Édition du 23 avril 2024

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Négociations du secteur public

Négociation nationale 2023 - Profs en négo : il ne faut pas s'arrêter à mi-chemin

QUÉBEC, le 27 oct. 2022 - Plus de 300 enseignantes et enseignants sont réunis ce matin à la fontaine de Tourny, devant l’Assemblée nationale du Québec, afin de soutenir la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) qui déposera, au courant de la journée, les demandes des 60 000 enseignantes et enseignants qu’elle représente, dans le cadre du renouvellement de leur convention collective qui arrivera à échéance le 31 mars 2023.

« La dernière négociation a permis des améliorations quant à l’autonomie professionnelle et au salaire des enseignantes et enseignants en début de carrière et au dernier échelon salarial. C’est pourquoi le gouvernement ne peut s’arrêter à mi-chemin. Le premier ministre du Québec, François Legault, le nouveau ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, ainsi que Sonia Lebel, présidente du Conseil du trésor, doivent poursuivre le travail amorcé et continuer à donner le coup de barre nécessaire pour améliorer l’état des écoles publiques et de la profession enseignante. Il faut viser toujours plus haut pour l’avenir des élèves jeunes et adultes », déclare Mélanie Hubert, présidente de la FAE.

Des demandes pour améliorer concrètement la profession enseignante

Un salaire à la hauteur des exigences de la profession

Malgré un certain rattrapage lors de la dernière négociation, les enseignantes et enseignants du Québec gagnent encore un salaire en deçà de la moyenne canadienne. Par exemple, une personne en début de carrière gagne 53 541 $ au Québec, alors qu’elle devrait gagner 58 443 $ si elle avait la moyenne canadienne. En fin de carrière, une personne gagne 92 027 $ au Québec, alors qu’elle devrait gagner 95 281 $. De plus, il lui faudra trois années de plus que ses collègues des autres provinces canadiennes pour atteindre le maximum de l’échelle (13 ans plutôt que 10 lorsque la convention collective arrivera à échéance le 31 mars 2023).

Contrairement à ce qu’affirme François Legault, il reste du chemin à faire pour en arriver à une meilleure reconnaissance de l’apport des enseignantes et enseignants à la société québécoise, grâce à un salaire à la hauteur des exigences de la profession. Celle-ci connaît une grande désertion et il faut arrêter l’hémorragie. De plus, depuis la seconde moitié de l’année 2021, le Québec subit une inflation rarement vue. Il faut donc protéger le pouvoir d’achat des enseignantes et enseignants.

C’est pourquoi la FAE demande l’atteinte de la moyenne canadienne et une structure salariale attractive pour toutes les enseignantes et tous les enseignants, mais aussi une augmentation de 4 % par année pour la durée de l’entente. Par ailleurs, si l’indice des prix à la consommation (IPC) au cours de l’année civile précédant l’augmentation salariale est supérieur à 4 %, la FAE demande que la hausse soit ajustée selon l’IPC.

« Messieurs Legault et Drainville ont rendez-vous avec l’histoire. Ils détiennent en ce moment même le pouvoir de changer le cours des choses. Donner aux profs du Québec un salaire équivalent à la moyenne canadienne n’est pas un luxe. C’est une nécessité pour maintenir les enseignantes et enseignants dans la profession, mais aussi pour y attirer de nouveaux talents », souligne madame Hubert.

Toutefois, de nombreux facteurs liés aux conditions de travail des enseignantes et enseignants permettront aussi de retenir et d’attirer du personnel enseignant qualifié.

Une meilleure conciliation famille-travail-vie personnelle

La nature du travail des enseignantes et enseignants rend plus difficile l’application de certaines solutions pouvant favoriser la conciliation famille-travail-vie personnelle. En effet, les enseignantes et enseignants travaillent en fonction d’un calendrier scolaire et d’un horaire quotidien établis. Or, les changements de la société québécoise amènent de nouvelles réalités familiales, comme prendre soin de parents vieillissants, et il est important que le personnel enseignant puisse aussi bénéficier de différents congés. Par ailleurs, la possibilité pour les parents et l’employeur d’interpeller en tout temps le personnel enseignant exerce une forte pression et altère la qualité de leur temps personnel.

C’est pourquoi la FAE demande une meilleure conciliation famille-travail-vie personnelle, principalement en augmentant, entre autres, le nombre de congés pour des raisons familiales et en élargissant leur accès. La FAE souhaite également que leur droit à la déconnexion soit respecté.

Une composition de la classe plus équilibrée

La réforme des années 2000 a mené à l’intégration en classes ordinaires des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA), ce qui a changé radicalement le portrait de la classe au Québec. Malheureusement, la classe ordinaire a franchi un seuil de difficulté tel qu’elle constitue une contrainte à l’enseignement et aux apprentissages.

La FAE défendra toujours l’idée que l’école doit accueillir TOUS les élèves, nonobstant leur origine, classe sociale ou difficulté. Cependant, le choix de la classe spécialisée, avec ses plus petits groupes et son personnel enseignant formé en adaptation scolaire, s’impose et représente pour plusieurs élèves ce qui leur conviendrait le mieux. Ce n’est pas seulement à la classe ordinaire, mais bien à l’école tout entière qu’incombe la responsabilité d’accueillir les élèves.

C’est pourquoi la FAE demande une composition de la classe offrant des conditions d’enseignement et d’apprentissage respectueuses des enseignantes et enseignants et de tous les élèves.

Par exemple, le ministre de l’Éducation doit procéder à l’ouverture de groupes adaptés aux besoins de certaines catégories d’élèves (issus de l’immigration ou présentant des difficultés d’adaptation ou d’apprentissage) et il doit ajouter des règles et des mécanismes assurant une composition équilibrée de la classe.

Un allègement de la charge de travail

Enseigner dans le système d’éducation actuel représente une charge de travail colossale. Quotidiennement, les enseignantes et enseignants sont sollicités intellectuellement, physiquement et émotionnellement, les plaçant toujours sur le qui-vive. Cette charge a un impact important sur leur santé mentale, si bien qu’ils sont parmi les professionnels les plus touchés par une détresse psychologique élevée. De plus, au-delà du travail effectué auprès des élèves, la profession inclut différentes activités professionnelles, comme accompagner les nouveaux profs, participer à différents comités, etc., qui s’insèrent difficilement dans la tâche.

C’est pourquoi la FAE demande un allègement de la charge de travail afin que le milieu de travail soit enrichissant et valorisant, plutôt que source d’épuisement. Il faut dégager les enseignantes et enseignants de ce qui les éloigne de leur fonction principale : instruire.

Par exemple, il faut diminuer le temps en présence d’élèves au primaire afin que les enseignantes et enseignants puissent se concentrer sur d’autres tâches, comme la planification de multiples suivis auprès des élèves et autres professionnels. De plus, la FAE demande d’améliorer le modèle de soutien offert aux enseignantes et enseignants afin que les services complémentaires se traduisent par une aide réelle. Des responsabilités pourraient être partagées avec d’autres intervenants. Toutefois, l’éparpillement des ressources et le soutien qui se traduit par des interventions ponctuelles n’apportent pas une aide réelle, puisqu’il en découle une multitude de suivis à effectuer qui alourdissent la tâche. Enfin, il faut qu’il y ait une reconnaissance rapide et réelle des besoins et capacités des élèves, puisque les délais d’attente pour avoir accès à des services professionnels sont déraisonnables.

Pour les enseignantes et enseignants en fin de carrière, il faut aussi, par exemple, favoriser un meilleur accès et un allongement de la période couverte par la retraite progressive.

L’amélioration des conditions physiques et psychologiques pour assurer un milieu de travail sain

Malgré les avancées réalisées et les investissements consentis, il est urgent que le gouvernement finalise la mise à niveau du parc immobilier. Par exemple, la qualité de l’air, la ventilation, les températures excessives ou la qualité de l’eau ne doivent plus être une source d’inquiétude ou de lésion.

De plus, il est inacceptable que des membres du personnel enseignant, notamment les spécialistes au primaire, n’aient pas de classe adaptée à leur spécialité. Au-delà des conditions physiques, le bien-être psychologique est tout aussi important. En plus de reconnaître l’importance de la charge mentale qu’entraîne une composition de la classe de plus en plus diversifiée, il faut aussi porter une attention particulière aux impacts directs ou indirects des incidents de violence en milieu de travail sur les enseignantes et enseignants.

C’est pourquoi la FAE revendique l’amélioration des conditions physiques et psychologiques d’exercice pour assurer un milieu de travail sain.

« Viser toujours plus haut pour les profs et leurs élèves jeunes et adultes sera notre devise pour cette négociation. Autrement, ça voudrait dire que nous sommes satisfaits du système actuel, alors que celui-ci est mal en point à plusieurs égards. L’école publique mérite le meilleur et les enseignantes et enseignants de la FAE continueront à la défendre. C’est notre devoir de souhaiter toujours mieux pour l’école publique, pour le bien de celles et ceux qui y travaillent ou y apprennent, et pour celui de l’ensemble de la société. Enseigner, c’est aussi, fondamentalement, valoriser et rechercher le meilleur pour les élèves : on tente toujours de les amener à se dépasser. C’est dans l’ADN de la profession enseignante. C’est ce qu’on fait de mieux, et c’est aussi ce qu’on fera tout au long du processus de négociation », conclut madame Hubert.

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