Tiré du blogue de l’auteur.
Cette UE a en effet été **conçue et construite par les gouvernements nationaux** pour transposer au niveau supranational une série de réformes structurelles qu’ils ne pouvaient ou n’osaient prendre seuls de peur d’être violemment rejetés par leurs électorats. Il y a deux ans, ce jour, les Britanniques ont voté en faveur de la sortie de l’UE. Si j’avais pu voter à cette occasion, j’aurais, sans aucune hésitation, voté pour le maintien de la Grande-Bretagne dans l’UE.
Pourquoi ? Parce qu’une sortie sèche comme celle de la Grande-Bretagne est techniquement hyper compliquée. Parce qu’elle entraîne plus de désavantages économiques pour les peuples que de gains. Parce qu’elle met en péril le peu de protection sociale que l’UE a pu imposer aux États-membres. En outre, cette sortie est un grand défouloir pour ce que le pays compte de xénophobes et de racistes. La situation économique et politique s’est dramatiquement détériorée depuis deux ans en Grande-Bretagne.
Jeremy Corbyn qui ne s’oppose pas clairement à cette offensive ultralibérale et xénophobe est en train de perdre des soutiens au sein de la jeunesse et de l’électorat travailliste très largement acquis au maintien dans l’UE. Je n’ose imaginer ce qu’un vote de sortie donnerait dans un pays comme la France, dans lequel les idées d’extrême-droite et islamophobes sont si fortes.
Penser que les capitalistes qui maitrisent l’économie d’un pays vont se coucher devant la “volonté d’un peuple souverain” au motif que ce pays est sorti de l’UE est une funeste farce. Un capitalisme national sera encore plus violent avec son peuple car il devra se battre avec une concurrence européenne (droits de douane, accès au marché unique, exigence de qualité des produits, etc.). Se battre au sein de l’UE fait certes penser à la condamnation de Sisyphe. C’est une option terrible, mais l’autre option, la sortie, l’est encore plus. L’option de la sortie est d’autant plus dépassée que la social-démocratie néolibérale, partisane de l’UE actuelle, est en train de disparaitre. Raison de plus pour y rester et se battre pour la transformer. C’est une tâche très difficile et aléatoire, mais c’est le moins mauvais des scénarios. Le projet de sortie est avant tout celui des populistes, des racistes et des ultralibéraux.
Quelques jour savant le vote britannique, je publiais cet article sur Mediapart. J’en reproduis les derniers paragraphes, tellement édifiants et prophétiques… :
“Jeremy Corbyn les Greens, Left Unity (gauche radicale), le mouvement social Momentum (proche de Corbyn), les syndicats du TUC, et des personnalités comme Ken Loach ou le journaliste Owen Jones font, sans état d’âme, campagne pour le maintien dans l’UE. Tous ont compris qu’une victoire du Brexit sur une ligne néo-thatchérienne et xénophobe amènerait un tournant à droite, et une attaque en règle contre les quelques droits sociaux protégés par l’UE (congés payés, de maternité ou durée maximale du travail hebdomadaire).
Le Lexit (sortie à gauche) est, de fait, restée introuvable. La gauche a compris que le gouvernement et Westminster n’ont pas besoin de la Commission européenne pour imposer une austérité virulente (le pays n’est pas dans la zone euro et n’est donc pas soumis aux contraintes du Pacte de stabilité) ou mener des politiques tatillonnes en matière d’immigration (la Grande-Bretagne n’appartient pas à la zone de Schengen).
Cette gauche sait que l’Europe est intergouvernementale et que les grandes décisions qui engagent les peuples sont décidées, non par la Commission, mais par les gouvernements les plus influents (Allemagne, France et Grande-Bretagne). Promouvoir une sortie de l’UE dans les circonstances actuelles, ce serait objectivement renforcer le camp antisocial, populiste et raciste, en Grande-Bretagne et en Europe.”
Deux ans après le vote du Brexit, les capitalistes et xénophobes ont les mains libres pour mettre en oeuvre leur sale besogne anti-populaire.
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