On sent que Jean-Marc Piotte, au travers ce récit analytique, nous fait partager quelquepart le bilan de sa propre vie et le cheminement qu’il a parcouru. La révolution des mœurs c’est d’abord la description d’une jeunesse à laquelle il appartenait qui, comme il l’écrit lui-même a fait sauter les verrous qui emprisonnaient la sexualité, a rejeté les mœurs d’origine religieuse fondées sur le sacrifice de soi et a réclamé le remplacement de la structure hiérarchique et autoritaire de l’université.
C’est cette génération qui à partir des années 1970 prendra le relais de la lutte pour les droits des femmes et l’approfondira. De la revue "Québécoises deboutte !"en 1971 ou la pièce de théâtre "Moman travaille pas, a trop d’ouvrage !" en 1975, le mouvement des femmes se radicalise. Le Front de Libération des femmes lance le slogan « Pas de libération des femmes sans libération du Québec, pas de libération du Québec sans libération des femmes ».
Au-delà des rappels historiques et des analyses pertinentes, Jean-Marc Piotte nous fait découvrir une vision inattendue de cette révolution culturelle, celle qui nous dit par exemple que la beatlemania a suscité « une nouvelle façon de faire : chaque individu, avec ou sans partenaire, s’exprime librement sur la piste de danse, alors que le rock’n’roll suivait une chorégraphie conduite par le mâle ».
Il se livre aussi à quelques confidences comme le fait qu’il a été membre de la chorale de l’église paroissiale puis chef de troupe scout. Il nous exprime sur un ton intimiste des faits d’une importance dont nous pouvons difficilement mesurer la portée aujourd’hui, comme la lecture d’auteurs ignorés dans les salles de cours parce qu’ils étaient à l’index. Pour lui, Jean-Paul Sartre venait en tête de liste, parce qu’il exprimait la liberté fondamentale de l’homme. Il affirmait aussi que le marxisme est « l’horizon philosophique indépassable de notre temps ».
Des luttes linguistiques à la prise du pouvoir du PQ en 1976, Jean-Marc Piotte salue sans dogmatisme les premières réalisations progressistes du PQ, ce qui rend d’autant plus crédible sa critique du revirement amorcé en 1983 contre les syndicats, sa politique du déficit zéro de 1996 et son repli identitaire dirigé par Bernard Drainville en 2013.
Sans louanger pour autant Québec solidaire, il souligne son refus de ce cul-de-sac et mentionne que contrairement aux deux vieux partis il préconise une démocratie participative. Il poursuit en affirmant que le syndicalisme de combat se situe dans une perspective semblable. Pour lui, le Printemps érable a constitué à la mise en pratique de cette perspective et même si ce printemps est terminé, Jean-Marc Piotte nous prévient qu’il y en aura d’autres en réaction aux états impuissants à répondre aux besoins de leurs commettants.
Un livre à lire, assurément.
Le lancement a lieu le 9 mars prochain dès 17h à La Quincaillerie, 980 Rachel est Montréal