Édition du 5 novembre 2024

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Lettre au Parti québécois

« Les membres du Parti québécois peuvent agir pour que leur parti mérite à nouveau sa réputation démocratique »

Aux membres du Parti québécois.

Beaucoup d’encre a coulé au sujet de l’élément central des débats du congrès des 14-16 avril, soit l’accession à la souveraineté, mais il n’en va pas de même pour ce qui devrait pourtant être le préalable à une telle visée. Quels que soient le momentum, le calendrier ou l’événement qui déclencherait la réalisation de votre objectif, un obstacle important demeure : comment espérer gagner un référendum sur la souveraineté sans avoir obtenu l’appui véritable de la population, lors d’une élection générale ?

Depuis 1969, tous vos programmes ont intégré des propositions pour remplacer l’actuel mode de scrutin par une formule proportionnelle. Dès sa création, votre parti a fait figure de modèle au chapitre de l’amélioration de la démocratie, mais il faut convenir que le lustre est progressivement disparu. Bien que le programme actuel indique toujours qu’il faut « instaurer un mode de scrutin fondé sur la formule proportionnelle compensatoire », le sujet est absent de la proposition principale qui vous a été soumise en juin dernier par la direction de votre parti.

Et il ne s’agit pas de la seule disparition du programme actuel. Alors que celui-ci s’engageait à « encourager par des mesures de soutien la participation de groupes traditionnellement sous-représentés dans la vie politique », la proposition principale est muette sur la question de la représentation de la diversité ethnoculturelle et se limite à un timide « favorisera la participation des femmes à la vie politique ». Il s’agit de reculs tout aussi importants que de ne plus s’engager à remplacer l’actuel mode de scrutin.

Si la réforme du mode de scrutin n’est pas réintégrée au programme durant le congrès, votre parti basculera officiellement dans le camp des défenseurs du statu quo. Est-ce vraiment ce que les membres du Parti québécois souhaitent ?

Les distorsions causées par le système électoral actuel affectant tous les partis, il n’y a que deux résultats possibles pour les prochaines élections générales : le PQ obtiendra soit une représentation supérieure, soit une représentation inférieure au pourcentage de votes qu’il aura reçu. Le véritable respect de la volonté populaire ne peut qu’avantager votre parti, puisque des alliances avec d’autres partis souverainistes vous permettraient de former un gouvernement de coalition bien plus solide qu’en étant isolé dans un statut minoritaire, ce qui rend une victoire référendaire bien illusoire. Comment imaginer atteindre la souveraineté si la population se sent flouée par le résultat des élections ?

Dernièrement, plutôt que de respecter le programme que vous avez voté en 2005, les membres du caucus du PQ se sont croisé les bras alors qu’il était possible d’agir pour que le gouvernement respecte son engagement d’examiner d’ici juin 2011, tant le mode de scrutin que la carte électorale, lors de la recherche de solution aux limites de la représentation territoriale. Disposer d’un mode de scrutin équitable pour les prochaines élections est tout aussi urgent que de mettre en place une carte électorale équitable pour ce même rendez-vous.

Cette inaction signifie que la volonté des membres du Parti québécois n’a pas été respectée et que l’héritage démocratique de René Lévesque a été remisé. Les occasions pour faire avancer le dossier n’ont pourtant pas manqué, tant celles initiées par le PQ, comme les États généraux sur la réforme des institutions démocratiques (2002-2003), par le parti libéral (2005-2006) ou par les campagnes comme celles du Mouvement pour une démocratie nouvelle ces dix dernières années. L’inaction du PQ n’a été que source de déception à répétition. Évacuer la question du mode de scrutin dans le cadre d’interventions pour améliorer la démocratie, les mœurs politiques et la carte électorale est tout simplement ahurissant.

Devant tout cela, deux options s’offrent aux membres du PQ : ajuster le programme à l’immobilisme des dernières années, sans égard pour les positions historiques, ou se retrousser les manches pour que le PQ mérite à nouveau sa réputation de défenseur des processus démocratiques. Comme membres, il vous appartient de préserver l’héritage laissé, par des René Lévesque, Robert Burns et Jean-Pierre Charbonneau, et de rectifier le tir pour que votre parti demeure le modèle démocratique que vous souhaitez qu’il soit.

13 avril 2011

Stéphane Lessard
Président
Mouvement pour une démocratie nouvelle (MDN)

slessard@democratie-nouvelle.qc.ca

11, rue Lansdowne
Granby, Québec
J2G 4P1
514-497-7146

Stéphane Lessard

Stéphane Lessard, Ex-membre du Comité de coordination national de Québec solidaire (2006-2010)

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