Tiré de Reporterre
2 octobre 2025
Par Émilie Massemin
Faute d’accord sur le budget entre les républicains de Donald Trump et l’opposition démocrate, les États-Unis ont basculé, mercredi 1er octobre en situation de « shutdown ». - Mehmet Eser / Middle East Images via AFP
Pour la première fois depuis 2018, c’est la paralysie quasi-totale outre-Atlantique. Faute d’accord sur le budget entre les républicains de Donald Trump et l’opposition démocrate, les États-Unis ont basculé, mercredi 1er octobre à minuit, en situation de « shutdown ». Quelque 750 000 fonctionnaires fédéraux se retrouvent au chômage technique, le versement de leurs traitements différé.
Les agences en charge des politiques environnementales ne sont pas épargnées. Pire : le gouvernement pourrait saisir l’occasion de ce blocage pour procéder à des licenciements massifs, selon le média spécialisé Inside Climate News. Ainsi, Russell Vought, directeur du Bureau de la gestion et du budget au gouvernement fédéral, a demandé aux agences fédérales de se préparer à des licenciements massifs. Si le gouvernement ferme, « nous allons licencier beaucoup de personnes de manière permanente », annonçait Donald Trump à NBC News le 28 septembre, sans préciser l’ampleur de ces suppressions.
À court terme et pendant le blocage, l’Agence de protection de l’environnement (EPA), une agence fédérale indépendante dont les principales missions sont de faire appliquer les lois environnementales, pourrait voir ses effectifs drastiquement réduits. Seuls 11 % de ses 15 000 employés pourraient continuer à travailler, selon les derniers plans d’urgence réclamés par l’État et élaborés par l’agence dans la perspective du shutdown.
« Personne ne tiendra les pollueurs responsables pendant la fermeture de l’EPA »
Ceci, alors qu’elle avait déjà été grandement fragilisée par la politique anti-écologique du président étasunien : elle avait déjà perdu 4 000 employés à la suite de licenciements et de mesures de départ volontaire, et l’administration Trump avait proposé une réduction de 55 % du financement de l’EPA dans son budget pour 2026.
« L’objectif semble être de supprimer l’expertise et l’expérience nécessaires à la mise en œuvre de nos lois fédérales sur la protection de l’environnement, et tant qu’il y aura des personnes qui ont ces compétences, je pense que l’objectif est de supprimer cela autant que possible », a accusé Jeanne Briskin, ancienne directrice du Bureau de la protection de la santé des enfants de l’EPA, lors d’un point presse.
Les conséquences de cet affaiblissement de l’EPA s’annoncent dramatiques. « Personne ne tiendra les pollueurs responsables de ce qu’ils rejettent dans l’air que nous respirons et dans l’eau que nous buvons pendant la fermeture de l’EPA », a déclaré à l’agence AP Jeremy Symons, ancien responsable politique de l’EPA sous la présidence de Bill Clinton, aujourd’hui conseiller principal du Réseau de protection de l’environnement.
Une étudesur la pollution provenant d’environ 200 centrales électriques au charbon lors du précédent shutdown de 2018-2019 pendant le premier mandat de M. Trump, d’une durée record de trente-cinq jours, a révélé qu’elles « avaient considérablement augmenté leurs émissions de particules en raison de la fermeture de l’EPA ». La pollution par la suie est liée àdes milliers de décès par an aux États-Unis.
Incertitudes sur des données énergétiques clés
Globalement, c’est tous les aspects environnementaux du fonctionnement d’un État qui risquent d’être affectés. L’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA), le ministère américain de l’Énergie (DOE) et le ministère américain de l’Intérieur n’avaient pas encore publié de plans actualisés sur la manière dont elles comptent gérer le shutdown.
Cela pourrait entraîner une incertitude quant à la publication par l’EIA de données énergétiques clés, ainsi que sur la manière dont l’administration Trump gèrera les licences d’exportation de gaz naturel liquéfié et la surveillance du développement pétrolier et gazier sur des millions d’hectares de terres fédérales, selon Argus Media, un site d’information spécialisé dans les marchés des matières premières.
Le shutdown pourrait aussi mettre en congé environ 42 000 employés du Département de l’agriculture des États-Unis, soit environ la moitié des employés de l’agence, selon son plan d’urgence pour 2025. En conséquence, les rapports sur les matières premières sensibles au marché publiés par le ministère américain de l’Agriculture et les programmes nutritionnels qui nourrissent des millions d’Étasuniens pourraient être perturbés, selon Reuters. L’agence utiliserait des fonds d’urgence pour poursuivre certains programmes, à l’instar de ceux de santé animale, mais suspendrait l’octroi de nouveaux prêts agricoles.
Les parcs nationaux, victimes du précédent shutdown
Autres victimes de cette situation de blocage, les parcs nationaux. Lors du précédent shutdown, les parcs nationaux étaient restés ouverts et sans personnel pendant trente-cinq jours, avec pour conséquences du vandalisme, la destruction d’habitats et l’accumulation de déchets. La semaine dernière, plus de 35 anciens directeurs du Service des parcs nationaux ont donc exhorté le gouvernement à fermer les parcs en cas de shutdown pour empêcher que de tels dégâts se reproduisent.
Dans leur lettre adressée au secrétaire à l’Intérieur Doug Burgum, ils rappelaient que ces parcs étaient déjà « au bord du gouffre » en raison des réductions de personnel et de budget opérées en 2025. Cette année-là, quelque 5 000 employés du Service forestier, rattaché au ministère de l’Agriculture, avaient accepté l’offre de départ volontaire ; entre mars et avril, le Service des parcs nationaux avait vu ses effectifs se réduire de 13 % ; quant aux effectifs du parc national de Carlsbad Caverns (Nouveau-Mexique), ils avaient fondu de 20 %.
Pour l’heure, difficile de savoir si ce plaidoyer pour une fermeture des parcs sera suivi d’effets : l’administration Trump prévoyait en effet de maintenir la plupart des parcs nationaux ouverts au public, selon Politico.
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