Édition du 16 avril 2024

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États-Unis

L’Ukraine bouleverse la politique étatsunienne

L’agression russe contre l’Ukraine a complètement bouleversé la politique étatsunienne. En fin de compte, elle pourrait déterminer l’avenir du président Biden et de Donald Trump, son prédécesseur, qui pourraient tous deux être candidats à la présidence en 2024.

Hebdo L’Anticapitaliste - 606 (10/03/2022

Par Dan La Botz

Les deux partis, républicains et démocrates, estiment que la guerre va compliquer la situation lors des élections de mi-mandat en novembre 2022. Biden peut s’attribuer le mérite d’avoir rassemblé les démocrates et les républicains, d’avoir uni le pays en soutien à l’Ukraine et en opposition à Vladimir Poutine. Il a également revendiqué le succès de la réunification de l’Otan autour d’une stratégie de sanctions. Sur ces plans, l’agression russe a servi les intérêts de l’impérialisme US. Néanmoins, les différents plans des deux partis sur ce qu’il faut faire désormais tourbillonnent au Congrès et dans l’élite politique. Les Républicains s’efforcent de discipliner leur parti et de mettre au pas ses éléments pro-Poutine, tandis que les Démocrates gèrent leurs divergences sur les sanctions.

Opportunisme des Républicains

Au sein du Parti républicain, l’ancien vice-président Mike Pence, également candidat à la présidence, a annoncé qu’il n’y avait « pas de place dans ce parti pour les apologistes de Poutine », visant ainsi son ancien patron, Donald Trump. Ce dernier a d’abord exprimé son admiration pour le génie de Poutine, puis sa sympathie pour le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Trump est toujours à la tête du parti, mais certains Républicains estiment que sa position, au mieux ambivalente, sur Poutine pourrait nuire à leurs chances lors des élections de mi-mandat.

Le sénateur républicain de Caroline du Sud, Lindsey Graham, n’est pas du tout ambivalent. Il a appelé à ce que quelqu’un en Russie tue Vladimir Poutine ou organise un coup d’État pour le renverser, une position répudiée par Biden et par les Républicains. Marjorie Taylor Greene, membre du Congrès de droite, a assisté à un meeting politique nationaliste blanc où les participants ont acclamé Poutine. Pourtant, la plupart des Républicains se rangent désormais derrière l’Ukraine.

Les Républicains espèrent faire de la gestion de la guerre par Biden et de l’impact des sanctions des thèmes de campagne majeurs lors des élections de novembre. Ils affirment que le fait que Biden n’ait pas imposé de sanctions énergétiques plus fortes à la Russie signifie que les achats de pétrole des États-Unis contribuent à financer la guerre de Poutine tout en augmentant le prix de l’essence. Dans une déclaration des gouverneurs républicains, on peut lire : «  Les habitants de nos États ne peuvent pas se permettre une nouvelle flambée des prix de l’essence, et nos alliés ne peuvent pas se permettre d’être pris en otage par la tyrannie et l’agression de Poutine. » D’autres Républicains demandent à M. Biden de revenir sur ses positions environnementales qui ont limité les concessions pétrolières et gazières ainsi que les pipelines et de rendre les États-Unis ­indépendants sur le plan énergétique.

Les Démocrates divisés

Les Démocrates sont divisés sur les sanctions. Jusqu’à présent, M. Biden est opposé à l’interdiction des importations de pétrole et de gaz russes, mais la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, déclare : « Je suis tout à fait pour, interdisez-les. » Le sénateur démocrate Joe Manchin, de Virginie-Occidentale, qui représente l’industrie du charbon, et la sénatrice Lisa Murkowski, de l’Alaska, un État riche en pétrole, proposent un nouveau projet de loi prévoyant des sanctions plus sévères contre le pétrole russe.

Biden veut éviter des initiatives qui pourraient provoquer une confrontation européenne à grande échelle pouvant mener à une guerre nucléaire. Mais Tom Malinowski, membre démocrate du Congrès du New Jersey, suggère que les États-Unis prévoient un pont aérien pour sauver Kiev, à l’instar du pont aérien de Berlin de 1948-1949. Cependant, une telle opération pourrait conduire à un conflit militaire avec la Russie.

Jusqu’à présent, la guerre en Ukraine a aidé Biden. Son discours sur l’état de l’Union, le 1er mars, lui a valu des ovations des deux côtés pour son soutien à l’Ukraine. Il a également appelé à des financements supplémentaires pour la police, ce pour quoi il a reçu une autre ovation... Il s’est aussi félicité de la forte progression de l’emploi, avec 678 000 emplois créés en février. Selon un récent sondage, sa cote de popularité globale a augmenté de huit points pour atteindre 47 %. Cela améliore les chances des Démocrates en novembre, mais il est encore probable qu’ils perdront le contrôle du Congrès.

Des manifestations populaires contre la guerre russe et en faveur de l’Ukraine ont eu lieu, principalement par des Ukrainiens-Américains. Certains ont appelé à un rôle accru des États-Unis et de l’Otan dans le conflit. La gauche US a été lente à réagir, bien qu’elle commence maintenant à organiser des manifestations contre l’agression russe, moins importantes que celles qui ont lieu en Europe.

Traduction Henri Wilno

Dan La Botz

L’auteur est un professeur d’université américain et un militant de l’organisation socialiste Solidarity.

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