Édition du 16 avril 2024

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Politique d’austérité

Perspectives CSQ 2015 - Le Québec, théâtre d'une grande noirceur

MONTRÉAL, le 2 janv. 2015 - En ce début d’année 2015, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) est extrêmement inquiète du Québec que le gouvernement Couillard met en scène avec ses réformes, ses politiques d’austérité et ses offres de conditions de travail d’une autre époque.

C’est l’essentiel du message livré par la présidente de la CSQ à l’occasion de la conférence de presse de début d’année, tenue aujourd’hui sur la scène du Lion d’Or à Montréal. Un lieu tout indiqué pour symboliser la mise en scène de Philippe Couillard à faire du Québec le théâtre d’une grande noirceur.

« Depuis qu’il est arrivé au pouvoir, il saccage plusieurs pans de la société qu’on s’est donnée : l’éducation, la santé et les services sociaux, la petite enfance, les retraites et j’en passe. Ce n’est pas vrai que nous allons laisser ce gouvernement nous plonger à l’ère de la grande noirceur de Maurice Duplessis. Alors que les banques aux profits monstrueux ont de nos jours remplacé les églises, ce gouvernement semble trouver normal que le peuple se sacrifie pour rendre un culte au déficit zéro. Mais au nom de son "Idéologie", il est carrément en train de créer une économie de pauvreté », s’insurge Louise Chabot, présidente de la CSQ.

Le masque des finances publiques

De même, pour légitimer les coupes tous azimuts, le gouvernement libéral amplifie de façon soutenue les difficultés budgétaires du Québec. Les chiffres invoqués par le gouvernement Couillard — plus de 5 milliards de déficits en 2014-2015 et plus de 7 milliards en 2015-2016 — sont tout simplement gonflés pour donner l’impression d’une crise majeure des finances publiques. En fait, ils ne servent au gouvernement qu’à des fins de propagande pour justifier la réduction du rôle d’État.

« Cette réduction des dépenses tient plus d’une idéologie pour transformer en profondeur l’État, l’économie et la société québécoise en utilisant les crises fiscales. D’autant plus que les choix budgétaires des dernières années dépouillent la population de ressources essentielles au maintien des programmes et services publics. Pensons notamment aux baisses d’impôts accordées en guise de cadeaux électoraux qui réduisent de près de 4,5 milliards de dollars les revenus annuels du Québec, ainsi qu’à l’abolition de la taxe sur le capital des entreprises qui prive le gouvernement de 1,5 milliard de dollars chaque année », soutient Louise Chabot.

Un décor d’une autre époque

Par ailleurs, la présidente de la CSQ considère que les multiples réformes, en cours et projetées, vont ramener le Québec plus de 40 ans en arrière. « Ce qui se passe n’est pas rien. Ce gouvernement est en train de mettre à terre une organisation sociale, avec ses services et ses structures, dont on s’est dotée après des décennies d’investissements, d’efforts et de labeurs collectifs.

En petite enfance, le recul risque d’être majeur si les projets libéraux de modulation des tarifs et l’optimisation des services de garde éducatifs sont adoptés. L’universalité et l’accessibilité des services de garde seront frappées en plein cœur. Cela pourrait être la fin des services de garde éducatifs et publics au profit de la commercialisation. On sacrifiera ainsi le développement de nos enfants », entrevoit Louise Chabot.
Le saccage n’est pas moindre dans d’autres secteurs encore plus névralgiques et fondamentaux sur lesquels est érigée une société juste et équitable. « Les actions à venir en éducation et en santé évacuent complètement l’humain de l’équation pour ne garder que les chiffres froids, déconnectés de la réalité. La seule chose qui compte, c’est le sacro-saint déficit zéro », n’en démord pas la présidente de la CSQ.

En effet, les différentes annonces en éducation sont loin d’être rassurantes. Compressions dans le programme d’aide alimentaire pour contrer le décrochage scolaire en milieux défavorisés, dans l’aide aux devoirs, dans les programmes d’incitation à la lecture et celui encourageant la pratique des sports, sont quelques exemples de la dérive libérale en éducation. De plus, la CSQ questionne entre autres l’économie générée par les fusions des commissions scolaires. Rien n’indique que cela favorisera davantage la réussite du plus grand nombre d’élèves ni qu’elle n’affectera pas les conditions d’exercice du personnel de l’éducation. La petite histoire démontre le contraire puisque l’expérience des fusions passées indique qu’une telle entreprise déstabilisera le système d’éducation au moins pour les deux prochaines années. « Nous avons besoin que les avantages de cette démarche soient démontrés avant de pouvoir s’y engager », indique la présidente de la Centrale.

Il en va de même pour le projet libéral de déconstruction du modèle québécois qui n’épargne pas l’enseignement supérieur. En novembre dernier, le ministère de l’Éducation annonçait des coupes supplémentaires aux cégeps et aux universités. Cette réduction budgétaire de 19 millions de dollars imposée aux cégeps s’ajoute aux 21 millions annoncés dans le budget Leitao de juin, totalisant ainsi des compressions de 90 millions depuis quatre ans. Quant aux universités, elles devront subir une baisse récurrente de subventions d’environ 1,5 %, soit 31,6 millions. Pour la CSQ, des impacts importants sont à prévoir tant dans les services aux étudiants que sur tout le personnel de l’enseignement supérieur.

Un choc est également anticipé avec le projet de loi n° 10 modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux encore à l’étude. S’il est adopté, le projet de loi du ministre Barrette n’améliorera en rien les services et les soins à la population et encore moins les conditions d’exercice des employés. Cette centralisation excessive aura pour effet direct d’éloigner les citoyens de leur établissement, plus particulièrement en région. Le regroupement sous un même chapeau administratif de plusieurs dizaines d’établissements aux mandats très différents laisse craindre l’impossibilité de maintenir un niveau adéquat de services préventifs et psychosociaux.

Le jeu des sacrifices

La leader syndicale renchérit en critiquant sévèrement le dépôt méprisant du ministre Coiteux aux employés de l’État dans le cadre de la négociation du secteur public. « Avec un gel salarial sur deux ans et un maigre 3 % d’augmentation proposée sur cinq ans, il demande maintenant à ses employés de s’appauvrir pour la cause. Cette proposition doublerait le retard de la rémunération des employés des services publics, frisant déjà les 8 %, avec les autres travailleurs québécois », ne décolère pas Louise Chabot.

En ce début d’année 2015, deux grandes batailles prendront l’affiche sur la scène des actions de la Centrale. Il y a bien sûr la négociation des conditions de travail de ses membres du secteur public et la lutte contre les mesures d’austérité. Dans les deux cas, la Centrale n’a nullement l’intention de laisser le gouvernement Couillard s’enfuir côté cour avec ses faux-semblants sur les finances publiques sans la moindre reddition de compte aux Québécoises et aux Québécois. « L’année risque d’être le théâtre de confrontations sociales importantes si le gouvernement ne se ressaisit pas rapidement pour rétablir un véritable dialogue avec sa population et ses employés. Il ne faudrait pas que le Québec devienne un triste vaudeville ! », conclut la présidente de la CSQ.

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