Édition du 16 avril 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Éducation

Manifestation nationale à Québec

La colère, le froid et les gaz

Ils et elles étaient 95 800 en grève générale illimitée le 1er mars, rejoints par 14 000 étudiants et étudiantes en grève pour cette journée. Entre 7000 et 8 000 d’entre elles et eux ont bravé le froid mordant de cette journée pour manifester à Québec et exprimer leur mécontentement devant le Parlement. Groupes syndicaux et formations politiques se sont joints aux protestations et à la colère de la communauté étudiante.

La manifestation était prévue pour 14h00, mais des problèmes logistiques et la température ont retardé d’une heure le début de la marche. Cela n’a néanmoins pas refroidi le moral des manifestants et des manifestantes, au contraire. Vers 15h00, la foule survoltée a sillonné les rues de Québec en partant du Parc des Braves jusqu’à l’Assemblée nationale. « L’imposant cortège a atteint l’édifice vers 16h30, bien que quelques étudiants et étudiantes plus rapides avaient déjà atteint les lieux. Tout au long de la marche, des membres de la CSN (dont la FNEEQ) étaient de la manifestation. Il en est de même pour Jean-Marc Aussant d’Option Nationale, pour Amir Khadir de Québec Solidaire et pour un petit groupe portant la bannière du Parti Québécois.

Ce n’est pas le froid, le vent et la neige qui ont découragé les étudiantes et étudiants ! Pour se réchauffer, l’imposant cortège a scandé avec une puissante énergie son opposition à la hausse des frais de scolarité décidée par le gouvernement en 2011. L’atmosphère était électrique, et la frustration de la communauté étudiante manifestante, palpable. De nombreux curieux semblaient d’ailleurs fort étonnés devant autant de bruit. En effet, les protestataires étaient si acharné-e-s à crier, chanter et exprimer leur colère que les discours prononcés durant la manifestation étaient presque inaudibles ! Toutefois, si les manifestants et manifestantes étaient manifestement en colère, aucun dérapage n’a été commis durant la marche, et les grévistes procédaient pacifiquement.

Devant le Parlement

Une fois arrivée à destination, ils et elles se sont massé-e-s devant l’entrée principale de l’Assemblée nationale, mais une imposante clôture leur interdisait l’accès au site, et de nombreux policiers et agents de la Sureté du Québec gardaient les lieux. Un petit groupe d’environ 300 étudiants et étudiantes a tenté de forcer la clôture et la ligne de policiers. C’est à ce moment qu’une première grenade lacrymogène a explosé, vers 16h45, mais les vents capricieux ont retourné les gaz vers les forces de l’ordre. Ainsi, ce sont surtout les agents de la paix qui ont été incommodés. Cela a laissé le champ libre au groupe de protestataires, qui a pénétré, pour une dizaine de mètres, dans le périmètre interdit d’accès.

À ce moment, une centaine de policiers et de policières de l’escouade antiémeute armé-e-s de matraques et équipé-e-s de masques à gaz ont surgi du Parlement et ont rapidement bloqué l’avance des étudiants et des étudiantes. À coup de matraques et en tirant d’autres grenades lacrymogènes, forces de l’ordre ont réussies à repousser le groupe au-delà du périmètre de sécurité et à disperser la plus grande partie des grévistes. Il était 17h00 lorsque les organisateurs et organisatrices de la manifestation ont appelé à la fin de la manifestation. L’altercation violente avec l’escouade antiémeute n’aura duré qu’une quinzaine de minutes.

On peut néanmoins se questionner sur la pertinence d’avoir utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule des grévistes. Qu’un député péquiste ait aussi été gazé démontre avec quel aveuglement la répression frappe. L’utilisation de telles armes n’empêchera pas les grévistes de manifester leurs revendications, mais elle crée un schisme à même le mouvement entre ceux-celles respectant une certaine norme morale et ceux-ceux l’outrepassant. « Les personnes gazées n’avaient pas à se trouver là et il faut être en mesure de réfréner les débordements », diront certains et certaines.

Contre cette pensée facile, nous répondrons que tant et aussi longtemps que l’État nous enverra son bras armé pour négocier, de tels évènements sont inévitables. Avec maintenant plus de 100 000 étudiantes et étudiants en grève, un mouvement qui grandit chaque jour en importance, ce n’est pas par la force et la violence que le gouvernement réussira à briser l’ardeur communauté étudiante, mais c’est en s’ouvrant au dialogue, en écoutant ce que nous demandons et en prenant compte de ses responsabilités que ce dernier pourra faire en sorte que de tels incidents ne se reproduisent plus.

L’auteur est étudiant en philosophie

Article tiré du numéro 4 d l’Ultimatum Express

Samuel Lesage

Étudiant en philosophie

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