Édition du 22 avril 2025

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Débat. « Le désordre programmé qui submerge Trump »

Fidèle à son style de parieur téméraire, Trump a semé le chaos sur les marchés mondiaux. Il a introduit, retiré puis reformulé une liste de droits de douane qui a déclenché un désordre majeur. Sa provocation a fait revivre les pires cauchemars financiers de ces dernières décennies.

Le magnat a mis en place un scénario inédit de crise mondiale provoquée délibérément. Certains analystes estiment qu’il a tendance à reculer face aux résultats défavorables de ses mesures, mais d’autres considèrent qu’il continue d’effrayer ses interlocuteurs pour les forcer à capituler.

Il règne également une impression superficielle que Trump est devenu fou et que, dans leur déclin, les Etats-Unis sont tombés sous le règne d’un personnage extravagant. Le magnat ment, insulte, agresse et semble diriger la première puissance mondiale comme s’il s’agissait d’un fonds d’investissement. Mais en réalité, il suit une stratégie approuvée par d’importants groupes de pouvoir et il ne faut pas le sous-estimer (Torres López, 2025).

21 avril 2025 | tiré du site alencontre.org
https://alencontre.org/ameriques/americnord/usa/debat-le-desordre-programme-qui-submerge-trump.html

Il a trois objectifs sur le plan économique : restaurer l’hégémonie du dollar, réduire le déficit commercial et, finalement, encourager le rapatriement des grandes entreprises. La hiérarchie et l’articulation de ces objectifs constituent la grande interrogation du moment.

Centralité monétaire

Certaines approches soulignent, à juste titre, la primauté des objectifs financiers et monétaires sur les objectifs commerciaux ou productifs. Elles soulignent que Trump entend instaurer un dollar bon marché pour l’exportation et un dollar fort comme monnaie de réserve. Il entend favoriser les exportations états-uniennes tout en assurant le statut privilégié de la devise américaine en tant que monnaie mondiale (Varoufakis, 2025).

Les deux principaux conseillers du président, Stephen Miran et Scott Bessent, ont confirmé cette intention, avouant que les pressions commerciales sont un instrument au service des exigences monétaires [voir l’essai de Stephen Miran, novembre 2024, dans Hudson Bay Capital : « A User’s Guide to restructuring the Global Trading system, november 2024 » – réd.].

Pour parvenir à la dévaluation du dollar et à son maintien comme monnaie de réserve, Trump doit renforcer la soumission des banques centrales d’Europe et du Japon. Cette subordination est indispensable pour préserver le rôle des titres de la dette états-unienne (bons du Trésor) comme principal refuge du capital.

Cette garantie détermine l’afflux vers Wall Street de l’argent liquide excédentaire dans le monde. Tokyo et Bruxelles doivent continuer à acheter ces bons du Trésor afin de valider le cours du dollar fixé par Washington, évitant ainsi les tensions monétaires qui feraient s’effondrer tout le projet.

Trump exige le maintien du règne continu du dollar et la capacité des Etats-Unis à se financer aux dépens du monde entier. L’impérialisme du dollar permet à la première puissance mondiale de s’endetter sans limite et de mettre toutes les économies du globe sous sa coupe.

Pour faire face aux sérieuses remises en question dont cet atout fait actuellement l’objet, Trump entend recréer les accords de Plaza que les Etats-Unis ont imposés à l’Allemagne et au Japon en septembre 1985. A l’époque, les deux pays subordonnés avaient accepté de soutenir la dépréciation du dollar et de maintenir une parité qui garantissait la primauté mondiale du dollar.

Trump adapte cette exigence aux temps actuels et encourage la création de nouvelles monnaies numériques liées au pouvoir politique du dollar. Le potentat a créé un fonds de cryptomonnaies adossé à sa propre personne et promeut ce marché (les stablecoins) comme un pilier supplémentaire du dollar. Il a déjà positionné ces instruments parmi les 10 plus grands détenteurs de bons du Trésor (Litvinoff, 2025).

Le président des Etats-Unis rêve de replacer le dollar sur son trône initial de Bretton Woods [1944]. Son plan B consiste à réutiliser cette influence pour atteindre le niveau de prépondérance obtenu par Nixon et Reagan. Dans le premier cas, le dollar a été libéré de la convertibilité en or [15 août 1971] et a entamé un long cycle de prédominance sans contrepartie métallique objective. Dans le second cas [1985], le dollar a été renforcé par la hausse des taux d’intérêt, l’émergence du néolibéralisme et la financiarisation sous la houlette de la Réserve fédérale. Ces deux présidents partageaient avec Trump le même profil de personnalités médiocres, mais ils ont introduit des changements significatifs dans le statut mondial du dollar.

Pour réitérer cet exploit, Trump doit freiner la tendance à la dédollarisation qui menace la suprématie du billet vert. Cette érosion est alimentée par les BRICS, qui ont commencé à concevoir des instruments de substitution à la devise américaine, par le biais d’opérations de paiement, de transactions commerciales et de mécanismes de compensation financière (Sapir, 2024).

Il existe même déjà un projet de création d’une monnaie des BRICS qui, suivant une trajectoire différente de celle de l’euro, aboutirait à un effet similaire. Ce plan prévoit la mise en place progressive d’une banque d’émission, dotée de fonds de réserve et d’agendas détaillés concernant les rythmes, les taux et les législations (Gang 2025).

Trump est conscient de ces menaces et a précipité le chaos pour déclencher la bataille contre les contestataires de la devise américaine. Il encourage cette panique afin de discipliner tous ses alliés sous son contrôle. A partir de cette centralisation, il espère redresser le dollar et réinitialiser le système économique mondial en faveur des Etats-Unis.

Mais Trupm doit limiter la portée de la crise qu’il génère, car si cette convulsion recrée le scénario de la pandémie ou le contexte de l’effondrement bancaire de 2008, le séisme finira par affecter son propre architecte (Marco del Pont, 2025a).

Le thermomètre immédiat de cette épreuve de force est le comportement des bons du Trésor. Le Japon est le principal détenteur de ces titres depuis que la Chine a commencé à les délaisser [en 2013, elle détenait pour 1277,7 milliards de dollars de bons de Trésor, en 2024, 772,5 milliards – réd.]. Les banques européennes et d’autres pays asiatiques détiennent également un stock important de ces titres. Le plan de Trump échouera rapidement si, comme l’ont laissé entrevoir les récentes turbulences, les détenteurs de la dette américaine vendent cet actif.

Mais au-delà de ce calcul immédiat, la grande question est la capacité générale des Etats-Unis à redresser leur monnaie. Il existe plusieurs différences substantielles avec l’ère Nixon et Reagan. Le déclin de la première puissance est bien plus important, le réseau de domination impériale s’est érodé, l’effondrement de l’URSS et les débuts de la mondialisation sont derrière nous et l’essor économique de la Chine est fulgurant.

La stratégie monétaire de Trump est également soumise à une forte tension avec les banques, tandis que Wall Street observe avec méfiance une orientation qui menace de réduire les énormes profits réalisés ces derniers temps.

Le boomerang des droits de douane

Le deuxième objectif de Trump est commercial et vise à réduire l’énorme déficit extérieur des Etats-Unis. Il s’agit d’un objectif à moyen terme, qui n’a pas l’acuité du tournant monétaire et dépend dans une large mesure de la recomposition du dollar. Trump introduit et modifie quotidiennement les droits de douane en fonction du rôle complémentaire de ces instruments dans les négociations avec chaque pays.

Le locataire de la Maison Blanche radicalise, dans les faits, la tendance protectionniste qui a commencé lors de la crise financière de 2008 et le déclin de la mondialisation commerciale. Depuis cette date, 59 000 mesures restrictives ont été introduites dans les échanges internationaux et les droits de douane ont atteint leur plus haut niveau depuis 130 ans (Roberts, 2025a). La guerre commerciale déclenchée par Trump avec son paquet de droits de douane spectaculaire s’inscrit dans cette lignée.

Trump a recouru à une formule absurde pour pénaliser les différents pays. Il a inventé un critère arbitraire de réciprocité pour définir le pourcentage de chaque sanction, avec des estimations farfelues du déficit commercial états-unien qui omettaient de comptabiliser l’excédent des Etats-Unis dans les services. Il a également omis que les déséquilibres commerciaux n’ont pas été causés par les pays sanctionnés, mais par les firmes américaines elles-mêmes, qui ont implanté leurs investissements à l’étranger afin d’améliorer leurs profits.

Les chances de succès du plan trumpiste sont très faibles, car les importations et les exportations états-uniennes ne constituent plus une force prépondérante dans le commerce mondial. Elles sont passées de 14% en 1990 à 10,35% aujourd’hui, tandis que dans la même période, les BRICS sont passés de 1,8% à 17,5%. La guerre tarifaire n’a pas de pouvoir dissuasif en soi et les ventes affichées par la première puissance mondiale dans le secteur des services sont insuffisantes pour faire basculer la balance (Roberts, 2025b).

Certaines estimations soulignent même que si les Etats-Unis suspendaient toutes leurs importations, 100 de leurs partenaires parviendraient à replacer leurs ventes sur d’autres marchés en seulement cinq ans (Nuñez, 2025).

Le plus grand problème de la guerre commerciale est la possibilité d’une escalade incontrôlable. En 1929-1934, la spirale descendante du commerce international qui a suivi le paquet protectionniste [loi Smoot-Hawley du 17 juin 1930) a provoqué une chute de 66% des échanges, et cet effondrement a touché tous les concurrents concernés. Trump pense qu’il évitera cette séquence grâce à des négociations bilatérales imposées depuis son bureau.

Mais l’histoire suggère une autre issue lorsque les conflits s’intensifient sans être maîtrisés. L’effet récessif du protectionnisme sur l’économie mondiale est aussi bien connu que le lien entre la Grande Dépression et le recul du commerce. Bien que les interprétations les plus courantes relient superficiellement ces deux processus – en omettant les racines capitalistes de ce qui s’est passé dans les années 1930 –, il ne fait aucun doute que le protectionnisme a déclenché, renforcé ou précipité l’effondrement au cours de cette période.

Le plus important dans une éventuelle répétition de ce précédent serait son effet sur l’économie états-unienne, qui est aujourd’hui beaucoup plus vulnérable aux turbulences mondiales. Cette incidence est d’autant plus grande que le poids du commerce extérieur est passé de 6% (1929) à 15% (2024) du PIB des Etats-Unis.

Trump réintroduit le protectionnisme à un moment historiquement inopportun. Les droits de douane ont été un instrument efficace pour les Etats-Unis dans le passé, mais ils ne remplissent plus la même fonction aujourd’hui. Ils ont facilité l’essor des puissances montantes face à des concurrents favorables au libre-échange, afin de maintenir leur domination sur le marché mondial. Le protectionnisme a été utilisé avec beaucoup d’avantages par l’Allemagne au XIXe siècle et par le Japon ou la Corée du Sud au siècle dernier. Mais ce même outil n’a pas permis à la Grande-Bretagne de contenir son déclin et cette inefficacité affecte aujourd’hui les Etats-Unis. Trump prône un protectionnisme inadapté, car au lieu d’encourager l’industrie naissante, il cherche à sauver une structure obsolète. Il ignore tout simplement que les Etats-Unis ne sont plus ce qu’ils étaient.

Le rêve du retour de l’industrie

Le troisième objectif de Trump est d’ordre productif. Il encourage le retour des entreprises sur leur territoire d’origine et considère cette relocalisation comme le seul moyen de rendre effective la reprise de l’hégémonie états-unienne. C’est pourquoi il a associé le début de son offensive (le « Jour de la libération » le 2 avril) à la réindustrialisation du pays.

Trump est le premier dirigeant à reconnaître ouvertement les difficultés engendrées par la délocalisation des usines. Il recourt à des mesures drastiques pour inverser cette tendance, car il comprend que la mondialisation a fini par affecter la puissance qui a promu cette internationalisation. Il constate que la primauté des Etats-Unis dans les services, la finance ou l’univers numérique ne compense pas le recul de l’industrie et l’érosion consécutive du pilier de toute économie.

Mais son plan de rapatriement industriel est plus irréalisable que son projet monétaire ou tarifaire. Aucune alchimie monétaire ou tarifaire n’offre un attrait suffisant pour inciter les entreprises, qui ont réalisé des profits élevés à l’étranger, à revenir. Aussi persuasives que soient les incitations de Trump, produire aux Etats-Unis a un coût plus élevé. La restauration industrielle nécessiterait un investissement massif que les entreprises ne sont pas disposées à réaliser compte tenu de la faible rentabilité actuelle sur le marché intérieur.

Le virage protectionniste vise à réduire cet écart, mais il se heurte à la difficulté de fermer l’économie dans un contexte de chaînes logistiques mondialisées. Le produit final de nombreuses marchandises intègre des intrants provenant d’usines implantées dans de nombreux pays.

Il est difficile d’imaginer comment les Etats-Unis pourraient retrouver leur compétitivité en recréant les anciens modèles de fabrication nationale. De combien faudrait-il augmenter les droits de douane pour qu’il soit moins coûteux de recommencer à fabriquer dans le pays d’origine ?

Il suffit de regarder le cas de Nike, qui possède 155 usines au Vietnam et emploie un nombre considérable de personnes dans ce pays pour approvisionner un tiers des importations de chaussures des Etats-Unis. La différence de coûts de production est tellement énorme qu’un retour aux Etats-Unis semble impensable (Tooze, 2025). Le découplage du processus de fabrication en Chine aurait un impact similaire pour des entreprises comme Apple.

Les économistes de Trump affirment également que son projet sera réalisable si la primauté du dollar est rétablie et si le déficit commercial est réduit. Ils estiment que ce processus corrigera les déséquilibres mondiaux en matière de consommation, d’épargne et d’investissement qui affectent la première puissance mondiale. A l’opposé, les critiques néoclassiques et keynésiens rappellent que Trump n’a pas réussi à amorcer cette transformation au cours de son premier mandat.

Le débat entre les deux positions porte sur l’impact positif ou négatif du protectionnisme sur les dépenses, les revenus, l’épargne et la consommation. Mais il oublie que le recul des Etats-Unis ne se situe pas dans ces domaines. Il découle de la faible productivité de la principale économie occidentale face à son concurrent oriental (la Chine) en pleine ascension. Les indicateurs de ce fossé sont aussi nombreux que les preuves de son élargissement continu.

Il suffit d’observer la tendance généralisée des entreprises américaines à privilégier les investissements financiers ou à fonctionner comme un distributeur automatique de billets pour Wall Street pour que l’on constate leur compétitivité décroissante. Elles ont tendance à dépenser plus en rachats d’actions et en versements de dividendes qu’en investissements à long terme.

Une grande partie de ces entreprises ont mondialisé leurs processus de fabrication afin de contrebalancer les coûts de production élevés au niveau intérieur. Mais ce revirement les a rendues très dépendantes des importations de biens de consommation bon marché en provenance du continent asiatique afin de maintenir les salaires locaux à un niveau bas.

Le degré de dépendance à l’égard de l’approvisionnement chinois a été confirmé par la décision même de Trump d’exempter tous les puces et composants électroniques des droits de douane imposés à son rival asiatique. Le même problème s’étend aux biens d’équipement et aux biens intermédiaires, qui représentent environ 43% des importations totales de la Chine (Mercatante, 2025).

Le recul américain n’est pas dû à des erreurs commerciales et son inversion ne passe pas par un ultimatum protectionniste. Il y a certes un changement de modèle en cours qui érode la division mondiale du travail forgée au cours de décennies d’internationalisation de la production. Mais ce déclin n’inaugure pas le processus inverse de nationalisation industrielle imaginé par Trump, car la capacité des Etats-Unis à mener ce changement s’est considérablement réduite.

Le recul face à la Chine

Il est évident que la Chine est l’épicentre de la guerre économique déclenchée par Trump. Elle a été la principale cible des droits de douane qui ont déclenché l’escalade vertigineuse entre les deux pays. Les 34% initiaux imposés par Washington ont été suivis par Pékin avec le même pourcentage et la confrontation est rapidement passée à 84%-104 %, puis à 145%-125%. A ces niveaux, le commerce entre les deux pays tend à être anéanti.

La place centrale de la Chine dans l’offensive de Trump a été confirmée par sa décision de maintenir les sanctions contre ce pays, après les avoir suspendues pour le reste du monde [pour 90 jours]. Les droits de douane très élevés imposés au Vietnam, au Cambodge et au Laos s’inscrivent dans le même contexte, car la Chine contrôle les chaînes d’approvisionnement de ces pays voisins et réexporte ses marchandises à partir de là [cette situation explique le récent voyage de Xi Jinping dans ces pays, y compris la Malaisie – réd.].

Pékin a réagi fermement en imposant immédiatement des droits de douane réciproques et en indiquant clairement qu’il n’accepterait pas le chantage des Etats-Unis. Il a préparé cette riposte depuis longtemps cette réaction et entend mener la bataille sur le terrain de la productivité, en cherchant à ne dévaluer que marginalement le yuan. Il s’efforce déjà de trouver des clients compensateurs et conçoit des arguments spécifiques pour l’Europe et l’Asie.

L’establishment occidental craint largement l’issue finale de cette épreuve de force. De nombreuses estimations prévoient le succès final de la Chine si Trump continue à se tirer une balle dans le pied.

Chaque jour, de nouvelles données confirment la supériorité asiatique dans d’innombrables domaines. Le géant oriental forme, à l’échelle mondiale, déjà 65% des diplômés en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques. Il maintient un taux de croissance deux fois supérieur à celui de son homologue. Il représente 35% de l’industrie manufacturière mondiale et devrait atteindre 45% en 2030. Jusqu’en 2001, 80% des pays commerçaient davantage avec les Etats-Unis qu’avec la Chine, et aujourd’hui, les deux tiers de ce total ont inversé cette relation (Ríos, 2025).

Au cours du premier mois de la présidence de Trump, la Chine a lancé 30 nouveaux projets d’énergie « propre » en Afrique, a commencé la construction du plus grand barrage du monde au Tibet et a présenté une nouvelle génération de trains à grande vitesse. Son réacteur nucléaire a atteint un record de production de plasma à une vitesse qui le place près de la production d’énergie « propre » illimitée. Ses chantiers navals ont mis à l’eau le plus grand navire d’assaut amphibie au monde et les tests de la 6G sur les réseaux de téléphonie mobile laissent présager sa victoire dans cette course (MIU, 2025).

Toute la politique de Trump est une tentative désespérée de freiner l’avancée chinoise. Cette expansion ne faisait que commencer au début du millénaire, lorsque la première puissance a cessé de recevoir des transferts de revenus en sa faveur de la part de son partenaire asiatique. C’est là qu’a commencé un échange défavorable qui a aujourd’hui atteint un pic difficile à inverser.

Trump entend modifier ce scénario défavorable par des mesures drastiques. Mais l’écart entre les deux puissances ne tient pas seulement à des différences de politique monétaire, commerciale ou productive. Il réside dans la structure sociale et la gestion de l’Etat. En Chine, d’importantes classes capitalistes spéculent sur leurs fortunes et exploitent les travailleurs. Mais ces groupes ne contrôlent pas le pouvoir étatique, ce qui explique la capacité et l’autonomie de la direction politique à orienter l’économie selon des modèles efficaces.

Trump n’a pas de formule pour faire face à ce désavantage, qui dépasse toutes ses intentions et tous ses projets. Pour comble, il met en œuvre des mesures qui aggravent les deux grands maux du capitalisme contemporain : les inégalités sociales et le changement climatique. Il s’est lancé dans une bataille différée pour maintenir le leadership américain d’un système en crise, mais il accentue le déclin américain par les mesures qu’il adopte, modifie et réinstaure.

Le lexique impérial nostalgique

Trump tente de rétablir la centralité impériale des Etats-Unis. C’est le seul moyen de glorifier les capitalistes de son pays aux dépens du reste du monde. Le train de sanctions, de droits de douane et de chantages qu’il a mis en place exige de revitaliser l’empire.

Trump tente de rétablir cette primauté par des attitudes belliqueuses. Il se vante d’avoir réussi à faire négocier les droits de douane par 75 pays, après la frayeur provoquée par son tableau tarifaire. Mais il maquille la réalité avec des fanfaronnades qui occultent le déroulement réel des négociations.

Avec l’Union européenne, il aggrave un conflit qui a débuté avec l’introduction puis la suspension de droits de douane de 25%. Trump aspire à imposer un vassalisme européen qui lui permettrait de réindustrialiser son pays en désindustrialisant son partenaire transatlantique.

La première étape de cette opération consiste à réarmer le Vieux Continent, avec des dépenses en énergie, en technologie numérique et en équipements fournis par les Etats-Unis. Le potentat a semé la panique parmi les élites européennes qui, dans un élan de russophobie, se sont lancées dans un bellicisme aveugle. Elles réduisent les dépenses sociales et remplacent déjà la transition verte tant vantée par une transition grise, purement militaire.

Mais ce revirement n’est pas sans conflits et l’accord rapide que Trump espérait conclure avec Poutine (pour s’approprier les richesses de l’Ukraine) n’est pas seulement enlisé avec la Russie. Il a également déclenché un conflit sans précédent entre Washington et Londres pour déterminer qui empochera le butin des terres rares (Marco del Pont, 2025b).

Plus déterminantes encore sont es négociations avec les partenaires subordonnés en Asie. Le Japon, la Corée du Sud, Taïwan et les Philippines ont toujours répondu avec une discipline sans faille à leur parrain américain. Mais la grande nouveauté de ces dernières années est le renforcement des relations économiques de ces pays avec Pékin. L’ampleur de ces échanges commerciaux a suscité de sérieux doutes au sein du bloc anti-chinois promu par la Maison Blanche.

Trump déploie des messages impériaux explicites pour faire valoir ses exigences. Il utilise un lexique si direct que le début de son second mandat a suscité de nombreuses remarques journalistiques à ce sujet. La réticence traditionnelle des grands médias à utiliser le terme irritant d’impérialisme a été dissipée par la franchise du magnat (voir The New York Times du 21 janvier 2025, The Washington Post du 24 janvier 2025).

La même démonstration de puissance impériale a entouré l’annonce de la liste des droits de douane. Trump a pompeusement inclus dans cette liste tous les pays du monde pour souligner qu’aucun n’échappera au joug de Washington. Il n’a pas hésité à y inscrire des nations qui ne commercent pas avec les Etats-Unis ou à y ajouter des îles uniquement habitées par des pingouins. Mais les proclamations impériales du riche New-Yorkais contiennent plus d’ingrédients nostalgiques qu’efficaces. Trump regrette les actes de dirigeants lointains, qui ont combiné protectionnisme et expansion impériale pendant la gloire du capitalisme américain.

Il exalte avec une emphase particulière le président McKinley (1897-1901), qui s’est profilé comme un « Napoléon du protectionnisme ». Il a introduit une augmentation drastique de 38 à 50% des droits de douane (1890), tout en commandant l’expansion vers le Pacifique (Hawaï, Philippines, Guam) et la conquête des Caraïbes (Porto Rico et aspiration à Cuba). Trump idolâtre autant sa défense virulente de l’industrie que son extension du rayon territorial américain par les armes (Borón, 2025).

Mais cette évocation se heurte à la réalité du XXIe siècle. Trump ne peut pas mettre en œuvre le protectionnisme agressif de son idole et a choisi de combiner la pression tarifaire et la prudence militaire. Loin de reprendre les interventions du Pentagone partout dans le monde, il modère l’élan expansionniste afin de contenir la détérioration de la compétitivité économique états-unienne.

Dans un élan de réalisme, Trump a pris note de l’échec militaire de Bush et du revers économique de Biden. C’est pourquoi il tente une troisième voie, celle de la modération militaire et d’une refonte monétaire et commerciale. Il sait que la capacité offensive des Etats-Unis a été considérablement limitée par une économie qui représente 25% du PIB mondial (et non plus 50% en 1945), face à la Chine qui en représente 18%.

Trump accentue le discours interventionniste face à ses adversaires extérieurs. Comme ses prédécesseurs contemporains, il doit contrer le déclin économique en faisant largement étalage de la puissance géopolitique et militaire qui préserve son pays. Mais il sait que la compensation militaire des faiblesses économiques aggrave les tensions entre les secteurs militaristes et productivistes de l’establishment. Les bellicistes ont tendance à favoriser des campagnes destructrices à tout prix qui affectent le budget de l’Etat et détériorent la compétitivité des entreprises.

Trump navigue entre ces deux secteurs, soutenant la reprise économique par des mesures protectionnistes. Il encourage les dépenses militaires, mais limite les guerres et cherche à limiter l’effet négatif du gigantisme militaire sur la productivité. L’hypertrophie militaire imposée par le Pentagone est une maladie incurable dont souffre l’économie américaine depuis longtemps et que Trump ne peut tempérer.

Tensions locales

Les contradictions internes qui affectent le projet protectionniste ont la même portée que les tensions externes. Elles comportent un effet inflationniste comme menace la plus immédiate. Les droits de douane rendront les marchandises plus chères par la simple introduction d’un coût supplémentaire sur les produits importés.

Cet effet sera important, tant pour les denrées alimentaires de base que pour les produits manufacturés. Le Mexique fournit par exemple plus de 60% des biens alimentaires frais et on estime qu’un droit de douane de 25% sur les voitures fabriquées dans ce pays (ou au Canada) augmenterait le prix final de chaque unité de 3000 dollars. Récemment, Trump s’est félicité de la délocalisation décidée par Honda, qui va fabriquer sa nouvelle voiture Civic dans l’Indiana plutôt qu’à Guanajuato (Mexique). Mais ce transfert augmenterait le coût moyen de chaque voiture de 3000 à 10 000 dollars (Cason ; Brooks, 2025).

Il est vrai que l’inflation pourrait également contribuer à réduire la valeur réelle de la dette, mais son impact négatif sur l’ensemble de l’économie serait bien supérieur à cette réduction du passif.

Tous les analystes s’accordent à souligner l’effet récessif du virage protectionniste, qui pourrait entraîner une contraction de 1,5 à 2 points de pourcentage du PIB. Le ralentissement de l’activité, qui n’était pas prévu dans les prévisions économiques, est désormais une forte probabilité dans un avenir proche.

Cette perspective tend les relations de Trump avec la Réserve fédérale (FED), qui s’oppose à la baisse des taux d’intérêt. Trump encourage cette baisse afin de contrer la chute probable de la production, de la consommation et de l’emploi. L’effondrement des marchés déclenché par l’annonce de son programme protectionniste a aggravé ce sombre scénario et les disputes qui ont suivi entre le président et la direction de la FED (Jerome Powell).

Trump poursuit également sa bataille contre les secteurs mondialistes, qui défendent les intérêts des entreprises et des banques les plus internationalisées. L’élite de Davos est discréditée par ses échecs, mais elle attend l’occasion de reprendre l’offensive. Si les résultats du virage protectionniste sont négatifs, ce revers frappera fort et placera les démocrates en pole position dans la course aux élections de mi-mandat de 2026.

Le chef de la Maison Blanche s’est entouré d’hommes d’affaires en pleine ascension, qui se disputent avec leurs homologues du spectre traditionnel. L’establishment a donné son feu vert à son projet, mais s’attendait à des droits de douane modérés et à un comportement plus proche de la prudence du premier mandat de Trump [janvier 2017-janvier 2021]. Les bouleversements actuels les incitent à exiger un frein à la déferlante présidentielle. Les multimilliardaires sont exaspérés par la forte réduction de leur patrimoine causée par l’effondrement des marchés.

Les tensions s’étendent à l’entourage même du président, qui doit arbitrer entre les protectionnistes extrêmes (Peter Navarro, conseiller du président, entre autres sur le commerce) et les fonctionnaires ayant des investissements à l’étranger (Elon Musk). Le plan de contrôle des droits de douane conduit en outre à l’introduction d’un enchevêtrement de réglementations, qui s’oppose à la réduction de la bureaucratie promise par la nouvelle administration (Malacalza, 2025). Les innombrables conflits auxquels Trump est confronté dépassent largement le nombre de ceux qu’il peut résoudre.

Bonapartisme impérial

Les conflits extérieurs, l’absence de résultats immédiats, la forte opposition des mondialistes et la fragile cohésion interne poussent Trump à renforcer l’autoritarisme de son administration. C’est pourquoi il tentera à nouveau la voie bonapartiste qu’il a explorée sans succès lors de son premier mandat. Il doit également renforcer le pouvoir de la Maison Blanche pour faire face au repli des investissements des capitalistes états-uniens.

Trump vient du monde impitoyable des affaires et a l’habitude de négocier en tapant du poing sur la table pour obtenir des concessions de ses adversaires. Ce comportement le distingue de ses homologues du système politique, forgés par les négociations, les conciliabules et l’hypocrisie verbale.

Pour consolider son rôle central, il s’est lancé dans une hyperactivité et se distingue par la signature quotidienne d’innombrables décrets. Il cherche à centraliser le pouvoir pour déstabiliser ses opposants et privilégie la loyauté à toute autre qualité chez ses collaborateurs.

Il expérimente son côté bonapartiste dans la tradition américaine du leader charismatique. Il tente d’assumer un rôle messianique d’interprète de la nation, en stigmatisant les migrants et en dénigrant le progressisme. Avec ce personnalisme extrême, il cherche à renforcer l’image d’un homme prédestiné à réaliser le rêve américain. Mais cette orientation renforce les tensions avec l’establishment mondialiste, qui contrôle les médias les plus influents (Wisniewski, 2025).

Trump comble le vide laissé par le discrédit des politiciens traditionnels. Il profite du climat créé par le rejet des magouilles parlementaires douteuses et utilise les attributions du présidentialisme pour renforcer son image (Riley, 2018).

Il tient un discours proche de la tendance conservatrice, qui exacerbe l’opposition culturelle entre les Etats-Unis et le reste du monde. En opposition à la tradition assimilationniste, il rejette l’immigration latino-américaine et exalte la langue anglaise. Il glorifie les idéaux anglo-protestants de l’individualisme et de l’éthique du travail, méprisant la tradition hispanique, qu’il associe à la paresse et à l’absence d’ambition.

Le discours trumpiste reprend l’héritage protectionniste (Alexander Hamilton, « père du dollar ») et patriotique (Thomas Jefferson, président de 1801 à 1809) qui privilégie la prospérité intérieure (Andres Jackson, président de 1829 à 1837). Il conteste le libéralisme cosmopolite (Thomas Wilson, président de 1913 à 1921) qui associe ce bien-être à l’ouverture vers l’extérieur (Anzelini, 2025).

Avec cette vision, Trump régénère les postulats des souverainistes, qui ont traditionnellement privilégié le racisme et l’anticommunisme dans la détermination des alliances extérieures. La sympathie de cette tendance américaniste pour le nazisme a inclus dans le passé une affinité avec le Ku Klux Klan et l’apartheid sud-africain. Cet héritage est actuellement repris par Elon Musk et, dans cette veine, le trumpisme redouble ses campagnes contre le profil multiethnique, multiracial et multiculturel du Parti démocrate.

Le courant dirigé par le magnat exprime une variante ethnocentrique de l’impérialisme yankee, aussi éloignée du néoconservatisme républicain que du cosmopolitisme démocrate. Il met en avant les aspects identitaires de l’idéologie américaine et exalte le patriotisme réactionnaire comme élément essentiel de son credo. Mais avec cette adhésion idéologique, il participe au même conglomérat impérialiste que les deux autres courants.

Bush, Biden et Trump constituent trois modalités du même impérialisme qui maintient le capitalisme américain. Les différentes modalités de cette domination constituent des modalités internes d’un même bloc. L’impérialisme est une nécessité systémique du capitalisme qui fonctionne en confisquant les ressources de la périphérie, en évinçant les concurrents et en étouffant les rébellions populaires. Trump gouverne selon ces paramètres et sa brutalité révèle clairement cette affiliation.

Trajectoires, ambitions et résistances

Il est juste de qualifier Trump de capitaliste-lumpen, au sens où Marx désignait les spéculateurs financiers de la classe supérieure, impliqués dans de multiples fraudes. Le parcours du magnat réunit tous les ingrédients de ce modèle par le nombre d’escroqueries, d’évasions fiscales, de faillites frauduleuses, de transactions avec la mafia et de blanchiment d’argent qui ont marqué son passage dans les affaires. Il s’est entouré de personnages du même acabit, avec de lourds casiers judiciaires dans l’univers des cavernes financières (Farber, 2018).

Mais ce parcours personnel n’a pas caractérisé son premier mandat, ni ne définit son mandat actuel. Trump agit en tant que représentant de secteurs capitalistes très importants et dirige une administration fondée sur une coalition de groupes d’entreprises états-uniennes, comprenant des entreprises numériques qui ont pris leurs distances ave le mondialisme. Il s’appuie sur le secteur sidérurgique, le complexe militaro-industriel, la fraction conservatrice du pouvoir financier et les entreprises centrées sur le marché intérieur, qui ont été pénalisées par la concurrence chinoise (Merino ; Morgenfeld ; Aparicio, 2023 : 21-78).

Trump a obtenu son mandat actuel grâce au soutien d’une ploutocratie numérique, qui a mis de côté ses préférences pour les démocrates. Les cinq géants de l’informatique constituent actuellement le secteur dominant du capitalisme américain, qui a besoin de la belligérance trumpiste pour lutter contre ses rivaux asiatiques.

Plus controversée est la signification du nouveau pouvoir politique que les milliardaires du numérique obtiennent grâce à Trump. Ils ont déjà enchaîné le public à leurs réseaux et préservent leurs clients liés à un enchevêtrement d’algorithmes. Cette dépendance leur permet d’étendre leur lucrative intermédiation dans la publicité et les ventes. Ils tentent désormais de projeter ce pouvoir à une autre échelle, en prenant directement le contrôle de plusieurs domaines du gouvernement.

Ces groupes forment de puissants oligopoles que certains assimilent à de la prédation et à la captation de rente. C’est pourquoi ils utilisent le terme de « technoféodaux » pour conceptualiser leur activité (Cédric Durand, 2025).

D’autres approches contestent cette appellation, qui dilue le sens capitaliste d’entreprises clairement intégrées dans les circuits de l’accumulation. Leur leadership technologique leur permet de profiter de la plus-value extraordinaire qu’ils absorbent du reste du système. Ils n’évoluent pas dans le domaine des rentes naturelles et ne tirent pas de profits de la coercition extra-économique (Morozov, 2023).

Mais les deux visions s’accordent pour souligner la gestion inédite de la vie sociale qui a permis à un secteur de se lancer à la conquête de parts importantes du pouvoir politique. Sous la protection de Trump, elles cherchent avant tout à neutraliser toute tentative de régulation étatique des réseaux.

La ploutocratie numérique s’est lancée dans la gestion directe des leviers de l’Etat afin de modeler l’activité politique à son service. Certains auteurs utilisent la notion de « capitalisme politique » pour singulariser cette appropriation. Ils observent l’émergence d’un régime d’accumulation fondé sur la dépendance nouvelle des entreprises à l’égard d’un pouvoir politique qui définit les bénéficiaires avec une plus grande marge de manœuvre fiscale que par le passé. Le trumpisme pourrait être l’artisan de ces transformations intervenant au sommet du capitalisme (Riley ; Brenner, 2023).

Mais sa dérive autoritaire a déjà suscité la résistance dans les rues. Sous un slogan unificateur et mobilisateur [« Hands Off ! », le 5 avril, avec une suite le 20 avril], 150 organisations ont organisé une manifestation massive et réussie dans un millier de villes. Elles ont commencé à reprendre la réponse venue de la base à laquelle Trump s’est affronté lors de son premier mandat et qu’il a réussi à tempérer lors de son retour. Les grandes manifestations qui ont suivi ont montré le rejet du potentat et des oligarques qui l’entourent [voir le succès des meetings de Bernis Sanders placés sous le mot d’ordre « Fight Oligarchy » – réd.].

Les marches canalisent le mécontentement face à la réduction des droits démocratiques menée par l’occupant de la Maison Blanche. Si l’érosion de la légitimité interne de Trump se conjugue à la résistance qu’il suscite dans le monde, la voie sera ouverte à une grande bataille contre son gouvernement. De cette convergence pourrait émerger une alternative qui commencerait à remplacer l’oppression impériale par la fraternité des peuples. (Buenos Aires, 15 avril 2025 ; traduction rédaction A l’Encontre)

Claudio Katz, membre des Economistes de gauche (EDI), chercheur du CONICET, professeur à l’Université de Buenos Aires.


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Claudio Katz

Claudio Katz est professeur d’économie à l’université de Buenos Aires en Argentine. Il tient également un blog : katz.lahaine.org

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