Édition du 23 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Économie

Récession américaine

Les déséquilibres du système s’aggravent !

Le lundi 21 janvier, les Bourses asiatiques s’affolent. Tokyo, Hong Kong, Mumbai subissent les contrecoups de la récession annoncée de l’économie américaine.

Les marchés connaissent des reculs en Chine, en Corée du Sud, en Australie, en Malaisie, à Singapour, à Taïwan et aux Philippines. Le plan de relance annoncé par George W. Bush le vendredi précédent ne les a visiblement pas rassurés.

La réduction des impôts comme seule solution.

Le plan Bush pour contrer la récession est simple : réduire les impôts d’un montant total de 145 milliards de dollars US pour stimuler l’économie. La FED (la Banque centrale américaine) réduit son taux directeur.

Ces politiques ne s’attaquent en rien au fond du problème : le taux d’endettement des ménages aux États-Unis est gigantesque. Deux millions de ces ménages sont confrontés à la saisie de leur logement étant donné leur incapacité de payer leur hypothèque. Des salariés perdent leurs emplois parce que des entreprises ont décidé de ralentir leur production et leurs investissements.

Le plan Bush ne remet surtout pas en question le fondement de cette situation : la baisse considérable des revenus salariaux dans la répartition globale des revenus et la concentration de la richesse dans les sommets de la société. On assiste à l’approfondissement des failles dans les bases de l’économie américaine : consommation folle basée sur l’explosion du crédit et de l’endettement, développement du déficit du commerce extérieur et financement de l’investissement par le reste du monde particulièrement par les pays émergents.

Si les Bourses s’affolent, c’est qu’une récession aux États-Unis aurait un impact important sur l’économie européenne qui souffre du haut niveau de sa monnaie par rapport au dollar et au yen japonais, ce qui rend les produits européens moins compétitifs. Les pays émergents pourraient voir leur croissance ralentir étant donné la part importante des exportations de ces pays en direction des États-Unis. D’autre part, la baisse continue du dollar depuis le début 2002 inquiète étant donné le niveau très élevé de la dette extérieure. Depuis 2002, le dollar a perdu plus de 25% de sa valeur. Il ne s’agit plus seulement d’un mouvement conjoncturel. La baisse du dollar fait perdre de l’argent aux étrangers qui détenaient, déjà en 2004, environ 2000 milliards d’actifs américains. Tous les grands investisseurs hors des États-Unis se questionnent maintenant sur la façon de procéder au regard d’une monnaie de réserve qui connaît une érosion de sa valeur depuis des années. Avec cette baisse continue du dollar et les pertes qu’elle provoque, une crise de confiance envers le dollar devient aujourd’hui envisageable.

Au Canada et au Québec, les prédictions de croissance sont réécrites à la baisse.

Au Canada, on se contente actuellement de parler de ralentissement. Mais ce ralentissement frappera de façon inégale les différentes régions du Canada et les différents secteurs de l’économie. Si les provinces de l’Ouest connaissent une croissance importante, les régions où se concentre le secteur manufacturier tourné vers l’exportation, le Québec et l’Ontario, vont connaître les conséquences de la récession américaine et de l’affaiblissement du pouvoir d’achat de la population des États-Unis. M. Robert Hogue, économiste principal de la Banque de Montréal, prévoit pour le Québec une croissance nulle de l’emploi et une hausse du taux de chômage, qui passera de 7,2 à 7,9% en 2008.

Que propose le gouvernement Charest ?

Son plan est du même modèle que le plan Bush. « L’élimination de la taxe sur le capital à la fin de 2010, un crédit de 10% sur la taxe sur le capital pour tout investissement dans le secteur manufacturier, une accélération de l’amortissement des nouveaux équipements, une réduction du fardeau fiscal des particuliers d’un milliard de dollars. » En bref, tout pour la stimulation de l’investissement privé quitte à rendre la fiscalité plus inéquitable, à faire subir aux systèmes publics de santé et d’éducation, un recul de leur financement et les rendre incapables de répondre à l’ensemble des besoins sociaux jetant ainsi les bases de l’approfondissement de leur privatisation.

Le gouvernement Charest prévoit également des investissements dans les infrastructures (routes, aqueducs, bâtiments publics, écoles, CHSLD et hôpitaux) à la hauteur de 30 milliards pour les cinq prochaines années, dans le cadre de partenariats publics/privés. Il propose aussi l’encouragement aux investissements privés dans le secteur des énergies renouvelables tout en soutenant le développement de la filière pétrolière et gazière par la construction des ports méthaniers (projets Rabaska et Cacouna). Il ne s’agit en aucune façon de la volonté de satisfaire des besoins sociaux dans une perspective écologique. Il s’agit moins d’un construire un Québec vert que d’ouvrir de nouveaux champs aux investissements privés. La seule orientation de Charest, c’est la privatisation tous azimuts sans égard à la construction d’une société écologiste ou à une répartition moins inégalitaire des richesses.

Mais la défense des intérêts privés est guidée par une rationalité étroite et aveugle qui permet que s’installe au niveau de l’ensemble de la société une irrationalité globale, injuste et destructrice. Cela devient particulièrement clair alors que les déséquilibres du système capitaliste s’aggravent !

Mots-clés : Économie États-Unis
Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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