Ainsi, il est clair que chaque ménage américain est maintenant endetté de plus de 10,000$, dette qui se reportera sur la prochaine génération et peut-être celles à venir. Or, ceux qui sont à l’origine de ce désastre ne semblent pas risquer beaucoup. Tous ces banquiers avides et autres experts en finance qui ont imaginé les véhicules les plus sophistiqués possibles pour empocher un maximum de profits en un minimum de temps ne devraient pas perdre beaucoup dans l’aventure.
Joseph Stiglitz, prix Nobel de la paix, estime que le plan de sauvetage présenté par l’administration Bush est tout en faveur de Wall Street , que les contribuables n’y font que perdre [1]. Le gouvernement américain ramasse une quantité phénoménale de mauvaises créances, celles dont personne ne veut plus. Le premier plan ne prévoyait même pas la possibilité de revendre ces produits le jour où le marché aura repris et ainsi rentrer, au moins en partie, dans son argent et le remettre aux contribuables. C’est ce qu’a fait la Suède au début des années quatre-vingt dix dans ces circonstances comparables. Elle a réussi à recouvrer ses fonds.
Plusieurs sont outrés que le plan ne fasse rien pour vraiment soutenir les propriétaires en défaut de paiement. Le plan de sauvetage ne visait, dans un premier temps, que le secteur financier. Les acheteurs de maison n’ont pourtant pas participé à leur débâcle. Une bonne part d’entre eux a été abusée par des vendeurs en mal de gains et ont contracté des prêts au-dessus de leurs moyens. Mais une autre est constituée de travailleurs-euses ayant perdu leur emploi ou dont le revenu stagnant, voire à la baisse, n’est plus à la hauteur des besoins élémentaires, dont celui de se loger. Bien sûr il y a aussi les spéculateurs.
Le système économique a fonctionné ces dernières années grâce aux bas salaires, que ce soit sur place ou via la délocalisation. Lorsque M. Bush invitait les Américains à continuer à acheter au lendemain du neuf septembre 2001, il les invitait à s’endetter encore plus. Ce qu’ils ont fait. Et on en ajoute aujourd’hui. Pour sauver de riches tricheurs à des degrés divers, à qui on a laissé la bride sur le cou.
Pas étonnant que les Américains soient révoltés en ce moment. Les représentants au Congrès et les Sénateurs sont inondés de messages les enjoignant de ne pas approuver ce plan. Il y a eu des manifestations sur Wall Street la semaine dernière et dans plusieurs autres villes [2]. Ce sont ces protestations populaires, en pleine période électorale à la présidence aussi bien qu’aux 2 chambres, tout autant que la résistance des élus républicains à ce qu’ils désignent comme une opération de socialisation (ce en quoi ils n’ont pas tort), qui ont forcé la révision du plan original. Les Démocrates allaient l’endosser tel quel en toute urgence. Ça en dit long sur leurs préoccupations quant au sort de la majorité de la population.
Tous ne sont pas convaincus que l’opération réglera complètement la situation. J. Stiglitz prévient que les bilans des banques sont pleins de trous. Même dans sa mouture actuelle, il ne fait rien pour prévenir d’autres crises qui sont très susceptibles de surgir. Entre autres : augmentation de l’inflation, dévaluation du dollar américain, augmentation du chômage, baisse des entrées de taxes au gouvernement, etc. Restera-t-il quelques sous pour la relance de l’emploi, le développement social, l’éducation ? Qu’adviendra-t-il des fonds de pensions acteurs dans ce système ?
Le virus est parti des États-Unis, mais il a été répandu partout ou presque dans le monde. Ce matin encore (lundi 29 septembre), on annonce la prise en mains totale ou partielle de deux banques européennes en Angleterre et au Bénélux.
Ceux qui ont défendu à corps et à cris le laisser-faire sont confondus, mais ils ne paieront pas le prix de leurs engagements à sa juste valeur.
À suivre donc.