Édition du 23 avril 2024

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Le parti de la suprématie indou, le Bharativa Janata Party, prend le pouvoir en Inde

Le BJP qui prône la suprématie Indou vient de largement gagner l’élection législative indienne. C’est un véritable raz de marée : 283 sièges soit 8 de plus que n’en requiert la majorité simple des 543 sièges du parlement. Avec l’appui de son allié la National Democratic Alliance il pourrait représenter un total de 335 voix. Son chef, M. Narenda Modi est maintenant le premier ministre du pays.

Équipe de Countercurrents.org, 16 mai 2014,

Traduction, Alexandra Cyr

Le Parti du Congrès qui a tenu le pouvoir depuis l’indépendance, sauf pendant 13 ans, a été laminé avec son pire score depuis les dix dernières années. Il n’a récolté que 18 sièges et ne menait que dans 27 autres (lors des derniers décomptes). Sa présidente, Mme Sonia Ghandi et son vice-président M. Rahul Ghandi ont pris la responsabilité de la défaite.

La participation a battu des records s’établissant à 66.38% des 814 millions d’inscritEs qui se sont prévalu de leur droit de vote. Cette élection s’est déroulée pendant 6 semaines. En 2009, la participation se chiffrait à 58,13%.

M. Modi est le Premier ministre de la province du Gujarat et milite en faveur d’un Hidutva. Il s’agit d’une idéologie de type fasciste qui prône la suprématie de la population d’appartenance et de religion Indoue.
Son rôle lors du désastreux pogrom contre les musulmans au Gujarat est encore sous enquête policière. L’affaire a commencé en février 2002 par la mort de 59 indous dans l’incendie d’un train. On accuse M. Modi d’avoir laissé aller les émeutes qui ont suivi cet incident sans agir pour empêcher le massacre. L’opposition a accusé l’administration provinciale de na pas avoir agi avec assez de vigueur contre les violences et même d’avoir fermé les yeux sur ce qui se passait.

Selon les rapports officiels, 1044 personnes seraient mortes au cours de ces événements : 790 musulmanEs et 254 IndouEs y compris ceux et celles qui ont péri dans l’incendie du train. Il y a encore 293 personnes reportées manquantes, 2,548 blesséEs, 919 veuves et 606 orphelinEs. En ajoutant les personnes manquantes qui ont été déclarées mortes par la suite, on passe à 1,267 mortEs. Human Rigths Watch a publié un rapport dont le titre dit tout : « We have no orders to save you. State Participation and Complicity in Communal Violence in Gujarat ». [1]

En avril 2009, la Cour suprême de l’Inde a crée une équipe spéciale d’enquête sur le rôle du gouvernement du Gujarat et de son premier ministre M. Modi dans le déroulement de ces violences. Ces enquêteurs ont remis leur rapport en décembre 2010. Il stipule qu’aucune preuve n’a été trouvée pouvant mener à des accusations formelles contre M. Modi. Il n’aurait pas, volontairement, permis le déroulement de ces événements dans la province.

Le 7 mai 2012, la cour Suprême a nommé un procureur « ami de la Cour », M. Raju Ramachandra qui a soumis que M. Modi pourrait être poursuivi pour avoir encouragé l’hostilité entre les différents groupes au cours des violences au Gujarat en 2002. Il soutenait que l’affaire devrait être examinée par une Cour, le groupe spécial d’investigation ayant comme mandat d’enquêter non pas de juger.

Par contre, le 31 août 2012, deux proches de M. Modi, une ancienne ministre de son cabinet et députée de l’assemblée provinciale, Docteure Maya Kodnani , a été trouvée coupable et condamnée à 28 ans de détention. Pour sa part, M. Babu Bajrangi, ancien président de l’État du Bajrang Dal a été condamné à 31 ans de détention en lien avec les épouvantables massacres de Naroda Patya. Ils se sont passé en février 2002 à Naroda, dans la capitale du Gujarat, Ahmedabad. 97 musulmans y ont été tués par une foule déchainée d’environ 5,000 personnes. Les violences ont duré dix heures au cours desquelles les émeutiers se sont livré à du pillage, des attaques au couteau, des assauts sexuels, des viols collectifs et ont brulé des personnes individuellement ou en groupes.

Dans son jugement, la Cour note qu’à « titre de représentant du peuple, la Docteure Kodnani se devait de le servir et donc de tenter d’arrêter les émeutes. Elle a au contraire été trouvée impliquée dans le complot et la planification de la conspiration pour attaquer les Musulmans de Naroda-Patiya ». La cour la désigne même comme « l’élément central de toutes les émeutes de Naroda-Patiya. Qu’elle y a dirigé les émeutiers et incité la foule à la violence. Elle a encouragé et soutenu les émeutiers violents ». Elle avait été élue trois fois à l’assemblée parlementaire de l’État comme députée de Naroda. Au moment des violences de 2002, elle était ministre d’État du bien-être des femmes et des enfants. Elle avait obtenu cette fonction en 2007 après son élection comme députée. Elle a dû démissionner après avoir été arrêtée en lien avec les massacres de Naroda-Patiya suite au rapport du Comité spécial d’enquête de la Cour suprême en 2009.

M. Narenda Modi est aussi soupçonné d’avoir organisé, avec l’aide de son fidèle entourage, des meurtres qui devaient servir à améliorer son image politique. Parmi ces meurtres on pointe le cas répugnant d’Ishrat Jahan. Le 2 mars 2012, La Cour suprême a mandaté un de ses anciens juge retraité, M. H.S.Bedi pour enquêter sur les 22 cas des exécutions extrajudiciaires perpétrées par la police du Gujarat entre octobre 2002 et décembre 2006. Le 21 février 2013, l’ex officier de police, G.I. Singhal qui était assistant commissaire de la police criminelle au moment des incidents, a été arrêté en lien avec l’exécution d’Ishrat Jahan qui s’est produite lors d’un faux rendez-vous. La poursuite soutient que M. Singhal, qui est maintenant Surintendant de police au State Crime Records Bureau, a été directement mêlé à l’organisation du rendez-vous que l’équipe d’enquêteurs spéciaux mandatés par la Cour suprême a déclaré faux. Avant cette arrestation, les officiers de police Tarun Barot, G. Parmar, N.K. Amin, Bharat Patel et Anaju Chaudhary avaient tous été arrêtés.

Le 4 juin (2013) M. D.G. Vanzara, déjà suspendu de ses fonctions de policier, a été arrêté depuis la prison centrale Sabarmati à Ahmedabad où il avait été transféré quelques jours plus tôt depuis celle de Mumbai où il était incarcéré depuis 2007. Il était en attente de procès pour une allégation de participation dans les meurtres Sohrabudin Shaikh en 2005 et de Tulsi Prajapati. La poursuite allègue qu’il a dirigé l’équipe dirigeante de la police criminelle d’Ahmedabad pour qu’elle mène la police locale dans l’opérationnalisation des meurtres en cause et pour l’interroger plus avant. Il est accusé d’avoir organisé des opérations ayant mené à 15 meurtres. Sa démission avait créé un imbroglio parce qu’elle mettait à mal les aspirations de M. Modi à la fonction de premier ministre (du pays). Sa lettre de démission avait été rejetée sous des prétextes techniques. On lui opposait qu’il devait être libéré de toute accusation pour que sa demande soit acheminée au conseil des ministres.

Dans sa lettre, il invoque que lui, comme ses subalternes « n’ont fait qu’agir et accomplir leur devoir en toute concordance avec ceux d’une police gouvernementale », et que finalement, ce sont ses supérieurs politiques qui les ont trahis. Il maintient qu’entre 2002 et 2007, lui et ses policiers subalternes n’ont fait qu’obéir aux ordres venant des plus hauts niveaux et il demande que ceux là soient aussi mis sous enquête et punis.

Voici un extrait de cette lettre de démission : « …M. Modi ne regrette rien du carnage qui a eu lieu en 2002 au Gujarat alors qu’il y était Premier ministre. Tout au cours de ces 12 années depuis les événements, il a refusé de répondre à cette question même lorsqu’un journaliste l’interviewait à la télévision…. »

(Au cours de cette entrevue, M. Modi réfère à des marionnettes), ce qui fait dire à un auteur publié sur Counter Currents, que : « Ce que M. Modi veut dire par cette référence à des marionnettes est très sérieux puisqu’il parle à propos d’un génocide brutal de milliers de Musulmans. Ce ne peut être un simple lapsus. Son inconscient semble avoir parlé malgré ses efforts pour faire valoir le ‘modèle du Gujarat’ et son image de parfait dirigeant. Est-ce que M. Modi considère les Musulmans comme des marionnettes, donc comme des êtres sans défense propre ? (…)

Le professeur Shamsul Islam de l’Université de Delhi lui a écrit une lettre ouverte à propos de sa déclaration publique à l’effet qu’il est un « Nationaliste Indou ».

Récemment, M. Modi a annulé un plan de visite au Royaume Uni. Il devait s’adresser à la Chambre des Communes à l’invitation du député travailliste Barry Gardiner. Il a craint d’être arrêté grâce à la Compétence universelle des tribunaux envers les crimes contre l’humanité.


[1« Nous n’avons aucune directive pour vous protéger. De la participation de l’État et la complicité dans les violences communautaires au Gujarat ».

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