Édition du 23 avril 2024

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Livres et revues

Emprise et empreinte de l'agrobusiness

Un modèle de développement socialement excluant et écologiquement destructeur

L’objet de l’ouvrage est de décortiquer « les logiques présidant à la montée en puissance de l’agrobusiness, au delà de ses expressions les plus visibles (nouvelle ruée sur les terres, expansion des agrocarburants, etc.) ».

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Sont abordés à la fois les menaces sur la sécurité alimentaire et la biodiversité, l’universalisation des régimes alimentaires, le désengagement de de l’État envers les petits producteurs et son aide aux grandes firmes, la concentration et l’intégration du marché des semences en particulier grâce à la brevetabilité du vivant et des nouvelles technologies (OGM).

Il y une « augmentation exponentielle des investissements directs étrangers dans le secteur de la production agroalimentaire », une « accélération du phénomène d’accaparement des terres », une spéculation sur les matières premières agricoles, une interpénétration des secteurs publics et privés, le déploiement de politiques néolibérales par les institutions internationales (dont les plans d’ajustement structurels) qui favorisent le marché et la concentration entre les mains des opérateurs privés, sans oublier les multiples violations des droits humains.

Les discours présentant l’agrobusiness comme une solution aux problèmes de la faim sont démontés par les différents auteure-e-s, à commencer par la liaison entre croissance et élimination de la faim « celle-ci est bien moins liée à un manque de disponibilité alimentaire qu’à un problème de répartition et d’inégal accès à la nourriture » ou le présupposé « suivant lequel les difficultés des petits producteurs relèveraient essentiellement d’un déficit de productivité et d’un accès limité aux grandes chaînes de commercialisation ».

En conclusion de son introduction, Laurent Delcourt défend : « Scénario de rupture par rapport aux orientions privilégiées jusqu’ici, sa concrétisation passe nécessairement par des politiques de régulation des opérations des transnationales et des marchés, la reconnaissance de la primauté des droits humains sur les règles du commerce, ainsi que par une relocalisation de la production alimentaire au profit des paysanneries locales ».

Elisa Da Via « La politique des discours ”gagnant-gagnant” : l’accaparement des terres comme levier de développement ? » analyse les modalités d’intervention des agences de financement du développement, elle montre toute la supercherie du gagnant-gagnant et insiste aussi sur la méconnaissance de fait « que l’expansion de l’exploitation commerciale des terres s’inscrit dans des chaînes de valeur agroindustrielles globales contrôlées par le pouvoir monopolistique des grandes multinationales » ou pour le dire autrement « Lié à la dynamique plus large de l’expansion capitaliste internationale et de la spéculation financière, ce modèle est donc en concordance parfaite avec la promotion des investissements fonciers en tant que facteur clé de la restructuration économique et agricole des pays du Sud ».

J’ai particulièrement apprécié l’article du African Centre for Biosafety sur « La mainmise de Monsanto sur l’agriculture sud-africaine » dont la possibilité pour cette entreprise, grâce à la protection des brevets de « garder son droit de propriété sur les semences après les avoirs vendues aux agriculteurs, et même après que ceux-ci les aient plantées ».

Les autres textes, tout aussi documentés, concernent les investissements fonciers au Mali, les conséquences du développement des agrocarburants au Guatemala (voir en complément une petite brochure sur l’industrie pétrolière du Collectif Guatemala http://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2012/09/07/de-limpunite-des-entreprises-multinationales/ ), la ”barbarie moderne” de l’agrobusiness au Brésil, le secteur de l’huile de palme en Indonésie. La revue se termine par un article sur le pouvoir de la grande distribution alimentaire.

Je reproduits juste une citation extraite de l’article sur le Brésil : « Cette triple conjonction de la monoculture, du latifundium et des agrocarburants a non seulement accentué les phénomènes d’exclusion/expropriation des populations rurales et de détérioration de l’environnement, mais elle a outre provoqué le renchérissement des denrées alimentaires, au détriment des populations les plus démunies ».

Didier Epsztajn

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