Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Écosocialisme

Passez à l'action directe non-violente pour la justice climatique !

A chaque mois qui passe, un nouveau record d’émissions de gaz à effets de serre et d’augmentation de la temprature mondiale est battu. Pourtant les négociations climat de l’ONU nous mènent dans l’impasse. ONG, mouvements sociaux et syndicats en ont assez des paroles non suivies d’effets, et certains appellent à passer à l’action directe non-violente pour la justice climatique.

Le mois de juin 2014 a été le plus chaud dans le monde jamais enregistré, selon l’Agence américaine océanique et atmosphérique (NOAA) , devenant le 352 ème mois d’affilée pour lequel la température de la planète a été au-dessus de la moyenne de celle du XXème siècle. Il fait suite à un mois de mai qui avait battu les mêmes records. Des records de température qui font suite à des records d’émissions de gaz à effets de serre, les concentrations de CO2 dans l’atmosphère ayant pour la première fois dépassé (http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/05/26/climat-concentration-record-de-co2-dans-l-hemisphere-nord_4426340_3244.html) la barre des 400 parts par millions (unité de mesure de la concentration) depuis 3 millions d’années, durant deux jours en 2013, et sur des moyennes mensuelles en 2014. Pourtant rien ne change.

C’est en raison de l’inertie des négociations climat et de l’emprise toujours plus grande du secteur privé (voir ici) sur ces négociations, que le gouvernement du Venezuela, pays membre de l’ALBA, mais aussi de l’OPEP, a décidé d’ouvrir un espace de dialogue entre ONG, syndicats, mouvements sociaux et gouvernements pour tenter de faire bouger les négociations et porter au sein de celles-ci un autre son de cloche. Quelle que soit l’appréciation que l’on puisse avoir du Venezuela, et de la capacité de cette initiative à influer les négociations, c’est la seule initiative d’un Etat engagé dans les négociations qui ouvre un tel espace international de dialogue avec les ONG, syndicats et mouvements sociaux. De son côté, le gouvernement français ne sait rien dire d’autre à la société civile que de lui demander de soutenir son action et ses positions qui sont pourtant inacceptables. Lors d’une première réunion au Venezuela en juillet, une déclaration intitulée "changez le système, pas le climat", a été adoptée. Disponible ici en anglais (http://www.precopsocial.org/sites/default/files/archivos/margarita_declaration_on_climate_change.pdf) et ici en espagnol (http://www.precopsocial.org/sites/default/files/archivos/declaracion_de_margarita_18jul2014_.pdf) (et bientôt en français), cette déclaration liste une soixantaine de points de ce qui pourrait être une feuille de route pour de véritables politiques de transition et de transformation sociale et écologique face au dérèglement climatique.

Ce n’est pas la première déclaration à établir un tel constat. La déclaration du Klimaforum (http://declaration.klimaforum.org) - forum de la société civile - en 2009 à Copenhague et celle du Sommet des peuples de Cochabamba (http://pwccc.wordpress.com/2010/04/24/peoples-agreement/) le faisaient déjà. Difficile d’imaginer qu’il suffira d’une nouvelle déclaration pour changer la donne, ce d’autant plus que les gouvernements multiplient également les déclarations de plus ou moins bonnes intentions, mais sans que cela ne soit jamais suivi d’effets. Au contraire, les gouvernements continuent d’encourager, de soutenir et de financer le développement des énergies fossiles, y compris à travers les politiques commerciales et d’investissement (voir ici dans le cas de TAFTA - https://france.attac.org/se-mobiliser/le-grand-marche-transatlantique/article/avec-le-tafta-l-ue-et-les-etats), sans mettre en oeuvre de véritables politiques de transitions énergétiques (voir ici pour la France). Pour reprendre les termes de l’excellent petit ouvrage de Naomi Oreskes et Erik Conway (1), l’emprise du "complexe de la combustion carbone" et du "fondamentalisme de marché" sur les gouvernements et institutions internationales engendre l’inaction climatique.

Pour démanteler ce "complexe de la combustion carbone" et faire refluer l’emprise de ce "fondamentalisme de marché", il apparaît de plus en plus clairement qu’il faudra plus que quelques déclarations et bonnes intentions. Y compris quelques coups d’éclat. En novembre 2013, une grande part des ONG, syndicats et mouvements sociaux ont décidé de quitter les négociations climatiques à Varsovie, sous le slogan "Assez de paroles, des actes", "les pollueurs parlent, nous marchons", "écoutez les peuples, pas les pollueurs". Six mois plus tard, alors que la situation a empiré, les ONG sont revenues dans les négociations, appelant les gouvernements à agir "dans notre intérêt ou se mettre de côté". Les négociations climat ont donc repris comme si de rien n’était. Comme si les ouragans Sandy (Cuba – Etats-Unis) et Haiyan (Philippines) n’étaient plus que de lointains souvenirs. Comme si les vives critiques pouvaient se dissiper alors que rien n’a été fait pour remédier à l’emprise des intérêts des entreprises les plus polluantes sur les négociations.

Le 23 septembre prochain, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, organise un sommet pour le climat (http://blogs.mediapart.fr/blog/maxime-combes/250714/passez-laction-directe-non-violente-pour-la-justice-climatique), dont l’agenda consiste principalement à promouvoir les solutions que le secteur privé est prêt à mettre en oeuvre, soit des solutions qui ne sont pas en mesure de répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés. A l’initiative de Avaaz et 350.org, une manifestation est organisée le 21 septembre à New York, qui se veut la plus grande marche de l’histoire pour le climat, appelant de nouveau les gouvernements à passer à l’action. Des forums alternatifs sont également prévus, avec une convergence pour le climat (http://convergeforclimate.org) qui est organisée les 19 et 20 Septembre et un Sommet des peuples qui se tiendra les 22 et 23 Septembre.

Ce sommet des peuples s’inscrit justement dans une semaine internationale d’action (17 - 24 sept) à l’initiative du réseau américain Climate Justice Alliance (http://www.ourpowercampaign.org/cja/), qui appelle à "passez à l’action directe non violente pour la justice climatique" (http://www.ourpowercampaign.org/peoplesclimatemarch/). Il s’agit de ne plus se contenter de déclarations de bonnes intentions et de ne pas attendre des gouvernements qu’ils agissent. L’appel, traduit ci-dessous en français, suit deux axes. Le premier consiste à considérer que les solutions sont celles qui sont déjà mises en oeuvre par les populations qui agissent sur le terrain, et que la seule bonne décision que pourrait prendre les gouvernements et les décideurs seraient de les "soutenir dans la construction des voies pour une transition juste qui s’écartent de l’économie dévastatrice qui "creuse, brûle et jette", pour se tourner vers des économies locales et vivantes prises en charge par les populations et les travailleurs !". On retrouve ici une démarche proche de celle d’Alternatiba (http://alternatiba.eu).

Un second axe vient compléter cette approche. Il s’agit de "passer à l’action directe non-violente" pour "stopper les pollutions et la pauvreté à la source, en affrontant les entreprises productrices d’énergies extrêmes qui provoquent la crise climatique". Sont nommées "les entreprises minières, de pétrole, de charbon et de gaz ; les raffineries et les pipelines ; les plantations d’agrocarburants ; les centrales nucléaires ; les déchets et les incinérateurs de biomasse, etc". Cet appel suggère de pointer les responsabilités et de nommer les acteurs qui font partie du problème, plutôt que d’entretenir le mythe d’une communauté d’intérêt face aux dérèglements climatiques. Le secteur de l’énergie fossile, devenue une "industrie voyou" (rogue industry) étant incapable de se transformer, devient l’adversaire de la lutte contre les dérèglements climatiques et de la transition écologique et sociale. Au moment où EDF vient d’annoncer vouloir importer des gaz de schiste des Etats-Unis, à quand des mouvements massifs d’action directe et de désobéissance civile en France ?

Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)

(1) Conway Erik et Oreskes Naomi, Les marchands de doute, éd Le Pommier, coll. « Essais et documents », 2012
 
 
Passez à l’action directe non-violente pour la justice climatique !

New York City | 17-24 septembre 2014

Semaine internationale de solidarité avec les populations qui sont en première ligne dans le monde entier
 (http://www.ourpowercampaign.org/peoplesclimatemarch)

Le 23 Septembre, les dirigeants politiques et économiques se réunissent au siège des Nations Unies à New York pour le Sommet sur le climat 2014. Ce sommet représente une nouvelle étape dans la prise de contrôle par le secteur privé des négociations climat de l’ONU, et dans la privatisation des terres, de l’eau et de l’air sous couvert d’un pacte mondial pour le climat.

Pendant ce temps, en tant que populations qui nous retrouvons en première ligne face aux dérèglements climatiques, nous sommes celles et ceux qui développons des solutions concrètes, adaptées aux territoires pour répondre aux crises écologiques mondiales. Les populations indigènes, les populations de couleur et les travailleurs, qui sont les populations les plus touchées par les tempêtes, les inondations et les sécheresses, s’organisent pour créer des millions d’emplois qui leur permettent de vivre, dans les secteurs de l’énergie propre, les transports publics, le zéro déchet, la souveraineté alimentaire, le logement collectif et la restauration des écosystèmes. 

Nous nous organisons également pour stopper les pollutions et la pauvreté à la source, en affrontant les entreprises productrices d’énergies extrêmes qui provoquent la crise climatique. En ce moment même, nos amis et camarades à travers le monde mettent leurs corps en interposition pour stopper les entreprises responsables - les entreprises minières, de pétrole, de charbon et de gaz ; les raffineries et les pipelines ; les plantations d’agrocarburants ; les centrales nucléaires ; les déchets et les incinérateurs de biomasse, et une myriade d’autres industries profitant de la destruction de nos communautés, de nos cultures et de nos écosystèmes.

De Mesa à Mountaintop, de Hood à Holler, rejoignez-nous pour répondre à l’ampleur et l’urgence de la crise, debout et solidaires avec toutes les luttes de résistance et de résilience à travers le monde, et passons à l’action directe non-violente contre les entreprises à l’origine de l’économie extractiviste.
Nous appelons nos alliés à :

 nous rejoindre dans les rues de New York pour une semaine d’actions non-violentes et créatives pour la justice climatique ;

 organiser une délégation pour se joindre à la Marche des peuples et au Sommet des peuples pour la justice climatique à New York

 organiser une action créative là où vous habitez, travaillez, qui mette en évidence les solutions locales aux dérèglements climatiques

 diffuser cet appel à l’action parmi vos réseaux respectifs et les médias sociaux

Nos demandes envers les décideurs locaux, nationaux et internationaux sont simples : 

Soutenez-nous dans la construction des voies pour une transition juste qui s’écartent de l’économie dévastatrice qui "creuse, brûle et jette", pour nous tourner vers des économies locales et vivantes prises en charge par les populations et les travailleurs !


Rejoignez-nous dans la solidarité, que ce soit dans les rues de New York, là où vous vivez, et dans le monde entier !

Alliance for Appalachia • ACE for Environmental Justice • Asian Pacific Environmental Network • Black Mesa Water Coalition • Catskills Mountainkeeper • Center for Earth, Energy and Democracy • Center for Story-based Strategy • Communities for a Better Environment • Community to Community Development • Cornell Global Labor Institute • East Michigan Environmental Action Council • Energy Justice Network • Environmental Justice and Climate Change Initiative • Global Alliance for Incinerator Alternatives • Global Justice Ecology Project • Grassroots Global Justice Alliance • Grassroots International • Indigenous Environmental Network • Institute for Policy Studies • Ironbound Community Corporation • Jobs With Justice • Just Transition Alliance • Kentuckians for the Commonwealth • Labor Community Strategy Center • Labor Network for Sustainability • Little Village Environmental Justice Organization • Missourians Organizing for Reform and Empowerment • Movement Generation • Movement Strategy Center • NAACP Climate Justice Initiative • New York City EJ Alliance • People Organizing to Demand Environmental and Economic Rights (PODER) • POWER • Right to the City Alliance • Rising Tide North America • Ruckus Society • Southwest Organizing Project • Southwest Workers Union • UPROSE

Restez à l’écoute dans les prochaines semaines pour plus d’informations sur les actions prévues en cours d’élaboration.

Pour plus d’informations, et partagez vos initiatives locales, contactez info@ourpowercampaign.org, sharon@ruckus.org ou nyc@risingtidenorthamerica.org, ou aller sur www.ourpowercampaign.org

Maxim Combes

Economiste de formation, je suis engagé depuis la fin des années 1990 dans le mouvement altermondialiste, à travers Attac France notamment. Avec d’autres j’ai contribué à animer la coalition Urgence Climatique Justice Sociale en France et le réseau Climate Justice Now ! à l’échelle internationale. J’ai depuis contribué à la mise sur pied de la Coalition climat 21. Outre ce blog, je contribue au site d’Informations Basta ! (bastamag.net) Je viens de publier : Sortons de l’âge des fossiles ! Manifeste pour la transition, Seuil, Anthropocène Et je suis le coauteur de : - La nature n’a pas de prix (Attac, Paris, LLL, 2012) - Les naufragés du libre-échange, de l’OMC à Tafta (Attac, Paris, LLL, 2015) - Crime climatique stop ! (Seuil, « Anthropocène », août 2015). - Le Climat est notre affaire (Attac, Paris, LLL, 2015)

Son blogue sur Mediapart : https://blogs.mediapart.fr/maxime-combes

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