Édition du 30 avril 2024

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Québec

Assistance sociale — Jamais trop tard pour bien faire

Cet été, en plein cœur des vacances, le gouvernement a déposé un projet de règlement, dont deux des principales mesures concernent l’assistance sociale. Ces mesures permettront à certaines personnes assistées sociales d’augmenter leurs revenus et à d’autres d’avoir accès à moindre coût à certains produits et équipements médicaux.

tiré de Votre 456e Soupe au caillou est servie
collectif@pauvrete.qc.ca

Indemnités

Une personne assistée sociale victime d’un acte criminel, d’un accident de la route ou d’un accident de travail peut se voir accorder des indemnités si elle en garde des séquelles physiques ou psychologiques. À l’heure actuelle, ces indemnités sont prises en compte dans le calcul des prestations. Une personne à l’Aide sociale peut conserver jusqu’à 1 500 $ sans voir sa prestation diminuée ; et une personne à la Solidarité sociale, jusqu’à 2 500 $.

À compter de janvier 2022, toutes les indemnités seront exclues du calcul de la prestation jusqu’à la hauteur de 235 401 $. Cette exclusion s’appliquera à chaque membre d’un ménage. Environ 200 personnes assistées sociales verront ainsi leurs revenus augmenter au cours des cinq prochaines années.

Cette mesure répond à une recommandation du Protecteur du citoyen qui, dès 2013, demandait à ce « que les sommes reçues pour compenser une perte d’intégrité physique ou psychique soient exclues du calcul des prestations ». Elle met également fin à une saga judiciaire et administrative. En effet, des victimes d’actes criminels avaient dénoncé cette injustice devant le Tribunal administratif du Québec, la Cour supérieure du Québec, la Cour d’appel et finalement la Cour suprême du Canada.

Prestations spéciales

En plus de leur prestation de base, les personnes assistées sociales ont droit à des prestations spéciales pour rembourser les frais liés à des besoins particuliers (comme des lunettes) ou une situation particulière (comme un incendie).

Or, au cours des 15 dernières années, la majorité des prestations spéciales n’ont pas été augmentées ni même indexées. Un exemple parmi d’autres : le montant accordé pour la monture d’une paire de lunettes est le même depuis 2006. La non-indexation des prestations spéciales équivaut, pour reprendre les mots du Protecteur du citoyen, « à ne pas assurer un remboursement effectif selon les prix courants ». Depuis une dizaine d’années, le Protecteur du citoyen demande au ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale la mise à jour des montants des prestations spéciales et leur indexation sur une base annuelle.

Le Ministère a enfin décidé de remédier à cette situation prochainement – mais en partie seulement.

À compter du 1er janvier 2022, les montants alloués pour certains produits et équipements médicaux (lunettes et lentilles, chaussures orthopédiques, etc.) seront augmentés de 20 %. À compter du 1er janvier 2023, ces mêmes montants seront indexés automatiquement chaque année.

Demi-mesure

Cependant, il s’agit encore une fois d’une demi-mesure. À regarder de plus près le règlement, on constate en effet que le montant de certaines prestations spéciales n’augmente pas, qu’il est le même qu’il y a 15, 20 ou même 30 ans. Cette négligence de la part du Ministère est injustifiable. Elle appauvrit des personnes en situation de pauvreté.

Parmi les prestations spéciales dont le montant restera exactement le même, on retrouve :
Incendie ou catastrophe 1 500 $ Depuis 1989
Frais de déménagement 200 $ Depuis 1989
Frais funéraires 2 500 $ Depuis 1999
Transport par taxi (sans excéder 100 $ par année) 20 $ Depuis 1999
Frais scolaires (primaire) 76 $ Depuis 2006
Frais scolaires (secondaire) 123 $ Depuis 2006

En faisant fi de l’augmentation du coût de la vie, le Ministère contraint les personnes assistées sociales à consacrer une part toujours plus importante de leur budget à l’achat de certains biens et services de première nécessité. Une personne assistée sociale qui est obligée de déménager pour une raison de santé ou de salubrité doit se débrouiller avec le même montant qu’il y a plus de 30 ans. Comment est-elle censée y arriver ?

Dans une lettre adressée à Jean Boulet le 26 août dernier, la Protectrice du citoyen, Marie Rinfret, recommande que le projet de loi soit modifié afin que l’ensemble des prestations spéciales soient majorées de 20 % puis indexées annuellement, et que cet exercice de révision soit finalisé d’ici le 31 mars 2022.

Il était temps

La lenteur du gouvernement dans ces deux dossiers aura eu pour effet d’appauvrir des personnes qui peinent à couvrir leurs besoins de base. Les mesures annoncées dans le projet de règlement auraient dû être mises en place il y a déjà longtemps. Et dans le cas des prestations spéciales, la majoration aurait dû s’appliquer à l’ensemble de ces prestations. Malgré tout, il s’agit d’une bonne nouvelle, ce qui est rare à l’assistance sociale.

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