Édition du 14 mai 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Faire taire pour toujours la voix des armes pour entendre la voix des femmes

La Fédération des femmes du Québec joint sa voix à celles de milliers de femmes de partout à travers le monde pour dire qu’il faut faire taire définitivement la voix des armes pour faire entendre la voix des femmes.

De façon toute particulière la FFQ veut relayer à la population québécoise le vibrant appel lancé dès le début de l’agression israélienne par des groupes de femmes palestiniennes et israéliennes à l’initiative de l’Organisation Femmes en Noir : " Nous, organisations de paix de femmes appartenant à un large spectre d’opinions politiques, exigeons la fin des bombardements et autres instruments de mort. Nous appelons à entreprendre immédiatement des délibérations pour parler de paix et cesser de faire la guerre. La danse des morts et des destructions doit finir. Nous exigeons que la guerre ne soit plus une possibilité, ni la violence une stratégie, ni l’assassinat une alternative. (…) Il est évident qu’à l’heure actuelle, les femmes paient le prix le plus élevé de cette guerre tout comme les femmes (…) ont toujours été exclues de la société et du discours dominant. Le temps des femmes, c’est maintenant. Nous exigeons que les mots et les actes utilisent un autre langage. Le monde différent que nous voulons n’appartient pas aux violents et aux puissants. Nous sommes convaincues que, pour faire la paix, il n’est pas nécessaire de préparer la guerre. Pour faire la paix, il est indispensable de préparer la paix, d’éradiquer la pauvreté et les injustices, de tresser des relations et des actions qui laissent ouverts des espaces d’avenir et d’espoir, de construire des ponts de paix, de tisser des toiles de solidarité... Nous, Femmes en Noir, pensons que "Entre tuer et mourir, il existe une troisième voie : vivre !" (1).

Cet appel a résonné au moment même où Gaza mourait chaque jour un peu plus sous les bombardements et les tirs des blindés de l’armée israélienne déterminée à mener jusqu’au bout sa cruellement nommée « opération plomb durci ». Cette agression meurtrière a frappé de plein fouet l’ensemble de la population, mais les femmes sont particulièrement touchées. Non seulement plusieurs d’entre elles ont été tuées ou blessées, mais toutes ont été atteintes à titre de dispensatrices d’aide et de responsables du maintien du tissu social.

Gaza est une prison à ciel ouvert depuis plus de 18 mois dans laquelle la population est soumise par Israël à un blocus implacable qui tue à petit feu. Responsables de la vie quotidienne, les femmes palestiniennes ont vu leur existence devenir un véritable enfer : coupures d’électricité, d’eau, d’approvisionnement de biens essentiels qui les empêchent de subvenir aux besoins de leur famille. La pluie de bombes israéliennes et l’entrée des troupes dans Gaza ont rendu la situation carrément intolérable avec la destruction des infrastructures vitales de cette société (maisons, hôpitaux, écoles, routes,) au point où de nombreuses agences internationales n’hésitent pas à parler de « véritable catastrophe humanitaire » (2) et d’autres, de « crimes de guerre » (3) .

Toutes les guerres augmentent le niveau de haine et de violence dans une société, y compris la violence sexuelle et domestique. Les femmes palestiniennes et israéliennes n’y échappent pas, sans compter aussi la destruction des liens familiaux, l’augmentation du nombre d’orphelin-e-s et donc de monoparentalité assumée presqu’entièrement par les femmes. La guerre est le terreau des intégrismes religieux et laïcs de toutes sortes (juif, chrétien, musulman, de droite, de gauche, etc.) qui sont une négation des droits des femmes. En plus des morts et des destructions de toutes sortes, l’opération « plomb durci » est grosse de violences pour l’avenir car elle nourrit la domination, l’exploitation, l’humiliation et encourage les abus de droits et de pouvoir. Combien de fois les femmes n’ont-elles pas crié qu’elles ne veulent plus mettre au monde des enfants pour la guerre, des jeunes qui deviendront la « chair à canon » des politiciens et des marchands d’armes ? Pensons-nous vraiment qu’il existe une solution militaire à la situation actuelle ? Toutes les protestations à travers le monde expriment le contraire et appellent à faire taire définitivement la voix des armes. La FFQ s’inspire de l’action courageuse de ces femmes de même que des gestes posés par de nombreuse femmes juives à travers le monde s’insurgeant contre les agressions de l’armée israélienne et proclamant que, ce que fait le gouvernement israélien, il ne le fait pas « en leur nom ».

La FFQ s’associe à l’ensemble des mouvements qui mettent de l’avant des revendications axées sur la nécessité absolue de faire cesser définitivement par Israël ces opérations « carnage » comme l’avait été, parmi tant d’autres, celle du Liban en 2006. Un cessez-le-feu par les forces militaires, israéliennes et du Hamas est en vigueur à l’heure actuelle mais il est fragile. Ce que nous demandons, c’est un cessez-le-feu durable. Ce qui implique non seulement l’arrêt des tirs de roquettes vers Israël, le retrait complet de l’armée israélienne du territoire palestinien, mais aussi la fin définitive du blocus de Gaza. Nous demandons une enquête internationale indépendante sur les crimes de guerre commis par Israël. Nous demandons également qu’Israël soit sanctionné pour le massacre de Gaza : le temps de l’impunité est terminé. Enfin, nous demandons de reconnaître le droit à la réparation pour la population de Gaza, réparation qui devrait prendre en compte la situation spécifique des femmes touchées durement, comme nous l’avons mentionné, par le blocus et la destruction des infrastructures.

La FFQ considère qu’il ne peut y avoir de paix durable sans justice. D’où la nécessité de s’attaquer à certaines des causes structurelles les plus importantes du conflit, soit les violations par Israël du droit international dont : le droit de retour ou de compensation pour les réfugié-e-s (conformément à la résolution 194 des Nations Unies) ; la fin de l’occupation des territoires palestiniens depuis plus de 40 ans (conformément à la résolution 242 des Nations Unies) ; le démantèlement des colonies de peuplement juif (conformément à la IVe Convention de Genève), la démolition du « mur de la honte » (conformément à la décision de la Cour internationale de justice).

La FFQ revendique aussi l’application de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies sur Les femmes, la paix et la sécurité exigeant la participation pleine et entière des femmes aux processus visant une solution politique négociée.

Enfin la FFQ dénonce le rôle du Canada dont la position unilatéralement pro-israélienne et alignée jusqu’ici sur celle de l’ex-président Bush l’empêche de participer à la résolution politique du conflit. Faut-il rappeler que le Canada est le seul pays a avoir voté contre une résolution du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU condamnant l’offensive militaire israélienne à Gaza. Une véritable honte pour l’ensemble des canadiennes et canadiens.

La Charte des femmes pour l’humanité (élaborée dans le cadre de la Marche mondiale des femmes) met de l’avant deux valeurs-clés pour mettre un terme à la situation actuelle : PAIX et JUSTICE, non pas l’une ou l’autre, mais l’une et l’autre, car à Gaza et ailleurs au Moyen-Orient il ne peut y avoir de paix durable que fondée sur la justice.

Michèle Asselin, présidente, Fédération des femmes du Québec
Gisèle Bourret et Lorraine Guay, membre du comité Femmes et mondialisation de la FFQ.

(1) Communiqué du 31 décembre 2008 par l’organisation Femmes en Noir créée en 1988 par des femmes israéliennes et regroupant de nombreuses organisations de femmes dans plusieurs pays pour travailler à la promotion de la paix et du dialogue. Voir www.femmesennoir.org

(2) Voir communiqué de Robert Falk, rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits humains en territoires occupés, 27 décembre 2008

(3) Voir article du Sunday Time (Londres) 11 janvier 2009 signé par plusieurs juristes et universitaires de plusieurs pays

Mots-clés : Communiqués

Sections

redaction @ pressegauche.org

Québec (Québec) Canada

Presse-toi à gauche ! propose à tous ceux et celles qui aspirent à voir grandir l’influence de la gauche au Québec un espace régulier d’échange et de débat, d’interprétation et de lecture de l’actualité de gauche au Québec...