Édition du 5 novembre 2024

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Anniversaire d’Hiroshima-Nagasaki

Août 1945 – Les véritables raisons d’Hiroshima-Nagasaki et les début de la terreur nucléaire

Les 6 et 9 août 1945, en quelques secondes, les vies d’au moins 150 000 JaponaisEs furent anéanties. Dans les semaines et mois qui suivirent, des dizaines de milliers encore sont morts, souvent dans d’atroces souffrances...

Aujourd’hui, comme à l’époque dans le camp des alliés, on trouve encore des hommes politiques et des « experts », qui affirment que, malgré l’horreur, les bombardements étaient nécessaires pour éviter la mort de centaines de milliers de soldats et de civils dans une guerre très longue. Cet argument est faux, et cache les véritables motivations du gouvernement américain.

« Montrer sa force »

En août 1945, replié sur les principales îles et la Mandchourie, le Japon n’était plus en mesure d’offrir une résistance conséquente. Huit millions et de demi de Japonais avaient fui les villes. La production de guerre était réduite à peu de choses. Dans les raffineries de pétrole, la production avait été réduite de 83 %, la production des moteurs d’avion de 75 %, celle des cellules d’avion de 60 %. 600 usines importantes avaient été détruites, 90 % des navires avaient été coulés.

Une étude menée par l’armée américaine après la guerre concluait que même sans les bombes, le Japon aurait certainement capitulé avant le 31 décembre, peut-être même avant le 1er novembre. Dans ses mémoires, le général Eisenhower parlera de sa « conviction que le Japon était déjà battu, que le bombardement était complètement inutile » et que « l’utilisation d’une bombe (n’était) pas nécessaire pour sauver la vie des Américains. » Plus loin, il ajoute que le général MacArthur (l’officier le plus haut gradé dans le théâtre des opérations en Pacifique) « pensait que le bombardement était complètement inutile d’un point de vue militaire. » Enfin, les États-Unis avaient percé les codes des communications japonaises et savaient que le Japon cherchait à négocier et envisageait même de se rendre.

Certains analystes évoquent l’argument qu’après avoir dépensé des sommes colossales pour développer la bombe, il fallait quand même s’en servir, ou que le largage des bombes permettait d’observer l’impact en situation réelle de cette nouvelle arme. D’ailleurs, les deux villes avaient été épargnées des bombardements « classiques » infligées aux autres villes japonaises… afin de mieux mesurer les effets de la bombe atomique ?

Il est tout à fait possible que de tels arguments cyniques aient pesé dans la décision. Dans une conversation avec le président Truman le 6 juin 1945, le ministre des Affaires étrangères, Henry Stimson dit : « Je craignais qu’avant d’être prêt, l’Armée de l’Air ait tellement détruit le Japon que la nouvelle arme ne bénéficie pas d’une situation suffisamment crédible pour montrer sa force. » Face à cette remarque, le président « a ri en disant qu’il comprenait. » Enfin, en matière de cynisme et de brutalité, les alliés avaient déjà montré leur capacité à terroriser les populations civiles avec des armes classiques, à Dresde ou à Tokyo (entre 80 000 et 100 000 mortEs à chaque fois).

Le partage du butin

Mais la raison de fond se trouve dans la rivalité entre les différentes puissances, en particulier entre les USA et l’URSS, la puissance émergente. Pendant la guerre, les USA et l’URSS, mais aussi la GB et la France, avaient besoin de l’aide des uns et des autres pour venir à bout de l’impérialisme allemand et japonais. Mais la rivalité n’était jamais très loin, comme l’a montré le refus des alliés, dans un premier temps, d’ouvrir un deuxième front à l’ouest, contents qu’ils étaient de voir l’Allemagne et l’URSS s’affaiblir dans un duel sanglant.

Par contre à mesure que l’Allemagne et le Japon reculaient, il devenait de plus en plus urgent de se mettre dans la meilleure position pour partager le butin qui reviendrait aux vainqueurs à la fin de la guerre : pour le partage de l’Europe et du Moyen Orient, mais aussi de l’Asie.

Ainsi, lors de la conférence des alliés à Potsdam en février 1945, l’URSS s’est engagée à ce que trois mois après la défaite de l’Allemagne, elle envahisse la Mandchourie occupée depuis 1931 par le Japon.

En échange de l’intervention de ses troupes, Staline revendiquait l’occupation des îles Kuriles, l’occupation de la Mandchourie et le partage du Japon. Mais la mise au point de la bombe atomique et son essai réussi le 16 juillet changea la donne. Capables maintenant de précipiter la reddition du Japon par la terreur, les USA pouvaient se passer de l’aide de l’URSS et éviter ainsi d’être obligés de trop lui céder. Staline, fonctionnant selon la même logique, s’est précipité pour envahir la Mandchourie deux jours après Hiroshima, et se livrer à un pillage en règle de ce pays à la fin des hostilités, même s’il ne pouvait plus prétendre à un partage du Japon. C’était aux Américains que les Japonais se rendaient, pas aux Russes !

La guerre froide n’allait pas tarder à se mettre en place....

Einstein et la bombe atomique

En août 1939, les physiciens Leo Szilard, Edward Teller et Eugène Wigner (réfugiés hongrois du nazisme) avaient la conviction que l’Allemagne nazie travaillait au développement d’armes atomiques, et ont donc décidé de persuader Albert Einstein, le physicien le plus célèbre de l’époque et « père » de la physique nucléaire, d’écrire au président Roosevelt.

Dans une lettre rédigée par Szilard, Einstein avertira le président du danger et lui demandera d’accélérer les recherches afin de devancer l’Allemagne.

Pourtant, Einstein était pacifiste pendant la Première guerre mondiale et très antimilitariste, écrivant en 1934 : « La pire des institutions grégaires se prénomme l’armée. Je la hais. Si un homme peut éprouver quelque plaisir à défiler en rang aux sons d’une musique, je méprise cet homme… Il ne mérite pas un cerveau humain puisqu’une moelle épinière le satisfait. Nous devrions faire disparaître le plus rapidement possible ce cancer de la civilisation. »

« Une grande erreur »

Après la défaite du nazisme et à l’approche de la fin de l’affrontement avec le Japon, Szilard est devenu très inquiet et en juillet 1945, avec 70 autres scientifiques travaillant sur le projet de la bombe, a envoyé une nouvelle lettre, cette fois au président Truman, afin de le dissuader de l’éventuelle utilisation de la bombe sur les villes japonaises. D’autres scientifiques ont proposé que la bombe soit employée sur une zone inhabitée afin d’avertir les Japonais de ce qu’ils risquaient. Mais les appels ne furent pas entendus.

Après la guerre, Einstein militera pour le désarmement nucléaire jusqu’à sa mort en 1955. Peu avant, il avouera à son ami Linus Pauling : « J’ai fait une grande erreur dans ma vie quand j’ai signé cette lettre (de 1939). » Quant à Szilard qui avait été très impliqué dans le développement de la bombe, il dira après la guerre : « Si les Allemands avaient largué des bombes atomiques à notre place, nous aurions qualifié de crimes de guerre les bombardements atomiques sur des villes, nous aurions condamné à mort les coupables allemands lors du procès de Nuremberg et les aurions pendus. »

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