Édition du 30 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Les élections québécoises : les positionnements et les enjeux se définissent !

Comment vous situez-vous face à la perspective du vote stratégique ?

La campagne électorale est commencée. Charest multiplie les annonces et les promesses. La CAQ est sur ses rails et a gobé l’ADQ. Le PQ se réaligne devant la nouvelle configuration du champ politique. Option nationale envisage un ralliement. Québec solidaire garde le cap. Les discussions sur le vote stratégique reprennent encore une fois. Les alignements et réalignements sont en cours. Les prochaines élections poseront en effet des défis importants à la gauche politique et sociale du Québec.

Jean Charest voit dans le mirage du Plan Nord une mission et une bouée de sauvetage !

Jean Charest a promis que les élections ne seraient pas déclenchées avant le 20 avril prochain. Pour faire oublier la corruption généralisée, l’ouverture à l’exploitation d’énergies polluantes comme les gaz de schiste, les tarifications de toutes sortes, l’augmentation des frais de scolarité, les pressions à la privatisation des services de santé... le Parti libéral du Québec mousse son Plan nord qui vise à déguiser un vaste programme de braderie des richesses collectives du Québec aux profits des affairistes du monde entier en un « projet d’une génération ». Il s’apprête à presser le pas en faisant adopter le projet de loi 14 sur les mines et une loi mettant sur pied la Société du Plan Nord. Pour le PLQ, il n’est pas question de toucher de nouveau au niveau des redevances et d’inclure dans le projet de loi une disposition favorisant la transformation du minerai au Québec. Le gouvernement libéral se refuse à à imposer la moindre contrainte aux entreprises. Il se dit prêt par contre à répondre à leurs besoins d’infrastructures et de services de tout ordre. C’est ainsi qu’un projet d’expropriation et de soumission nationale est présenté comme une nouvelle frontière pour le Québec. Il n’est pas étonnant que des milliards d’investissements soient annoncés et que les affairistes se disent intéressés à profiter de cette manne.

La CAQ joue la carte de la démagogie antisyndicale

En avalant l’ADQ, la Coalition Avenir Québec s’est assurée d’occuper clairement le terrain de la droite antisyndicale et antiécologiste. D’emblée, Legault a décidé de faire sa campagne sur le dos des syndicats en promettant d’ouvrir les conventions collectives conclues avec les enseignant-e-s afin de transformer l’organisation du travail et permettre l’évaluation des enseignant-e-s. Sur le terrain de l’environnement, la CAQ dit s’intéresser au potentiel d’affaire lié au développement durable. Culture du résultats, évaluations omniprésentes, mises en concurrence des travailleuses et travailleurs, la CAQ nous promet, à son tour, une nouvelle réingénérie de l’État s’attaquant aux acquis sociaux de la population et soutenant diverses formes de privatisation au profit de la défense des intérêts des affairistes. On peut donc s’attendre à ce qu’il multiplie les provocations et qu’il utilise à plein une démagogie populiste.

L’oligarchie aura donc deux fers au feu dans les prochaines élections... Ces partis de droite occupent donc presque tout ce terrain.

Le Parti québécois embouche un discours plus à gauche !

Face à un terrain trop bien occupé à droite, le Parti québécois devait donc rapidement prendre un virage et se remettre en bouche un discours plus à gauche. Plus question de courtiser l’électorat adéquiste, de chercher à réduire la taille de l’État ou d’identifier l’enrichissement individuel à l’enrichissement collectif. L’alliance avec Péladeau pour l’obtention d’un amphithéâtre à Québec financé par le public date pourtant d’avant hier. Il fallait également remiser le scénario compliqué pour envisager un éventuel dégel des frais de scolarité ou espérer que tombe au plus tôt dans l’oubli les dénonciations sur les revendications exagérées des syndicats du secteur public par Pauline Marois elle-même.

L’odieuse contribution santé est dénoncée et on en promet l’abolition. Mieux, le PQ promet d’en faire payer la totalité en augmentant le fardeau fiscal des plus riches. Mais le PQ va plus loin, il propose d’abolir les hausses décrétées les hausses des droits de scolarité et de les regeler, de bloquer les hausses des tarifs d’électricité, d’abolir la hausse de la taxe sur l’essence... Il propose également de réviser la loi sur les mines afin d’augmenter les redevances des compagnies qui exploitent le minerai, d’imposer les profits des minières, d’exiger la transformation du minerai au Québec. Quand on se rappelle, que c’est le gouvernement Landry qui avait baissé les redevances à un niveau historiquement bas et que les différents gouvernements péquistes avaient été les champions de la défiscalisation des revenus des plus riches, on ne peut que se réjouir de tels tournants, même si on peut se garder plus qu’une petite gêne quand on se rappelle que ce parti a déjà, dans le passé, manifesté une propension à distinguer ses politiques dans l’opposition de celles qu’il pratiquait lorsqu’il parvenait au pouvoir.

Option nationale a ouvert la porte à une nouvelle fusion … avec le Parti québécois.

Jean-Martin Aussant envisage déjà que le congrès d’Opition nationale du 25 février soit appelé à voter en faveur de la fusion avec le PQ. Il pose encore la condition que le PQ ait une position claire en faveur de la souveraineté, mais comme le chef d’Option nationale croit toujours que le PQ est le meilleur véhicule pour réaliser la souveraineté du Québec, on peut s’attendre à ce que l’approche des élections accélère le processus. Une éventuelle fusion avec Québec solidaire a été soulevée mais, cette hypothèse ne semble être privilégiée par la direction d’Option nationale... Si les autres démissionnaires devaient suivre le même chemin, ce qu’il est permis d’envisager, la victoire de Pauline Marois et de sa stratégie de la gouvernance souverainiste aurait finalement réussi à s’imposer assez largement à toute la mouvance péquiste.

Québec solidaire garde le cap !

Québec solidaire maintient le cap. Ce parti vise à présenter 125 candidat-e-s aux prochaines élections. Un projet de plate-forme est discuté dans les différentes associations et un congrès doit se tenir en avril pour l’adopter. Un projet de société indépendantiste, égalitaire, démocratique et écologiste traverse ce projet de plate-forme. Face aux politiques d’austérité que nous prépare la droite au Québec, devant l’approfondissement de la récession européenne qui risque de se répercuter au niveau international, des propositions marquent clairement la nécessité de refuser de payer pour la crise du capital. Elles pourront certainement trouver un large écho dans la population québécoise dans les mois qui viennent. La reprise de telles revendications dans les luttes qui ne manqueront pas de se développer et dont la lutte étudiante est l’expression la plus immédiate, est la condition de la résistance qui doit se bâtir pour bloquer les attaques que nous préparent l’oligarchie qui règne sur la société québécoise.

Bernard Rioux

Militant socialiste depuis le début des années 70, il a été impliqué dans le processus d’unification de la gauche politique. Il a participé à la fondation du Parti de la démocratie socialiste et à celle de l’Union des Forces progressistes. Militant de Québec solidaire, il participe au collectif de Gauche socialiste où il a été longtemps responsable de son site, lagauche.com (maintenant la gauche.ca). Il est un membre fondateur de Presse-toi à gauche.

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