Édition du 30 avril 2024

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Québec

Sommet sur l'itinérance : la CAQ refuse de combattre l’horreur

L’Union des municipalités du Québec tenait le 15 septembre dernier un sommet sur l’itinérance. Lors de cet événement, c’est une première dans la lutte à l’itinérance de regrouper autant d’élu.e.s pour combattre ce fléau, la progression du phénomène a été souligné sous toutes les coutures. C’est toutefois les politiques de la CAQ et du gouvernement Trudeau qui furent dénoncées. Les maires et mairesses ont en particulier fait la démonstration du laxisme du gouvernement Legault dans la lutte pour le droit au logement.

L’itinérance et le mal-logement progressent. Les chiffres le démontrent même si ceux-ci sous-estiment le phénomène. Tous les intervenants municipaux s’entendent sur cela. L’itinérance prend une ampleur jamais vue. Les refuges débordent, les banques alimentaires peinent à répondre à une demande qui gonfle dans des proportions jamais atteintes. Les hausses abusives du prix des logements sont largement documentées. Selon La Presse, la cause principale des pertes de logements est le phénomène des expulsions. De plus, le revenu des personnes ne suit pas le rythme de l’inflation et les hausses successives des taux d’intérêt font en sorte que la capacité de payer des classes populaires est constamment rognée.

Les intervenant.e.s au Sommet ont aussi souligné le rôle de plus important joué par les municipalités dans cette bataille alors qu’elles ne disposent pas des moyens pour y arriver. Pourtant, il existe un fonds de plus de 900 M$ à Ottawa que le gouvernement caquiste bloque pour des raisons de rivalités fédérales-provinciales. Alors que le gouvernement Trudeau blâme les villes et leurs bureaucratie pour la situation, le gouvernement Legault est accusé d’immobilisme. En effet, le ministre délégué aux services sociaux fixe comme objectif du gouvernement du Québec « d’inverser la tendance » tout en invitant de façon méprisante les maires et mairesses de « baisser le ton ». Bref, tant à Ottawa qu’à Québec, on n’entend pas lutter contre l’itinérance mais à « surfer sur la vague » le temps que les choses se calment.

Pourtant, la détérioration des conditions de vie de la majorité populaire n’est plus à faire. Tous les diagnostics convergent vers une augmentation des dépenses alors que les revenus ne suivent pas. Le personnel des banques alimentaires est témoin de la présence de plus en plus importante de salarié.e.s pour qui leur revenu d’emploi n’est pas suffisant pour pallier aux hausses des loyers, de la bouffe, du transport, etc. Et bien sûr, les gouvernement refusent de hausser le salaire minimum à la hauteur des besoins alors qu’ils s’octroient des hausses de salaires bien au-delà de l’inflation. Les organisation syndicales du secteur public exigent présentement des hausses salariales à la hauteur des hausses du coût de la vie.

Le gouvernement Legault réplique avec la proverbiale « capacité de payer des québecois » pour refuser des hausses qui permettrait de rendre l’emploi dans la fonction publique plus attrayante. Il apparaît que seule la construction d’un rapport de force favorable aux classes populaires forcera les gouvernements provinciaux et fédéraux à offrir des conditions de travail à la hauteur des défis de la lutte à l’inflation. Toutefois, pour construire un tel rapport de force, les acteurs et actrices de la lutte pour ce meilleures conditions de vie doivent bien identifier les allié.e.s et les obstacles à une telle lutte. Or, le portrait dressé par l’UMQ et ses intervenants comportait de nombreux angles morts. Ignorer les obstacles qui se dressent devant nous ne contribue en rien au succès éventuel d’une telle entreprises.

Des angles morts

Si plusieurs intervenant.e.s au Sommet de l’UMQ ont dressé un portrait relativement fidèle des conséquences de l’itinérance, de nombreux obstacles à cette lutte sont passé sous silence. Ainsi, plusieurs ont souligné que la progression de l’itinérance est liée à l’augmentation de la pauvreté dans la population. Toutefois, aucune explication de la progression de la pauvreté n’a été fournit par les analystes. Rien sur l’absence de politique de lutte à la pauvreté sauf quelques mesures ponctuelles et populistes qui ne freinent en rien la progression du phénomène. Rien sur le refus de hausser le salaire minimum. Les représentants du gouvernement Legault, les ministres Carmant et Julien appellent à la « collaboration » et, évoquant la proximité des villes avec le phénomène, les invitent à être les « bras » de la lutte à l’itinérance. Les élu.e.s municipaux se voient donc invité à aller au front sans pouvoir s’appuyer sur les moyens à la hauteur du défi.

Autre angle mort, à aucun moment ne fut mentionner le phénomène AirBNB dont le développement provoque le retrait de milliers de logements disponibles pour le long terme. Évictions qui se multiplient, hausses abusives du prix du loyer, location illégale, rien ne semble calmer l’appétit des propriétaires immobiliers pour des profits rapide et juteux. Ainsi, autour de 30 000 logements seraient retirés du marché selon le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec et 79% de ceux-ci seraient en location illégale. Les élu.e.s de l’UMQ auraient avantage à agir rapidement en ce domaine. Des gains rapides et immédiats sont à leur portée si leur venait le courge de s’y attaquer. Toutefois, le soutien à une telle opération ne viendra pas de Québec, ce gouvernement étant complètement inféodé aux intérêts des promoteurs et propriétaires immobiliers, dont la ministre de l’habitation France-Élaine Duranceau est une alliée indéfectible, elle qui niait jusqu ‘à récemment le problème. D’ailleurs son absence ainsi que celle du premier ministre Legault fuit largement souligné lors du Sommet.

Cet écosystème de l’industrie immobilière est le dernier angle mort de cet événement. Des promoteurs qui encaissent les revenus de location aux courtiers qui agissent à titre d’intermédiaire dans les transactions aux médias qui constituent la « vitrine » de offres et y perçoivent des revenus significatifs jusqu’aux banques qui financent les opérations et en tirent d’importants profits, tout cette faune profite de la situation actuelle et refuse de tuer la « poule aux oeufs d’or ». Il faudra pourtant s’y attaquer car l’appétit sans borne des ces acteurs représente un frein à la lutte à la pauvreté et à l’accès au logement comme l’a constaté la mairesse de Montréal Valérie Plante dans le dossier du volet 3 qui veut contraindre les promoteurs à inclure du logement abordable et du logement social dans leurs projets. Elle dénonçait en mars dernier la faible implication du gouvernement du Québec en matière de construction de logement abordable et elle soulignait que seulement 200 logements abordables ont été financés par Québec depuis 2019. Les promoteurs à la recherche de profits rapides n’ont aucun intérêt à consacrer une partie de leur parc locatif aux personnes les plus pauvres de la société. Ils et elles ne sont pas là pour la charité mais pour encaisser le maximum de revenu. À ce titre, ils et elles représentent un obstacle dce taille dans cette bataille pour le droit au logement.

Au lendemain de ce sommet, les organisations de défense des droits des locataires des personnes des classes populaires manifestent contre le projet de loi 31 caquiste. Celui-ci vise notamment à retirer le droit à la cession des baux renforçant ainsi le rapport de force en faveur des propriétaires immobiliers. La lutte pour le droit au logement est une lutte contre le capitalisme dans le secteur du logement. Cette lutte est confrontée à des intérêts contraires dont il faut tenir compte lorsqu’on ébauche une stratégie pour y parvenir. Un appel « à la colère » des élu.e.s comme celui du maire Bruno Marchand ne suffira pas à faire trembler les colonnes du temple malgré son éloquence. Penser que le gouvernement Legault et ses sbires peuvent être « convaincus » grâce à des études de coûts de l’itinérance pour la société québécoise représente une erreur. Le gouvernement Legault est un gouvernement des affairistes par et pour les personnes qui veulent faire des profits grâce à l’immobilier. Souhaiter civiliser le capitalisme n’a jamais conduit qu’aux cul-de-sacs du renoncement et des échecs.

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