Tiré d’À l’encontre.
Depuis le début de la dernière guerre contre Gaza, des fonctionnaires du ministère de la Défense et de la CIA se trouvent en Israël pour aider les Israéliens dans les domaines du renseignement, de la logistique, du ciblage et de l’évaluation des dommages causés par les bombes. Pourtant, l’administration Biden affirme n’avoir aucune preuve tangible que les armes qu’elle a transférées à Israël ont été utilisées pour massacrer des civils, torturer des détenus ou restreindre l’acheminement de l’aide humanitaire aux civils palestiniens affamés, déshydratés et malades.
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Sous la pression de Bernie Sanders [sénateur indépendant du Vermont], Chris Van Hollen [sénateur démocrate du Maryland], Jeff Merkley [sénateur démocrate de l’Oregon]et d’autres démocrates du Congrès, le président a publié en février le mémorandum de sécurité nationale 20 (NSM-20, ou « mémorandum de sécurité nationale sur les garanties et la responsabilité concernant les articles de défense et les services de défense transférés »). Ce dernier demande au département d’Etat d’« obtenir certaines assurances écrites crédibles et fiables de la part des gouvernements étrangers recevant des équipements de défense [américains] et, le cas échéant, des services de défense » qu’ils respecteront le droit américain et le droit international. La NSM-20 exige également que les départements d’Etat et de la Défense fassent rapport au Congrès dans les 90 jours sur la mesure dans laquelle ces partenaires respectent leurs assurances. Il souligne « l’évaluation de tout rapport ou allégation crédible selon lequel des équipements de défense et, le cas échéant, des services de défense, ont été utilisés d’une manière non conforme au droit international, y compris le droit international humanitaire ». Le rapport NSM-20 demandait également à l’administration Biden d’évaluer si Israël avait pleinement coopéré avec les efforts internationaux et soutenus par le gouvernement des Etats-Unis pour fournir une assistance humanitaire dans la zone de conflit. Le délai de 90 jours a été dépassé de deux jours [le 17 mai], ce qui a probablement repoussé la publication du rapport à la fin de l’après-midi d’un vendredi, moment traditionnellement creux pour les nouvelles que l’on voudrait enterrer.
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Depuis le 7 octobre, l’administration Biden a approuvé plus de 100 transferts d’armes à Israël dans le cadre des ventes de matériel militaire à l’étranger. Deux de ces transferts ont fait l’objet d’une autorisation d’urgence afin de contourner l’examen du Congrès. La vague de transferts d’armes vers Israël a commencé au début du mois d’octobre et la quantité de matériel expédié était telle que le Pentagone a eu du mal à trouver suffisamment d’avions-cargos pour les acheminer. Alors que le Pentagone fournit régulièrement des informations détaillées sur les armes envoyées en Ukraine, il n’a publié que deux mises à jour sur le type et la quantité d’armes envoyées en Israël. Mais ces deux rapports, publiés en décembre 2023, suggèrent que les armes comprenaient des obus d’artillerie, des obus de chars, des systèmes de défense aérienne, des munitions guidées de précision, des armes légères, des missiles Hellfire utilisés par des drones, des obus de canon de 30 mm, des dispositifs de vision nocturne PVS-14 et des roquettes à épaulement jetables (mais probablement pas biodégradables). Fin octobre, une vente à Israël comprenait des kits JDAM (Joint Direct Attack Munition) d’une valeur de 320 millions de dollars, destinés à convertir des bombes « muettes » non guidées en munitions guidées par GPS. Cette vente s’ajoutait à une autre, d’une valeur de 403 millions de dollars, portant sur les mêmes systèmes de guidage. Entre le 7 octobre et le 29 décembre, les livraisons d’armes américaines à Israël comprenaient 52 229 obus d’artillerie M795 de 155 millimètres, 30 000 charges propulsives M4 pour obusiers, 4792 obus d’artillerie M107 de 155 millimètres et 13 981 obus de chars M830A1 de 120 millimètres.
Depuis des années, les Etats-Unis conservent en Israël un stock d’armes secrètes destinées à être utilisées dans le cadre d’opérations américaines au Moyen-Orient. Dans un geste extraordinaire, l’administration Biden a donné aux FDI (Forces de défense israéliennes) l’accès à ces munitions, y compris les bombes de 2000 livres qui ont été utilisées pour détruire les villes de Gaza. Les Etats-Unis auraient transféré au moins 5000 « bombes muettes » de 2000 livres à Israël depuis le 7 octobre.
Ces transferts et ventes d’armes s’inscrivent en grande partie dans le cadre d’un accord conclu en 2016 par l’administration Obama, qui engageait les Etats-Unis à fournir à Israël au moins 38 milliards de dollars d’armes sur dix ans. En mars, alors que le nombre officiel de morts à Gaza avait déjà dépassé les 30 000, le département d’Etat a autorisé le transfert de 25 avions de combat F-35A et de leurs moteurs, d’une valeur d’environ 2,5 milliards de dollars. Cet accord a été rapidement suivi, en avril, par l’approbation par Biden de la vente de 50 chasseurs F-15 à Israël, pour un prix de vente total de 18 milliards de dollars. Plus tard, en avril, Biden a signé un programme d’aide qui permettra à Israël de bénéficier d’une aide militaire supplémentaire de 15 milliards de dollars.
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Aucun de ces transferts n’a été assorti de conditions quant à l’utilisation des armes. En effet, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de Joe Biden, John Kirby, a déclaré à plusieurs reprises que la Maison-Blanche n’avait imposé « aucune ligne rouge » pour les offensives d’Israël à Gaza et au Sud-Liban. Selon une analyse du Washington Post, les FDI ont largué plus de 22 000 munitions sur Gaza au cours des 45 premiers jours de la guerre, munitions qui ont été fabriquées aux Etats-Unis.
L’administration Biden s’était enfermée dans un carcan, car les « lignes rouges » étaient déjà fixées. Et ce n’est pas seulement le droit international, pour lequel l’administration Biden fait régulièrement preuve de mépris lorsqu’il s’applique aux Etats-Unis et à leurs alliés, qui interdit les ventes d’armes aux pays qui violent le droit humanitaire, mais aussi plusieurs lois américaines, ainsi que les procédures internes de l’exécutif de Biden.
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La loi, les règlements et la politique de transfert d’armes conventionnelles des Etats-Unis exigent la suspension de l’assistance militaire lorsque nos transferts d’armes sont utilisés en violation du droit humanitaire international :
– La « loi Leahy » (22 U.S. Code § 2378d) exige l’interruption automatique de l’aide américaine à la sécurité des unités militaires étrangères impliquées de manière crédible dans des violations flagrantes des droits de l’homme.
– La section 502B de la loi sur l’assistance aux pays étrangers interdit aux Etats-Unis de fournir une assistance en matière de sécurité à tout gouvernement qui se livre à des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme [ce que tendent à confirmer les dernières conclusions de la CIJ et de la CPI].
– La section 620I de la loi sur l’aide à l’étranger « …interdit aux Etats-Unis de fournir une assistance en matière de sécurité ou de vendre des armes à tout pays lorsque le président est informé que le gouvernement interdit ou restreint, directement ou indirectement, le transport ou l’acheminement de l’aide humanitaire des États-Unis ».
– La politique de transfert d’armes conventionnelles de l’administration Biden, publiée en 2023, stipule que les Etats-Unis ne transféreront pas d’armes lorsqu’il est « plus probable qu’improbable » que ces armes seront utilisées pour commettre, faciliter la réalisation ou aggraver le risque de violations graves des droits de l’homme ou du droit humanitaire international, parmi d’autres violations spécifiées.
– En 2022, l’administration Biden a signé, avec plus de 80 autres pays, une déclaration commune sur les armes explosives dans les zones peuplées (EWIPA-Explosive Weapons in Populated Areas), dans laquelle les signataires « condamnent fermement toute attaque dirigée contre des civils, d’autres personnes protégées et des biens civils, y compris les convois d’évacuation de civils, ainsi que les bombardements aveugles et l’utilisation aveugle d’armes explosives », qui sont incompatibles avec le droit humanitaire international.
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Comment Biden pourrait-il se sortir de ce dilemme ?
Bien que le département d’Etat américain ait prudemment admis qu’il était « raisonnable d’estimer » qu’Israël utilisait des armes fournies par les Etats-Unis dans des cas qui, selon lui, pourraient être « incompatibles » avec les obligations du droit humanitaire international et avec le mémorandum américain sur la sécurité nationale de février 2024 qui exige des gouvernements étrangers qu’ils garantissent qu’ils ne violeront pas les droits de l’homme avec des armes achetées aux Etats-Unis, il a conclu qu’il ne disposait d’aucune preuve tangible que c’était le cas. Plus risible encore, le rapport du département d’Etat a déclaré qu’il acceptait comme « crédibles et fiables » les assurances d’Israël selon lesquelles il utiliserait les armes américaines conformément à la loi, étant donné l’absence d’informations complètes permettant de vérifier que les armes américaines ont bien été utilisées dans des cas spécifiques. L’administration n’a pas non plus constaté qu’Israël avait intentionnellement entravé l’aide humanitaire à Gaza, du moins pas pendant la semaine où le rapport a été publié, ce qui semble être à peu près tout ce qu’elle a pris en compte.
Alors que le NSM-20 demandait au département d’Etat d’enquêter sur « tout rapport ou allégation crédible » concernant une éventuelle utilisation abusive d’armes américaines par le gouvernement israélien, l’équipe d’Antony Blinken n’a examiné que dix incidents, et encore, de manière superficielle. Lorsqu’il s’est agi de déterminer si Israël avait mis en œuvre les « meilleures pratiques » pour limiter les dommages causés aux civils lors de ses opérations militaires dans des zones urbaines densément peuplées, le rapport de Blinken n’a pas identifié ni examiné de cas spécifiques, se contentant de citer la conclusion anodine de la Communauté du renseignement des Etats-Unis selon laquelle Israël « pourrait faire plus » pour éviter les pertes civiles.
Selon Akbar Shahid Ahmed, du Huffington Post (le 9 mai), deux des principaux collaborateurs de Joe Biden, Jack Loew (ambassadeur en Israël) et David Satterfield (envoyé humanitaire à Gaza), ont joué un rôle décisif dans l’édulcoration des critiques formulées par le rapport conter Israël, en particulier en ce qui concerne la restriction des flux d’aide à Gaza. Un fonctionnaire du département d’Etat a déclaré à Amar : « C’était la tâche de Satterfield de défendre Israël. »
Les preuves du massacre massif de civils par Israël, du bombardement de cibles non militaires et d’infrastructures civiles, de l’assassinat de travailleurs humanitaires et de personnel médical, ainsi que du retard, de l’obstruction et de la restriction de l’aide humanitaire sont accablantes et ont été méticuleusement documentées depuis octobre par l’ONU, ainsi que par des organisations humanitaires et de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, Oxfam et Human Rights Watch. Si le département d’Etat ne pouvait pas obtenir les évaluations de la CIA et du Pentagone, il aurait pu consulter et évaluer les rapports préparés par ces organisations. Mais, comme l’a noté Chris Van Hollen, « ces rapports indépendants soulignent une tendance inquiétante : l’administration cite l’important travail de ces organisations lorsque cela lui convient, mais l’ignore lorsque cela ne lui convient pas ».
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Pour mémoire, examinons le dossier depuis le 7 octobre en suivant simplement le cheminement des missiles.
Le 7 octobre, jour des attaques du Hamas, Israël a coupé l’électricité qu’il fournit à Gaza, la principale source d’énergie de la bande. L’électricité est restée coupée au moins jusqu’au mois de mars.
Le 7 octobre 2023, Nidal al-Waheidi et Haitham Abdelwahed, journalistes palestiniens de Gaza, ont été arrêtés par les FDI alors qu’ils couvraient l’attaque menée par le Hamas dans le sud d’Israël. Plus de sept mois plus tard, les autorités israéliennes refusent toujours de révéler le lieu où ils se trouvent, ainsi que les motifs légaux et les raisons de leur arrestation.
En octobre, Israël a utilisé des munitions d’attaque directe conjointes (JDAM-Joint Direct Attack Munitions) fabriquées aux Etats-Unis lors de deux frappes meurtrières sur des maisons palestiniennes dans la bande de Gaza occupée, tuant 43 civils – 19 enfants, 14 femmes et 10 hommes.
Le 9 octobre, une frappe aérienne des Forces de défense israéliennes sur le camp de réfugiés de Jabalia a détruit plusieurs bâtiments à plusieurs étages, tuant au moins 39 personnes. Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) a constaté qu’il n’y avait pas d’objectif militaire spécifique et qu’aucun avertissement n’avait été donné avant l’attaque.
Le 9 octobre 2023, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a annoncé un « siège complet » de Gaza : « Nous imposons un siège complet à [Gaza]. Pas d’électricité, pas de nourriture, pas d’eau, pas de carburant – tout est fermé. Nous combattons des animaux humains et nous agissons en conséquence. » La politique de blocus a été réaffirmée le 18 octobre 2023 par le Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui a déclaré que « nous n’autoriserons pas l’aide humanitaire sous forme de nourriture et de médicaments à partir de notre territoire vers la bande de Gaza ». Pendant les douze jours qui ont suivi, Israël a fermé tous les points d’accès à Gaza et a bombardé à plusieurs reprises le poste-frontière de Rafah avec l’Egypte. Le blocus complet impose une punition collective à tous les habitants de Gaza et viole la section 620I du Foreign Assistance Act.
Le 10 octobre, une frappe aérienne des FDI a démoli un bâtiment dans le quartier Sheikh Radwan de la ville de Gaza, tuant au moins 40 civils. Selon Amnesty International, un membre du Hamas vivait à l’un des étages de l’immeuble, mais il n’était pas présent au moment du bombardement. Le même jour, une frappe aérienne des FDI sur une maison à Deir al Balah a tué 21 membres de la famille al Najjar ainsi que trois voisins. L’enquête d’Amnesty International a permis d’établir qu’une bombe de 2000 livres équipée d’une munition d’attaque directe conjointe (JDAM) et d’un kit de guidage avait été utilisée lors de cette frappe meurtrière. Rien n’indique qu’il y ait eu des cibles militaires légitimes dans la zone.
Le 11 octobre, la seule centrale électrique de Gaza s’est retrouvée à court de réserves de carburant, après qu’Israël a bloqué l’entrée du carburant dans la bande.
Le 13 octobre, une attaque de chars israéliens dans le sud du Liban a tué le journaliste de Reuters Issam Abdallah, grièvement blessé la photographe de l’AFP Christina Assi, et blessé cinq autres reporters, dont un citoyen américain. Selon une enquête de Human Rights Watch, les tirs des Israéliens étaient « apparemment une attaque délibérée contre des civils, ce qui constitue un crime de guerre ».
Le 16 octobre, les forces israéliennes ont utilisé du phosphore blanc de fabrication américaine lors d’une attaque à Dhayra, dans le sud du Liban, d’une manière incompatible avec le droit humanitaire international, qui a blessé au moins neuf civils et endommagé des bâtiments civils. Le ministère libanais de l’Environnement a déclaré qu’au moins 6,82 kilomètres carrés de terres ont été brûlés lors des attaques des forces israéliennes, en grande partie à cause du phosphore blanc. Une enquête menée par le Washington Post a révélé que l’armée israélienne avait utilisé des munitions au phosphore blanc fournies par les Etats-Unis lors de ces attaques.
Le 19 octobre, une frappe aérienne israélienne a détruit un bâtiment dans l’enceinte de l’église orthodoxe grecque Saint Porphyre, au cœur de la vieille ville de Gaza, où s’abritaient environ 450 personnes déplacées de la petite communauté chrétienne de Gaza. La frappe a tué 18 civils et en a blessé au moins 12 autres.
Le 19 octobre, les FDI ont mené deux frappes aériennes sur la maison de la famille Saqallah à Sheikh Ajleen près de Tal-Hawa, à l’ouest de la bande de Gaza, où la famille élargie s’était réunie pour s’abriter de l’attaque. Tous les occupants de la maison ont été tués, dont 4 enfants et 4 médecins.
Le 20 octobre, 28 civils, dont 12 enfants, ont été tués par une frappe israélienne qui a détruit la maison de la famille al-Aydi et gravement endommagé deux maisons voisines dans le camp de réfugiés d’al-Nuseirat. Les maisons se trouvaient dans une zone du centre de la bande de Gaza où l’armée israélienne avait ordonné aux habitants du nord de la bande de Gaza de se déplacer.
Le 21 octobre, Israël n’a autorisé que 20 camions d’aide humanitaire, contenant des denrées alimentaires, de l’eau, du fourrage pour les animaux, des fournitures médicales et du carburant, à passer par le point de passage de Rafah pour entrer dans la bande de Gaza. En revanche, avant le 7 octobre, la population de Gaza dépendait en moyenne de 500 camions chargés de nourriture, d’eau, de médicaments et d’autres produits essentiels chaque jour. Des mois plus tard, lorsqu’Israël a finalement ouvert les points de passage de Rafah et de Kerem Shalom, les FDI ont imposé un système d’inspection arbitraire et restrictif qui a entraîné des embouteillages massifs et de longues files d’attente pouvant aller jusqu’à 2000 camions. Aujourd’hui encore, il faut en moyenne 20 jours aux camions humanitaires pour se rendre du point d’inspection israélien d’Al Arish à Gaza.
Le 22 octobre 2023, une frappe aérienne des FDI sur une maison à Deir al-Balah a tué 18 membres de la famille Mu’ei-leq – 12 enfants et 6 femmes – ainsi qu’un voisin. Amnesty International a établi que la maison avait été touchée par une bombe de 1000 livres équipée d’une munition d’attaque directe conjointe (JDAM) dotée d’un système de guidage.
Entre le 7 octobre et le 7 novembre, les forces israéliennes ont bombardé plusieurs hôpitaux et cliniques, notamment l’hôpital de l’amitié turco-palestinienne, l’hôpital indonésien et le centre international de soins ophtalmologiques. Les hôpitaux bénéficient d’un statut protégé en vertu du droit humanitaire international et ne perdent leur protection contre les attaques que s’ils sont utilisés pour commettre des « actes préjudiciables à l’ennemi », bien que les avertissements, la proportionnalité et la distinction soient toujours requis.
Le 25 octobre, des frappes aériennes israéliennes ont décimé le quartier d’Al Yarmouk, détruisant sept tours résidentielles. Dans la seule tour résidentielle Al Taj, le bombardement a tué 91 Palestiniens, dont 28 femmes et 39 enfants.
Le 31 octobre, une frappe aérienne des FDI a visé un immeuble d’habitation de six étages près du camp de réfugiés de Nuseirat, dans le centre de Gaza. Au moins 106 civils, dont 54 enfants, ont été tués dans ce bombardement. Les autorités israéliennes n’ont fourni aucune justification pour cette attaque. Human Rights Watch n’a trouvé aucune preuve de l’existence d’une cible militaire à proximité de l’immeuble au moment de l’attaque.
Le 5 novembre, les forces israéliennes ont frappé une famille dans une voiture dans le sud du Liban, tuant trois filles âgées de 10, 12 et 14 ans et leur grand-mère. Human Rights Watch n’a trouvé aucune preuve de l’existence d’une cible militaire à proximité de la voiture qui a été frappée et qui ne contenait que des civils en fuite. Selon Human Rights Watch, l’attaque de la voiture montre « un mépris inconsidéré de l’armée israélienne pour son obligation de faire la distinction entre les objets civils et militaires et un manquement significatif à l’obligation de prendre des mesures de protection adéquates pour éviter la mort de civils ».
Le 3 novembre, une frappe aérienne israélienne sur une ambulance balisée à l’extérieur de l’hôpital al-Shifa a tué 21 personnes, dont 5 enfants, et en a blessé 60. Les ambulances sont des biens civils protégés en vertu du droit international humanitaire et ne peuvent être prises pour cible lorsqu’elles sont utilisées pour soigner des blessés et des malades, qu’il s’agisse de civils ou de combattants. Un porte-parole des FDI a justifié l’attaque lors d’une interview télévisée en déclarant : « Nos forces ont vu des terroristes utiliser des ambulances pour se déplacer. Elles ont perçu une menace et, en conséquence, nous avons frappé cette ambulance. » Human Rights Watch n’a trouvé aucune preuve que l’ambulance attaquée était utilisée à des fins militaires, mais a au contraire vérifié une vidéo montrant une femme sur un brancard dans l’ambulance.
En décembre 2023, des frappes aériennes des FDI ont détruit plusieurs bâtiments dans le camp de réfugiés d’Al Maghazi, tuant au moins 68 personnes. Un responsable militaire israélien a admis à la chaîne publique israélienne Kanque « [l]e type de munition ne correspondait pas à la nature d’un tel objectif, causant d’importants dommages collatéraux qui auraient pu être évités ».
Du 1er janvier au 12 février, plus de la moitié des missions d’aide humanitaire prévues dans le nord de Gaza ont été entravées par les autorités israéliennes. Les restrictions comprenaient : l’absence de garantie d’un passage sûr ; l’absence d’ouverture de routes supplémentaires vers le nord de Gaza ; des retards excessifs ; et le refus pur et simple de l’accès par l’armée israélienne.
Le 9 janvier 2024, une frappe aérienne israélienne a touché un immeuble d’habitation de cinq étages appartenant à la famille Nofal dans le quartier de Tal Al-Sultan à Rafah. L’attaque a tué 18 civils, dont 10 enfants, quatre hommes et quatre femmes. Au moins huit autres personnes ont été blessées. Une analyse des fragments de la bombe effectuée par Amnesty International a permis de déterminer qu’il s’agissait d’une bombe de petit diamètre GBU-39 à guidage de précision, fabriquée aux Etats-Unis par Boeing.
Le 29 janvier 2024, les FDI ont attaqué une voiture transportant la famille de Hind Rajab, une fillette palestinienne de 6 ans, dans la zone identifiée plus tard comme Tel Al-Hawa, dans la ville de Gaza. La plupart des membres de sa famille ont été tués lors de l’attaque initiale, laissant Hind en vie parmi les corps de ses six parents. Deux médecins du Croissant-Rouge palestinien ont été dépêchés pour secourir Hind, qui a peut-être été tuée par les tirs israéliens avant leur arrivée. Ils ont également été attaqués et tués. Leur ambulance a été écrasée par des chars israéliens. Le Washington Post a identifié sur les lieux un fragment d’obus de 120 mm de fabrication américaine.
Le 2 février, un navire israélien a tiré sur un convoi de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) qui attendait d’entrer dans le nord de Gaza par la route Al Rashid.
Le 13 février, il a été révélé que le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, bloquait la livraison d’une cargaison de farine financée par les Etats-Unis au port d’Ashdod depuis au moins le 19 janvier 2024, alors que Netanyahou avait assuré à Biden que la cargaison serait autorisée à entrer à Gaza.
Le 16 février, la production d’eau à Gaza n’était plus que de 5,7% de ce qu’elle était avant le début de la guerre, ce qui a entraîné des cas de déshydratation grave, ainsi que l’apparition de maladies, notamment l’hépatite A et la diarrhée. Depuis novembre, les habitants du nord de Gaza n’ont pas accès à l’eau potable, tandis que depuis mars, les habitants du sud de Gaza ne disposent en moyenne que de deux litres d’eau par jour.
Le 24 mars 2024, alors que le nord de Gaza est au bord de la famine, les autorités israéliennes déclarent aux Nations unies qu’elles n’autoriseront plus le passage de convois alimentaires de l’UNRWA dans le nord de Gaza. Le même jour, les forces israéliennes ont tiré sur des personnes qui attendaient la distribution de nourriture sur un site situé au rond-point de Koweït.
Le 1er avril, une frappe aérienne israélienne a tué sept travailleurs humanitaires de la World Central Kitchen suite à trois frappes distinctes sur des véhicules portant le logo de la WCK dans une rue « désignée pour le passage de l’aide humanitaire ». Les trois voitures ont été frappées l’une après l’autre et ont été retrouvées détruites à près d’un kilomètre et demi de distance. Les frappes ont été autorisées par un colonel et supervisées par un major.
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Voici un extrait du rapport (publié le 18 avril) de l’Independent Task Force on NSM-20, rédigé par Noura Erakat et Josh Paul, ancien fonctionnaire du département d’Etat : « Bien qu’Israël ait attribué les 34 000 victimes palestiniennes, dont 70% sont des femmes et des enfants, à la prétendue utilisation de civils comme boucliers humains par le Hamas, nous avons constaté que dans 11 des 16 incidents que nous avons analysés, Israël n’a même pas défini publiquement une cible militaire ou tenté de justifier l’attaque. Sur les cinq incidents restants, Israël a publiquement désigné des cibles, avec vérification dans deux cas, mais aucun avertissement de précaution n’a été donné et nous estimons que les dommages civils anticipés étaient connus et excessifs. »
Depuis qu’Antony Blinken a publié son rapport réaffirmant sa confiance en Israël pour utiliser son arsenal américain de manière responsable, Israël a fermé le point de passage de Rafah, forcé plus de 500 000 personnes à quitter la ville [1], recommencé à bombarder le camp de réfugiés de Jabalia déjà dévasté, frappé un camion d’aide de l’ONU par un drone, laissé 20 médecins américains bloqués à l’hôpital sans eau. Et les forces de sécurité israéliennes se sont retirées alors que des centaines de colons et de paramilitaires israéliens détruisaient les fournitures d’un convoi humanitaire et incendiaient deux des camions.
En réponse à ces nouvelles atrocités, Joe Biden a approuvé un nouveau transfert de 1,2 milliard de dollars d’armes (700 millions de dollars de munitions pour chars, 500 millions de dollars de véhicules tactiques et 60 millions de dollars d’obus de mortier) vers Israël, ce qui constituera certainement une récompense bienvenue lorsque les FDI franchiront une nouvelle ligne rouge de facto fictive dans leur assaut terrestre sur Rafah.
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Article publié dans Counterpunch le 17 mai 2024 ; traduction rédaction A l’Encontre.
Jeffrey St. Clair est rédacteur en chef de CounterPunch. Son livre le plus récent est An Orgy of Thieves : Neoliberalism and Its Discontents (Counterpunch, novembre 2022, avec Alexander Cockburn).
Notes
[1] Déclaration de Martin Griffiths, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d’urgence, sur Rafah, le 24 mai
« La souffrance et la misère que l’opération militaire israélienne à Rafah a infligées à la population de Gaza n’ont rien de limité.
Comme on le craignait, il s’agit d’une tragédie sans nom.
L’incursion terrestre à Rafah a déplacé plus de 800 000 personnes, qui ont fui une fois de plus en craignant pour leur vie et sont arrivées dans des zones dépourvues d’abris adéquats, de latrines et d’eau potable.
Elle a interrompu l’acheminement de l’aide dans le sud de la bande de Gaza et paralysé une opération humanitaire déjà à bout de souffle.
Elle a interrompu les distributions de nourriture dans le sud et ralenti l’approvisionnement en carburant des éléments vitaux de Gaza – boulangeries, hôpitaux et puits d’eau – jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un mince filet d’eau.
Bien qu’Israël ait rejeté les appels de la communauté internationale à épargner Rafah, la clameur mondiale en faveur d’un arrêt immédiat de cette offensive est devenue trop forte pour être ignorée.
Avec l’adoption aujourd’hui de la résolution 2730 du Conseil de sécurité appelant à la protection des travailleurs humanitaires et l’ordre de la Cour internationale de justice d’ouvrir le point de passage de Rafah pour fournir une aide à grande échelle et mettre fin à l’offensive militaire, nous vivons un moment de clarification.
C’est le moment d’exiger le respect des règles de la guerre auxquelles tous sont tenus. Les civils doivent pouvoir se mettre à l’abri. L’aide humanitaire doit être acheminée sans obstruction. Les travailleurs humanitaires et le personnel des Nations unies doivent pouvoir accomplir leur travail en toute sécurité.
Alors que la population de Gaza est confrontée à la famine, que les hôpitaux sont attaqués et envahis, que les organisations humanitaires sont empêchées d’atteindre les personnes dans le besoin, que les civils sont bombardés du nord au sud, il est plus important que jamais de tenir compte des appels lancés au cours des sept derniers mois :
Libérer les otages. Accepter un cessez-le-feu. Mettez fin à ce cauchemar. » (Traduction rédaction A l’Encontre)
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