande à la PC de couvrir des événements.

Il a aussi affirmé que la production locale du journal était assurée par dix employés-cadres de la rédaction. Ces dix personnes, a-t-il dit, font le travail qui était effectué, avant le déclenchement du conflit, par trente-cinq journalistes, seize pupitreurs, onze photographes et trois statisticiens.

Certains employés-cadres ont été embauchés quelques mois avant le 22 avril, dont le directeur adjoint de la section sportive, André Létourneau. Ce dernier, a dit Donald Charette, a été sorti de la retraite « parce qu’on considérait qu’on avait besoin d’un meilleur encadrement aux sports ».

Erreurs de signatures

L’avocat Morin a longuement interrogé le témoin sur les signatures des textes publiés dans le Journal de Québec en provenance de Canoë. M. Charette s’est dit incapable d’expliquer pourquoi certains étaient signés Canoë, tandis que d’autres étaient attribués au Journal, au Journal de Québec, à Canoë-Argent, à l’agence Nomade, quand ils n’avaient carrément pas de signature.

Donald Charette a soumis que l’hypothèse la plus plausible était une erreur lors de la mise en page.

Me Morin lui a signifié, preuves à l’appui, une vingtaine d’erreurs de signatures, uniquement en examinant les articles écrits par les intimés Bernard Plante et Dominic Salgado qui ont été reproduits dans le Journal de Québec.

Les audiences de la Commission se poursuivront le 28 janvier

Tout a commencé avec Communication Ferron
Avant de fournir des textes aux agences Canoë et Nomade, le journaliste Bernard Plante a vendu, dans les semaines qui ont suivi le déclenchement du lock-out, des textes à la firme Communication Conseil Ferron, dont certains se sont retrouvés dans le Journal de Québec.

« En mai 2007, j’ai été approché par Communication Conseil Ferron, une boîte de consultants pour laquelle j’ai travaillé pendant trois semaines. Ils m’ont commandé des textes et certains ont été publiés dans le Journal de Québec », a dit M. Plante, lors de son témoignage devant la commissaire Myriam Bédard, hier.

L’intimé affirme ne pas savoir s’il y avait une quelconque entente entre le Journal de Québec et la firme de consultants de Québec.

L’ex-journaliste de TVA a relaté avoir ensuite été sous contrat avec Canoë pour la période du 4 juin au 4 septembre.

« On nous a dit que Canoë allait prendre la relève, que Canoë avait décidé d’avancer le développement de son portail Internet et avait besoin d’employés (…) pour produire des articles sur Internet qui seraient disponibles pour toutes les entités de Quebecor. »

Nomade

Puis, en septembre, c’était au tour de l’Agence Nomade, dirigée par Sylvain Chamberland (ancien directeur chez TVA et RadioMédia), de prendre le relais et de devenir le fournisseur de textes de Canoë.

Il a ajouté qu’il envoyait ses textes à Louis Gosselin (il a contredit Donald Charette en affirmant que ce dernier besognait pour Nomade, et non Canoë) ou Yves Mallette, lesquels travaillent depuis leur résidence de Saint-Jean-sur-Richelieu.

« Canoë achète l’information de Nomade, qui cède ses droits à Canoë. »

« Ça ne me concerne pas »

Par ailleurs, Bernard Plante n’a abordé que du bout des lèvres la situation au Journal de Québec, refusant de discourir sur la publication de ses articles dans le quotidien en conflit depuis presque neuf mois.

« Moi, je suis payé par Nomade pour envoyer des articles à Nomade. La suite ne me concerne pas. »

M. Plante a cependant reconnu qu’à Québec, « il y a bien du monde qui parle du conflit ».

« Un coin de la couverture »

(MMQ) - « On savait déjà que le journal était en partie produit à Toronto, Mirabel et Kanata, maintenant nous savons qu’il est aussi fait dans une maison de Saint-Jean-sur-Richelieu. »

Visiblement heureux que les audiences de la Commission des relations de travail débute, après deux mois d’attente, le porte-parole des syndicats du Journal de Québec, Denis Bolduc, a soutenu que les témoignages d’hier « démontrent clairement que l’utilisation de Canoë par le Journal de Québec est une conséquence directe du lock-out » décrété par Quebecor, le 22 avril 2007.

« On a levé un coin de la couverture sur les tactiques de Quebecor pour continuer de publier le Journal de Québec. »

Quant au témoignage du directeur de l’information, Donald Charette, M. Bolduc a dit qu’on « a eu des réponses surprenantes et évasives par moments ».


Source : SFPQ http://scfp.qc.ca/modules/nouvelles/nouvelle.php?id=1222&langue=fr

Mots-clés : Communiqués

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