Édition du 16 avril 2024

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Asie/Proche-Orient

En Iran, la machine à tuer tourne à plein régime

Les exécutions connaissent une hausse inquiétante en Iran, où le régime entend semer la terreur et étouffer toute velléité de contestation, huit mois après la mort de Mahsa Amini.

Tiré de Médiapart.

L’année 2022 a été marquée par une hausse inquiétante des exécutions en Iran, le pays qui pratique le plus au monde la peine de mort après la Chine. 2023 pourrait être pire, s’alarment l’Organisation des Nations unies ainsi que plusieurs ONG devant l’application croissante de la peine capitale. Depuis le 1er janvier, au moins 209 personnes ont été exécutées en Iran, principalement pour des délits liés à la drogue, un chiffre qui serait en deçà de la réalité selon l’ONU.

Samedi 6 mai, c’est le dissident irano-suédois Habib Chaab, ancien chef du Mouvement de lutte arabe pour la libération d’Ahvaz (ASMLA ou Harakat al-Nidal), considéré comme une organisation terroriste par Téhéran, qui a été exécuté. Lundi 8 mai, deux autres hommes ont connu le même sort inhumain : Sadrollah Fazeli Zare et Youssef Mehrdad, reconnus coupables d’avoir « insulté le Prophète Mahomet, y compris d’avoir brûlé » un exemplaire du Coran.

Cette fureur meurtrière frappe aussi le soulèvement populaire déclenché en septembre 2022 par la mort d’une jeune Kurde iranienne, Mahsa Amini, tuée par la police des mœurs pour un voile « mal porté ». Il s’agit de terroriser et de mater toute velléité de contestation. « Les autorités iraniennes se servent de la peine de mort comme d’un outil de répression politique dans le but de mettre fin au soulèvement populaire et d’instiller la peur parmi la population qui ose encore descendre dans la rue pour demander, simplement, plus de libertés », dénonçait récemment l’ONG Amnesty International.

Mohsen Shekari, 23 ans, est le premier manifestant à avoir été exécuté le 8 décembre, juste avant le lever du soleil, trois semaines seulement après avoir été déclaré coupable et condamné à mort lors d’un procès inique où il était accusé d’« inimitié à l’égard de Dieu » ainsi que d’avoir « bloqué une rue à Téhéran, suscitant la peur et privant les personnes de liberté et de sécurité, et intentionnellement blessé un agent de sécurité avec une arme blanche (couteau) ».

Depuis ce jour noir, d’autres manifestants, pour la plupart âgés de moins de 30 ans, ont connu pareil châtiment : Majidreza Rahnavard, pendu à une grue, cinq jours plus tard, sur une place publique à Machhad ; Mohammad Mahdi Karami et Seyed Mohammad Hosseini, pendus le même jour, le 7 janvier. Sans compter tous ceux qui sont dans le couloir de la mort sous le coup d’une sentence capitale ou accusés de crimes passibles de la peine de mort. ONG et défenseurs des droits humains appellent à accentuer la pression internationale sur l’Iran afin de faire cesser les exécutions et d’annuler les condamnations à mort.

Parmi eux, le très populaire rappeur Toomaj Salehi, 33 ans, qui fédère plus d’un million d’abonné·es sur le réseau social Instagram. L’artiste iranien, connu pour son rap politique, engagé, dénonçant la crise sociale et la répression des libertés, est emprisonné depuis le 30 octobre et soumis à de nombreuses tortures. Accusé notamment d’être « un ennemi de Dieu » et de « corruption sur terre », passibles de la peine capitale, il a comparu fin novembre devant le tribunal révolutionnaire de la ville d’Ispahan lors d’un simulacre de procès durant lequel son avocat n’a pu être présent.

Peu avant son arrestation, le rappeur avait donné une interview très critique du régime à la chaîne canadienne CBC : « Vous avez affaire à une mafia prête à tuer la nation tout entière […] afin de conserver son pouvoir, son argent et ses armes. »

Dimanche 14 mai, à l’initiative de plusieurs collectifs de soutien à la révolte iranienne, un rassemblement est prévu à Paris, sur la place de la Bastille, de 15 à 18 heures, pour appeler à la libération de Toomaj Salehi et de tous les prisonniers politiques en Iran.

« Toomaj, c’est la jeunesse iranienne, le symbole de la liberté d’expression, martèle auprès de Mediapart l’artiste franco-iranienne Marjane Satrapi, qui se mobilise pour la libération du jeune rappeur. Il n’a jamais appelé à la violence, mais il a fait beaucoup pour la conscience iranienne, il a appelé à ne pas rester silencieux, indifférent devant l’oppression, c’est pour cela qu’il est torturé sauvagement. C’est à nous aujourd’hui de ne pas rester silencieux, indifférents, de braquer la lumière sur les victimes du régime iranien. Quand la lumière est trop forte, qu’il y a trop d’attention, ils ne peuvent pas exécuter. »

Rachida El Azzouzi

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