Édition du 16 avril 2024

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Débats : quel soutien à la lutte du peuple ukrainien ?

Le rejet américain de l’offre de Moscou de pourparlers de paix est totalement inexcusable

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré mardi que Moscou était ouvert à des pourparlers avec les États-Unis ou avec la Turquie pour mettre fin à la guerre en Ukraine, affirmant que les responsables américain.e.s mentent lorsqu’ils et elles disent que la Russie refusent des pourparlers de paix.

13 octobre 2022 | caitlinjohnstone.com /2022/10/12/us-rejection-of-moscows-offer-for-peace-talks-is-utterly-inexcusable/

L’agence Reuters rapporte :

« Lavrov a déclaré que des responsables, dont le porte-parole de la sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby, avaient déclaré que les États-Unis étaient ouverts aux pourparlers, mais que la Russie avait refusé.

« C’est un mensonge », a déclaré Lavrov. « Nous n’avons reçu aucune offre sérieuse pour entrer en contact. »

L’affirmation de Lavrov a eu sa confirmation lorsque le porte-parole du Département d’État américain, Ned Price, a rejeté l’offre de pourparlers de paix peu de temps après qu’elle ait été faite, citant les récentes frappes de missiles russes sur Kyiv.

« Nous voyons cela [l’offre de négocier] comme une posture », a déclaré Price lors d’un point de presse mardi. « Nous ne considérons pas cela comme une offre constructive et légitime d’engager le dialogue et la diplomatie qui sont absolument nécessaires pour mettre fin à cette guerre d’agression brutale contre le peuple et l’État ukrainiens. »

C’est inexcusable. Quand notre monde est à son moment le plus périlleux depuis la crise des missiles de Cuba, selon de nombreux et nombreuses expert.e.s, ainsi que selon le président des États-Unis lui-même, le gouvernement américain ne peut refuser de s’asseoir avec les responsables russes et de travailler vers un désescalade et la paix. Ils n’ont pas le droit de rejeter la diplomatie. Il faut le faire au nom de chaque organisme sur cette planète dont la vie est en jeu dans ces jeux de la corde raide nucléaire. Le fait que cette guerre se soit intensifiée avec des frappes de missiles sur la capitale ukrainienne rend les pourparlers de paix encore plus nécessaires, pas moins.

Ce refus de négocier s’est rendu d’autant plus scandaleux par de nouvelles informations du quotidien Washington Post selon lesquelles le gouvernement américain ne croit pas que l’Ukraine puisse gagner la guerre mais refuse en même temps de l’encourager à négocier avec Moscou. « En privé, les responsables américains disent que ni la Russie ni l’Ukraine ne sont capables de gagner la guerre. Mais ils ont exclu l’idée de pousser, même doucement, l’Ukraine à la table des négociations », rapporte le journal.

« Les responsables disent qu’ils et elles ne savent pas à quoi ressemblerait la fin de la guerre, ni comment elle pourrait se terminer, ni quand, tout en insistant sur le fait que cela dépend de Kyiv. »

Ces deux points pris ensemble donnent encore plus de crédibilité à un argument que j’avance depuis le tout début de cette guerre : les États-Unis ne veulent pas la paix en Ukraine. Ils cherchent plutôt à créer un bourbier militaire coûteux pour Moscou, tout comme les responsables américains l’ont avoué avoir tenté de faire en Afghanistan et en Syrie.

Cela expliquerait pourquoi le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, a déclaré que l’objectif des États-Unis en Ukraine était en réalité « d’affaiblir » la Russie, et aussi pourquoi les E-U ont apparemment activement torpillé un accord de paix entre l’Ukraine et la Russie au début du conflit en avril.

Cette guerre par procuration n’a pas de stratégie de sortie. Cela est entièrement par conception. Et cela est profondément immoral.

Beaucoup de personnes ont appelé les États-Unis à abandonner leur politique de soutien actif à cette guerre en évitant les pourparlers de paix.

« Le langage du président Biden est à peu près au sommet de l’échelle linguistique, si vous voulez… » a déclaré dimanche dernier à ABC’s This Week l’ancien chef d’état-major interarmées Mike Mullen concernant la récente remarque du président Biden selon laquelle ce conflit pourrait nous conduire à « Armageddon ».

« Je pense que nous devons reculer un peu et faire tout ce que nous pouvons pour nous asseoir à la table de négociations afin de résoudre ce conflit », a déclaré Mullen, en ajoutant :

« C’est chose typique dans n’importe quelle guerre - elle doit à un moment donné prendre fin, et il y a généralement des négociations associées à cela. Et en ce qui me concerne, le plus tôt sera le mieux. »

« Une chose que les États-Unis peuvent faire est… abandonner sa position – et c’est la position officielle - selon laquelle la guerre doit continuer à affaiblir gravement la Russie. Cela signifie le refus de négociations », a déclaré Noam Chomsky lors d’une récente apparition sur Democracy Now.

« Est-ce que cela ouvrirait-il la voie aux négociations, à la diplomatie ? On ne peut pas être sûr. Mais il n’y a qu’une seule façon de le savoir – l’essayer. Si vous n’essayez pas, c’est certain que cela n’arrivera pas. »

« Il est temps que les États-Unis complètent le soutien militaire à l’Ukraine par une voie diplomatique pour gérer cette crise avant qu’elle ne devienne incontrôlable », a déclaré George Beebe de l’Institut Quincy à la suite des frappes de missiles lundi sur Kyiv, la qualifiant de « crise majeure » et d’une escalade de la guerre qui « rapprochera le monde d’une collision militaire directe entre la Russie et les États-Unis ».

« Les Américain.e.s doivent trouver un accord avec les Russes. Et alors la guerre se terminera », a déclaré le Premier ministre hongrois Viktor Orban mardi, ajoutant que « quiconque pense que cette guerre sera terminée par des négociations russo-ukrainiennes ne vit pas dans ce monde ».

C’est absolument insensé que les deux superpuissances nucléaires du monde accélèrent vers une confrontation militaire directe et qu’elles ne se parlent même pas. Et c’est encore plus fou que quiconque dit qu’elles devraient se parler soit appelé un.e. agent.e du Kremlin et un apaiseur.e à la Chamberlain.

Harry Kazianis de l’institut Responsible Statecraft discute de cette dynamique folle dans un article récent intitulé « Parler n’est pas un apaisement. C’est éviter un armageddon nucléaire ».

« J’ai participé à plus de trente simulations de combat dans des jeux de guerre sous ma propre direction dans le cadre d’un contrat de défense privée au cours des derniers mois, en examinant divers aspects de la guerre russo-ukrainienne. Et une chose est claire : les chances d’une guerre nucléaire augmentent considérablement avec chaque jour qui passe.

« Dans chaque scénario que j’ai testé, l’administration Biden donne à l’Ukraine des armes toujours plus avancées comme l’ATACMS, les F-16 et d’autres plates-formes qui, selon les avertissement de la Russie, constitueraient une menace militaire directe. Bien que chaque scénario ait postulé un point différent auquel Moscou décide d’utiliser une arme nucléaire tactique afin de contrer les plates-formes conventionnelles qu’elle ne peut pas facilement vaincre, les chances que la Russie utilise des armes nucléaires augmentent à mesure que de nouvelles capacités militaires plus puissantes sont introduites sur le champ de bataille par l’Occident.

« En fait, dans 28 des trente scénarios que j’ai exécutés depuis le début de la guerre, une échange nucléaire se produit.

« La bonne nouvelle est qu’il existe un moyen de sortir de cette crise, aussi imparfaite soit-elle. Dans les deux scénarios où la guerre nucléaire a été évitée, des négociations directes ont conduit à un cessez-le-feu. »

Je répète encore une fois qu’il est absolument insensé que des négociations directes ne sont pas déjà en cours. Il faut exiger à toutes les autorités supérieures que cela change très bientôt. Exigeons aussi aux dirigeant.e.s de nos propres États à travers le monde d’exercer tout type de pression possible sur Washington pour que ces pourparlers commencent.

Cette politique de la corde raide nous menace tous et toutes, et les dirigeant.e.s de l’empire américain n’ont pas le droit de jouer avec nos vies.

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